Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 14 avril 2016, 14-29.679, Publié au bulletin

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :


Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Lyon, 24 octobre 2014), que Mme X... a été engagée le 28 septembre 2005 par la société Sigvaris en qualité de responsable développement, son contrat de travail comportant une clause de non-concurrence prévoyant une indemnité égale à la moitié de son traitement mensuel en cas de licenciement, au tiers de ce traitement en cas de rupture par la salariée ; que celle-ci a démissionné le 27 mars 2012 et a saisi la juridiction prud'homale ;

Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de le condamner à payer un solde d'indemnité de clause de non-concurrence et les congés payés afférents, alors, selon le moyen :

1°/ que la convention collective applicable au contrat de travail a pour effet de régir la relation de travail conclue entre l'employeur et le salarié ; que le juge ne peut faire prévaloir une application contraire aux dispositions de la convention collective librement négociée entre les partenaires sociaux ; que le contrat de travail conclu entre la société Sigvaris, anciennement société Ganzoni France, et Mme X... relevait de la convention collective nationale de l'industrie textile ; que l'article 32 de la convention collective applicable à la relation de travail prévoit, au cas de clause de non-concurrence, le versement d'une indemnité mensuelle égale au minimum : «- en cas de licenciement, à la moitié du traitement mensuel de l'intéressé calculé sur la moyenne de la rémunération effective des 12 mois qui ont précédé la rupture du contrat (…) ;- en cas de rupture du contrat par le cadre, à 1/ 3 de ce traitement » ; que le contrat de travail reprenant ces dispositions devait être déclaré régulier et le paiement corrélatif effectué par la société Sigvaris, à la suite de la démission de Mme X..., devait être regardé comme ayant rempli la salariée dans ses droits au regard de l'engagement de non-concurrence souscrit au contrat de travail ; qu'en statuant en sens contraire au motif que la clause de non-concurrence ne peut dissocier les conditions d'ouverture de l'obligation de non-concurrence de celle de son indemnisation et que la société Sigvaris ne peut opposer l'article 8 du contrat de travail « peu important à cet égard que la clause contractuelle litigieuse reproduise les dispositions de l'article 32 de la convention collective nationale de l'industrie textile applicable au sein de l'entreprise », la cour d'appel a méconnu l'article 32 de la convention collective applicable à la relation de travail, ensemble l'article 1134 du code civil ;

2°/ que ne porte pas atteinte au principe de libre exercice d'une activité professionnelle l'application régulière des dispositions d'une convention collective prévoyant, au résultat de la négociation entre les partenaires sociaux, du versement d'une indemnité de non-concurrence calculée différemment selon qu'il est mis fin au contrat de travail, par un cas de licenciement prononcé par l'employeur, ou un cas de démission à l'initiative du salarié ; qu'en statuant en sens contraire en considérant que l'employeur ne pouvait se prévaloir de l'application régulière des dispositions de la convention collective nationale de l'industrie textile applicable au contrat de travail conclu avec Mme X..., la cour d'appel a méconnu le principe susvisé, l'article L. 1121-1 du code du travail, l'article 32 de la convention collective applicable à la relation de travail, ensemble l'article 1134 du code civil ;

Mais attendu qu'ayant constaté que l'article 32 de la convention collective nationale de l'industrie textile du 1er février 1951 applicable dans l'entreprise, auquel se conformait le contrat de travail, prévoyait une minoration de la contrepartie financière de l'obligation de non-concurrence en cas de rupture de ce contrat par le salarié, la cour d'appel a exactement décidé que cette disposition, contraire au principe de libre exercice d'une activité professionnelle et à l'article L. 1121-1 du code du travail, devait être réputée non écrite ; que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Sigvaris aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Sigvaris à payer à Mme X... la somme de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du quatorze avril deux mille seize.


MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par Me Rémy-Corlay, avocat aux Conseils, pour la société Sigvaris

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR condamné la Société Sigvaris à payer à Madame X... la somme de 20. 909, 52 € à titre de solde d'indemnité de non-concurrence due pour la période de juin 2012 à mai 2014, inclus, outre celle de 2. 090, 88 € bruts au titre des congés payés afférents et dit que ces sommes produiront intérêts au taux légal à compter du 28 novembre 2012 ;

AUX MOTIFS QUE « le salarié lié par une clause de non concurrence devant bénéficier d'une contrepartie financière, les parties ne peuvent dissocier les conditions d'ouverture de l'obligation de non concurrence de celles de son indemnisation ; que cette règle, basée sur le principe de la liberté du travail et sur les dispositions de l'article L. 1121-1 du code du travail doit être appliquée sans distinction à toutes les indemnités de non-concurrence, que leur modalité de calcul soit contractuelle ou d'origine conventionnelle ; que Mme Florence X... soutient en conséquence à bon droit que la SAS SIGVARIS n'est pas fondée à lui opposer l'article 8 de son contrat de travail pour minorer au tiers son indemnité de non-concurrence, peu important à cet égard que la clause contractuelle litigieuse reproduise les dispositions de l'article 32 de la Convention collective nationale de l'industrie textile applicable au sein de l'entreprise ; que la décision déférée doit en conséquence être réformée ; que les dispositions précitées devant être réputées non écrites, sans pour autant affecter la validité de la clause de non-concurrence, qui a d'ailleurs été respectée par Mme Florence X..., cette dernière est fondée à réclamer paiement à l'intimée du solde correspondant à la différence entre l'indemnité qui lui a été versée sur la base du tiers de son salaire mensuel de juin 2012 à mai 2014 et celle à laquelle elle peut prétendre, sur la base d'un demi traitement, qu'elle a justement chiffré à la somme de 20. 909, 52 € bruts augmentée des congés payés afférents soit un total de 23. 000, 40 € ; que s'agissant d'une créance de nature salariale, elle est productrice d'intérêts au taux légal à compter de la notification de la demande de rappel d'indemnité à l'employeur, soit le 28 novembre 2012 »

ALORS QUE 1°) la convention collective applicable au contrat de travail a pour effet de régir la relation de travail conclue entre l'employeur et le salarié ; que le juge ne peut faire prévaloir une application contraire aux dispositions de la convention collective librement négociée entre les partenaires sociaux ; que le contrat de travail conclu entre la Société Sigvaris, anciennement Société Ganzoni France, et Madame X... relevait de la convention collective nationale de l'industrie textile ; que l'article 32 de la convention collective applicable à la relation de travail prévoit, au cas de clause de non-concurrence, le versement d'une indemnité mensuelle égale au minimum : «- en cas de licenciement, à la moitié du traitement mensuel de l'intéressé calculé sur la moyenne de la rémunération effective des 12 mois qui ont précédé la rupture du contrat (…) ;- en cas de rupture du contrat par le cadre, à 1/ 3 de ce traitement » ; que le contrat de travail reprenant ces dispositions devait être déclaré régulier et le paiement corrélatif effectué par la Société Sigvaris, à la suite de la démission de Madame X..., devait être regardé comme ayant rempli la salariée dans ses droits au regard de l'engagement de non-concurrence souscrit au contrat de travail ; qu'en statuant en sens contraire au motif que la clause de non-concurrence ne peut dissocier les conditions d'ouverture de l'obligation de non-concurrence de celle de son indemnisation et que la Société Sigvaris ne peut opposer l'article 8 du contrat de travail « peu important à cet égard que la clause contractuelle litigieuse reproduise les dispositions de l'article 32 de la Convention collective nationale de l'industrie textile applicable au sein de l'entreprise », la Cour d'appel a méconnu l'article 32 de la convention collective applicable à la relation de travail, ensemble l'article 1134 du Code civil ;

ALORS QUE 2°) ne porte pas atteinte au principe de libre exercice d'une activité professionnelle, l'application régulière des dispositions d'une convention collective prévoyant, au résultat de la négociation entre les partenaires sociaux, du versement d'une indemnité de non-concurrence calculée différemment selon qu'il est mis fin au contrat de travail, par un cas de licenciement prononcé par l'employeur, ou un cas de démission à l'initiative du salarié ; qu'en statuant en sens contraire en considérant que l'employeur ne pouvait se prévaloir de l'application régulière des dispositions de la convention collective nationale de l'industrie textile applicable au contrat de travail conclu avec Madame X..., la Cour d'appel a méconnu le principe susvisé, l'article L. 1121-1 du Code du travail, l'article 32 de la convention collective applicable à la relation de travail, ensemble l'article 1134 du Code civil.

ECLI:FR:CCASS:2016:SO00834
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