Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 7 avril 2016, 14-21.769, Inédit
Cour de cassation - Chambre sociale
- N° de pourvoi : 14-21.769
- ECLI:FR:CCASS:2016:SO00726
- Non publié au bulletin
- Solution : Cassation partielle sans renvoi
- Président
- M. Lacabarats (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Texte intégral
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu selon l'arrêt attaqué que M. X..., engagé à compter du 11 avril 2006 par la société Ciffréo Bona en qualité de chauffeur de véhicule léger, devenu le 1er septembre 2007 chauffeur poids lourd selon avenant, a été, après mise à pied conservatoire, licencié pour faute grave par lettre du 8 juin 2012 ;
Sur le premier moyen :
Attendu que la société fait grief à l'arrêt de dire le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse et de la condamner en conséquence à payer des dommages-intérêts à ce titre, les indemnités de rupture et un rappel de salaire sur mise à pied, alors selon le moyen, que l'employeur peut convoquer le salarié à un entretien informel, à la fin de sa journée de travail, pour parler avec lui de ses difficultés à exécuter son contrat de travail ; que le fait, pour un chauffeur de poids lourds, de refuser, de manière réitérée et sans raison valable, de déférer aux convocations de ses supérieurs hiérarchiques souhaitant discuter des difficultés liées à l'exécution de son travail à la fin de ses tournées, caractérise un comportement rendant impossible son maintien pendant la durée du préavis ; qu'en l'espèce, pour déclarer sans cause réelle et sérieuse le licenciement pour faute grave, la cour d'appel a retenu que l'employeur devait fixer un rendez-vous avec le salarié durant ses heures de travail ; qu'en se fondant sur ce motif, la cour d'appel a violé les articles L. 1234-1, L. 1234-5 et L. 1234-9 du code du travail ;
Mais attendu qu'ayant retenu que le salarié avait été convoqué par sa hiérarchie à deux reprises pour discuter de l'exécution de sa prestation de travail en dehors de ses heures de travail et sans rémunération, la cour d'appel a pu considérer que le refus du salarié d'y déférer dans ces conditions n'était pas fautif et le grief d'insubordination non établi ; que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le second moyen :
Vu l'article 1134 du code civil ;
Attendu que pour condamner la société à payer un rappel de prime d'entretien du matériel, l'arrêt retient que, dans une lettre du 13 avril 2012, l'employeur signifiait au salarié que cette prime lui avait été versée en janvier, février et mars 2012 (160 euros pour rattrapage), qu'il résulte à l'examen des bulletins de salaire édités et spécialement du bulletin de février 2012 que cette prime n'a pas été versée, l'employeur ne justifiant pas de son paiement pour le mois de février 2012, la cour entrera en voie de condamnation à hauteur de 80 euros ;
Qu'en statuant ainsi, alors que la lettre de la société indiquait qu'en janvier 2012, le salarié n'avait pas perçu la prime d'entretien du véhicule car le camion n'était toujours pas entretenu, qu'en février 2012, il avait perçu cette prime mais n'avait pas eu celle de non-accident, du même montant, un chargement non sanglé étant tombé sur la voie rapide de Nice et qu'en mars 2012, il avait touché les deux primes, et que le bulletin de salaire de février 2012 mentionnait la prime d'entretien du matériel d'un montant de 80 euros, la cour d'appel a dénaturé la lettre de la société du 13 avril 2012 et le bulletin de salaire de février 2012 ;
Vu l'article 627 du code de procédure civile, après avis donné aux parties comme indiqué au rapport ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne la société à payer 80 euros de prime au salarié, l'arrêt rendu le 17 juin 2014, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix en Provence ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi et statuant de ce chef ;
Déboute le salarié de sa demande en paiement d'une prime d'entretien du véhicule de 80 euros pour février 2012 ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Ciffréo Bona ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du sept avril deux mille seize.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt
Moyens produits par la SCP Boulloche, avocat aux Conseils, pour la société Ciffréo Bona.
Le premier moyen de cassation fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir jugé que le licenciement de M. X... prononcé pour faute grave était dépourvu de cause réelle et sérieuse et d'avoir, en conséquence, condamné la société Ciffréo Bona à payer à M. X... les sommes de 14. 000 euros en réparation de son licenciement « illégitime », de 4519, 41 euros au titre du préavis, outre 451, 94 euros au titre des congés payés afférents, de 1. 506, 47 euros d'indemnité de licenciement et de 753, 23 euros à titre de rappel de salaire ;
AUX MOTIFS QUE M. X... a été au service de la société Ciffréo Bona, ayant une activité de vente de matériels et matériaux pour la construction, en qualité de chauffeur de véhicule léger à compter du 11 avril 2006, puis, par avenant prenant effet le 1er septembre 2007, en qualité de chauffeur poids lourd ; qu'il a été licencié par une lettre du 8 juin 2012, pour une faute grave, à savoir : pour avoir, le 16 mai 2012, refusé de déférer à la convocation de son supérieur hiérarchique, M. Z..., puis pour avoir, le 17 mai 2012, à nouveau refusé de rencontrer le directeur de site, M. Y..., ces deux supérieurs hiérarchiques souhaitant s'entretenir avec lui du motif pour lequel le salarié avait refusé de prendre le volant pour livrer le 16 courant ; que ce salarié ne conteste pas la matérialité des faits reprochés, mais son conseil objecte à bon droit que sa convocation le 16 mai 2012, à 14 heures 45, prenait sur son temps libre puisque son travail s'achevait avant cette heure, son contradicteur l'admettant ; qu'il appartenait à l'employeur de le convoquer à un entretien durant ses heures de travail ; que s'agissant de l'entretien mentionné dans la lettre de licenciement le 17 mai 2011, à 14 heures, la lettre de licenciement fixe les limites du litige ; qu'or, le jeudi 17 mai 2012 était un jour férié pendant lequel M. X... n'a pas travaillé ; que si on devait considérer que l'indication de la date du 17 mai est une erreur matérielle, l'objection prise du dépassement du temps de travail subsisterait ; que le conseil de l'employeur dit que l'horaire de 14 heures prévu pour cet entretien se situait durant un temps de travail ; que cependant, cet employeur ne précise jamais les horaires de travail, ce qui interdit de retenir que le 18 mai 2012, à 14 heures, M. X... était encore à son service ; que la cour en tire la même conclusion, à savoir que l'employeur devait fixer un rendez vous avec le salarié durant ses heures de travail ; qu'il s'ensuit que le licenciement de M. X... ne repose pas sur une cause sérieuse ; que les indemnités de rupture ne sont pas querellées en leurs montants, de sorte que la cour entrera en voie de condamnation à hauteur des sommes suivantes :
-4. 519, 41 euros, ainsi que 451, 94 euros au titre des congés payés afférents, pour préavis,
-1. 506, 47 euros au titre de l'indemnité de licenciement.
Que l'employeur doit nécessairement le paiement retenu durant une mise à pied conservatoire qui n'avait pas lieu d'être ; que le salarié recevra à ce titre la somme de 753, 23 euros dont le montant n'est pas davantage querellé ; que M. X... était âgé de 54 ans au jour de son licenciement prononcé en l'état d'une ancienneté de 6 ans au sein d'une entreprise occupant une centaine de salariés ; qu'il a perdu un salaire brut de 2. 259, 70 euros par mois, primes incluses ; que l'intéressé indique avoir retrouvé un emploi moins rémunéré à compter du 21 octobre 2012 ; que le bulletin de paie qu'il verse aux débats du mois de janvier 2014 mentionne un salaire mensuel brut d'un montant de 2. 044, 16 euros, primes incluses, légèrement inférieur à sa précédente rémunération au sein de la société Ciffréo Bona ; que la cour dispose des éléments d'appréciation suffisants pour arrêter à 14 000 euros l'exacte et juste réparation de son nécessaire préjudice ;
ALORS QUE l'employeur peut convoquer le salarié à un entretien informel, à la fin de sa journée de travail, pour parler avec lui de ses difficultés à exécuter son contrat de travail ; que le fait, pour un chauffeur de poids lourds, de refuser, de manière réitérée et sans raison valable, de déférer aux convocations de ses supérieurs hiérarchiques souhaitant discuter des difficultés liées à l'exécution de son travail à la fin de ses tournées, caractérise un comportement rendant impossible son maintien pendant la durée du préavis ; qu'en l'espèce, pour déclarer sans cause réelle et sérieuse le licenciement pour faute grave de M. X..., la cour d'appel a retenu que l'employeur devait fixer un rendez-vous avec le salarié durant ses heures de travail ; qu'en se fondant sur ce motif, la cour d'appel a violé les articles L. 1234-1, L. 1234-5 et L. 1234-9 du code du travail.
Le second moyen de cassation fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir condamné la société Ciffréo Bona à payer à M. X... la somme de 80 euros en rappel d'une prime dite d'entretien matériel ;
AUX MOTIFS QUE pour réclamer le paiement d'une prime de 80 euros récompensant le chauffeur dont le camion est tenu dans un bon état de propreté, le conseil du salarié estime que cette prime mensuelle lui est due ; que dans un courrier en date du 13 avril 2012, l'employeur lui signifiait que cette prime de 80 euros lui avait été versée en janvier, février et mars 2012 (160 € pour rattrapage), de sorte que la contestation serait vaine ; qu'il résulte à l'examen des bulletins de salaire édités et spécialement du bulletin de salaire édité pour le mois de février 2012 que cette prime de 80 euros, dite prime d'entretien matériel, ne fut pas versée ; que le conseil de l'employeur ne produisant pas le bulletin de paie du mois de mars 2012, la cour ne peut vérifier son affirmation selon laquelle un rattrapage fut fait à hauteur de 160 € (80 € pour le mois de février + 80 € pour le mois de mars) ; que le principe du paiement de cette prime n'étant plus contesté et l'employeur ne justifiant pas de son paiement pour le mois de février 2012, la cour entrera en voie de condamnation à hauteur de 80 euros ;
1°) ALORS QUE dans un courrier en date du 13 avril 2012 adressé à M. X..., la société Ciffréo Bona précisait « qu'en février 2012 », il avait « touché la prime d'entretien matériel, soit 80 euros », mais non « la prime non accident » et « qu'en mars 2012 », il avait « bien touché ces deux primes de 80 + 80, soit 160 euros » ; qu'en affirmant, pour condamner la société Ciffréo Bona à payer au salarié un rappel de prime matériel, que dans un courrier en date du 13 avril 2012, l'employeur lui signifiait que cette prime de 80 euros lui avait été versée en janvier, février et mars 2012 (160 € pour rattrapage), de sorte que la contestation serait vaine, la cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis de ce courrier, violant ainsi l'article 1134 du code civil ;
2°) ALORS QUE le bulletin de paie de M. X... édité pour le mois de février 2012 faisait état de la somme de 80 euros payée au titre de la prime " entretien matériel " ; qu'en affirmant, pour condamner la société Ciffréo Bona à payer au salarié la somme de 80 euros au titre d'une prime d'entretien pour le mois de février 2012, qu'il résultait du bulletin de salaire édité pour le mois de février 2012 que cette prime de 80 euros, dite prime d'entretien matériel, n'avait pas été versée, la cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis du bulletin de paie de février 2012, violant ainsi l'article 1134 du code civil.