Cour de cassation, civile, Chambre civile 3, 4 février 2016, 15-11.140, Publié au bulletin

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :



Sur le moyen unique :

Vu l'article L. 271-1 du code de la construction et de l'habitation ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 13 novembre 2014), que, par acte notarié du 13 janvier 2011, la société Bat et Bri a consenti une promesse unilatérale de vente d'un terrain à bâtir à M. et Mme X..., sous la condition suspensive de l'obtention d'un permis de construire une maison à usage d'habitation et d'un prêt ; que, la vente n'ayant pas été régularisée, la société Bat et Bri a assigné en paiement de l'indemnité d'immobilisation M. et Mme X... qui ont soutenu que la promesse unilatérale de vente était nulle, faute de leur avoir été notifiée conformément aux dispositions de l'article L. 271-1 du code de la construction et de l'habitation ;

Attendu que, pour déclarer nulle la promesse unilatérale, l'arrêt retient que la volonté des acquéreurs de construire une maison à usage d'habitation était certaine lors de la conclusion de la promesse et était entrée dans le champ contractuel et qu'il se déduit de ces éléments que le droit de rétractation prévu par les dispositions légales était applicable ;

Qu'en statuant ainsi, alors que la promesse ne portait que sur la vente d'un terrain à bâtir et que la faculté de rétractation prévue par l'article L. 271-1 précité ne concerne que les actes ayant pour objet la construction ou l'acquisition d'un immeuble à usage d'habitation, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 13 novembre 2014, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;


Condamne M. et Mme X... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne M. et Mme X... à payer la somme de 3 000 euros à la société Bat et Bri ; rejette la demande de M. et Mme X... ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quatre février deux mille seize.


MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par la SCP Boulloche, avocat aux Conseils, pour la société Bat et Bri

Le moyen de cassation fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir déclaré nulle la promesse unilatérale du 13 janvier 2011 et dit que la SCP Delecroix serait tenue de restituer la somme de 10 500 euros séquestrée entre ses mains par les époux X... sur présentation de l'arrêt,

Aux motifs que « suivant l'acte authentique du 13 janvier 2011, la société Bat & Bri, promettant, et les époux X..., bénéficiaires, ont conclu une promesse unilatérale de vente aux termes de laquelle la première a promis de vendre aux seconds un terrain à bâtir sis 2 impasse du Château Gaillard à Wissous (91320) au prix de 210 000 euros, sous diverses conditions suspensives, le délai de la promesse expirant au 7 décembre 2011, étant stipulée une indemnité d'immobilisation d'un montant de 21 000 euros.
Considérant qu'il résulte de l'article L. 271-1 du code de la construction et de l'habitation, dont les dispositions sont d'ordre public, que l'acquéreur non professionnel d'un immeuble à usage d'habitation dispose d'un droit de rétractation, que le délai de rétractation court à compter du lendemain de la première présentation de la lettre recommandée avec demande d'avis de réception lui notifiant l'acte, que l'exercice par l'acquéreur de sa faculté de rétractation entraîne l'anéantissement du contrat.
Considérant qu'en l'espèce, excipant de ce que la promesse unilatérale de vente litigieuse ne leur a pas été notifiée conformément aux dispositions susvisées, les époux X... soutiennent que le délai de rétractation n'a pas couru, de sorte que la promesse doit être déclarée nulle par la cour, les époux X... ayant usé de leur faculté de rétractation dans leurs conclusions du 15 octobre 2012, tandis que la société Bat & Bri s'oppose à cette demande au motif que les dispositions susvisées ne seraient pas applicables en l'espèce.
Considérant que la promesse unilatérale a pour objet un terrain désigné comme terrain à bâtir, en vue de la construction d'une maison à usage d'habitation des bénéficiaires, comme cela résulte expressément des termes de cette promesse et sans que ce point ne soit contesté ; que notamment, il est stipulé dans cet acte une condition suspensive, au bénéfice du bénéficiaire, relative à l'obtention d'un permis de construire en vue de la construction d'une maison à usage d'habitation ; que la volonté des époux X... de construire une maison à usage d'habitation sur le terrain litigieux, désigné comme un terrain à bâtir, était ainsi certaine lors de la conclusion de la promesse litigieuse, cette volonté étant entrée dans le champ contractuel.
Considérant qu'il se déduit de ces éléments que le droit de rétractation prévu par les dispositions susvisées sont applicables à l'espèce, les appelants étant des non-professionnels au sens de ces mêmes dispositions.
Considérant que la promesse unilatérale de vente litigieuse n'ayant pas été notifiée aux époux X... conformément aux dispositions susvisées, le délai de rétractation n'a pas couru, de sorte que ces derniers ont pu régulièrement exercer leur droit de rétractation dans leurs conclusions du 15 octobre 2012.
Considérant que l'exercice par les époux X... de leur faculté de rétractation entraîne l'anéantissement du contrat ; que par conséquent il y a lieu d'infirmer le jugement entrepris, et statuant à nouveau, de déclarer nulle la promesse unilatérale du 13 janvier 2011 et de dire que la SCP Delecroix notaires associés sera tenue de restituer la somme de 10 500 euros séquestrée entre ses mains par les époux X... » (arrêt pages 2 et 3) ;

Alors que, d'une part, l'article L. 271-1 du code de la construction et de l'habitation n'impose le respect d'une faculté de rétractation qu'en présence d'un acte ayant pour objet la construction ou l'acquisition d'un immeuble à usage d'habitation ; qu'en jugeant que la promesse de vente d'un terrain nu à bâtir, pas même assortie d'un permis de construire, offrait aux acquéreurs non professionnels une faculté de rétractation, la cour d'appel a violé l'article L. 271-1 du code de la construction et de l'habitation ;

Alors que, d'autre part, l'article L. 271-1 du code de la construction et de l'habitation n'impose le respect d'une faculté de rétractation qu'en présence d'un acte ayant pour objet la construction ou l'acquisition d'un immeuble à usage d'habitation ; que l'intention des parties à l'acte est sans incidence sur le champ d'application de ce texte ; qu'en jugeant que la volonté des époux X... de faire édifier un immeuble d'habitation sur le terrain nu objet de l'acte était entrée dans le champ contractuel, ce qui leur permettait de bénéficier des dispositions de l'article L. 271-1 du code de la construction et de l'habitation relative à la faculté de rétractation, la cour a violé ledit texte.

ECLI:FR:CCASS:2016:C300156
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