Cour de cassation, civile, Chambre commerciale, 13 octobre 2015, 14-19.734, Publié au bulletin

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :



Sur le moyen unique :

Vu l'article 2313 du code civil, ensemble l'article 122 du code de procédure civile ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X... s'est, par acte sous seing privé du 23 février 2007, rendue caution solidaire envers la société Banque populaire Côte d'Azur (la banque) d'un prêt consenti par celle-ci à la société Maison jardin (la société), par acte authentique du 15 février 2007 ; qu'assignée en paiement du solde, la caution a opposé l'irrecevabilité de la demande pour non-respect de la procédure préalable de conciliation prévue par le contrat de prêt ;

Attendu que pour accueillir cette fin de non-recevoir, l'arrêt retient que l'obligation de mettre en ¿uvre une procédure préalable de conciliation s'analyse en une exception inhérente à la dette en ce que cette prévision est indifférente à la personne du souscripteur et ne se rapporte qu'à l'obligation souscrite, dont elle définit les modalités présidant à son admission et sa mise en exécution ;

Qu'en statuant ainsi, alors que la fin de non-recevoir tirée du défaut de mise en oeuvre d'une clause contractuelle qui institue une procédure de conciliation, obligatoire et préalable à la saisine du juge, ne concerne, lorsqu'une telle clause figure dans un contrat de prêt, que les modalités d'exercice de l'action du créancier contre le débiteur principal et non la dette de remboursement elle-même dont la caution est également tenue, de sorte qu'elle ne constitue pas une exception inhérente à la dette que la caution peut opposer, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce que, confirmant le jugement entrepris, il rejette les demandes de la société Banque populaire Côte d'Azur au titre du solde de 57 843,59 euros du prêt notarié, l'arrêt rendu le 23 janvier 2014, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Lyon ;

Condamne Mme X... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du treize octobre deux mille quinze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par la SCP Célice, Blancpain, Soltner et Texidor, avocat aux Conseils, pour la société Banque populaire Côte d'Azur.

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté la BPCA de sa demande tendant à la condamnation de Madame Y... à lui verser la somme de 57.843,59 ¿ au titre du solde du prêt notarié ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE « Mme Y... s'est portée caution du prêt de 80 000 € souscrit par la SARL MAISON JARDIN à hauteur de 96 000 €, selon acte authentique du 23 février 2007. Entre autres dispositions, cet acte prévoit en page 10 sous le paragraphe intitulé : "CONCILIATION CONVENTIONNELLE" «en cas de litige, les parties conviennent préalablement à toute instance judiciaire, de soumettre leur différend au conciliateur qui sera missionné par le président de la chambre des notaires ». La BPCA n'a pas soumis le litige à la commission de conciliation Or, celle-ci devait être actionnée avant toute démarche contentieuse. Pour cette raison, le tribunal a déclaré irrecevable l'action de la BPCA à l'encontre de la SARL MAISON JARDIN et, par ricochet, sa caution. La BPCA ne peut valablement rechercher cette caution sauf à démontrer que l'exception qui aurait joué en faveur de la société emprunteuse lui soit strictement personnelle puisque, dans ce cas, la caution ne pourrait l'invoquer. Sur ce point, l'exigence d'un recours préalable à une procédure de conciliation avant l'engagement d'une action en justice telle que mentionnée dans I'acte notarié s'analyse comme une exception inhérente à la dette. En effet, cette prévision est indifférente à la personne du souscripteur et ne se rapporte qu'à l'obligation souscrite dont elle définit les modalités présidant à son admission et sa mise à exécution. Elle ne se présente donc pas comme une exception personnelle s'entendant seulement de celles marquées par l'intuitus personae, absent d'une telle spécification. Il s'ensuit que l'appel de la banque est infondé et le jugement sera infirmé de ce chef » ;

ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE « l'acte notarié prévoit, article "CONCILIATION CONVENTIONNELLE", que «en cas de litige, les parties conviennent préalablement à toute instance judiciaire, de soumettre leur différend au conciliateur qui sera missionné par le président de la chambre des notaires », Que la BPCA qui est en demande avait tout le loisir de saisir le conciliateur, le tribunal déboutera la BPCA de ses demandes au titre du solde de 57.843,59 € du prêt notarié » ;

ALORS QUE l'inobservation de la clause de conciliation préalable stipulée dans un contrat de prêt constitue une exception personnelle au débiteur principal ; qu'elle ne saurait par conséquent être invoquée par la caution, tierce au contrat de prêt et à la conciliation qu'il prévoit ; qu'en jugeant que la méconnaissance de la clause de conciliation préalable stipulée dans le contrat de prêt conclu avec la société MAISON JARDIN était une exception inhérente à la dette que Madame Y... était recevable et fondée à opposer à la BPCA pour différer l'exécution de ses engagements, la Cour d'appel a violé l'article 2313 du Code civil.

ECLI:FR:CCASS:2015:CO00896
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