Cour de cassation, civile, Chambre civile 2, 17 septembre 2015, 14-22.931, Publié au bulletin

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :


Sur le moyen unique, pris en ses première et troisième branches :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 12 juin 2014), qu'ayant cessé son activité salariée le 14 janvier 2011, M. X... a été inscrit à Pôle emploi et a bénéficié de l'allocation d'aide au retour à l'emploi du 27 février au 30 juin 2011 ; qu'il a été affilié à compter du 1er juillet 2011 auprès de la caisse du régime social des indépendants Ile-de-France Ouest (la caisse) ; que celle-ci lui ayant refusé le bénéfice des indemnités journalières pour la période du 28 novembre 2011 au 1er janvier 2012, l'intéressé a saisi d'un recours une juridiction de sécurité sociale ;

Attendu que la caisse fait grief à l'arrêt d'accueillir ce recours, alors, selon le moyen :

1°/ que l'article D. 613-16 du code de la sécurité sociale dispose que, pour avoir droit aux indemnités journalières, l'assuré doit être affilié au régime d'assurance maladie maternité des travailleurs non-salariés des professions non agricoles depuis au moins un an à la date du constat médical de l'incapacité de travail à cette dernière date ; qu'en disant la caisse du régime social des indépendants tenue de servir à M. X... des indemnités journalières pour des arrêts de travail à compter du 28 novembre 2011 et jusqu'au 1er janvier 2012, tout en constatant expressément que cet assuré a été affilié à la caisse du régime social des indépendants à compter seulement du 1er juillet 2011, ce dont il résultait nécessairement qu'il ne pouvait avoir droit auxdites indemnités journalières avant le 1er juillet 2012, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences de ses propres constatations au regard du texte susvisé, qu'elle a donc violé par fausse application ;

2°/ que l'article D. 613-16 du code de la sécurité sociale dispose que, pour avoir droit aux indemnités journalières, l'assuré doit être affilié au régime d'assurance maladie maternité des travailleurs non-salariés des professions non agricoles depuis au moins un an à la date du constat médical de l'incapacité de travail ; que, s'il ajoute que la période d'affiliation au régime antérieur est prise en compte pour l'appréciation de la durée d'affiliation qu'il prévoit, c'est à la condition qu'il n'y ait pas eu d'interruption entre les deux régimes ; qu'en particulier, la période de maintien des droits prévue par l'article L. 161-8 du même code n'est pas une période d'affiliation, de sorte qu'il y a interruption de l'affiliation ; qu'en disant que la période du 14 janvier 2011 au 30 juin 2011 pendant laquelle M. X... ayant cessé son activité salariée et s'étant inscrit à Pôle emploi avait perçu l'allocation de retour à l'emploi devait être considérée comme une période d'affiliation et d'immatriculation au régime général dont cet assuré relevait auparavant, la cour d'appel a violé par fausse application le texte susvisé, ensemble les articles L. 172-1 A et R. 172-12-1 du code de la sécurité sociale ;

Mais attendu que, selon l'article D. 613-16 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction modifiée par le décret n° 2007-709 du 4 mai 2007, lorsque l'assuré est affilié depuis moins d'un an au régime d'assurance maladie et maternité des travailleurs non salariés des professions non agricoles et relevait précédemment à titre personnel d'un ou de plusieurs régimes, la période d'affiliation au régime antérieur est prise en compte, sous réserve qu'il n'y ait pas eu d'interruption entre les deux affiliations, pour l'appréciation de la durée d'affiliation d'un an requise pour l'attribution des indemnités journalières du régime des artisans et des industriels et commerçants ; que, selon l'article L. 311-5, dans sa rédaction modifiée par la loi n° 2011-893 du 28 juillet 2011, toute personne percevant l'une des allocations ou l'un des revenus de remplacement qu'il énumère, conserve la qualité d'assuré social et bénéficie du maintien de ses droits aux prestations du régime obligatoire d'assurance maladie, maternité, invalidité et décès dont elle relevait antérieurement ; qu'il résulte de ces dispositions que la période au cours de laquelle le bénéficiaire de l'une des allocations ou de l'un des revenus mentionnés à l'article L. 311-5 conserve la qualité d'assuré revêt le caractère d'une période d'affiliation antérieure au sens et pour l'application des dispositions de l'article D. 613-16 ;

Et attendu que l'arrêt relève que M. X... a cessé son activité salariée le 14 janvier 2011 et a perçu l'allocation de retour à l'emploi jusqu'au 30 juin 2011, et qu'il n'est pas contesté qu'il a été affilié auprès de la caisse du régime social des indépendants à compter du 1er juillet 2011 ;

Que de ces constatations, la cour d'appel a exactement déduit qu'aucune interruption n'étant intervenue entre l'affiliation, successivement, au régime général et au régime d'assurance maladie et maternité des travailleurs non salariés des professions non agricoles, les conditions fixées par l'article D. 613-16 du code de la sécurité sociale étaient réunies, de sorte que la caisse était tenue de servir à M. X... les indemnités afférentes à ses arrêts de travail ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur le même moyen annexé, pris en ses deuxième et quatrième branches, qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la caisse du régime social des indépendants Ile-de-France Ouest aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la caisse du régime social des indépendants Ile-de-France Ouest ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-sept septembre deux mille quinze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par la SCP Garreau, Bauer-Violas et Feschotte-Desbois, avocat aux Conseils, pour la caisse du régime social des indépendants Ile-de-France Ouest

Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'avoir dit que Monsieur X... ouvre droit aux indemnités journalières pour les périodes du 28 novembre 2011 au 10 décembre 2011 et du 10 décembre 2011 au 1er janvier 2012, et dit que la caisse du Régime social des indépendants est tenue de servir ces prestations en espèces de l'assurance maladie maternité à l'égard de Monsieur X... en application des dispositions des articles L. 171-1 et suivants et D 613-16 du code de la sécurité sociale et infirmé la décision de la commission de recours amiable du 8 février 2010,

AUX MOTIFS PROPRES QU'à l'appui de sa demande, la Caisse du régime social des indépendants Ile de France Ouest fait valoir que le fait d'être bénéficiaire de certains revenus de remplacement ou de substitution n'ouvre pas droit au service des indemnités journalières dans la mesure où l'article D 613-16 du code de la sécurité sociale prévoit que ces indemnités ne sont réservées qu'aux assurés affiliés ayant cotisé depuis au moins un an à la date de la constatation médicale de l'incapacité de travail ; que selon les dispositions de l'article D 613-16 du code de la sécurité sociale, pour avoir droit aux indemnités journalières, l'assuré doit :

- être affilié au régime d'assurance maladie maternité des travailleurs non-salariés des professions non agricoles depuis au moins un an et rattaché aux groupes professionnels artisanal, industriel et commercial à la date du constat médical de l'incapacité de travail ;

- être à jour de ses cotisations de base et supplémentaires à la date du constat médical de l'incapacité de travail ;

- lorsque l'assuré est affilié depuis moins d'un an au régime d'assurance maladie maternité des travailleurs non-salariés non agricoles et relevait précédemment à titre personnel d'un ou de plusieurs régimes, la période d'affiliation au régime antérieur est prise en compte pour l'appréciation de la durée d'affiliation sous réserve qu'il n'y ait pas eu d'interruption entre les deux affiliations ;

que le litige porte sur la définition de l'affiliation et la notion d'interruption entre deux affiliations ; que la notion de travail effectif retenue par la Caisse du régime social des indépendants pour définir l'affiliation ouvrant droit aux prestations en espèces au titre de l'assurance maladie maternité n'est pas exigée par le texte précité ; qu'en l'espèce, Monsieur Laurent X... a cessé son activité salariée le 14 janvier 2011 et a perçu l'allocation de retour à l'emploi (ARE) jusqu'au 30 juin 2011 ; que le Pôle Emploi certifie par lettre du 13 février 2012 que le montant des sommes qui lui ont été versées au titre de l'allocation de retour à l'emploi "tient compte des retenues légales et conventionnelles (CSG, CRDS, précompte sécurité sociale, retraite complémentaire)" ; que rien n'établit que la mention de la retenue au titre du précompte de la sécurité sociale ne peut être prise en compte au motif qu'il s'agirait d'une lettre type de Pôle Emploi comme le soutient la Caisse du régime social des indépendants ; que bien que n'en fournissant pas le justificatif: il n'est pas contesté que Monsieur Laurent X... a été affilié à la Caisse du régime social des indépendants à compter du 1er juillet 2011 ; qu'il s'en suit qu'il n'y a eu aucun interruption entre les deux régimes de sécurité sociale auxquels il a été affiliée, de sorte que les conditions posées par l'article D 613-16 du code de la sécurité sociale pour avoir droit aux indemnités journalières sont réunies ; que la Caisse du régime social des indépendants est donc tenue de servir à Monsieur Laurent X... les prestations en espèces auxquelles il peut prétendre pour les périodes d'arrêts de travail susvisées ; que le jugement entrepris doit donc être confirmé,

ET AUX MOTIFS ADOPTÉS QUE Monsieur X... Laurent a cessé son activité salariée le 14 janvier 2011, a été inscrit à Pôle emploi et a perçu l'ARE depuis le 27 février 2011 jusqu'au 30 juin 2011 ; qu'il est affilié au Régime Social des Indépendants depuis le 01 juillet 2011 ; qu'en application de l'article L 172-1-A du Code de la Sécurité Sociale introduit dans le Code de la Sécurité Sociale par l'article 57 de la loi N° 2007-1786 du 19 décembre 2007 de financement de la Sécurité Sociale pour 2008, « lorsque le versement des prestations en nature ou en espèces des assurances maladie-maternité est subordonné par les dispositions du présent code (...) à des conditions d'affiliation, d'immatriculation, des cotisations ou de durée de travail préalables ; que les organismes de Sécurité Sociale tiennent compte, pour la mise en oeuvre de ces dispositions, de l'ensemble des périodes d'affiliation, d'immatriculation, de cotisations versées ou de travail effectués, même lorsqu'elles relèvent d'un autre régime de sécurité sociale régi par le présent code (...) » ; que L'article R 172-12-1 du Code de la Sécurité Sociale précisant les modalités de coordination entre les régimes de sécurité sociale, pris pour l'application de l'article L 172-1-A du Code de la Sécurité Sociale prévoit que pour l'application par un régime d'assurance maladie-maternité des dispositions de l'article L 172-1-A, la période d'activité accomplie dans un autre régime est prise en compte selon les règles suivantes :
1° la durée d'affiliation ou d'immatriculation à un régime est assimilée à une durée d'affiliation ou d'immatriculation dans l'autre régime ;
2° le montant des cotisations acquittées dans un régime est considéré comme acquitté dans l'autre régime. Les périodes de cotisations ou la durée de travail effectuée ainsi que les périodes et durées assimilées dans un régime sont considérées comme effectuées dans l'autre régime ;
que l'article D 613-16 du Code de la Sécurité Sociale relatif au Régime Social des Indépendants dispose par ailleurs que pour avoir droit aux indemnités journalières, l'assuré doit être affilié au régime d'assurance maladie-maternité des travailleurs non-salariés des professions non agricoles depuis au moins un an et rattaché aux groupes professionnels artisanal, industriel et commercial à la date du constat médical de l'incapacité de travail et être à jour de ses cotisations de base et complémentaires à la date du constat médical de l'incapacité de travail ; que Monsieur X..., en tant que bénéficiaire de l'ARE, doit être considéré comme relevant du régime de sécurité sociale dont il relevait précédemment à sa période de chômage indemnisée (régime général) jusqu'à la date de son affiliation au Régime Social des Indépendants, soit jusqu'au 30 juin 2011 ; que dès lors, la période durant laquelle il a été indemnisé au titre de l'ARE doit être considérée comme une période d'affiliation ou d'immatriculation au Régime Général et les cotisations acquittées sur ses allocations chômage (CSG-CRDS-précompte sécurité sociale-retraite complémentaire) sont réputées acquittées dans le régime social des indépendants ; que par ailleurs, aucune période d'interruption n'est intervenue entre son affiliation au Régime Général et son affiliation au Régime Social de Indépendants ; que dans ces conditions, Monsieur X... peut légitimement prétendre aux indemnités journalières afférentes aux périodes médicalement constatées de son incapacité de travail, soit :
- du 28 novembre 2011 au 10 décembre 2011
- du 10 décembre 2011 au 01 janvier 2012
dont le service incombe à la Caisse du Régime Social des Indépendants ÎIe de France Ouest en application des dispositions de l'article R 172-12-3 du Code de la Sécurité Sociale ; que la décision de la Commission de Recours Amiable de la caisse du Régime Social des Indépendants Île de France Ouest du 08 février 2010 sera donc annulée,

ALORS, D'UNE PART, QUE l'article D 613-16 du code de la sécurité sociale dispose que, pour avoir droit aux indemnités journalières, l'assuré doit être affilié au régime d'assurance maladie maternité des travailleurs non-salariés des professions non agricoles depuis au moins un an à la date du constat médical de l'incapacité de travail à cette dernière date ; qu'en disant la caisse du régime social des indépendants tenue de servir à Monsieur X... des indemnités journalières pour des arrêts de travail à compter du 28 novembre 2011 et jusqu'au 1er janvier 2012, tout en constatant expressément que cet assuré a été affilié à la caisse du régime social des indépendants à compter seulement du 1er juillet 2011, ce dont il résultait nécessairement qu'il ne pouvait avoir droit auxdites indemnités journalières avant le 1er juillet 2012, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences de ses propres constatations au regard du texte susvisé, qu'elle a donc violé par fausse application,

ALORS, D'AUTRE PART, QUE si l'article L 161-8 alinéa 1 du code de la sécurité sociale prévoit que les personnes qui cessent de remplir les conditions pour relever du régime général bénéficient, à compter de la date à laquelle ces conditions ne sont plus remplies, du maintien de leurs droits aux prestations des assurances maladie, maternité, invalidité et décès pendant une certaine période, son alinéa 2 précise que ce maintien des droits de l'assuré prend fin lorsqu'il vient à remplir les conditions pour bénéficier d'un autre régime obligatoire d'assurance maladie et maternité et qu'il ne peut plus prétendre aux prestations en espèces de ce régime au-delà de la période de maintien de droit ; qu'en disant que Monsieur X... a droit aux indemnités journalières pour des arrêts de travail à compter du 28 novembre 2011 et jusqu'au 1er janvier 2012, tout en constatant expressément que cet assuré qui bénéficiait du maintien de ses droits au régime général était affilié à la caisse du régime social des indépendants à compter du 1er juillet 2011 et qu'il ne bénéficiait même plus du maintien de ses droits au régime général, la cour d'appel n'a, de ce chef encore, pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations au regard du texte susvisé, qu'elle a donc violé par fausse application,

ALORS, EN OUTRE, QUE l'article D 613-16 du code de la sécurité sociale dispose que, pour avoir droit aux indemnités journalières, l'assuré doit être affilié au régime d'assurance maladie maternité des travailleurs non-salariés des professions non agricoles depuis au moins un an à la date du constat médical de l'incapacité de travail ; que, s'il ajoute que la période d'affiliation au régime antérieur est prise en compte pour l'appréciation de la durée d'affiliation qu'il prévoit, c'est à la condition qu'il n'y ait pas eu d'interruption entre les deux régimes ; qu'en particulier, la période de maintien des droits prévue par l'article L 161-8 du même code n'est pas une période d'affiliation, de sorte qu'il y a interruption de l'affiliation ; qu'en disant que la période du 14 janvier 2011 au 30 juin 2011 pendant laquelle Monsieur X... ayant cessé son activité salariée et s'étant inscrit à Pôle Emploi avait perçu l'Allocation de retour à l'emploi devait être considérée comme une période d'affiliation et d'immatriculation au régime général dont cet assuré relevait auparavant, la cour d'appel a violé par fausse application le texte susvisé, ensemble les articles L 172-1 A et R 172-12-1 du code de la sécurité sociale,

ALORS, ENFIN, QUE l'article D 613-16 du code de la sécurité sociale dispose que, pour avoir droit aux indemnités journalières, l'assuré doit également être à jour de ses cotisations à la date du constat médical de l'incapacité de travail ; qu'en déduisant d'une lettre de Pôle Emploi du 13 février 2012 énonçant de façon générale que les sommes versées à Monsieur X... à titre d'allocation de retour à l'emploi tiendraient compte des retenues légales et conventionnelles, notamment de précompte sécurité sociale, la cour d'appel, qui n'a pas constaté que cet assuré aurait versé des cotisations suffisantes au profit du régime social des indépendants de nature à lui ouvrir droit aux prestations de ce régime, a privé sa décision de base légale au regard dudit article.

ECLI:FR:CCASS:2015:C201329
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