Cour de cassation, criminelle, Chambre criminelle, 6 janvier 2015, 14-87.893, Publié au bulletin

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

N° A 14-87.893

F-P+B+I

N° 2



LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à Paris, le six janvier deux mille quinze, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de M. le conseiller MONFORT, les observations de la société civile professionnelle WAQUET, FARGE et HAZAN, avocat en la Cour, et les conclusions de Mme l'avocat général LE DIMNA ;

Statuant sur la question prioritaire de constitutionnalité formulée par mémoire spécial reçu le 8 décembre 2014 et présenté par M. Andrej X..., à l'occasion du pourvoi formé par lui contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris, 5e section, en date du 26 novembre 2014, qui a autorisé sa remise aux autorités judiciaires polonaises, en exécution d'un mandat d'arrêt européen ;

Attendu que la question prioritaire de constitutionnalité est ainsi rédigée :

"Les dispositions de l'article 695-30 du code de procédure pénale dans son 3ème alinéa, en ce qu'elles régissent l'audition de la personne recherchée dans le cadre d'un mandat d'arrêt européen devant la chambre de l'instruction sans prévoir la notification à celle-ci du droit de se taire portent-elles atteinte aux droits et libertés que la Constitution garantit et notamment :

- au droit au silence et au droit de la personne concernée de ne pas contribuer à sa propre incrimination, ainsi qu'aux droits de la défense garantis par les articles 9 et 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 ;

- au principe d'égalité dans la mesure où ce droit est assuré à la personne qui comparait devant une juridiction de jugement (articles 328 et 406 du code de procédure pénale) et non à la personne qui comparait en personne devant la chambre de l'instruction qui doit statuer sur la demande d'un Etat étranger en vue de l'exécution d'un mandat d'arrêt européen, alors que cette personne est dans la même situation procédurale, c'est-à-dire sous le coup d'un accusation au sens large, que la personne comparaissant devant la juridiction de jugement, et sans qu'aucune justification constitutionnellement recevable ne puisse être apportée à cette différence de traitement" ;

Attendu que la disposition législative contestée est applicable à la procédure et n'a pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel ;

Mais attendu que la question, ne portant pas sur l'interprétation d'une disposition constitutionnelle dont le Conseil constitutionnel n'aurait pas encore eu l'occasion de faire application, n'est pas nouvelle ;

Et attendu que la question posée ne présente pas, à l'évidence, un caractère sérieux ; qu'en effet, la procédure d'exécution d'un mandat d'arrêt européen ne conduit pas les juridictions françaises compétentes à recueillir des éléments d'accusation à l'égard de la personne concernée ; que l'audition, devant la chambre de l'instruction, de la personne recherchée ne vise qu'à constater son identité, à recevoir ses observations sur la procédure dont elle fait l'objet, et à lui permettre de consentir ou non à sa remise, et non à la soumettre à un interrogatoire sur les faits objet du mandat d'arrêt ; qu'ainsi, l'absence de notification du droit de se taire dans cette phase de la procédure n'est pas contraire aux droits de la défense, et notamment au droit de la personne de ne pas contribuer à sa propre incrimination, ni au principe d'égalité ;

D'où il suit qu'il n'y a pas lieu de renvoyer la question au Conseil constitutionnel ;

Par ces motifs :

DIT N'Y AVOIR LIEU DE RENVOYER au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité DAR ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;

Etaient présents aux débats et au délibéré : M. Guérin, président, M. Monfort, conseiller rapporteur, MM. Beauvais, Straehli, Finidori, Mme Durin-Karsenty, conseillers de la chambre, Mme Moreau, MM. Barbier, Talabardon, conseillers référendaires ;

Avocat général : Mme Le Dimna ;

Greffier de chambre : Mme Zita ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.

ECLI:FR:CCASS:2015:CR00002
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