Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 8 juillet 2015, 14-13.324, Inédit
Cour de cassation - Chambre sociale
- N° de pourvoi : 14-13.324
- ECLI:FR:CCASS:2015:SO01215
- Non publié au bulletin
- Solution : Rejet
- Président
- M. Mallard (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Texte intégral
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Dijon, 9 janvier 2014) que Mme X... a été engagée à compter du 24 août 2004 par la société Covercom en qualité de vendeur senior ; que la salariée s'est trouvée en arrêt de travail pour état pathologique résultant de la grossesse puis en congé parental du 3 juillet 2010 au 30 avril 2011 ² ; que le 26 avril 2011, elle a notifié sa démission à son employeur ; que le 30 novembre 2011, elle a saisi la juridiction prud'homale ;
Attendu que l'employeur fait reproche à l'arrêt de dire que la prise d'acte de la rupture du contrat de travail produisait les effets d'un licenciement nul et de le condamner au paiement de diverses sommes, alors, selon le moyen :
1°/ que la prise d'acte de la rupture du contrat de travail par le salarié ne produit les effets d'un licenciement nul ou sans cause réelle et sérieuse qu'en cas de manquement suffisamment grave de l'employeur empêchant la poursuite de l'exécution du contrat ; qu'il résulte des propres constatations de l'arrêt attaqué que Mme X... avait remis sa démission motivée le 26 avril 2011, alors même « que l'intéressée n'avait plus de contact avec l'entreprise depuis plusieurs mois » et qu'elle n'avait pas estimé devoir rompre le contrat de travail avant le 3 juillet 2010, qui marque la date à partir de laquelle elle n'était plus présente dans l'entreprise ; qu'en considérant que Mme X... était fondée à prendre acte de la rupture de son contrat de travail le 26 avril 2011, cependant que cette dernière ne subissait pas, depuis plusieurs mois, les agissements de harcèlement moral dont elle
disait avoir fait l'objet, en raison de son absence de l'entreprise pour un motif totalement étranger à ce prétendu harcèlement moral, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a violé les articles 1134 et 1184 du code civil, ensemble les articles L. 1232-1 et L. 1235-3 du code du travail ;
2°/ que la société Covercom faisait valoir dans ses conclusions que le véritable motif de la rupture de son contrat de travail était l'engagement de Mme X... par un autre employeur et qu'elle tentait d'exploiter des faits imputables à son responsable hiérarchique qui ne la concernaient pas directement ; qu'en s'abstenant de répondre à ce moyen, la cour d'appel a méconnu les exigences des articles 455 et 458 du code de procédure civile ;
Mais attendu d'abord que la cour d'appel, après avoir jugé que la salariée avait été victime de faits répétés de harcèlement moral, a constaté que l'employeur, bien qu'informé de tels faits n'avait pris au jour de la rupture aucune mesure pour les faire cesser et que la salariée pouvait légitimement craindre la perpétuation des agissements de harcèlement moral lors de son retour dans l'entreprise où l'auteur du harcèlement pouvait toujours se manifester puisque l'employeur ne s'était pas encore décidé de le licencier ; qu'elle a pu en déduire que cette situation rendait impossible la poursuite de la relation contractuelle ;
Attendu ensuite, que la cour d'appel, ayant retenu que la rupture était la conséquence des faits de harcèlement moral dont la salariée avait été victime, n'avait pas à répondre à des conclusions inopérantes ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Covercom aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Covercom à payer à Mme X... la somme de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du huit juillet deux mille quinze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt
Moyen produit par la SCP Célice, Blancpain, Soltner et Texidor, avocat aux Conseils, pour la société Covercom.
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit que la prise d'acte de la rupture du contrat de travail produisait les effets d'un licenciement nul, et d'AVOIR condamné en conséquence la société COVERCOM à payer à Madame X... les sommes de 16. 000 ¿ à titre de dommages et intérêts pour licenciement déclaré nul par la cour et pour préjudice moral, 3. 614, 85 ¿ à titre d'indemnité de licenciement et une somme globale de 2. 000 ¿ au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;
AUX MOTIFS QUE « La qualification de la prise d'acte Lorsqu'un salarié prend acte de la rupture de son contrat de travail en raison de faits qu'il reproche à son employeur, cette rupture entraîne la cessation immédiate du contrat de travail en produisant soit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse si les faits invoqués la justifiaient soit, dans le cas contraire, les effets d'une démission. Il n'est pas douteux que, comme l'ont décidé les premiers juges, le harcèlement moral dont Cathie X... a été victime justifie, compte tenu de la gravité du manquement dont il est le fruit, la prise d'acte de la rupture du contrat de travail notifiée à la SAS COVERCOM le 26 avril 2011, peu important que cette notification soit intervenue alors que l'intéressée n'avait plus de contact avec l'entreprise depuis plusieurs mois, la salariée pouvant légitimement craindre la perpétuation des agissements de harcèlement moral lors de son retour dans l'entreprise où l'auteur du harcèlement pouvait toujours se manifester puisque l'employeur ne s'était pas encore décidé de le licencier. Il doit être observé, par ailleurs, que bien qu'elle ait été informée à plusieurs reprises des agissements du responsable des ventes, la SAS COVERCOM n'a pas pris les mesures qui s'imposaient pour mettre un terme à cette situation, manquant ainsi à son obligation de sécurité. Les dispositions des articles L. 1152-1 et L. 1152-2 du code du travail relatives à la rupture du contrat de travail en cas de harcèlement moral trouvant ainsi matière à s'appliquer, les premiers juges auraient dû analyser la prise d'acte non pas en un licenciement sans cause réelle et sérieuse mais en un licenciement nul. Il convient par conséquent d'infirmer le jugement et d'analyser la prise d'acte en un licenciement nul » ;
ALORS, D'UNE PART, QUE la prise d'acte de la rupture du contrat de travail par le salarié ne produit les effets d'un licenciement nul ou sans cause réelle et sérieuse qu'en cas de manquement suffisamment grave de l'employeur empêchant la poursuite de l'exécution du contrat ; qu'il résulte des propres constatations de l'arrêt attaqué que Madame X... avait remis sa démission motivée le 26 avril 2011, alors même « que l'intéressée n'avait plus de contact avec l'entreprise depuis plusieurs mois » et qu'elle n'avait pas estimé devoir rompre le contrat de travail avant le 3 juillet 2010, qui marque la date à partir de laquelle elle n'était plus présente dans l'entreprise ; qu'en considérant que Madame X... était fondée à prendre acte de la rupture de son contrat de travail le 26 avril 2011, cependant que cette dernière ne subissait pas, depuis plusieurs mois, les agissements de harcèlement moral dont elle disait avoir fait l'objet, en raison de son absence de l'entreprise pour un motif totalement étranger à ce prétendu harcèlement moral, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a violé les articles 1134 et 1184 du Code civil, ensemble les articles L. 1232-1 et L. 1235-3 du Code du travail ;
ALORS, D'AUTRE PART, QUE la société COVERCOM faisait valoir dans ses conclusions que le véritable motif de la rupture de son contrat de travail était l'engagement de Madame X... par un autre employeur et qu'elle tentait d'exploiter des faits imputables à son responsable hiérarchique qui ne la concernaient pas directement ; qu'en s'abstenant de répondre à ce moyen, la cour d'appel a méconnu les exigences des articles 455 et 458 du code de procédure civile.