Cour de cassation, civile, Chambre civile 2, 11 juin 2015, 14-21.867, Publié au bulletin

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :



Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Jean-Jacques X... étant décédé d'une maladie occasionnée par l'amiante dont l'organisme de sécurité sociale a reconnu l'origine professionnelle, son épouse, Mme Y... épouse X..., ses enfants, M. Jean-Sébastien X..., Mme X... épouse Z... et Mme X... épouse A..., ont saisi d'une demande d'indemnisation le Fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante (le FIVA) qui leur a présenté une offre portant, notamment, sur la réparation du préjudice économique de Mme X..., qu'ils ont contestée devant une cour d'appel ;

Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur la première branche du moyen annexé qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Mais sur le moyen unique, pris en sa seconde branche :

Vu l'article 53 I et 53 IV de la loi n° 2000-1257 du 23 décembre 2000 ;

Attendu que, pour fixer le préjudice économique de Mme X... à une certaine somme sous réserve de la déduction de l'éventuel capital décès versé par la mutuelle de Jean-Jacques X..., l'arrêt énonce que c'est à juste titre que le FIVA invoque les dispositions de l'article 53 IV de la loi du 23 décembre 2000 aux termes duquel le FIVA indique au demandeur l'évaluation retenue pour chaque chef de préjudice ainsi que le montant des indemnités qui lui reviennent compte tenu des prestations énumérées à l'article 29 de la loi n° 85-677 du 5 juillet 1985 et des indemnités de toute nature reçues ou à recevoir d'autres débiteurs du même préjudice ; que le capital décès versé par une mutuelle ou tout autre organisme de prévoyance doit être déduit du montant du préjudice économique ;

Qu'en se déterminant ainsi, sans rechercher si le capital décès versé par la mutuelle revêtait un caractère indemnitaire ou forfaitaire, alors que celui-ci, ne relevant pas des prestations indemnitaires par détermination de la loi, ne réparait le préjudice économique du conjoint survivant que s'il dépendait des revenus du défunt, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a fixé le préjudice économique de Mme X... pour la période du 31 mai 2002 au 31 décembre 2007 à la somme de 32 321,15 euros sous réserve de la déduction d'un éventuel capital décès versé par la mutuelle de M. X..., l'arrêt rendu le 27 mai 2014, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence, autrement composée ;

Condamne le Fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du onze juin deux mille quinze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat aux Conseils, pour les consorts X....

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir fixé le préjudice économique de Madame X... pour la période du 31 mai 2002 au 31 décembre 2007 à la somme de 32.320,15 € sous réserve de la déduction de l'éventuel capital décès versé par la mutuelle de Monsieur X... ;

Aux motifs qu'en ce qui concerne le préjudice économique pour la période du 31 mai 2002 au 31 décembre 2007, les parties sont d'accord sur le montant de ce préjudice soit 32.320,15 euros ; que cependant, le FIVA fait valoir que Madame X... ne lui a communiqué aucun document émanant de l'organisme social et/ou de la mutuelle de Monsieur X..., attestant l'absence de versement d'un capital-décès devant être déduit du préjudice économique ; que Madame X... soutient n'avoir perçu aucun capital décès de l'organisme social de son époux ; qu'elle a rédigé et produit une attestation sur l'honneur de non perception ; que par ailleurs, elle s'oppose à la déduction de l'éventuel capital décès versé par la mutuelle en faisant valoir que l'article 29 alinéa 5 de la loi du 5 juillet 1985 n'étend pas le recours de ces organismes au capital décès ; que cependant, en ce qui concerne l'éventuel capital décès versé par la mutuelle de Monsieur X..., c'est à juste titre que le FIVA invoque les dispositions de l'article 53 IV de la loi du 23 décembre 2000 ; qu'en effet, aux termes de ce texte, le Fonds indique au demandeur "l'évaluation retenue pour chaque chef de préjudice, ainsi que le montant des indemnités qui lui reviennent compte tenu des prestations énumérées à l'article 29 de la loi n° 85-677 du 5 juillet 1985 tendant à l'amélioration de la situation des victimes d'accidents de la circulation et à l'accélération des procédures d'indemnisation, et des indemnités de toute nature reçues ou à recevoir d'autres débiteurs du chef du même préjudice" ; que tant le capital-décès versé par l'organisme social que celui versé par une mutuelle ou tout autre organisme de prévoyance doivent être déduits du montant du préjudice économique ; qu'il convient en conséquence de faire droit à la réserve du Fonds, Mme X... devant justifier par un document émanant de l'organisme social et de la mutuelle de son époux soit qu'aucun capital décès ne lui a été versé soit le montant de ce capital ;

Alors que, d'une part le capital-décès, ne relevant pas des prestations indemnitaires par détermination de la loi, ne répare pas la perte économique subie par la veuve d'une victime, décédée à la suite d'une exposition à l'amiante ; qu'en décidant que le capital-décès versé par une mutuelle ou tout autre organisme de prévoyance devait être déduit du montant du préjudice économique au seul motif qu'en vertu de l'article l'article 53 IV de la loi du 23 décembre 2000, le FIVA indique au demandeur "l'évaluation retenue pour chaque chef de préjudice, ainsi que le montant des indemnités qui lui reviennent compte tenu des prestations énumérées à l'article 29 de la loi n° 85-677 du 5 juillet 1985 tendant à l'amélioration de la situation des victimes d'accidents de la circulation et à l'accélération des procédures d'indemnisation, et des indemnités de toute nature reçues ou à recevoir d'autres débiteurs du chef du même préjudice", la Cour d'appel a violé l'article 53-I, 53-II et 53-IV, de la loi nº 2000-1257 du 23 décembre 2000 ;

Alors que, d'autre part, et à titre subsidiaire, il résulte de l'article 53-I, 53-II et 53-IV, de la loi n° 2000-1257 du 23 décembre 2000, que seules doivent être imputées sur l'indemnité réparant le préjudice économique subi par Madame X... à la suite du décès de son mari, victime d'une exposition à l'amiante, le montant des indemnités qui lui reviennent compte tenu des prestations énumérées à l'article 29 de la loi n° 85-677 du 5 juillet 1985 tendant à l'amélioration de la situation des victimes d'accidents de la circulation et à l'accélération des procédures d'indemnisation, et des indemnités de toute nature reçues ou à recevoir d'autres débiteurs du chef du même préjudice, ce qui exclut les sommes revêtant un caractère forfaitaire et non pas indemnitaire ; qu'en décidant que le capital-décès versé par une mutuelle ou tout autre organisme de prévoyance doit être déduit du montant du préjudice économique sans rechercher s'il revêt un caractère indemnitaire ou forfaitaire, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 53-I, 53-II et 53-IV, de la loi nº 2000-1257 du 23 décembre 2000, ensemble le principe de la réparation intégrale.

ECLI:FR:CCASS:2015:C200969
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