Cour d'appel de Limoges, 25 février 2015, 14/00163
Cour d'appel de Limoges - Chambre civile
- N° de RG : 14/00163
- Solution : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours
Texte intégral
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE LIMOGES
CHAMBRE CIVILE
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ARRÊT DU 25 FEVRIER 2015
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RG N : 14/ 00163
AFFAIRE :
Lionel X...
C/
Nathalie X..., CAISSE REGIONALE DE CREDIT MARITIME MUTUEL DE BRET AGNE NORMANDIE
DEMANDE RELATIVE A UN PRET
Le vingt cinq Février deux mille quinze la Chambre civile de la cour d'appel de LIMOGES a rendu l'arrêt dont la teneur suit par mise à disposition du public au greffe :
ENTRE :
Lionel X...
de nationalité Française, né le 05 Juin 1962 à PARIS 14ème (75014), Employé d'usine, demeurant...-19110 SARROUX
représenté par Me Carole DESBLE, avocat au barreau de TULLE
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 14/ 1639 du 12/ 06/ 2014 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de Limoges)
APPELANT d'un jugement rendu le 17 JANVIER 2014 par le TRIBUNAL D'INSTANCE DE TULLE
ET :
Nathalie X...
de nationalité Française, née le 08 Avril 1968 à L'ABBE (29), Sans emploi, demeurant ...-29730 GUILVINEC
représentée par Me Dominique VAL, avocat au barreau de CORREZE
CAISSE REGIONALE DE CREDIT MARITIME MUTUEL DE BRET AGNE NORMANDIE
dont le siège social est ZAC Atalante Champeaux 2- rue Pierre-Joseph Colin-35000 RENNES
représentée par Me Bruno GREZE, avocat au barreau de LIMOGES
INTIMEES
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Selon calendrier de procédure du Conseiller de la Mise en Etat, l'affaire a été fixée à l'audience du 28 Janvier 2015 pour plaidoirie avec arrêt rendu le 25 Février 2015. L'ordonnance de clôture a été rendue le 17 décembre 2014.
Conformément aux dispositions de l'article 786 du Code de Procédure Civile, Monsieur Jean-Claude SABRON, Président de chambre, magistrat rapporteur, assisté de Madame Elysabeth AZEVEDO, Greffier, a tenu seul l'audience au cours de laquelle il a été entendu en son rapport, les avocats de la cause sont intervenus au soutien des intérêts de leurs clients et ont donné leur accord à l'adoption de cette procédure
Après quoi, Monsieur Jean-Claude SABRON, Président de chambre, a donné avis aux parties que la décision serait rendue le 25 Février 2015 par mise à disposition au greffe de la cour, après en avoir délibéré conformément à la loi.
Au cours de ce délibéré, Monsieur Jean-Claude SABRON, a rendu compte à la Cour, composée de Monsieur Jean-Claude SABRON, Président de chambre, de Monsieur Didier BALUZE et Monsieur Gérard SOURY, Conseillers. A l'issue de leur délibéré commun, à la date fixée, l'arrêt dont la teneur suit a été mis à disposition au greffe.
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LA COUR
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Après acceptation d'une offre préalable du 18 décembre 2002 et par acte authentique du 26 août 2003, la CAISSE REGIONALE DE CREDIT MARITIME MUTUEL DE BRETAGNE NORMANDIE a consenti à M. Lionel X... et à son épouse, Madame Nathalie B..., un prêt de 75 000 ¿ remboursable sur 240 mois avec un taux nominal de 7 % et un TEG de 8, 230 % ; le montant des mensualités, fixes, était de 581, 47 ¿ hors assurance et, selon le plan d'amortissement, de 623, 47 ¿ assurance comprise.
Le remboursement de ce prêt était garanti par une inscription d'hypothèque conventionnelle prise sur un immeuble à usage d'habitation situé à SARROUX (Corrèze) appartenant en propre à M. X....
Par lettre en date du 19 juillet 2012, le CREDIT MARITIME a mis les emprunteurs en demeure de payer la somme de 3 740, 82 ¿ correspondant à 6 échéances mensuelles, outre les intérêts de retard (67, 44 ¿.).
Par lettre du 8 août 2012, elle a notifié aux emprunteurs la déchéance du terme, prononcée à la date du 7 août, et les a avisé de ce que sa créance s'élevait à la somme de 64 386, 81 ¿ totalisant les échéances impayées (4 364, 29 ¿), les intérêts de retard sur échéances impayées (162, 26 ¿) l'indemnité contractuelle de 5 % (3066 ¿) et le capital restant dû (56 793, 46 ¿).
Le 4 décembre 2012 la banque a mis M. et Madame X... en demeure de lui payer la dite somme avec intérêts de retard au taux contractuel de 11 % (le taux nominal de 7 % majoré de 4 points).
Par courrier du 19 février 2013, elle a accepté une proposition de remboursement partiel, à hauteur de la moitié du montant des échéances mensuelles, dans l'attente de la vente du bien qui constituait sa garantie et devrait permettre de solder l'encours.
M. X... a mis sa maison en vente le 9 février 2013 au prix de 250 000 ¿.
Par acte du 28 mai 2013, il a fait assigner LE CREDIT MARITIME MUTUEL devant le tribunal d''instance de TULLE pour obtenir sur le fondement des articles L 313-12 du code de la consommation et 1244-1 du code civil la suspension du remboursement du prêt, sans que les sommes reportées produisent des intérêts.
Par le même acte, il a appelé dans la procédure Madame Nathalie B... avec laquelle il était en instance de divorce, l'ordonnance de non-conciliation remontant au 5 octobre 2012.
Celle-ci a signifié des conclusions dans lesquelles elle demandait au tribunal de prononcer la déchéance des intérêts en application des dispositions de l'article L 311-10 du code de la consommation.
Le tribunal a par jugement du 17 janvier 2014 :
- débouté M. X... et Madame B... de leur demande principale d'obtention de délais ;
- condamné ces derniers à payer à la CAISSE REGIONALE DE CREDIT MARITIME MUTUEL DE BRETAGNE NORMANDIE la somme de 61 907, 63 ¿ représentant le montant de sa créance en principal après suppression de l'indemnité de résiliation, ce avec intérêts au taux légal à compter du jugement.
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M. Lionel X... a relevé appel de ce jugement par déclaration remise au greffe le 10 février 2014.
Dans ses dernières conclusions qui ont été déposées le 8 octobre 2014, il demande à la cour :
- de dire que l'offre de prêt du 18 décembre 2002 n'a pas été souscrite au titre d'un prêt personnel ;
- de constater qu'elle ne répond pas aux prescriptions du code de la consommation à défaut de préciser le montant de la mensualité avec assurance et en l'absence de mention du TEG sur les relevés périodiques reçus par l'emprunteur ;
- de confirmer le jugement en ce qu'il a prononcé la déchéance des intérêts mais de le réformer sur le calcul de la créance de la banque qui doit résulter de la différence entre le capital restant dû et le total des versements effectués au titre des 128 échéances qui ont été versées ;
- de constater que le capital restant dû, ainsi calculé, n'est que de 571, 84 ¿ ;
- de lui accorder un délai de deux ans pour s'acquitter du remboursement du prêt avec « suspension des échéances de prêt » pendant la même période, étant précisé que ces échéances ne produiront pas intérêt ;
- de condamner la CAISSE REGIONALE DE CREDIT MARITIME MUTUEL DE BRETAGNE NORMANDIE à lui verser une indemnité de 1 800 ¿ au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
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Dans ses dernières conclusions qui ont été déposées le 16 octobre 2014, Madame X... née B... demande à la cour :
- de dire que les dispositions du code de la consommation afférentes aux conditions de l'offre préalable sont également applicables aux crédits immobiliers au vu des articles L 312-7 et suivants du code de la consommation ;
- d'accueillir son appel incident et de prononcer la déchéance des intérêts avec toutes les conséquences qui résultent de cette sanction légale ;
- de constater que le montant du capital restant dû est de 571, 84 ¿ ;
- de constater que des démarches réelles de mise en vente du bien ont été effectuées, M. X... ayant signé le 31 juillet 2014 un mandat de vente au prix de 160 000 ¿ ;
- d'accorder une suspension des échéances de prêt pendant une durée de deux ans ;
- de dire que les remboursements devront s'imputer en priorité sur le capital restant dû qui s'élève en mai 2014 à la somme de 571, 84 ¿ ;
- de condamner la CAISSE REGIONALE DE CREDIT MARITIME MUTUEL DE BRETAGNE NORMANDIE à lui verser une indemnité de 1 500 ¿ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
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Dans ses dernières conclusions qui ont été déposées le 16 octobre 2014, la CAISSE REGIONALE DE CREDIT MARITIME MUTUEL DE BRETAGNE NORMANDIE demande à la cour :
- de constater que le prêt dont le montant excède la somme de 21 500 ¿ n'est pas soumis aux dispositions du code de la consommation et qu'en tout état de cause, les demandes des emprunteurs sont irrecevables par l'effet de la prescription quinquennale, l'offre préalable ayant été signée le 18 décembre 2012 ;
- de constater qu'au surplus, l'offre de prêt n'est entachée d'aucune irrégularité ;
- d'accueillir son appel incident et de fixer sa créance à la somme de 64 589, 90 ¿, compte arrêté au 20 juillet 2012, outre les intérêts de retard au taux contractuel de 11 % jusqu'à parfait paiement
-de condamner M. et Madame X... à lui verser une indemnité de 2 000 ¿ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
LES MOTIFS DE LA DECISION
Les emprunteurs ont cessé de régler les mensualités du prêt à la suite des difficultés économiques dans lesquelles les ont mis leur séparation et le fait que tous deux ont perdu leur emploi.
M. X... avait mis en vente le 9 février 2013 la maison lui appartenant et sur laquelle la banque bénéficie d'une hypothèque conventionnelle.
Il est vrai que ce prix était élevé mais on ne peut pas reprocher à un propriétaire endetté de vouloir tirer le meilleur parti de la vente de son bien ; cette estimation (250 000) avait été nue par un agent immobilier.
Aujourd'hui, le bien est mis en vente au prix de 160 000 ¿, ce depuis le 31 juillet 2014.
Il y a lieu de réformer le jugement en ce qu'il a rejeté la demande de report formée par M. X... et reprise par son épouse ; il sera accordé à ces derniers un report de l'exigibilité de leur dette d'une durée de deux ans, étant précisé que pendant ce délai de grâce les sommes dues ne produiront pas intérêt.
Le cours de ce délai doit toutefois rétroagir à la date du prononcé du jugement déféré, de telle sorte qu'il expirera le 17 janvier 2016.
La banque dispose d'un titre exécutoire dans la mesure où le prêt a été contracté par acte authentique.
Il y a lieu de statuer sur le calcul de la créance, les emprunteurs réclamant la déchéance des intérêts au motif que l'offre préalable du 18 décembre 2002 dont les mentions sont reprises dans l'acte authentique du 26 août 2003 ne serait pas conforme aux dispositions du code de la consommation.
Toutefois, le prêt en litige n'est pas soumis à ces dispositions dans la mesure où il s'agit d'un prêt personnel dont le montant est supérieur à 21 500 ¿.
Ce prêt n'a pas été souscrit pour l'acquisition d'un immeuble, ni même pour financer des travaux sur un immeuble.
Le bien sur lequel a été pris une hypothèque en garantie des obligations du prêt est un bien qui appartenait à M. X... depuis 1998, date de la donation que lui en avait fait ses parents.
Les emprunteurs ne sont dés lors pas en droit de réclamer la déchéance des intérêts.
La créance de la CAISSE REGIONALE DE CREDIT MARITIME MUTUEL DE BRETAGNE NORMANDIE s'établissait au 7 août 2012, date de la déchéance du terme, à la somme de 64 386, 01 ¿ qui doit être majorée des intérêts de retard au taux contractuel de 11 % pour la période du 4 décembre 2012, date de la mise en demeure, au 17 janvier 2014, date de leur suspension.
Le cours des intérêts reprendra à l'expiration du délai de grâce si l'intégralité de la dette n'a pas été acquittée.
La clause pénale de 5 % n'est pas manifestement excessive, de telle sorte que le jugement sera infirmé en ce qu'il l'a mise à néant.
Il n'y a pas lieu de faire application de l'article 700 du code de procédure civile au regard de la situation économique des emprunteurs.
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PAR CES MOTIFS
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LA COUR,
Statuant par arrêt contradictoire, mis à disposition au greffe, en dernier ressort et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Réforme le jugement entrepris et, statuant à nouveau.
Accorde à M. Lionel X... et Madame Nathalie B..., coemprunteurs, un délai de grâce de deux ans pour s'acquitter du solde dont ils sont redevables, après déchéance du terme, au titre du prêt que la CAISSE REGIONALE DE CREDIT MARITIME MUTUEL DE BRETAGNE NORMANDIE leur a consenti par acte notarié du 26 août 2003 qui vaut titre exécutoire.
Dit que le cours de ce délai doit rétroagir à la date du jugement déféré, soit le 17 janvier 2014, de telle sorte qu'il expirera le 17 janvier 2016.
Dit que pendant ce délai de grâce, les sommes dues ne produiront pas intérêt.
Fixe la créance de la CAISSE REGIONALE DE CREDIT MARITIME MUTUEL DE BRETAGNE NORMANDIE à la somme de 64 386, 01 ¿ selon compte arrêté au 7 août 2012, date de la déchéance du terme.
Dit que cette somme sera majorée des intérêts de retard au taux contractuel de 11 % pour la période du 4 décembre 2012, date de la mise en demeure, au 17 janvier 2014, date de période de suspension de l'obligation à paiement.
Dit que ces intérêts de retard recommenceront à courir à compter de l'expiration du délai de deux ans, soit à compter du 17 janvier 2016, sur les sommes qui resteront dues à cette date.
Dit n'y avoir lieu de faire application de l'article 700 du code de procédure civile.
Dit que les parties conserveront la charge des sommes qu'elles ont exposées au titre des dépens de première instance et d'appel.
LE GREFFIER, LE PRESIDENT,
Elysabeth AZEVEDO. Jean-Claude SABRON.