Cour de cassation, civile, Chambre civile 1, 18 décembre 2014, 14-11.085, Publié au bulletin
Cour de cassation - Chambre civile 1
- N° de pourvoi : 14-11.085
- ECLI:FR:CCASS:2014:C101535
- Publié au bulletin
- Solution : Rejet
- Président
- Mme Batut
Texte intégral
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur les deux moyens réunis, ci-après annexés :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 29 octobre 2013), que la société Dukan de Nitya, venant aux droits de la société JJ Holding, a conclu un contrat, lui donnant la jouissance d'une boutique à usage commercial, avec la société VR services ; que la première contestant la résiliation du contrat que la seconde lui avait notifiée, a mis en oeuvre la procédure d'arbitrage prévue au contrat, et désigné comme arbitre, sur la liste de quatre noms prévue par la convention d'arbitrage, le président de l'organisme Promotion pour les commerces spécialisés (Procos) qui a subdélégué M. X... ; qu'aux termes de deux sentences des 10 août et 24 septembre 2012, le tribunal arbitral a déclaré la société Dukan de Nitya irrecevable en ses demandes et l'a condamnée à verser à la société VR services une indemnité d'occupation jusqu'à libération des lieux ; que la société Dukan de Nitya a formé un recours en annulation des sentences pour composition irrégulière du tribunal arbitral ;
Attendu que la société VR services fait grief à l'arrêt d'annuler ces sentences, alors, selon les moyens :
1°/ que la partie qui, en connaissance de cause et sans motif légitime, s'abstient d'invoquer en temps utile une irrégularité devant le tribunal arbitral est réputée avoir renoncé à s'en prévaloir ; que la recevabilité du moyen d'annulation d'une sentence arbitrale s'apprécie uniquement au regard de la connaissance qu'avait ou qu'aurait pu avoir, lors de l'instance arbitrale, le demandeur des griefs invoqués à l'appui de son recours ; qu'en se fondant, pour admettre la recevabilité du moyen d'annulation tiré de la composition irrégulière du tribunal arbitral, sur la circonstance inopérante selon laquelle la déclaration d'indépendance de l'arbitre aurait été délibérément tronquée et réductrice, la cour d'appel a violé les articles 1466 et 1456, alinéa 2, du code de procédure civile ;
2°/ que le demandeur n'est pas recevable à invoquer devant la cour d'appel des griefs dont il avait ou pouvait avoir connaissance lors de l'instance arbitrale ; qu'il en va ainsi d'un grief reposant sur des faits qui, par leur caractère public ou notoire, pouvaient être connus dès la désignation de l'arbitre ; qu'en retenant, pour admettre la recevabilité du moyen tiré de la constitution irrégulière du tribunal arbitral que la société Dukan de Nitya n'avait aucune raison particulière de mettre en doute la bonne foi de l'arbitre et qu'il importait peu, à cet égard, que les informations relatives aux liens unissant l'arbitre à l'un des associés du cabinet d'avocats, conseil de l'autre partie, aient été parfaitement accessibles dès le début de la procédure arbitrale, la cour d'appel a violé les articles 1466 et 1456, alinéa 2, du code de procédure civile ;
3°/ que la loyauté procédurale impose, en matière d'arbitrage, que les parties soulèvent dès qu'elles ont connaissance ou pouvaient en avoir connaissance, les causes d'irrégularité de la procédure arbitrale ; qu'en retenant que le moyen d'annulation tiré de la composition irrégulière du tribunal arbitral était recevable, sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si, la société Dukan de Nitya ne s'était pas réservée de manière déloyale un moyen d'annulation dont elle n'avait fait état, de son propre aveu, qu'au regard de la teneur de la sentence rendue, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1466, 1464, alinéa 3 et 1492 2° du code de procédure civile, ensemble le principe de la loyauté des débats ;
4°/ que les juges doivent procéder à une analyse même sommaire des éléments sur lesquels ils fondent leur décision ; qu'en se bornant, pour retenir l'existence de liens professionnels entre M. Gilles Y... et l'arbitre, à énoncer qu'il ressortait des éléments produits aux débats que M. Gilles Y... était l'avocat du Procos, sans préciser les éléments sur lesquels elle fondait cette assertion, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
5°/ que devant la cour d'appel, la société Dukan de Nitya se prévalait de deux documents pour tenter d'établir les liens entre M. Y... et le Procos, d'une part, une page du site internet de l'Institut pour la Ville et le Commerce selon laquelle « Auprès de la fédération Procos, Gilles Y... intervient en tant qu'Avocat/ conseil/ Partenaire pour la défense du bail commercial ainsi que sur la propriété commerciale » et, d'autre part, la plaquette du Procos selon laquelle : « Toute l'actualité des baux commerciaux, assurée par notre avocat spécialisé en immobilier commercial Gilles Y... HB & associés » ; qu'à supposer qu'elle se soit fondée sur ces documents pour affirmer que M. Y... était l'avocat du Procos, quand ces documents se bornaient à faire état de la participation de M. Y..., en sa qualité d'avocat, à la veille juridique du Procos, la cour d'appel en a dénaturé les termes clairs et précis et a ainsi violé l'article 1134 du code civil ;
6°/ que l'annulation de la sentence pour constitution irrégulière du tribunal n'est encourue qu'autant que des informations recelées dans la déclaration d'indépendance de l'arbitre sont de nature à provoquer dans l'esprit des parties un doute raisonnable quant à son impartialité, ce que les juges du fond sont tenus de caractériser ; qu'en se bornant, pour annuler les sentences litigieuses, à faire état de divers liens professionnels unissant M. Gilles Y..., M. X... et le Procos, sans expliquer, autrement que par l'existence de ces liens elle-même, en quoi ceux-ci avaient pu créer un doute raisonnable quant à l'indépendance et à l'impartialité de l'arbitre, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1456 et 1492 2° du code de procédure civile ;
7°/ qu'en se fondant sur la circonstance, impropre à caractériser l'existence d'un doute raisonnable quant à l'impartialité et à l'indépendance de l'arbitre X..., tenant au caractère prétendument contraint de l'arbitrage, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1456 et 1492 2° du code de procédure civile ;
Mais attendu, d'abord, qu'après avoir constaté que, dans une déclaration d'indépendance, M. X... avait dit connaître M. Y..., associé du cabinet HB et associés, avocat de la société VR services, le rencontrant à l'occasion des conférences organisées par le Procos lorsqu'il présentait l'actualité jurisprudentielle, affirmé que cet avocat n'intervenait, en aucune manière, en qualité de conseil du Procos et que cette connaissance n'était pas de nature à mettre en cause son impartialité et son indépendance, l'arrêt relève qu'il ressort des éléments versés aux débats que M. Y... était secrétaire général de l'association l'Institut pour la ville et le commerce, siégeant à ce titre à son conseil d'administration aux côtés de M. X..., que celui-ci, délégué général de la fédération Procos, président délégué de l'Institut, était président de l'association Berenice pour la ville et le commerce dont le cabinet HB et associés était l'un des partenaires privilégiés et, enfin, que M. Y... intervenait auprès de la fédération Procos en tant qu'avocat et conseil pour la défense du bail commercial et la propriété commerciale ;
Qu'ayant retenu, en l'état de ces constatations, que la déclaration d'indépendance de l'arbitre revêtait un caractère délibérément tronqué et réducteur et qu'aucune circonstance spécifique ne justifiait de mettre en doute, dans l'esprit des parties, la sincérité de la déclaration, quand rien au regard des circonstances révélées ne leur imposait de procéder à des investigations particulières, la cour d'appel a décidé à bon droit, que, dès lors que des éléments importants manquaient dans la déclaration de l'arbitre, la société Dukan de Nitya n'avait pas renoncé à contester la régularité de la composition du tribunal arbitral ;
Attendu, ensuite, qu'ayant relevé, d'une part, que la société Dukan de Nitya avait dû choisir un arbitre sur une liste fermée limitée à quatre noms avec faculté de subdélégation réservée au président de l'organisme, d'autre part, que les liens professionnels étroits entre l'arbitre et l'avocat de la société VR services étaient de nature à créer dans l'esprit des parties un doute raisonnable quant à l'impartialité et l'indépendance de l'arbitre, la cour d'appel en a exactement déduit, hors toute dénaturation, que le tribunal arbitral avait été irrégulièrement composé ;
D'où il suit que les moyens ne peuvent être accueillis ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société VR services aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et la condamne à verser à la société Dukan de Nitya la somme de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-huit décembre deux mille quatorze.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt
Moyens produits par la SCP Delaporte, Briard et Trichet, avocat aux Conseils, pour la société VR services.
PREMIER MOYEN DE CASSATION
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir annulé la sentence arbitrale rendue entre les parties le 10 août 2012 et par voie de conséquence celle rendue entre les parties le 24 septembre 2012, après avoir admis la recevabilité du moyen d'annulation tiré de la composition irrégulière du tribunal arbitral ;
Aux motifs que « sur le moyen d'annulation pris de la composition irrégulière du tribunal arbitral (article 1492 2° du code de procédure civile), la société DUKAN DE NITYA soutient en premier lieu que n'ayant pas eu le choix de son arbitre et " ayant pris connaissance de la sentence tout à fait choquante rendue à son encontre ", avoir procédé à diverses recherches et s'être aperçue que l'arbitre, M. X..., entretenait par le biais de ses activités propres et de ses centres d'intérêt, des liens professionnels réguliers et étroits avec le cabinet HB et associés, un des deux conseils de la société VR SERVICES, et particulièrement son associé principal, Maître Gilles Y... ; qu'à cet égard, elle fait valoir que contrairement à ce qui était faussement affirmé dans la déclaration d'indépendance de l'arbitre, Maître Gilles Y... est l'avocat régulier du PROCOS et que M. X... a omis de mentionner leur collaboration étroite au sein de l'association L'Institut pour la Ville et le Commerce ainsi que les liens de HB et Associés avec l'association pour la ville et le commerce " ; qu'elle invoque en conséquence une situation de conflit d'intérêts, de dépendance ou de partialité entre l'arbitre et le conseil de VR SERVICES ; que la recourante fait valoir en second lieu que Mme Sophie CREPIN, présidente du tribunal arbitral, a méconnu l'obligation de révélation de l'article 1456 alinéa 2 du code de procédure civile, en ne procédant à aucune déclaration d'indépendance et d'impartialité ; que selon l'article 1466 du code de procédure civile opposé par VR SERVICES, " La partie qui en connaissance de cause et sans motif légitime, s'abstient d'invoquer en temps utile une irrégularité devant le tribunal arbitral est réputée avoir renoncé à s'en prévaloir " ; que l'article V1, 9 du contrat du 24 mai 2000 faisant la loi des parties dispose : " Tout différend survenant à l'occasion de l'interprétation ou de l'exécution du présent contrat sera soumis à l'arbitrage d'un tribunal arbitral (le « Tribunal arbitral ») dans les conditions définies ci-après ; que le Tribunal arbitral sera composé de trois arbitres ; que dans un délai maximum de quinze jours à compter de la Notification d'arbitrage, chacune des parties devra faire connaître à l'autre, les nom et qualité de l'arbitre désigné par ses soins sur la liste annexée au présent contrat (Annexe 6) pour faire partie du Tribunal arbitral ; que la décision du Tribunal arbitral sera définitive et contraignante pour les partis sans possibilité d'appel autre que celle prévue par les dispositions d'ordre public » ; que l'annexe 6 du contrat intitulé. " Liste des membres du Tribunal arbitral " prévoit que " pourront être désigné membre du Tribunal arbitral : le Président du PROCOS (Promotion pour les Commerces Spécialisés) ou toute personne désignée par lui, le Président de l'UFCC (Union Fédérale des Coopératives de Commerçants) ou toute personne désignée par lui, le Président de la CCI de Paris (Chambre de Commerce et d'Industrie de Paris) ou toute personne désignée par lui, le Président de la Chambre Syndicale de la Couture ou toute personne désignée par lui. " ; que DUKAN DE NITYA a désigné le Président du PROCOS qui s'est substitué M. Michel X... en qualité d'arbitre ; que celui-ci a procédé dans l'acte de mission à une déclaration d'indépendance en ces termes : " Monsieur Michel X... déclare connaître Maître Gilles Y..., Associé du Cabinet HB ET ASSOCIES, pour le rencontrer dans le cadre des conférences organisées par le PROCOS et dans le cadre desquelles Gilles Y... intervient pour présenter l'actualité jurisprudentielle. En aucune manière Gilles Y... n'intervient en qualité d'Avocat du PROCOS et Monsieur X... déclare que son impartialité et son indépendance ne sont pas de nature à être remises en cause par sa connaissance de Monsieur Gilles Y... " ; que la recourante produit notamment un procès-verbal de constat d'huissier sur internet du 11 février 2013, deux extraits du site de l'association l'Institut pour la Ville et le Commerce, la page internet du PROCOS et la plaquette de l'association BERENICE pour la Ville et le Commerce desquels il résulte que M. Gilles Y..., avocat, associé fondateur au Cabinet HB et Associés est aussi Secrétaire Général de l'Institut pour la Ville et le Commerce et siège à ce titre au conseil d'administration de cette association aux côtés de M. Michel X..., Délégué Général de la Fédération PROCOS et Président délégué de l'Institut ; qu'en outre celui-ci est également Président de l'association " BERENICE pour la ville et le commerce dont le cabinet HB et associés est l'un des " partenaires privilégiés " ; qu'enfin, Me Y... intervient auprès de la fédération PROCOS " en tant qu'Avocat/ conseil/ Partenaire pour la défense du bail commercial ainsi que sur la propriété commerciale " (pièce 49), la plaquette PROCOS précisant à cet égard : " Toute l'actualité des baux commerciaux, assurée par notre avocat spécialisé en immobilier commercial Gilles Y...- HB & Associés " ; que pour être recevable, le grief invoqué à l'encontre de la sentence doit avoir été soulevé, chaque fois que cela est possible, devant le tribunal arbitral lui-même ; qu'au regard du caractère délibérément tronqué et réducteur de la déclaration d'indépendance à laquelle s'est livré en l'espèce l'un des arbitres alors même que la société recourante n'avait aucune raison particulière de mettre en doute la bonne foi de celui-ci, peu important à cet égard la parfaite accessibilité dès le début de la procédure arbitrale des informations quant aux liens unissant l'arbitre à l'un des associés du cabinet d'avocats, conseil de l'autre partie, le moyen d'annulation pris de l'irrégularité de la composition du tribunal arbitral est recevable ; qu'il est de principe que l'arbitre doit révéler aux parties toute circonstance de nature à affecter son jugement et à provoquer dans l'esprit des parties un doute raisonnable sur ses qualités d'impartialité et d'indépendance qui sont l'essence même de la fonction arbitrale ; que bien que VR SERVICES s'en défende, faisant état à cet égard d'un abus de langage, il résulte des éléments produits que Maître Gilles Y..., associé fondateur du Cabinet HB et Associés, est l'avocat du PROCOS dont M. Michel X... est le délégué général ; que ce dernier est comme Maître Y... membre du conseil d'administration de l'Institut pour la Ville et le Commerce et président de l'association BERENICE pour la ville et le commerce dont le Cabinet HB et Associés est l'un des partenaires privilégiés, alors que ce Cabinet d'avocats était l'un des conseils de la société VR SERVICES dans l'arbitrage l'opposant à la société DUKAN DE NITYA ; que de surcroît, si Maître Frédéric Z... du Cabinet HB et Associés était le conseil de VR SERVICES lors des opérations d'arbitrage, la recourante établit que Maître Y... était l'avocat de VR SERVICES dans le cadre de procédures initiées contre elle en marge de la procédure d'arbitrage (assignation en vue d'obtenir la publication des comptes, assignation en liquidation judiciaire et assignation en dissolution judiciaire) et qu'elle le considérait comme l'un des conseils de VR SERVICES dans l'arbitrage lui-même (courrier du 26 janvier 2012 de son avocat Me Marcel A...) ; que les liens professionnels étroits entre Maître Y..., avocat du cabinet HB et Associés et M. X..., désigné comme arbitre par le président du PROCOS d'une part ainsi qu'entre le Cabinet HB et Associés, avocat de VR SERVICES et le PROCOS d'autre part, alors surtout que le choix du président du PROCOS par DUKAN DE NITYA s'est exercé dans un cadre contraint, s'agissant d'un arbitrage fermé limité à une liste de quatre noms, avec de surcroît une faculté de subdélégation réservé au président de l'organisme désigné, étaient de nature à créer dans l'esprit des parties un doute raisonnable quant à l'impartialité de cet arbitre et à son indépendance ; qu'il convient en conséquence, sans qu'il y ait lieu d'examiner les autres moyens, d'annuler la sentence rendue le 10 août 2012 et par voie de conséquence celle rendue sur requête en omission matérielle le 24 septembre suivant » ;
Alors, d'une part, que la partie qui, en connaissance de cause et sans motif légitime, s'abstient d'invoquer en temps utile une irrégularité devant le tribunal arbitral est réputée avoir renoncé à s'en prévaloir ; que la recevabilité du moyen d'annulation d'une sentence arbitrale s'apprécie uniquement au regard de la connaissance qu'avait ou qu'aurait pu avoir, lors de l'instance arbitrale, le demandeur des griefs invoqués à l'appui de son recours ; qu'en se fondant, pour admettre la recevabilité du moyen d'annulation tiré de la composition irrégulière du tribunal arbitral, sur la circonstance inopérante selon laquelle la déclaration d'indépendance de l'arbitre aurait été délibérément tronquée et réductrice, la cour d'appel a violé les articles 1466 et 1456 alinéa 2 du code de procédure civile ;
Alors d'autre part que, le demandeur n'est pas recevable à invoquer devant la cour d'appel des griefs dont il avait ou pouvait avoir connaissance lors de l'instance arbitrale ; qu'il en va ainsi d'un grief reposant sur des faits qui, par leur caractère public ou notoire, pouvaient être connus dès la désignation de l'arbitre ; qu'en retenant, pour admettre la recevabilité du moyen tiré de la constitution irrégulière du tribunal arbitral que la société DUKAN DE NITYA n'avait aucune raison particulière de mettre en doute la bonne foi de l'arbitre et qu'il importait peu, à cet égard, que les informations relatives aux liens unissant l'arbitre à l'un des associés du cabinet d'avocats, conseil de l'autre partie, aient été parfaitement accessibles dès le début de la procédure arbitrale, la cour d'appel a violé les articles 1466 et 1456 alinéa 2 du code de procédure civile ;
Alors, enfin, que la loyauté procédurale impose, en matière d'arbitrage, que les parties soulèvent dès qu'elles ont connaissance ou pouvaient en avoir connaissance, les causes d'irrégularité de la procédure arbitrale ; qu'en retenant que le moyen d'annulation tiré de la composition irrégulière du tribunal arbitral était recevable, sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si, la société DUKAN DE NITYA ne s'était pas réservée de manière déloyale un moyen d'annulation dont elle n'avait fait état, de son propre aveu, qu'au regard de la teneur de la sentence rendue, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1466, 1464 al 3 et 1492 2° du code de procédure civile, ensemble le principe de la loyauté des débats.
SECOND MOYEN DE CASSATION (subsidiaire)
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir annulé la sentence arbitrale rendue entre les parties le 10 août 2012 et par voie de conséquence celle rendue entre les parties le 24 septembre 2012 ;
Aux motifs que « sur le moyen d'annulation pris de la composition irrégulière du tribunal arbitral (article 1492 2° du code de procédure civile), la société DUKAN DE NITYA soutient en premier lieu que n'ayant pas eu le choix de son arbitre et " ayant pris connaissance de la sentence tout à fait choquante rendue à son encontre ", avoir procédé à diverses recherches et s'être aperçue que l'arbitre, M. X..., entretenait par le biais de ses activités propres et de ses centres d'intérêt, des liens professionnels réguliers et étroits avec le cabinet HB et associés, un des deux conseils de la société VR SERVICES, et particulièrement son associé principal, Maître Gilles Y... ; qu'à cet égard, elle fait valoir que contrairement à ce qui était faussement affirmé dans la déclaration d'indépendance de l'arbitre, Maître Gilles Y... est l'avocat régulier du PROCOS et que M. X... a omis de mentionner leur collaboration étroite au sein de l'association L'Institut pour la Ville et le Commerce ainsi que les liens de HB et Associés avec l'association pour la ville et le commerce " ; qu'elle invoque en conséquence une situation de conflit d'intérêts, de dépendance ou de partialité entre l'arbitre et le conseil de VR SERVICES ; que la recourante fait valoir en second lieu que Mme Sophie CREPIN, présidente du tribunal arbitral, a méconnu l'obligation de révélation de l'article 1456 alinéa 2 du code de procédure civile, en ne procédant à aucune déclaration d'indépendance et d'impartialité ; que selon l'article 1466 du code de procédure civile opposé par VR SERVICES, " La partie qui en connaissance de cause et sans motif légitime, s'abstient d'invoquer en temps utile une irrégularité devant le tribunal arbitral est réputée avoir renoncé à s'en prévaloir " ; que l'article VI, 9 du contrat du 24 mai 2000 faisant la loi des parties dispose : " Tout différend survenant à l'occasion de l'interprétation ou de l'exécution du présent contrat sera soumis à l'arbitrage d'un tribunal arbitral (le « Tribunal arbitral ») dans les conditions définies ci-après ; que le Tribunal arbitral sera composé de trois arbitres ; que dans un délai maximum de quinze jours à compter de la Notification d'arbitrage, chacune des parties devra faire connaître à l'autre, les nom et qualité de l'arbitre désigné par ses soins sur la liste annexée au présent contrat (Annexe 6) pour faire partie du Tribunal arbitral ; que la décision du Tribunal arbitral sera définitive et contraignante pour les parties sans possibilité d'appel autre que celle prévue par les dispositions d'ordre public » ; que l'annexe 6 du contrat intitulé. " Liste des membres du Tribunal arbitral " prévoit que " pourront être désigné membre du Tribunal arbitral : le Président du PROCOS (Promotion pour les Commerces Spécialisés) ou toute personne désignée par lui, le Président de l'UFCC (Union Fédérale des Coopératives de Commerçants) ou toute personne désignée par lui, le Président de la CCI de Paris (Chambre de Commerce et d'Industrie de Paris) ou toute personne désignée par lui, le Président de la Chambre Syndicale de la Couture ou toute personne désignée par lui. " ; que DUKAN DE NITYA a désigné le Président du PROCOS qui s'est substitué M. Michel X... en qualité d'arbitre ; que celui-ci a procédé dans l'acte de mission à une déclaration d'indépendance en ces termes : " Monsieur Michel X... déclare connaître Maître Gilles Y..., Associé du Cabinet HB ET ASSOCIES, pour le rencontrer dans le cadre des conférences organisées par le PROCOS et dans le cadre desquelles Gilles Y... intervient pour présenter l'actualité jurisprudentielle. En aucune manière Gilles Y... n'intervient en qualité d'Avocat du PROCOS et Monsieur X... déclare que son impartialité et son indépendance ne sont pas de nature à être remises en cause par sa connaissance de Monsieur Gilles Y... " ; que la recourante produit notamment un procès-verbal de constat d'huissier sur internet du 11 février 2013, deux extraits du site de l'association l'Institut pour la Ville et le Commerce, la page internet du PROCOS et la plaquette de l'association BERENICE pour la Ville et le Commerce desquels il résulte que M. Gilles Y..., avocat, associé fondateur au Cabinet HB et Associés est aussi Secrétaire Général de l'Institut pour la Ville et le Commerce et siège à ce titre au conseil d'administration de cette association aux côtés de M. Michel X..., Délégué Général de la Fédération PROCOS et Président délégué de l'Institut ; qu'en outre celui-ci est également Président de l'association " BERENICE pour la ville et le commerce dont le cabinet HB et associés est l'un des " partenaires privilégiés " ; qu'enfin, Me Y... intervient auprès de la fédération PROCOS " en tant qu'Avocat/ conseil/ Partenaire pour la défense du bail commercial ainsi que sur la propriété commerciale " (pièce 49), la plaquette PROCOS précisant à cet égard : " Toute l'actualité des baux commerciaux, assurée par notre avocat spécialisé en immobilier commercial Gilles Y...- HB & Associés " ; que pour être recevable, le grief invoqué à l'encontre de la sentence doit avoir été soulevé, chaque fois que cela est possible, devant le tribunal arbitral lui-même ; qu'au regard du caractère délibérément tronqué et réducteur de la déclaration d'indépendance à laquelle s'est livré en l'espèce l'un des arbitres alors même que la société recourante n'avait aucune raison particulière de mettre en doute la bonne foi de celui-ci, peu important à cet égard la parfaite accessibilité dès le début de la procédure arbitrale des informations quant aux liens unissant l'arbitre à l'un des associés du cabinet d'avocats, conseil de l'autre partie, le moyen d'annulation pris de l'irrégularité de la composition du tribunal arbitral est recevable ; qu'il est de principe que l'arbitre doit révéler aux parties toute circonstance de nature à affecter son jugement et à provoquer dans l'esprit des parties un doute raisonnable sur ses qualités d'impartialité et d'indépendance qui sont l'essence même de la fonction arbitrale ; que bien que VR SERVICES s'en défende, faisant état à cet égard d'un abus de langage, il résulte des éléments produits que Maître Gilles Y..., associé fondateur du Cabinet HB et Associés, est l'avocat du PROCOS dont M. Michel X... est le délégué général ; que ce dernier est comme Maître Y... membre du conseil d'administration de l'Institut pour la Ville et le Commerce et président de l'association BERENICE pour la ville et le commerce dont le Cabinet HB et Associés est l'un des partenaires privilégiés, alors que ce Cabinet d'avocats était l'un des conseils de la société VR SERVICES dans l'arbitrage l'opposant à la société DUKAN DE NITYA ; que de surcroît, si Maître Frédéric Z... du Cabinet HB et Associés était le conseil de VR SERVICES lors des opérations d'arbitrage, la recourante établit que Maître Y... était l'avocat de VR SERVICES dans le cadre de procédures initiées contre elle en marge de la procédure d'arbitrage (assignation en vue d'obtenir la publication des comptes, assignation en liquidation judiciaire et assignation en dissolution judiciaire) et qu'elle le considérait comme l'un des conseils de VR SERVICES dans l'arbitrage lui-même (courrier du 26 janvier 2012 de son avocat Me Marcel A...) ; que les liens professionnels étroits entre Maître Y..., avocat du cabinet HB et Associés et M. X..., désigné comme arbitre par le président du PROCOS d'une part ainsi qu'entre le Cabinet HB et Associés, avocat de VR SERVICES et le PROCOS d'autre part, alors surtout que le choix du président du PROCOS par DUKAN DE NITYA s'est exercé dans un cadre contraint, s'agissant d'un arbitrage fermé limité à une liste de quatre noms, avec de surcroît une faculté de subdélégation réservé au président de l'organisme désigné, étaient de nature à créer dans l'esprit des parties un doute raisonnable quant à l'impartialité de cet arbitre et à son indépendance ; qu'il convient en conséquence, sans qu'il y ait lieu d'examiner les autres moyens, d'annuler la sentence rendue le 10 août 2012 et par voie de conséquence celle rendue sur requête en omission matérielle le 24 septembre suivant »
Alors, d'une part, que les juges doivent procéder à une analyse même sommaire des éléments sur lesquels ils fondent leur décision ; qu'en se bornant, pour retenir l'existence de liens professionnels entre Monsieur Gilles Y... et l'arbitre, à énoncer qu'il ressortait des éléments produits aux débats que Monsieur Gilles Y... était l'avocat du PROCOS, sans préciser les éléments sur lesquels elle fondait cette assertion, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
Alors, subsidiairement, que devant la cour d'appel, la société DUKAN DE NITYA se prévalait de deux documents pour tenter d'établir les liens entre Maître Y... et le Procos, d'une part, une page du site internet de l'Institut pour la Ville et le Commerce selon laquelle « Auprès de la fédération PROCOS, Gilles Y... intervient en tant qu'Avocat/ conseil/ Partenaire pour la défense du bail commercial ainsi que sur la propriété commerciale » et, d'autre part, la plaquette du PROCOS selon laquelle : « Toute l'actualité des baux commerciaux, assurée par notre avocat spécialisé en immobilier commercial Gilles Y...- HB & Associés » ; qu'à supposer qu'elle se soit fondée sur ces documents pour affirmer que Maître Y... était l'avocat du PROCOS, quand ces documents se bornaient à faire état de la participation de Maître Y..., en sa qualité d'avocat, à la veille juridique du PROCOS, la cour d'appel en a dénaturé les termes clairs et précis et a ainsi violé l'article 1134 du code civil ;
Alors, en toute hypothèse que, l'annulation de la sentence pour constitution irrégulière du tribunal n'est encourue qu'autant que des informations recelées dans la déclaration d'indépendance de l'arbitre sont de nature à provoquer dans l'esprit des parties un doute raisonnable quant à son impartialité, ce que les juges du fond sont tenus de caractériser ; qu'en se bornant, pour annuler les sentences litigieuses, à faire état de divers liens professionnels unissant Maître Gilles Y..., Monsieur X... et le PROCOS, sans expliquer, autrement que par l'existence de ces liens elle-même, en quoi ceux-ci avaient pu créer un doute raisonnable quant à l'indépendance et à l'impartialité de l'arbitre, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1456 et 1492 2° du code de procédure civile.
Alors enfin qu'en se fondant sur la circonstance, impropre à caractériser l'existence d'un doute raisonnable quant à l'impartialité et à l'indépendance de l'arbitre X..., tenant au caractère prétendument contraint de l'arbitrage, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1456 et 1492 2° du code de procédure civile.