Cour de cassation, criminelle, Chambre criminelle, 17 décembre 2014, 13-87.881, Inédit

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par :


- Mme Dounia X...,


contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de BORDEAUX, en date du 29 octobre 2013, qui, dans l'information suivie contre M. Ahmed X... des chefs d'infractions à la législation sur les stupéfiants, association de malfaiteurs, blanchiment et non-justification de ressources, a prononcé sur la saisie de sommes inscrites au crédit de ses comptes bancaires ;

La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 19 novembre 2014 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Guérin, président, M. Azema, conseiller rapporteur, Mme Nocquet, conseiller de la chambre ;

Greffier de chambre : Mme Hervé ;

Sur le rapport de M. le conseiller référendaire AZEMA, les observations de la société civile professionnelle BOUZIDI et BOUHANNA, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général BONNET ;

Vu le mémoire produit ;

Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 131-21, 132-71, 222-36, 222-37, 222-40, 222-41, 222-43, 222-44, 222-45, 222-47, 222-48, 222-49, 222-50, 222-51, 450-1, 450-3, 450-5, 321-6, 321-6-1, 321-10 et 321-10-1 du code pénal, L5132-7, L. 5132-8, R. 5132-74, R. 5132-77, R. 5132-78, R. 5132-84, R. 5132-85 et R. 5132-86 du code de la santé publique, 186, 194 et suivants, 206, 706-141 à 706-147, 706-148, 706-153 et 706-154, de l'article préliminaire du code de procédure pénale, de l'article 1er du protocole additionnel à la Convention européenne des droits de l'homme, 591, 592 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, excès de pouvoir et manque de base légale ;

" en ce que l'arrêt attaqué a confirmé les ordonnances du magistrat instructeur du 18 avril 2013 portant maintien de la saisie du solde créditeur du compte épargne Livret A n° 0335250617V55 et du 19 avril 2013 portant saisie du solde créditeur du compte PEL Banque populaire Centre Atlantique n° 72080148978 30, tous comptes détenus par Mme X... ;

" aux motifs que, par ordonnance du 18 avril 2013, dont appel, le magistrat instructeur a ordonné le maintien de la saisie du solde créditeur du compte épargne livret A n° 0335250617V55 appartenant à Mme X... (solde créditeur de 17 361, 30 euros), saisie qui avait été effectuée selon procès-verbal de saisie du 8 avril 2013, après autorisation du magistrat instructeur ; que, par ordonnance du 19 avril 2013, dont appel, le magistrat instructeur a ordonné la saisie du solde créditeur du compte PEL Banque populaire Centre Atlantique n° 72080148978 30 appartenant à Mme X... (solde créditeur de 26 123, 12 euros) ; qu'aux termes de l'article 706-153 du code de procédure pénale, le juge d'instruction peut autoriser par ordonnance motivée la saisie des biens ou droits incorporels dont la confiscation est prévue par l'article 131-21 du code pénal ; que l'article 706-154 du même code permet par ailleurs au juge d'instruction d'autoriser un officier de police judiciaire à procéder à la saisie d'une somme d'argent versée sur un compte bancaire, le magistrat instructeur devant alors se prononcer par ordonnance motivée sur le maintien ou la mainlevée de cette saisie dans un délai de dix jours à compter de sa réalisation ; que les procès-verbaux de saisie établis par les enquêteurs font mention de l'autorisation du magistrat instructeur ; que ce même magistrat a par ailleurs statué dans les dix jours des saisies, soit le 18 avril 2013, de sorte que les conditions formelles prévues par les articles susvisés ont bien été respectées s'agissant de l'ordonnance de maintien de saisie ; que l'ordonnance de maintien de la saisie pénale vise les articles 131-21-9 du code pénal et les articles 706-141 à 706-147, 706-141-1, 706-153 et 706-154 du code de procédure pénale ; que le visa de l'article 131-21-9 indique que le juge s'est situé dans la cadre d'une saisie en valeur ce que confirme également sa motivation " que les sommes inscrites sur le compte bancaire encourent donc la confiscation en valeur conformément à l'article 131-21 alinéa 9 du code de procédure pénale " ; que le visa de l'article 706-141-1 du code de procédure pénale valide le choix de ce fondement juridique ; que, cependant, l'examen exhaustif de la motivation du juge dans cette ordonnance révèle que celui-ci s'est également fondé sur le fait que les éléments de l'affaire permettaient de soupçonner que les sommes en cause sont le produit du trafic de stupéfiants pour lequel M. Ahmed X... est mis en examen ; qu'il convient également de relever que le magistrat instructeur a été saisi par réquisitoire supplétif le 11 avril 2013 de faits de blanchiment par placement, dissimulation ou conversion du produit d'un délit de trafic de stupéfiants et de faits de non-justification de ressources par une personne en relation habituelle avec l'auteur de crimes ou délits de trafic ou usage de stupéfiants ; qu'aux termes des dispositions combinées des articles 131-21 du code pénal, d'une part, 222-44, 222-49, 321-9 et 321-10-1 du code pénal, fixant les peines complémentaires applicables aux délits susvisés, d'autre part, la confiscation de la somme saisie apparaît potentiellement encourue à double titre :- en tant qu'élément du patrimoine de l'appelante,- en tant que produit des infractions de trafic de stupéfiants et de blanchiment dont est saisi le magistrat instructeur, sous réserve que soit apportée la démonstration de la provenance frauduleuse de la dite somme ; que cependant les saisies de patrimoine requièrent, sans exception, que soit recueilli au préalable l'avis du ministère public, en application de l'article 706-148 du code de procédure pénale, de sorte que ce fondement ne peut être substitué à celui retenu par le juge puisque le magistrat instructeur a statué sur le maintien de la saisie sans solliciter l'avis du ministère public ; qu'observation faite, à régime juridique et procédural constant, la cour peut opter entre le fondement juridique de la saisie en valeur (131-21-9) et celui de la saisie du produit direct de l'infraction (131-21-3), il convient de rechercher s'il résulte de l'information des éléments permettant de retenir que ces sommes sont susceptibles de provenir des faits de trafic de stupéfiants, de blanchiment et de non-justification de ressources dont est saisi le magistrat instructeur ; qu'en ce qui concerne l'ordonnance de saisie du 19 avril 2013, elle est rendue au visa des articles 131-21, 131-21, alinéa 6, 131-21, alinéa 5, 131-21, alinéa 9, du code pénal, 222-49 du même code, puis des articles 706-141 à 706-147, 706-141- l, 706-48, 706-49, 706-153, 706-154 et 706-156 du code de procédure pénale ; que, rendue après avis du même jour du ministère public, elle précise que les sommes inscrites sur le compte bancaire encourent donc la confiscation en valeur, conformément à l'article 131-21, alinéa 5, du code pénal ; que le texte ainsi visé n'étant pas en concordance avec la saisie en valeur qui renvoie à l'article 131-21, alinéa 9, du code pénal, ajouté à l'examen de la motivation du juge dans cette ordonnance qui révèle que celui-ci s'est également fondé sur le fait que les éléments de l'affaire permettaient de soupçonner que les sommes en cause sont le produit du trafic de stupéfiants pour lequel M. Ahmed X... est mis en examen, permet également à la cour d'analyser le bien fondé de cette saisie sur le fondement du produit direct ou indirect de l'infraction ; qu'il sera relevé à cet égard que la famille X... est impliquée dans un trafic de stupéfiants et plus précisément dans l'importation de résine de cannabis depuis le Maroc ; qu'au domicile familial 54 château du Gua à Ambarès et Lagrave, lors de la perquisition, le chien spécialisé en recherche de stupéfiants a marqué en différents points de la maison et dans le véhicule ; que trois plaques de résine de cannabis ont été découvertes dans un salon, une autre plaque dans un deuxième salon c'est-à-dire dans des parties communes à l'ensemble de la famille ; que, dissimulée en différents endroits de la maison, a été découverte la somme globale de 22 010 euros, une partie de cet argent étant dissimulée au même endroit que les 3 plaques de résine de cannabis ; que les enquêteurs ont également découvert de très nombreux téléphones ou supports de cartes téléphoniques, un brouilleur de GSM et un pistolet automatique et ses cartouches, ainsi qu'une dizaine de boîtes de chaussures de luxe et une centaine de vêtements de marque ; que quatre caméras de surveillance orientées vers l'extérieur avaient été installées sur le toit de la maison ; que le chien spécialisé en recherches de stupéfiants a fortement marqué le véhicule Twingo immatriculé ...au nom de M. Y...stationné devant le domicile familial, en différents endroits du véhicule et notamment au niveau de la trappe d'essence ou des garnitures latérales dont les enjoliveurs de visserie sont absents ; que M. Ahmed X... a été interpellé le 26 août 2007 en Espagne alors qu'il se trouvait dans un véhicule chargé de plus de 151 kilogrammes de résine de cannabis et serait selon lui sorti de prison en mai 2010 ; qu'il reconnaît lui-même que tous ses frères ont été interpellés en flagrant délit de transport de stupéfiants ; que les investigations diligentées par les enquêteurs, corroborées par l'étude de son passeport, mettent en évidence sur les années 2011, 2012 et 2013 de nombreux voyages au Maroc et deux voyages en Thaïlande, dont il a déclaré qu'ils avaient été pour partie financés par son frère Karim et ses parents ; que, le 26 août 2010, les parents du mis en examen, M. Azzouz et Mme Sabah X... et leur fils Tarek ont été interpellés à bord du véhicule Renault Espace immatriculé au nom de M. Azzouz X... avec plus de 31 kilogrammes de résine de cannabis ; que le frère du mis en examen, M. Hicham X..., est actuellement en semi-liberté en Espagne suite à une condamnation pour transport de stupéfiants ; que, selon son père qui se trouvait avec lui lors de l'interpellation en 2011, ils transportaient à bord de sa voiture 25 kilogrammes de résine de cannabis ; que son autre frère, M. Karim X..., a déjà été condamné en France ou en Espagne pour des infractions liées au trafic de stupéfiants ; qu'il a notamment été arrêté le 1er janvier 2010 à Algesiras à bord d'un véhicule Renault Espace immatriculé au nom du père, M. Azzouz X... ; que son autre frère, M. Youcef X..., est actuellement en détention en Espagne suite à son interpellation le 30 mars 2012 à bord du véhicule Mercedes immatriculé au nom du père avec plus de 28 kilogrammes de résine de cannabis ; que sa soeur, Mme X..., l'appelante, a été interpellée le 16 mars 2013 à bord du véhicule Mercedes immatriculée au nom de sa soeur Hanae, qui n'a pas le permis de conduire, à Ceuta, en Espagne, alors qu'elle ramenait plus de 18 kilogrammes de résine de cannabis dissimulés dans une cache aménagée dans le coffre ; que le frère mineur du mis en examen, Tarek, était également dans ce véhicule, ainsi que M. Kevin B...; qu'il ressort des surveillances téléphoniques et du témoignage du garagiste que M. Azzouz X..., le père, était informé de ce qu'un véhicule Twingo leur appartenant était aménagé d'une cache, le garagiste ayant même repéré la présence de résine sur les injecteurs ; qu'il ressort de l'audition du père qu'il est parfaitement au fait de toutes les condamnations de ses enfants ; qu'il est encore établi que les frères X... sont en relation habituelle avec M. Mustapha C...lequel, en fuite au Maroc depuis plusieurs mois, est mis en cause de façon très circonstanciée tant par les surveillances téléphoniques que par les témoignages pour être l'un des principaux importateurs/ revendeurs de résine de cannabis sur Libourne ; qu'aucun des membres de la famille X... ne justifie d'un emploi et de revenus autres que les minima sociaux, à l'exception de M. Azzouz X... et de son épouse, qui ont déclaré 36 300 euros de salaires et pensions pour l'année 2011 et 26 300 euros pour 2010, alors même qu'ils hébergent quatre de leurs enfants dépourvus de ressources ; qu'en ce qui concerne Mme X... à titre personnel, le magistrat instructeur a relevé à juste titre qu'elle a été interpellée le 16 mars 2013 en Espagne alors qu'elle se trouvait à bord d'un véhicule transportant 18 kilogrammes de résine de cannabis que c'est dans un salon du domicile familial et donc en un endroit où elle avait nécessairement accès que des sommes d'argent et de la résine de cannabis ont été découverts ; que plusieurs de ses frères et même ses parents ont été arrêtés année après année alors qu'ils se trouvaient à bord de véhicules chargés de résine de cannabis ; qu'un de ses frères est encore en détention en Espagne pour ce motif, un autre en semi liberté qu'il paraît dès lors suffisamment établi que Mme X... ne peut ignorer les activités des membres de sa famille en matière de trafic de stupéfiants et qu'elle est en relation habituelle avec des personnes se livrant à la commission de crimes ou de délits punis d'au moins cinq ans d'emprisonnement leur procurant un profit direct ou indirect au sens des articles 321-6 et 321-6-1 du code pénal ; que son interpellation du 16 mars 2013 démontre qu'elle participe elle même à ce trafic ; qu'il peut en être déduit que Mme X... ne peut ignorer les activités des membres de sa famille en matière de trafic de stupéfiants et qu'elle est en relation habituelle avec des personnes se livrant à la commission de crimes ou de délits punis d'au moins cinq ans d'emprisonnement leur procurant un profit direct ou indirect au sens des articles 321-6 et 321-6-1 du code pénal ; qu'au demeurant, il résulte de l'ordonnance de saisie du 19 avril 2013 que, l'origine des fonds figurant au crédit de ses comptes bancaires n'étant pas justifiée, l'intéressée doit être convoquée pour un interrogatoire de première comparution en vue de sa mise en examen notamment des chefs de non-justification de ressources et blanchiment des sommes provenant d'un trafic de stupéfiants ; que le conseil de Mme X... soutient qu'aucun dépôt d'espèces n'a été constaté sur les différents comptes ; que, cependant, il ne produit aucun relevé de compte permettant de vérifier ce point ; qu'il doit être noté que Mme X... ne justifie que d'une activité professionnelle irrégulière ; que les certificats de travail produits montrent qu'elle a enchaîné un certain nombre de CDD en qualité d'aide à domicile, tâches ménagères et d'agent hospitalier contractuel au cours des années de 2002 à 2006 puis en cette dernière qualité depuis cette date ; que les bulletins de salaire au titre de ces dernières années montrent un revenu mensuel de 1 200 euros ; qu'il est justifié qu'elle a déclaré la somme de 11 299, 89 euros au titre de l'année 2012 ; qu'il s'ensuit que la modicité de ces revenus est sans commune mesure avec les soldes créditeurs des deux comptes faisant l'objet des saisies maintenues et ordonnées, la perception alléguée et justifiée d'une somme de 1 124, 53 euros au titre d'un sinistre le 3 décembre 2012 étant sans effet sur cette appréciation ; que ces éléments imposent à la cour la confirmation des ordonnances entreprises ordonnant le maintien des saisies et la saisie de soldes créditeurs présumés être le produit direct ou indirect des infractions de non-justifications de ressources et blanchiment de sommes provenant d'un trafic de stupéfiants pour lequel M. Ahmed X... est mis en examen, qu'observation faite la perquisition au domicile familial a en particulier permis la découverte de nombreuses feuilles de comptes à hauteurs de plusieurs dizaines de milliers d'euros, faisant notamment apparaître " Weston 20 700, GRO 27 800, Fat 33 000 + 1 250, Nasab 17 000, MOUS 20 000, 11 200 euros Youcef, 11 400 euros Brice, 16 900 euros Adile et 5 000 euros Rollo " ;

" 1°) alors qu'il appartient à l'auteur d'une saisie pénale opérée sur le solde créditeur d'un compte bancaire de préciser et de justifier du fondement légal de la saisie opérée ; qu'en retenant successivement que, si le visa de l'article 131-21-9 du code pénal dans l'ordonnance de maintien de la saisie du solde créditeur du compte épargne Livret A n° 0335250617V55 indique que le juge se serait situé dans le cadre d'une saisie en valeur, ce que confirment également la motivation de sa décision ainsi que le visa de l'article 706-141-1 du code de procédure pénale qui « valide le choix de ce fondement juridique », cependant, « l'examen exhaustif de la motivation du juge dans cette ordonnance révèle que celui-ci s'est également fondé sur le fait que les éléments de l'affaire permettaient de soupçonner que les sommes en cause sont le produit du trafic de stupéfiants pour lequel M. Ahmed X... est mis en examen » et encore que le magistrat instructeur a statué en l'espèce sur le maintien de la saisie sans solliciter l'avis du ministère public et ce, en méconnaissance des exigences de l'article 706-148 du code de procédure pénale applicable aux saisies de patrimoine ce qui exclut que la confiscation des sommes saisies ait été encourue en tant qu'élément du patrimoine de l'exposante et enfin qu'« à régime juridique et procédural constant, la cour peut opter entre le fondement juridique de la saisie en valeur (131-21-9) et celui de la saisie du produit direct de l'infraction (131-21-3) », justifiant qu'il soit recherché s'il résulte de l'information des éléments permettant de retenir que ces sommes sont susceptibles de provenir des faits de trafic de stupéfiants, de blanchiment et de non-justification de ressources dont est saisi le magistrat instructeur, la chambre de l'instruction n'a pas tiré les conséquences légales qui s'en évinçaient selon lesquelles, l'ordonnance maintenant la saisie litigieuse laissait totalement incertains le fondement juridique et la base légale de ces saisies et a violé les textes susvisés ;

" 2°) alors qu'il appartient à l'auteur d'une saisie pénale opérée sur le solde créditeur d'un compte bancaire de préciser et de justifier du fondement légal de la saisie opérée ; qu'en retenant successivement que, si le visa de l'article 131-21-9 du code pénal dans l'ordonnance de maintien de la saisie du solde créditeur du compte épargne Livret A n° 0335250617V55 indique que le juge se serait situé dans le cadre d'une saisie en valeur, ce que confirment également la motivation de sa décision ainsi que le visa de l'article 706-141-1 du code de procédure pénale qui « valide le choix de ce fondement juridique », cependant, « l'examen exhaustif de la motivation du juge dans cette ordonnance révèle que celui-ci s'est également fondé sur le fait que les éléments de l'affaire permettaient de soupçonner que les sommes en cause sont le produit du trafic de stupéfiants pour lequel M. Ahmed X... est mis en examen » et encore que le magistrat instructeur a statué en l'espèce sur le maintien de la saisie sans solliciter l'avis du ministère public et ce, en méconnaissance des exigences de l'article 706-148 du code de procédure pénale applicable aux saisies de patrimoine ce qui exclut que la confiscation des sommes saisies ait été encourue en tant qu'élément du patrimoine de l'exposante et enfin qu'« à régime juridique et procédural constant, la cour peut opter entre le fondement juridique de la saisie en valeur (131-21-9) et celui de la saisie du produit direct de l'infraction (131-21-3) », justifiant qu'il soit recherché s'il résulte de l'information des éléments permettant de retenir que ces sommes sont susceptibles de provenir des faits de trafic de stupéfiants, de blanchiment et de non-justification de ressources dont est saisi le magistrat instructeur, la chambre de l'instruction qui, à l'image de l'ordonnance maintenant la saisie litigieuse, a laissé totalement incertains le fondement juridique et la base légale de cette saisie, privant ainsi la Cour de cassation de la faculté d'exercer son contrôle sur la réunion des conditions propres à justifier de sa légalité et de sa régularité, n'a pas légalement justifié sa décision ;

" 3°) alors qu'il appartient au juge de déterminer le fondement juridique de la saisie pénale opérée avant d'apprécier si les procédures spécifiques applicables à la saisie en cause ont été respectées ; qu'en retenant que le magistrat instructeur a statué en l'espèce sur le maintien de la saisie du solde créditeur du compte épargne Livret A n° 0335250617V55, sans solliciter l'avis du ministère public et ce, en méconnaissance des exigences de l'article 706-148 du code de procédure pénale applicable aux saisies de patrimoine, pour en déduire que la confiscation des sommes saisies n'avait pas été opérée en tant qu'élément du patrimoine de l'exposante, la chambre de l'instruction à qui il appartenait au contraire de déterminer le fondement juridique de la saisie opérée avant d'apprécier si le juge d'instruction avait satisfait aux exigences procédurales liées à la saisie en cause, a violé les textes susvisés ;

" 4°) alors que pour conclure à la validité et à la régularité d'une ordonnance portant saisie pénale, la chambre de l'instruction ne peut substituer un autre fondement légal à celui choisi par le juge d'instruction, auteur de la saisie ; qu'ayant constaté que l'ordonnance du 19 avril 2013 portant saisie du solde créditeur du compte PEL Banque populaire Centre Atlantique, « précise que les sommes inscrites sur ce compte bancaire encourent la confiscation en valeur, conformément à l'article 131-21, alinéa 5, du code pénal » lequel vise la confiscation portant sur les biens meubles ou immeubles appartenant au condamné ou dont il a la libre disposition « lorsque ni le condamné, ni le propriétaire mis en demeure de s'expliquer sur les biens dont la confiscation est envisagée, n'ont pu en justifier l'origine », la chambre de l'instruction qui, pour confirmer cette ordonnance de saisie lui substitue un autre fondement juridique en appréciant sa légalité au regard des exigences de l'article L. 131-21, alinéa 3, du code pénal relatif aux saisies portant sur des biens qui sont l'objet ou le produit direct ou indirect de l'infraction a violé les textes susvisés ;

" 5°) alors, et à titre subsidiaire, que la saisie ordonnée sur le fondement des articles 131-21 al. 3 du code pénal et 706-153 ou 706-154 du code de procédure pénale ne peut porter que sur les biens dont il est établi avec certitude qu'ils constituent soit l'objet, soit le produit direct ou indirect de l'infraction, sans préjudice des dispositions de l'article 131-21, alinéa 5, du code pénal permettant d'appréhender les biens appartenant à la personne condamnée ou poursuivie, sans qu'il soit nécessaire, en pareille hypothèse, d'établir qu'ils constituent le produit direct ou indirect de l'infraction visée aux poursuites ; qu'en l'espèce, il est constant qu'à la date de l'arrêt attaqué, Mme X..., titulaire des comptes bancaires dont les soldes créditeurs ont été saisis, n'a fait l'objet d'aucune poursuite pénale, de sorte qu'en cet état, la saisie de ces sommes ne pouvait être ordonnée qu'à la condition de constater qu'elles constituaient avec certitude le produit direct ou indirect des infractions dont la juridiction d'instruction est saisie, et pour lesquelles le fils de la demanderesse est mis en examen ; que pour confirmer l'ordonnance de maintien de saisie du solde créditeur du compte épargne livret A et l'ordonnance de saisie du solde créditeur du compte PEL Banque populaire Centre Atlantique, la chambre de l'instruction s'est bornée à relever que la demanderesse ne justifie que d'une activité professionnelle irrégulière, que ses revenus modestes ne permettent pas d'expliquer les montants qui figurent au crédit des comptes saisis, de sorte que ces soldes sont « présumés » être le produit direct ou indirect des infractions pour lesquelles M. Ahmed X... est mis en examen ; qu'en l'état de ces seules énonciations, d'où il ne résulte pas que les soldes litigieux constituent effectivement et avec certitude le produit direct ou indirect des infractions pour lesquelles M. Ahmed X... est mis en examen, tandis qu'il est constant que la demanderesse n'était pas elle-même poursuivie des ces chefs, la chambre de l'instruction n'a pas légalement justifié sa décision " ;

Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure qu'au cours de l'information suivie contre M. Ahmed X... des chefs d'infractions à la législation sur les stupéfiants réprimées notamment par l'article 222-49 du code pénal, association de malfaiteurs, blanchiment, non-justification de ressources, le juge d'instruction a, au visa de l'article 131-21, alinéa 9, du code pénal et des articles 706-141 à 706-147, 706-153 et 706-154 du code de procédure pénale, rendu le 18 avril 2013, une ordonnance maintenant la saisie de 17 361, 30 euros et, le 19 avril 2013, une ordonnance prescrivant la saisie de 26 123, 12 euros, sommes inscrites au crédit des comptes bancaires de Mme Dounia X..., soeur du mis en examen, dont la famille est impliquée dans l'importation de résine de cannabis en provenance du Maroc ;

Attendu que, pour confirmer la saisie de 26 123, 12 euros, ainsi que le maintien de la saisie de 17 361, 30 euros, les juges relèvent que ces sommes ne peuvent provenir que des délits reprochés à M. Ahmed X... et que Mme Dounia X..., susceptible d'être mise en examen pour non-justification de ressources ou blanchiment en lien avec le trafic de stupéfiants poursuivi, n'a pas pu ignorer les activités illicites de son frère ;

Attendu qu'en l'état de ces énonciations, d'où il résulte que les sommes saisies seront susceptibles d'être confisquées en application des articles 222-49 et 131-21, alinéa 3, du code pénal, et dès lors que l'effet dévolutif de l'appel l'autorisait à se fonder notamment sur ce dernier texte, la chambre de l'instruction a justifié sa décision sans encourir les griefs allégués ;

D'où il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

REJETTE le pourvoi ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le dix-sept décembre deux mille quatorze ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.

ECLI:FR:CCASS:2014:CR07236
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