Cour de cassation, criminelle, Chambre criminelle, 16 décembre 2014, 13-85.351, Inédit

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur les pourvois formés par :



- Le procureur général près la cour d'appel de Montpellier,

- M. Sébastien X...,
- Mme Anne Y...,

parties civiles,


contre l'arrêt de la cour d'appel de MONTPELLIER, chambre spéciale des mineurs, en date du 28 juin 2013, qui, pour violences aggravées ayant entraîné la mort sans intention de la donner, a condamné Gaëtan Z...à cinq ans d'emprisonnement dont deux ans avec sursis et mise à l'épreuve, et ordonné une mesure de placement ;

La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 18 novembre 2014 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Guérin, président, M. Pers, conseiller rapporteur, M. Fossier, conseiller de la chambre ;

Greffier de chambre : Mme Zita ;

Sur le rapport de M. le conseiller PERS, les observations de la société civile professionnelle WAQUET, FARGE et HAZAN, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général DESPORTES ;

Joignant les pourvois en raison de la connexité ;

I-Sur sa recevabilité du pourvoi formé par M. X...et Mme Y...:

Attendu que les parties civiles, non appelantes du jugement du tribunal pour enfants ayant statué sur l'action publique et sur l'action civile n'étant plus parties à l'instance d'appel, sont sans qualité pour se pourvoir en cassation contre l'arrêt qui a condamné Gaëtan Z...;

Qu'il s'ensuit que leur pourvoi n'est pas recevable ;

II-Sur le pourvoi formé par le procureur général :

Vu le mémoire produit ;

Attendu que, le 20 juin 2011, Gaëtan Z..., mineur de 16 ans, qui s'est présenté à la sortie du collège pour y attendre sa jeune soeur en conflit violent avec deux autres élèves, a porté à l'une d'elles, Carla X..., des coups de poing au visage, dont l'un a entraîné la mort de la jeune fille par luxation d'une vertèbre cervicale ; que le mineur a été renvoyé pour violences volontaires ayant entraîné la mort, sans intention de la donner, d'un mineur de quinze ans, commises avec préméditation, devant le tribunal pour enfants, qui n'a pas retenu la circonstance aggravante de préméditation, a prononcé une peine d'emprisonnement pour partie assortie d'un sursis avec mise à l'épreuve, a ordonné l'exécution provisoire de cette mesure et a statué sur les intérêts civils ; que, sur le seul appel du ministère public, la chambre spéciale des mineurs de la cour d'appel a déclaré irrecevables les conclusions des parents de la victime, a confirmé le jugement sur la culpabilité et sur le principe de la peine, modifiant le délai d'épreuve et ajoutant une obligation particulière, sans prononcer sur l'exécution provisoire ;

En cet état ;

Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 515 et 593 du code de procédure pénale, omission de statuer ;

Attendu que le moyen pris de ce que la cour d'appel n'a ni infirmé ni confirmé l'exécution provisoire de la mesure de sursis avec mise à l'épreuve ordonnée par le tribunal pour enfants est inopérant, dès lors que cette exécution provisoire se poursuit, compte tenu de l'effet suspensif du pourvoi en cassation, jusqu'à la date où l'arrêt attaqué devient exécutoire ;


D'où il suit que le moyen ne peut être admis ;

Sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation des articles 4-1 de l'ordonnance n° 45-174 du 2 février 1945, préliminaire et 591 du code de procédure pénale ;

Attendu que, s'il est exact que l'avocat de Gaëtan Z...n'était pas présent lors du prononcé de l'arrêt attaqué, celui-ci n'encourt pas pour autant la censure dès lors que la Cour de cassation est en mesure de s'assurer que le mineur a été assisté par un avocat à chaque étape de la procédure ;

D'où il suit que le moyen doit être écarté ;

Sur le troisième moyen de cassation, pris de la violation de l'article 593 du code de procédure pénale ;

Attendu que, pour déclarer Gaëtan Z...coupable de violences volontaires sur mineur de quinze ans ayant entraîné la mort sans intention de la donner, en écartant la circonstance aggravante de préméditation, l'arrêt retient qu'il est établi que Gaëtan Z...a eu connaissance de l'animosité qui existait entre Carla, victime des faits, et sa soeur, au plus tard le 14 juin ; qu'il avait été convenu dès le 17 juin qu'il irait chercher sa soeur au collège ; que les juges ajoutent que l'information n'a pas établi qu'il ait adressé directement des menaces à la victime ; que l'exploitation de la téléphonie établit que dans la demi-heure précédant les faits, le prévenu a échangé des messages amoureux avec sa petite amie, fixé un rendez-vous téléphonique avec son père, discuté avec sa soeur ; qu'il a également conversé avec Lucas B...et Justine A...devant le collège et avait alors le comportement " normal " d'un adolescent de 15 ans ; que la cour d'appel retient que les propos tenus devant Mme C... le 15 juin, alors que sa soeur présentait des hématomes et le message écrit quelques minutes avant les faits à sa mère renvoient à des violences mais seulement éventuelles, pour être conditionnées et imprécises, et ne visent pas particulièrement Carla ; que la radicalité même du texto atteste qu'il s'agit de propos à tonalité agressive assez couramment employés par les adolescents, d'autant qu'il intervient au milieu d'autres messages assez banals ; que ces deux éléments ne sauraient à eux seuls établir l'existence d'un dessein mûrement réfléchi au sens de l'article 132-72 du code pénal, ce d'autant que l'instruction n'a pas mis en évidence l'existence d'actes préparatoires ; qu'au contraire la rapidité et la violence de l'action, survenue après un échange de regards entre la victime et Gaëtan Z..., a surpris tous les témoins de la scène, y compris Lucas B...qui discutait avec le prévenu chez lequel il n'avait relevé ni agitation ni froideur ni détermination ; que devant la cour les experts psychologue et psychiatre ont confirmé le caractère circonstanciel des faits ; que le caractère irraisonné et impulsif des faits est donc clairement établi ;

Attendu qu'en l'état de ces énonciations, exemptes d'insuffisance comme de contradiction, d'où il résulte que le prévenu n'avait pas formé à l'avance le dessein de frapper Carla X..., la cour d'appel a justifié sa décision ;

D'où il suit que le moyen ne peut être accueilli ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

Par ces motifs :

I-Sur le pourvoi formé par M. X...et Mme Y...:

Le déclare IRRECEVABLE ;

II-Sur le pourvoi formé par le procureur général :

Le REJETTE ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le seize décembre deux mille quatorze ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;

ECLI:FR:CCASS:2014:CR07111
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