Cour de cassation, civile, Chambre civile 1, 26 novembre 2014, 13-26.833, Inédit

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Nîmes, 12 septembre 2013), que par acte reçu le 6 octobre 1999 par Mme Z..., notaire, M. X... a acquis un terrain en vue de l'édification d'un immeuble à usage d'habitation ; qu'un permis de construire délivré le 23 septembre 1999 et une reconnaissance d'avis donné à l'acquéreur sur l'absence d'extinction du recours des tiers contre cette autorisation étaient annexés à l'acte, qui comportait aussi une clause selon laquelle M. X... s'était renseigné personnellement auprès des services compétents sur les dispositions d'urbanisme applicables et dispensait le notaire de produire un certificat ou une note d'urbanisme, le déchargeant ainsi de toute responsabilité à cet égard ; que l'arrêté valant permis de construire ayant été annulé par le tribunal administratif en raison de l'implantation de la construction dans le périmètre d'un lotissement jardin, M. X..., condamné à indemniser son voisin, a assigné le notaire en responsabilité professionnelle, lui reprochant d'avoir manqué à son obligation d'assurer l'efficacité de l'acte en omettant d'obtenir un certificat d'urbanisme et à son devoir de conseil en n'attirant pas son attention sur la portée de l'acte de reconnaissance d'avis donné et sur le caractère inconstructible de la parcelle vendue ;

Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de rejeter ses demandes, alors, selon le moyen :

1°/ que pour assurer l'efficacité de l'acte instrumenté, le notaire a l'obligation de demander et de fournir à son client un certificat d'urbanisme ; qu'en statuant comme elle l'a fait, motif pris qu'il était indiqué dans l'acte du 6 octobre 1999, au paragraphe Urbanisme, que sur « la nature, la situation et la destination de ce bien, le nouveau propriétaire déclare s'être renseigné personnellement auprès des services compétents sur les dispositions d'urbanismes applicables. Il dispense le notaire soussigné de produire un certificat ou une note d'urbanisme en le déchargeant, ainsi que l'ancien propriétaire, de toutes responsabilités à ce sujet », la cour d'appel a violé l'article 1382 du code civil ;

2°/ que les compétences et connaissances personnelles du client ne libèrent pas le notaire de son devoir de conseil relativement aux règles d'urbanismes qui pourraient empêcher la réalisation de l'opération ; qu'en écartant toute responsabilité du notaire, motifs pris qu'il était indiqué dans l'acte du 6 octobre 1999, au paragraphe Urbanisme, que sur « la nature, la situation et la destination de ce bien, le nouveau propriétaire déclare s'être renseigné personnellement auprès des services compétents sur les dispositions d'urbanismes applicables » et que « c'est donc en pleine connaissance de cause que M. X... a poursuivi l'acquisition du terrain sur lequel il a construit deux villas », la cour d'appel a violé l'article 1382 du code civil ;

3°/ que les compétences et connaissances personnelles du client ne libèrent pas le notaire de son devoir de conseil quant aux risques juridiques qui pourraient empêcher la réalisation de l'opération ; qu'en statuant comme elle l'a fait, motif pris que « c'est donc en pleine connaissance de cause que M. X... a poursuivi l'acquisition du terrain sur lequel il a construit deux villas », la cour d'appel a violé l'article 1382 du code civil ;

4°/ que le notaire, tenu d'un devoir de conseil envers ses clients, doit les mettre en garde contre les obstacles, notamment juridiques, susceptibles de faire échec à leur projet ; qu'en écartant la responsabilité du notaire au motif inopérant que « M. X... savait que la validité de son permis de construire, qu'il avait lui-même demandé et obtenu ne lui était pas définitivement acquise, les délais et voies de recours des tiers étant rappelés à la fin de ce document », M. X... reprochant au notaire de ne l'avoir pas informé des risques d'annulation du permis de construire, la cour d'appel n'a pas justifié sa décision au regard de l'article 1382 du code civil ;

Mais attendu que l'arrêt relève qu'au jour de la signature de l'acte authentique, M. X... savait non seulement que la validité du permis de construire, qu'il avait lui-même demandé, ne lui était pas définitivement acquise en l'absence d'expiration des délais de recours des tiers, ce que le notaire avait rappelé dans une annexe de l'acte, mais encore que la contestation judiciaire d'une telle autorisation administrative avait été annoncée par un voisin, de sorte que c'est en pleine connaissance de cause qu'il a néanmoins poursuivi l'acquisition de la parcelle, acceptant le risque d'annulation ; que de ces constatations et énonciations, la cour d'appel, écartant implicitement mais nécessairement tout manquement du notaire à son obligation de solliciter un certificat d'urbanisme destiné à vérifier les caractères du bien cédé au regard des règles applicables à la construction, dès lors que l'aptitude du terrain à recevoir un ouvrage déterminé était attestée par l'existence d'un permis de construire, a pu déduire que le notaire avait rempli son devoir de conseil ; que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. X... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et le condamne à payer à la société Chantal Z...la somme de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-six novembre deux mille quatorze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par la SCP Ortscheidt, avocat aux Conseils, pour M. X....

Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'avoir débouté M. X... de ses demandes de condamnation de la SELARL CHANTAL Z...en paiement de dommages-intérêts ;

AUX MOTIFS PROPRES QU'à la date de l'acquisition, Monsieur X... savait que la validité de son permis de construire, qu'il avait lui-même demandé et obtenu ne lui était pas définitivement acquise, les délais et voies de recours des tiers étant rappelés à la fin de ce document ; qu'à l'acte du 6 octobre 1999 est annexée une RECONNAISSANCE D'AVIS DONNE mentionnant en'2/ Absence de l'expiration du recours des tiers : « Monsieur et Madame X... reconnaissent avoir été parfaitement informés par Me Z..., Notaire à MENERBES, des conséquences liées à l'absence d'extinction du recours des tiers (suspension des travaux, pendant la procédure judiciaire, annulation du permis de construire) et persistent dans leur intention d'acquérir ce bien, déchargeant Me Z..., notaire de toute responsabilité » ; que cette annexe est à rapprocher de la déclaration portée dans l'acte au paragraphe URBANISME : « Attendu la nature, la situation et la destination de ce bien, le nouveau propriétaire déclare s'être renseigné personnellement auprès des services compétents sur les dispositions d'urbanismes applicables. Il dispense le Notaire soussigné de produire un Certificat ou une Note d'Urbanisme en le déchargeant, ainsi que l'ancien propriétaire, de toutes responsabilités à ce sujet » ; que c'est donc en pleine connaissance de cause que Monsieur X... a poursuivi l'acquisition du terrain sur lequel il a construit deux villas ; qu'aucune faute n'est démontrée à l'encontre de la SELARL Chantal Z...; que c'est par des motifs pertinents que les premiers juges ont débouté Monsieur X... ;

ET AUX MOTIFS NON CONTRAIRES ADOPTES QUE le notaire est tenu d'une obligation de conseil à l'égard de toutes les parties à l'acte auquel il prête son concours. Franco X... considère que la SCP Chantal Z...-Valérie Z...-A... a commis une faute en ne l'informant pas du caractère illégal de l'autorisation d'urbanisme qui lui avait été délivrée ou, à tout le moins, du caractère inconstructible de la parcelle compte tenu de l'existence d'un lotissement jardin ; que le tribunal constate qu'une reconnaissance d'avis donné a été annexée à l'acte de vente du 6 octobre 1999. Cette reconnaissance vise l'absence d'expiration du recours des tiers ; qu'il est mentionné : " Monsieur et madame X... reconnaissent avoir été parfaitement informés par Me Z..., notaire à MENERBES, des conséquences liées à l'absence d'extinction du recours des tiers (suspension des travaux, pendant la procédure judiciaire, annulation du permis de construire) et persistent dans leur intention d'acquérir ce bien, déchargeant Me Z..., notaire de toute responsabilité à ce sujet. " ; que Franco X... avait déjà connaissance d'un risque puisqu'il avait reçu un courrier de Michel Y... daté du 26 mai 1999 l'informant qu'il s'opposerait à toute construction ; que Michel Y... a été à l'origine de la demande d'annulation du permis de construire et d'autres procédures à l'encontre de Franco X.... Me Z...a spécifiquement informé Franco X... du risque d'annulation du permis de construire et a formalisé cette information en procédant à la rédaction d'un acte particulier annexé à l'acte de Vente ; qu'il ne peut être imputé à la SCP Chantal Z...-Valérie Z...-A... un manquement à son obligation de conseil ; qu'en l'absence de faute, Franco X... est débouté de ses différentes demandes de dommages et intérêts ;

1°) ALORS QUE pour assurer l'efficacité de l'acte instrumenté, le notaire a l'obligation de demander et de fournir à son client un certificat d'urbanisme ; qu'en statuant comme elle l'a fait, motif pris qu'il était indiqué dans l'acte du 6 octobre 1999, au paragraphe Urbanisme, que sur « la nature, la situation et la destination de ce bien, le nouveau propriétaire déclare s'être renseigné personnellement auprès des services compétents sur les dispositions d'urbanismes applicables. Il dispense le Notaire soussigné de produire un Certificat ou une Note d'Urbanisme en le déchargeant, ainsi que l'ancien propriétaire, de toutes responsabilités à ce sujet », la cour d'appel a violé l'article 1382 du code civil ;

2°) ALORS QUE les compétences et connaissances personnelles du client ne libèrent pas le notaire de son devoir de conseil relativement aux règles d'urbanismes qui pourraient empêcher la réalisation de l'opération ; qu'en écartant toute responsabilité du notaire, motifs pris qu'il était indiqué dans l'acte du 6 octobre 1999, au paragraphe Urbanisme, que sur « la nature, la situation et la destination de ce bien, le nouveau propriétaire déclare s'être renseigné personnellement auprès des services compétents sur les dispositions d'urbanismes applicables » et que « c'est donc en pleine connaissance de cause que Monsieur X... a poursuivi l'acquisition du terrain sur lequel il a construit deux villas », la cour d'appel a violé l'article 1382 du code civil ;

3°) ALORS QUE les compétences et connaissances personnelles du client ne libèrent pas le notaire de son devoir de conseil quant aux risques juridiques qui pourraient empêcher la réalisation de l'opération ; qu'en statuant comme elle l'a fait, motif pris que « c'est donc en pleine connaissance de cause que Monsieur X... a poursuivi l'acquisition du terrain sur lequel il a construit deux villas », la cour d'appel a violé l'article 1382 du code civil ;

4°) ALORS QUE le notaire, tenu d'un devoir de conseil envers ses clients, doit les mettre en garde contre les obstacles, notamment juridiques, susceptibles de faire échec à leur projet ; qu'en écartant la responsabilité du notaire au motif inopérant que « Monsieur X... savait que la validité de son permis de construire, qu'il avait lui-même demandé et obtenu ne lui était pas définitivement acquise, les délais et voies de recours des tiers étant rappelés à la fin de ce document », M. X... reprochant au notaire de ne l'avoir pas informé des risques d'annulation du permis de construire, la cour d'appel n'a pas justifié sa décision au regard de l'article 1382 du code civil.

ECLI:FR:CCASS:2014:C101392
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