Cour de cassation, civile, Chambre commerciale, 16 septembre 2014, 13-18.503, Inédit
Cour de cassation - Chambre commerciale
- N° de pourvoi : 13-18.503
- ECLI:FR:CCASS:2014:CO00699
- Non publié au bulletin
- Solution : Rejet
- Président
- M. Espel (président)
Texte intégral
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le second moyen :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Fort-de-France, 1er mars 2013), que, le 17 décembre 2002, les sociétés GL Gestion et investissements, Le Colibri voyageur, Le Colibri curieux et Le Colibri express ont été mises en redressement judiciaire, la confusion de leurs patrimoines étant ensuite constatée et la procédure collective ainsi rendue commune étendue à M. X..., leur dirigeant ; qu'un plan de redressement par voie de continuation a été arrêté le 30 mars 2004 ; qu'un jugement du 25 septembre 2012 a décidé sa résolution et ouvert la procédure de liquidation judiciaire, un autre jugement du même jour prononçant à l'encontre de M. X... une mesure d'interdiction de gérer pour une durée de 10 ans ;
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt d'avoir confirmé cette dernière décision, alors, selon le moyen, que le juge ne peut, pour prononcer une interdiction de gérer à l'encontre du dirigeant d'une société ayant fait l'objet d'une nouvelle procédure collective après résolution d'un plan de continuation, se fonder sur des faits apparus lors de la précédente procédure collective ; qu'en approuvant expressément le tribunal d'avoir retenu des faits survenus au cours de la procédure initiale pour prononcer à l'encontre de M. X... la sanction de l'interdiction de gérer, et en confirmant le jugement de première instance de ce chef, la cour d'appel a violé les articles L. 653-3 et L. 653-8 du code de commerce ;
Mais attendu que, pour prononcer la faillite personnelle ou l'interdiction de gérer, le juge peut, en cas de résolution du plan de redressement, retenir des faits postérieurs à la décision arrêtant ce plan et antérieurs à celle ouvrant, après sa résolution, une procédure de liquidation judiciaire ; qu'ayant relevé, par motifs propres et adoptés, que M. X... n'avait pas réglé les dettes postérieures à l'adoption du plan et avait créé, au cours de son exécution, un important passif, la cour d'appel, qui ne s'est fondée que sur des faits survenus pendant la période pouvant être prise en considération, a légalement justifié sa décision; que le moyen n'est pas fondé ;
Et attendu que le premier moyen ne serait pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du seize septembre deux mille quatorze.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt
Moyens produits par la SCP Barthélemy, Matuchansky, Vexliard et Poupot, avocat aux Conseils, pour M. X....
PREMIER MOYEN DE CASSATION
Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'AVOIR prononcé à l'encontre de monsieur Jean Georges X... une mesure d'interdiction de gérer pendant dix ans ;
AUX MOTIFS QUE le tribunal a prononcé l'interdiction de gérer à l'encontre de M. X... sur le fondement des articles L. 653-1 et suivants, et L. 653-8 du code de commerce, après avoir retenu que l'intéressé avait poursuivi abusivement, et de longue date, l'exploitation déficitaire des sociétés dont il avait la gérance, et ce, dans son intérêt personnel ; que la poursuite abusive d'une exploitation déficitaire est un des cas dans lesquels le tribunal peut prononcer la faillite personnelle du dirigeant ; qu'il est prévu à l'article L. 653-3 1° ; que l'article L. 653-8 dispose que dans les cas prévus aux articles L. 653-3 à L. 653-6, le tribunal peut prononcer, à la place de la faillite personnelle, l'interdiction de gérer ; que les réquisitions écrites du procureur de la République aux fins de résolution du plan, d'ouverture d'une procédure de liquidation judiciaire et de sanctions commerciales du dirigeant, visent, en ce qui concernent ces sanctions, les articles L. 651-2, L. 653-1 et L. 653-8 ; que l'ordonnance du président du tribunal pour citation du débiteur vise la requête du procureur de la République ; que M. X... ne produit pas la citation qui lui a été délivrée à la requête du greffier du tribunal mixte de commerce ; qu'ainsi, l'article L. 653-3, auquel fait référence l'article L. 653-8, était bien visé dans l'acte de saisine du tribunal ; que le premier moyen d'annulation du jugement attaqué n'est donc pas pertinent (arrêt, p. 5) ;
ALORS QUE la nullité dont est entaché un acte introductif d'instance vicie la procédure subséquente ; que l'article L. 653-7 du code de commerce a supprimé la faculté pour le tribunal de commerce de se saisir d'office en vue du prononcé, à l'encontre du dirigeant d'une personne morale mise en redressement ou en liquidation judiciaire, d'une interdiction de gérer ; qu'en retenant que le tribunal de commerce avait été valablement saisi par la requête du ministère public ; cependant qu'en l'absence de fondement désigné dans la requête du procureur de la République à la demande de sanction, le tribunal avait prononcé d'office l'interdiction de gérer pendant dix ans sur le fondement de l'article L. 653-3 du code de commerce, qui n'était pas visé dans l'acte de saisine, ce qui rendait toute la procédure subséquente irrégulière, la cour d'appel a violé l'article L. 653-7 du code de commerce.
SECOND MOYEN DE CASSATION
Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'AVOIR prononcé à l'encontre de monsieur Jean Georges X... une mesure d'interdiction de gérer pendant dix ans ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE le tribunal a prononcé à l'encontre de M. X... la sanction de l'interdiction de gérer dans le cadre de la procédure de liquidation judiciaire qu'il venait de prononcer contre lui et les trois sociétés Colibri après résolution du plan de continuation (1er jugement du 25 septembre 2012) et de l'extension de cette procédure de liquidation judiciaire aux sociétés Coulicou (2ème jugement du même jour) ; que la cause du prononcé de la liquidation judiciaire tenant dans la constitution d'un important passif des sociétés Colibri en cours d'exécution du plan de redressement judiciaire, c'est à bon droit que le tribunal a pu retenir des faits survenus au cours de la procédure initiale pour prononcer la sanction de l'interdiction de gérer ; que, comme l'a relevé la cour dans son arrêt confirmant le premier jugement rendu le 25 septembre 2012 qui a prononcé la résolution du plan de continuation et ouvert une procédure de liquidation judiciaire à l'encontre des trois sociétés Colibri et de M. X..., ce dernier avait, en payant par anticipation les échéances du plan avec la trésorerie des sociétés Colibri, cherché à éteindre son passif propre mais au détriment des sociétés dont il ne réglait pas des dettes postérieures à l'adoption du plan, précipitant ainsi l'ouverture de leur liquidation judiciaire ; que ce constat justifie pleinement la nature et la durée de la sanction prononcée contre M. X... ; qu'en conséquence, le jugement attaqué sera confirmé en ses dispositions frappées d'appel par M. X... (arrêt, p. 6) ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE, vu les articles L. 653-1 et suivants et L. 653-8 du code de commerce, il résulte des éléments de la procédure que monsieur X... a accumulé un passif social très important depuis le quatrième trimestre 2003 soit depuis l'arrêté du plan de redressement (plus de 500 000 euros tous créanciers confondus) ; qu'ainsi que cela a été indiqué, monsieur X..., dans le cadre d'une requête en résolution de plan déposée par l'administrateur judiciaire en 2008 a effectué des paiements massifs des créanciers, bien avant que leur dette soit exigible, au détriment du paiement des cotisations sociales, afin d'éviter le prononcé d'une liquidation judiciaire le concernant à titre personnel, et ce, fans un but évident de protéger ses biens personnels de toute appréhension, en faisant valoir que le plan était intégralement respecté et donc expiré ; que cette attitude, et alors que les sociétés en redressement connaissaient déjà un passif social de 500 000 euros n'a eu pour effet que d'accroître le passif et de conduire les sociétés à un nouvel état de cessation des paiements qui existait depuis plusieurs années ; qu'il convient de rappeler que monsieur X... n'a obtenu un désistement de la procédure en résolution de plan et en ouverture de redressement judiciaire qu'à la condition qu'il vende un immeuble lui appartenant pour désintéresser la CGSS ; que monsieur X... n'a pas respecté la décision du tribunal rendue en 2010 l'autorisant à vendre un immeuble lui appartenant mais à affecter le produit au règlement de cette dette entre les mains du commissaire à l'exécution du plan qui a déclaré ne jamais avoir été destinataire des fonds perçus ; qu'il résulte de l'ensemble de ces éléments que monsieur X... a poursuivi abusivement, et de longue date, l'exploitation déficitaire des sociétés dont il avait la gérance, et ce, dans son intérêt personnel ; qu'il est constant que le tribunal doit s'attacher en vertu du principe de proportionnalité à adapter la sanction aux fautes commises ; que la volonté constante et réitérée de ne pas honorer les dettes sociales au profit de la sauvegarde de ses intérêts personnels, de même que le non-respect des décisions de justice, justifient pleinement la sanction sollicitée par le ministère public (jugement, pp. 4 et 5) ;
ALORS QUE le juge ne peut, pour prononcer une interdiction de gérer à l'encontre du dirigeant d'une société ayant fait l'objet d'une nouvelle procédure collective après résolution d'un plan de continuation, se fonder sur des faits apparus lors de la précédente procédure collective ; qu'en approuvant expressément le tribunal d'avoir retenu des faits survenus au cours de la procédure initiale pour prononcer à l'encontre de monsieur X... la sanction de l'interdiction de gérer, et en confirmant le jugement de première instance de ce chef, la cour d'appel a violé les articles L. 653-3 et L. 653-8 du code de commerce.