Cour de cassation, civile, Chambre civile 1, 14 mai 2014, 13-19.329, Inédit

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que MM. X..., Y..., Z..., A..., B..., C..., D..., E..., F...et Mme G..., associés de la société des Mousquetaires, en ont été exclus par différentes assemblées générales de 1998 à 2003 ; que MM. X..., Z..., A..., B..., C..., D..., E..., F...et Mme G..., d'une part, M. Y..., d'autre part, ont saisi un président de tribunal de grande instance, statuant en la forme des référés, sur le fondement de l'article 1843-4 du code civil, pour faire déterminer la valeur de leurs droits sociaux par expert ; que les anciens associés ont, au regard des évaluations expertales, assigné en paiement, devant un tribunal de grande instance, la société Des Mousquetaires ; que dans la seule instance l'opposant à MM. X..., Z..., A..., B..., C..., D..., E..., F...et Mme G..., le juge de la mise en état a, à la demande de la société des Mousquetaires, sursis à statuer dans l'attente d'un arrêt de la Cour de cassation après le pourvoi formé contre la décision déclarant irrecevable l'appel de l'ordonnance présidentielle de commission de l'expert ; que cette instance ayant été jointe à celle opposant M. Y...à la société des Mousquetaires, après le prononcé de l'arrêt, celle-ci a soulevé l'incompétence de la juridiction étatique au profit d'un tribunal arbitral en application de la clause compromissoire figurant dans les contrats de franchise conclus entre les sociétés dirigées par les anciens associés et la société ITM entreprises ;

Sur le premier moyen :

Vu les articles 73 et 74 du code de procédure civile ;

Attendu que, pour décider que l'exception d'incompétence est recevable à l'égard de MM. X..., Z..., A..., B..., C..., D..., E..., F...et Mme G..., l'arrêt retient que le sursis, facultatif pour le juge, n'est qu'un incident de procédure ;

Qu'en statuant ainsi, alors que la demande de sursis à statuer formée, en défense, par la société des Mousquetaires, dans l'instance l'opposant à ces anciens associés, était une exception de procédure, et que les exceptions doivent, à peine d'irrecevabilité, être soulevées simultanément, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

Sur le second moyen :

Vu l'article 1442 du code de procédure civile ;

Attendu que, pour retenir que l'exception d'incompétence est fondée à l'égard de M. Y..., l'arrêt retient qu'il existe un lien certain entre la rupture du contrat d'enseigne et la valorisation des parts sociales de M. Y...puisque leur remboursement découle directement de la rupture de ce contrat ;

Qu'en statuant ainsi, alors que la clause compromissoire figurait exclusivement dans le contrat de franchise conclu entre M. Y...et la société ITM entreprises, et que celui-ci et la société des Mousquetaires n'avaient pas soumis à l'arbitrage les litiges opposant la société à ses associés, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;


PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 23 mai 2013, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;

Condamne la société des Mousquetaires aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et la condamne à payer à MM. X..., Y..., Z..., A..., B..., C..., D..., E..., F...et Mme G... la somme globale de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quatorze mai deux mille quatorze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits par la SCP Rousseau et Tapie, avocat aux Conseils, pour MM. X..., Z..., A..., B..., C..., D..., E..., F...et Mme G...

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Il est reproché à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir fait droit à l'exception d'incompétence soulevée par la société civile des Mousquetaires au profit d'un tribunal arbitral et ce, en vertu de la clause compromissoire insérée dans les contrats d'enseigne conclus par les sociétés dirigées par les consorts X...avec la société ITM Entreprises, pour connaître de la demande des consorts X...de condamnation de la société civile des Mousquetaires à leur payer la valeur, telle qu'arbitrée par l'expert, des parts sociales par eux détenues au sein de cette dernière société,

Aux motifs que seuls les sursis à statuer dits obligatoires, en ce sens qu'ils s'imposent au juge, constituent des exceptions de procédure et qu'à l'inverse, un sursis à statuer dont l'opportunité est laissée à l'appréciation discrétionnaire du juge, relève du régime des incidents d'instance,

Alors que constitue une exception de procédure tout moyen qui tend à suspendre le cours de l'instance ; que les exceptions de procédure doivent, à peine d'irrecevabilité, être soulevées simultanément et avant toute défense au fond ; que la décision du sursis suspend le cours de l'instance pour le temps ou jusqu'à la survenance de l'événement qu'elle détermine ; que la demande de sursis à statuer formée par le défendeur à l'action constitue non pas un incident d'instance, mais une exception de procédure tendant à suspendre le cours de l'instance, peu important que le sursis sollicité soit facultatif ou obligatoire pour le juge ; qu'en ayant qualifié d'incident d'instance la demande de sursis à statuer jusqu'à un arrêt de la Cour de cassation soulevée par la société civile des Mousquetaires, en défense à l'action engagée contre elle par les consorts X..., la cour d'appel a violé les articles 73, 74 et 378 du code de procédure civile.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION (subsidiaire)

Il est reproché à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir fait droit à l'exception d'incompétence soulevée par la société civile des Mousquetaires au profit d'un tribunal arbitral et ce, en vertu de la clause compromissoire insérée dans les contrats d'enseigne conclus par les sociétés dirigées par les consorts X...avec la société ITM Entreprises, pour connaître de la demande des consorts X...de condamnation de la société civile des Mousquetaires à leur payer la valeur, telle qu'arbitrée par l'expert, des parts sociales par eux détenues au sein de cette dernière société,

Aux motifs que la cour considère qu'au regard des éléments sur les liens contractuels passés entre la SCM et les adhérents, dirigeants des sociétés franchisées par la société ITM Entreprises, contrôlant et dirigeant les structures composant le franchiseur, qu'il existe un lien certain entre la rupture du contrat d'enseigne et la valorisation des parts sociales puisque le remboursement desdites parts découle directement de la rupture de ce contrat ; qu'au regard du lien entre les contrats, puisque tous les associés de la SCM signant avec la société ITM Entreprises d'une part, à titre personnel, un document aux termes duquel ils déclarent adhérer aux principes qui gouvernement le groupement des Mousquetaires, et d'autre part, tant en qualité de représentants de la société d'exploitation qu'à titre personnel un contrat de franchise dénommé « contrat d'enseigne », le litige est en relation avec l'accord contenant la clause d'arbitrage car les contrats sont interdépendants et qu'il convient donc de faire jouer la clause compromissoire en laissant au tribunal arbitral le soin de juger au besoin de sa propre compétence,

Alors que la clause compromissoire est la convention par laquelle les parties à un contrat s'engagent à soumettre à l'arbitrage les litiges qui pourraient naître relativement à ce contrat ; qu'en ayant déclaré applicable au litige né relativement au contrat de société conclu entre la société civile des Mousquetaires et les consorts X..., la clause compromissoire figurant dans le contrat de franchise conclus entre, d'une part, les consorts X...et les sociétés par eux dirigées et, d'autre part, la société ITM Entreprises, la cour d'appel a violé l'article 1442 du code de procédure civile.

ECLI:FR:CCASS:2014:C100506
Retourner en haut de la page