Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 4 décembre 2013, 12-16.697, Inédit

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :



Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été engagé le 26 mai 2008 en qualité d'ambulancier par la société Ambulances Hippocrate suivant contrat à durée déterminée pour la période du 26 mai au 30 septembre 2008 ; que son contrat a pris fin au terme initialement prévu ; qu'il a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes, notamment d'indemnité de congés payés et de rappel de salaire ;

Sur les premier et troisième moyens :

Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur ces moyens qui ne seraient pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;

Mais sur le deuxième moyen :

Vu les articles L. 1242-14 et L. 1242-16 du code du travail ;

Attendu que l'employeur ne peut imposer à ses salariés la prise anticipée de congés payés ;

Attendu que pour débouter le salarié de sa demande d'indemnité au titre d'une mise d'office en congé payé de façon anticipée, l'arrêt retient que le salarié n'a jamais allégué avant l'audience de la cour avoir été contraint par l'employeur de prendre cinq jours de congés payés par anticipation ;

Qu'en statuant ainsi alors qu'il résultait de ses constatations qu'engagé le 26 mai 2008, le salarié avait été en congés payés du 22 au 26 septembre 2008, soit quelques jours avant le terme de son contrat, la cour d'appel, à qui il appartenait de rechercher si cette prise anticipée de congés payés s'était effectuée à la demande du salarié ou avec son accord exprès, n'a pas donné de base légale à sa décision ;

Et sur le quatrième moyen :

Vu l'article 455 du code de procédure civile ;

Attendu que pour débouter le salarié de sa demande de rappel de salaire, l'arrêt retient que celui-ci effectuait des heures supplémentaires majorées de 50 % lesquelles ont été déduites légitimement de son amplitude ;

Qu'en statuant ainsi, par un motif inintelligible, alors que le salarié faisait valoir que n'effectuant aucune permanence, le taux de prise en compte de son amplitude journalière d'activité, tel qu'il résulte du régime d'équivalence applicable aux entreprises de transport sanitaire, était celui de 90 % et non pas celui, appliqué à tort par l'employeur, de 83 %, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déboute le salarié de ses demandes au titre des congés payés pris par anticipation et de rappel de salaire (amplitude x 90 %), l'arrêt rendu le 9 mai 2011, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence, autrement composée ;

Condamne la société Ambulances Hippocrate aux dépens ;

Vu l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, condamne la société Ambulances Hippocrate à payer la somme de 2 500 euros à la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano à charge pour cette dernière de renoncer à percevoir l'indemnité prévue par l'Etat ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du quatre décembre deux mille treize.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits par la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat aux Conseils, pour M. X....

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté M. X... de ses demandes tendant à ce que le contrat à durée déterminée daté du 26 mai 2008 soit requalifié en un contrat à durée indéterminée et que la société Ambulances Hippocrate soit, en conséquence, condamnée à lui verser diverses sommes ;

AUX MOTIFS QU'aux termes de l'article L. 1243-3 du code du travail, un contrat à durée déterminée peut notamment être conclu en cas d'accroissement temporaire de l'activité de l'entreprise ; qu'en l'espèce le contrat litigieux mentionne un « surcroît exceptionnel d'activité » ; que cette mention apparaît suffisante, l'employeur n'étant nullement obligé de préciser dans le contrat en quoi consiste l'accroissement temporaire d'activité ; que vainement M. X... conteste la réalité de ce surcroît d'activité, alors que celui-ci est récurrent pendant la saison estivale en raison de l'afflux de touristes sur la Côte d'Azur ; que l'appelant, par voie de conséquence, doit être débouté de ses demandes d'indemnités de requalification et de rupture pour licenciement abusif ;

ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QU'un contrat de travail à durée déterminée pour surcroît de travail est signé des deux parties le 26 mai 2008 ; que l'attestation de travail datée du 11 juillet 2008 n'a pas l'entête de l'entreprise ni une signature semblable à celle du contrat de travail signé le 26 mai 2008 et une signature semblable à celle de l'attestation Assedic et l'attestation de travail du 26 septembre 2008 ; que l'attestation de travail du 11 juillet 2008 avait pour objet de permettre à M. X... d'obtenir un prêt jeune avenir auprès de la Société Générale ; que M. X... n'apporte pas la preuve qu'il a réclamé par écrit auprès de son employeur un contrat de travail à durée indéterminée ; que M. X... sera débouté de sa demande de reconnaissance de contrat à durée indéterminée ;

1) ALORS QUE c'est à l'employeur de prouver la réalité du surcroît d'activité qu'il invoque pour justifier le recours au contrat à durée déterminée ; qu'en l'espèce, en estimant ce recours justifié, au motif que le salarié contestait vainement le surcroît d'activité allégué sans preuve par l'employeur du fait de la saison estivale, la cour d'appel a inversé la charge de la preuve et violé l'article 1315 du code civil ;

2) ALORS QUE c'est à l'employeur de rapporter la preuve de l'accroissement temporaire d'activité ayant justifié le recours au contrat à durée déterminée ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que le contrat à durée déterminée litigieux conclu pour la période du 26 mai 2008 au 30 décembre 2008 mentionnait un « surcroît exceptionnel d'activité » ; que M. X... faisait valoir que ce surcroît d'activité n'était pas caractérisé, l'été et spécialement le mois d'août étant une morte saison pour l'activité des ambulanciers puisque beaucoup de médecins et notamment de spécialistes comme les chirurgiens étaient alors en congés ; qu'il soulignait que l'employeur ne produisait d'ailleurs aucune pièce à l'appui de son allégation et qu'il avait notamment refusé de produire le registre du personnel, la déclaration préalable à l'embauche et les déclarations mensuelles de TVA des douze mois de l'année 2008 bien que le salarié lui en ait fait la demande ; que la cour d'appel, pour débouter le salarié de sa demande de requalification de son contrat à durée déterminée en contrat à durée indéterminée, s'est contentée d'affirmer que le surcroît d'activité est récurrent pendant la saison estivale en raison de l'afflux de touristes sur la Côte d'Azur ; qu'en statuant ainsi péremptoirement, sans préciser sur quels éléments de preuve elle se fondait, quand l'existence d'un surcroît d'activité pendant la période estivale était précisément contestée par le salarié et que l'employeur n'avait pas produit la moindre pièce à l'appui de son allégation, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1242-2 et L. 1242-11 du code du travail.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté M. X... de sa demande tendant à ce que la société Ambulances Hippocrate soit condamnée à lui verser une indemnité compensatrice de congés payés et des dommages-intérêts pour résistance abusive ;

AUX MOTIFS QU'à l'appui de cette demande, M. X... soutient que la SA Ambulances Hippocrate ne pouvait le mettre d'office en congés payés de façon anticipée du 22 au 26 septembre 2008 et que par ailleurs il n'était pas en absence injustifiée les 17, et 19 septembre 2008 ; que sur ce dernier point, la dénégation tardive de M. X... n'est pas crédible faute pour lui de l'avoir formulée auprès de l'employeur puis devant le conseil de prud'hommes ; qu'elle n'est du reste pas étayée ; qu'il n'a de même jamais allégué avant l'audience de la Cour avoir été contraint par l'employeur de prendre cinq jours de congés payés par anticipation ; que l'appelant sera donc débouté de ces chefs de demande ;

1°) ALORS QUE l'employeur ne saurait imposer à un salarié engagé sous contrat à durée déterminée la prise de ses congés payés par anticipation ; que lorsque le salarié a pris ses congés payés par anticipation, c'est donc à l'employeur de prouver que c'était à la demande du salarié ou avec son accord ; qu'en l'espèce, la cour d'appel, pour débouter M. X... de sa demande d'indemnité compensatrice de congés payés et de dommages-intérêts pour résistance abusive, a relevé que le salarié n'avait jamais allégué avant l'audience de la cour d'appel avoir été contraint par l'employeur de prendre cinq jours de congés payés par anticipation ; qu'en statuant ainsi, quand il appartenait à la cour d'appel de rechercher si l'employeur justifiait que cette prise des congés par anticipation répondait à une demande du salarié, la cour d'appel, qui a fait peser à tort la charge de la preuve sur le salarié, a violé l'article 1315 du code civil, ensemble les articles L. 1242-14 et L. 1242-16 du code du travail ;

2°) ALORS QUE l'employeur ne saurait imposer au salarié engagé à durée indéterminée la prise de ses congés payés par anticipation ; que la cassation de l'arrêt sur le fondement du premier moyen en ce qu'il a débouté M. X... de sa demande de requalification de son contrat à durée déterminée en un contrat à durée indéterminée entraînera, par voie de conséquence, en application de l'article 624 du code de procédure civile, la cassation de l'arrêt en ce qu'il l'a débouté de sa demande d'indemnité compensatrice de congés payés et de dommages-intérêts pour résistance abusive ;

3°) ALORS QUE M. X... faisait valoir dans ses conclusions d'appel que l'employeur ne lui avait pas versé la somme de 181¿84 qu'il avait pourtant reconnu, dans ses conclusions de première instance, devoir au salarié au titre de congés payés qui lui restaient dus ; qu'en déboutant le salarié de sa demande d'indemnité compensatrice de congés payés et de dommages-intérêts pour résistance abusive sans répondre à ce chef des conclusions du salarié, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté M. X... de sa demande tendant à ce que la société Ambulances Hippocrate soit condamnée à lui verser une somme à titre de primes de repas ;

AUX MOTIFS QU'il ressort de l'article 8 du protocole du 30 avril 1974 relatif aux frais de déplacement des ouvriers des entreprises de transport que ceux-ci ne peuvent prétendre au versement de l'indemnité de repas d'un montant de 11,77 ¿ : a) en cas de déplacement extérieur lorsque l'amplitude couvre la période de repas et si le salarié n'a pas été prévenu la veille, b) en cas de fin de service après 21h30, c) en cas de coupure sur le lieu de travail lorsque l'amplitude couvre la période de repas si le salarié n'a pas été prévenu la veille et si la coupure est supérieure à 1 heure ; qu'attendu qu'au cas d'espèce, M. X... n'a jamais travaillé de manière continue entre 11h et 14h30 et a toujours bénéficié de 30 ou 60 minutes de pause ; que l'amplitude de son service ne couvrait donc pas entièrement la durée de 11h à 14h30 et de 18h30 à 22 heures ;

1°) ALORS QU'il résulte des dispositions de l'article 8 du protocole du 30 avril 1974 relatif aux frais de déplacement des ouvriers constituant l'annexe n° 1 à la convention collective nationale des transports routiers et des activités auxiliaires du transport, qu'une indemnité de repas est attribuée au salarié pour les journées où il a eu une amplitude de travail couvrant entièrement la période comprise entre 11 heures 30 et 14 heures 30 ou entre 18 heures 30 et 22 heures, ou pour lesquelles il n'a pas disposé d'une coupure ininterrompue d'au moins une heure entre 11 heures et 14 heures 30 ou entre 18 heures 30 et 22 heures ; qu'en l'espèce, la cour d'appel, pour débouter le salarié de sa demande de rappel d'indemnités de repas, a relevé que l'amplitude de son service ne couvrait pas entièrement la durée de 11 heures à 14 heures 30 et de 18 heures 30 à 22 heures puisque le salarié n'avait jamais travaillé de manière continue entre 11 heures et 14 heures 30 et entre 18 heures 30 et 22 heures, ayant toujours bénéficié d'une pause de 30 ou 60 minutes entre 11 heures et 14 heures 30 ; qu'en statuant ainsi, quand l'amplitude correspond au nombre d'heures séparant le début de la journée de travail de son achèvement, temps de pause compris, de sorte que ce n'est pas parce que le salarié bénéficiait d'un temps de pause entre 11 heures à 14 heures 30 que l'amplitude de son service ne couvrait pas entièrement la durée de 11 heures à 14 heures 30 et de 18 heures 30 à 22 heures, la cour d'appel s'est déterminée par un motif inopérant, et privé sa décision de base légale au regard de l'article 8 susvisé ;

2°) ALORS QU'il résulte des dispositions de l'article 8 du protocole relatif aux frais de déplacement des ouvriers constituant l'annexe n° 1 à la convention collective nationale des transports routiers et des activités auxiliaires du transport qu'une indemnité de repas est attribuée au salarié pour les journées où il n'a pas disposé d'une coupure ininterrompue d'au moins une heure entre 11 heures et 14 heures 30, ou entre 18 heures 30 et 22 heures ; qu'en l'espèce, la cour d'appel, pour débouter le salarié de sa demande de rappel d'indemnités de repas, a relevé que le salarié avait toujours bénéficié de 30 ou minutes de pause entre 11 heures et 14 heures 30 ; qu'en statuant ainsi, quand l'indemnité de repas lui était en tout état de cause due pour les jours où il avait eu moins d'une heure de pause, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé l'article 8 susvisé.

QUATRIEME MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté M. X... de sa demande de rappel de salaire, AUX MOTIFS QU'il est constant que le salarié qui assure au moins 4 permanences par mois doit être payé pour 83% de son amplitude en application de la convention collective ; que M. X... soutient que c'est à tort que l'employeur l'a rémunéré sur cette base de 83% de son amplitude de travail (c'est-à-dire avec un abattement de 17%) car il n'effectuait jamais de permanences ; qu'il devait donc seulement être déduit 10% de son amplitude et il devait en percevoir 90% ; que cependant M. X... effectuait des heures supplémentaires majorées à 50% lesquelles ont été déduites légitimement de son amplitude ; que ce chef de demande sera donc rejeté ;

ALORS QU'un motif inintelligible ne met pas la Cour de cassation en mesure d'exercer son contrôle et équivaut à un défaut de motif ; qu'en l'espèce, M. X... faisait valoir que dans la mesure où il n'effectuait aucune permanence, il résultait de l'application des dispositions conventionnelles instaurant un système d'équivalence qu'il aurait dû être rémunéré à hauteur de 90% de l'amplitude de sa durée du travail et non à hauteur de 83% comme cela avait été le cas ; que pour débouter le salarié de sa demande de rappel de salaire, la cour d'appel a jugé que M. X... effectuait des heures supplémentaires majorées à 50% lesquelles ont été déduites légitimement de son amplitude ; qu'en statuant par un tel motif inintelligible, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.

ECLI:FR:CCASS:2013:SO02117
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