Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 27 novembre 2013, 11-22.449, Inédit

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Donne acte à M. X... de ce que, par mémoire en date du 25 octobre 2013, il intervient à l'instance en sa qualité de mandataire judiciaire de la société des Eaux de Saint-Géron, mise en redressement judiciaire le 8 juin 2012 ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Riom, 14 juin 2011), que M. Y..., après sa nomination, le 27 juin 2005, dans les statuts comme membre du comité de direction et directeur général de la société des Eaux de Saint-Géron, a été engagé par celle-ci, à compter du 15 octobre 2005, en qualité de directeur d'usine ; qu'il a été licencié le 17 juin 2008, pour faute grave, et démis de ses mandats sociaux le 28 juillet 2008 ; qu'il a contesté le bien-fondé de son licenciement devant la juridiction prud'homale et demandé la condamnation de la société à lui payer diverses sommes au titre de la rupture du contrat de travail et de la clause de non-concurrence ;

Sur le premier moyen :

Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur ce moyen qui ne serait pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;

Sur le deuxième moyen :

Attendu que la société et M. X... font grief à l'arrêt de décider que le licenciement n'était pas motivé par une faute grave, ni même par une cause réelle et sérieuse, de condamner en conséquence la société à payer au salarié diverses sommes au titre de la rupture du contrat de travail et de la clause de non-concurrence, et à rembourser à Pôle emploi les indemnités de chômage versées au salarié alors, selon le moyen :

1°/ que la faute grave, qui résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits, imputables au salarié, constituant une violation des obligations s'attachant à son emploi, d'une telle importance qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise, n'implique pas nécessairement que le comportement reproché au salarié procède de sa mauvaise volonté ; que la cour d'appel a en l'espèce constaté que plusieurs des manquements reprochés au salarié dans l'exécution de son contrat de travail étaient établis, à savoir le « surdimensionnement de l'usine, les effectifs pléthoriques, le matériel sous utilisé, une communication faible avec le personnel, une méconnaissance chez le salarié de l'activité commerciale (¿) la sous occupation du personnel, l'inexpérience de la force de vente, et l'existence de dépenses non prioritaires » ; qu'en écartant néanmoins la faute grave au seul motif que la société des Eaux de Saint-Géron « ne produit aucun élément de nature à établir que ces insuffisances auraient procédé d'une mauvaise volonté de M. Y... », la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1232-1, L. 1235-3, L. 1234-1 et L. 1332-4 du code du travail ;

2°/ que les juges du fond sont tenus de vérifier la réalité et le sérieux des griefs énoncés dans la lettre de licenciement ; qu'outre les griefs de licenciement écartés par la cour d'appel, la société reprochait également au salarié d'avoir mis en place un système de déférisation « sans mettre en oeuvre un appel d'offre, sans comparer les devis » engendrant des coûts exorbitants ainsi que de graves problèmes bactériologiques, d'avoir fait preuve d'une inertie récurrente concernant la question de la « supervision des achats et expédition », d'avoir abandonné ses missions commerciales, d'avoir menti sur ses contacts avec la grande distribution, d'avoir divulgué de fausses informations sur le site internet s'agissant des distributeurs partenaires, d'avoir vendu ses titres en pleine période de crise, et enfin d'avoir eu pour objectif de se faire licencier pour percevoir ses indemnités de départ ; qu'en omettant de vérifier si ces griefs visés dans la lettre de licenciement ne caractérisaient pas une faute grave, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1232-1, L. 1232-6, L. 1235-3 du code du travail ;

3°/ qu'à supposer que la cour d'appel ait implicitement jugé que ces griefs ne constituaient pas un motif disciplinaire, en statuant de manière affirmative sans motiver sa décision sur ce point, la cour d'appel a en tout état de cause violé l'article 455 du code de procédure civile ;

4°/ que présentaient un caractère disciplinaire les griefs, visés dans la lettre de licenciement, reprochant au salarié d'avoir indiqué faussement au comité de direction avoir des contacts auprès de la grande distribution, avoir divulgué des informations mensongères sur le site internet de l'entreprise, avoir laissé la situation se dégrader auprès des créanciers et laisser les dettes se cumuler sans intervenir, s'être placé dans une situation d'obstruction, avoir argué à ses subordonnés qu'il « attendait la fin » et que la situation catastrophique de l'entreprise n'était pas « son problème » compte tenu du montant élevé des indemnités de rupture auxquelles il pouvait prétendre, avoir vendu ses parts en pleine période de crise, avoir démotivé ses subordonnés, leur avoir indiqué avoir pour objectif de se faire licencier, et avoir menti sur la réalité de ses compétences et de son expérience dans les métiers de l'eau lors de son embauche ; qu'en retenant au contraire, pour décider que le licenciement pour faute grave était injustifié, que « l'essentiel des griefs reprochés à Philippe Y..., à l'exception de ceux tirés de la volonté qu'il aurait eue de tromper les actionnaires sur la situation réelle de l'usine et de sa déloyauté à l'occasion du licenciement de Mme Z..., (¿), sont constitutifs d'insuffisances professionnelles », la cour d'appel a dénaturé la lettre de licenciement de M. Y... et violé l'article 1134 du code civil ;

5°/ qu'en retenant que les griefs précités, visés dans la lettre de licenciement, étaient « constitutifs d'insuffisances professionnelles », alors qu'ils constituent sans conteste des motifs disciplinaires, la cour d'appel a violé les articles L. 1232-1, L. 1235-3, L. 1234-1 et L. 1332-4 du code du travail ;

6°/ qu'enfin, en décidant que le grief tiré « de sa déloyauté à l'occasion du licenciement de Mme Z... (¿) était non établi », sans s'expliquer sur ce point, et notamment sans analyser l'attestation de M. A..., indiquant que, lors de l'entretien préalable au licenciement de la salariée, M. Y... avait méconnu ses responsabilités et s'était désolidarisé de manière déloyale du président de la société en indiquant qu'il n'avait pas de faute à reprocher à la salariée, la cour d'appel a derechef violé l'article 455 du code de procédure civile ;

Mais attendu que la cour d'appel qui, après avoir examiné l'ensemble des griefs invoqués dans la lettre de licenciement et les éléments de preuve qui lui étaient soumis, a retenu que ces griefs relevaient, à défaut de mauvaise volonté délibérée, d'une insuffisance professionnelle, en a déduit à bon droit que le licenciement, prononcé pour faute grave, était dépourvu de cause réelle et sérieuse ;

Que le moyen qui, sous couvert de dénaturation, de manque de base légale et de violation de la loi, ne tend qu'à remettre en cause l'appréciation souveraine des juges du fond, n'est pas fondé ;

Sur le troisième moyen :

Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur ce moyen qui ne serait pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société des Eaux de Saint-Géron et M. X..., ès qualités, aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société des Eaux de Saint-Géron et M. X..., ès qualités, à payer à M. Y... la somme globale de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-sept novembre deux mille treize.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits par la SCP Célice, Blancpain et Soltner, avocat aux Conseils, pour la société des Eaux de Saint-Géron et M. X..., ès qualités

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté la Société des EAUX DE SAINT GERON de sa demande d'annulation du contrat de travail de Monsieur Y..., d'AVOIR en conséquence condamné la Société des EAUX DE SAINT GERON à payer à Monsieur Y... les sommes de 297. 408 ¿ au titre de l'indemnité conventionnelle de rupture, 37. 176 ¿ au titre de l'indemnité compensatrice de préavis, outre les congés payés afférents, 11. 439, 30 ¿ au titre du rappel de salaire afférent à la période de mise à pied, outre les congés payés afférents, 74. 352, 00 ¿ à titre de dommages-intérêts et 356. 889, 60 ¿ au titre de la clause de non concurrence, outre la somme de 1. 000 ¿ au titre de l'article 700 du code de procédure civile, et d'AVOIR ordonné le remboursement par la Société des EAUX DE SAINT GERON au POLE EMPLOI des indemnités de chômage versées à Monsieur Y... suite à son licenciement, dans la limite de six mois ;

AUX MOTIFS QUE « d'abord, et pour une première part, les conditions d'antériorité des fonctions salariées prévues par l'article L. 225-22 du code du commerce pour les administrateurs de sociétés anonymes ne sont pas applicables à la société par actions simplifiées, en vertu de l'article L. 227-1 du même code, de sorte que le contrat de travail de Philippe Y... ne saurait être annulé au seul motif qu'il a été conclu après sa nomination comme Directeur Général de la société DES EAUX DE SAINT-GERON ; que, pour une seconde part, au regard du même article L. 227-1 du code de commerce, le principe d'ordre public de la révocabilité ad nutum prévu par l'article L. 225-47 alinéa 3 du même code est inapplicable dans une société par actions simplifiée, ce dont il résulte que le contrat de travail de Philippe Y... ne peut davantage être annulé au seul motif que les avantages et indemnités exorbitants, selon la société DES EAUX DE SAINT-GERON, stipulés par son contrat de travail, lui auraient été en réalité octroyés en vue de faire échec à ce principe ; que s'il n'existe pas d'incompatibilité de principe entre un contrat de travail et un mandat social, c'est à la condition que les fonctions salariées qui doivent correspondre à un emploi effectif soient exercées dans un état de subordination à l'égard de la société et que les intéressés perçoivent une rémunération distincte de celle qui peut leur être allouée comme mandataire social ; qu'en l'espèce et en premier lieu le contrat de travail de Philippe Y... stipulait que ses attributions seraient notamment les suivantes :- direction des services présents dans l'usine ;- supervision des achats et des expéditions ;- mise en oeuvre de la politique de la société ;- les relations sociales de l'usine ;- les relations avec les élus et les administrations ; les relations avec les clients ; qu'il résulte de cette liste que les missions de Philippe Y... avaient fait l'objet d'une détermination précise et que son activité salariée présentait une spécificité et une technicité particulière ; que de telles attributions lui conféraient un pouvoir de gestion de l'usine qu'il était chargé de diriger ; que notamment, il ressort du témoignage d'un ancien salarié de la société DES EAUX DE SAINT-GERON, M. B..., et de l'avenant à son contrat de travail, que Philippe Y..., jusqu'au mois de juillet 2007, était investi, entre autres fonctions techniques, de celles de directeur commercial ; que son contrat de travail, dans son préambule, stipulait qu'il est un professionnel du métier " de l'eau " ; qu'il possède une solide et longue expérience en la matière comme le démontre ses états de services à la Direction de la Source de Sainte Marguerite ; qu'il s'est occupé précédemment pendant dix ans des problèmes techniques et administratifs de la source de Saint Géron et il a noué de nombreux contacts avec des investisseurs potentiels pendant la même période ; que la société DES EAUX DE SAINT GERON reconnaît aussi dans ce préambule que sans le travail effectué en amont par Philippe Y..., la SAS DES EAUX DE SAINT-GERON n'aurait pas pu voir le jour et qu'elle s'est rapprochée de lui afin qu'il en assure la direction technique ; qu'il résulte ainsi du contrat de travail que Philippe Y... a été engagé en qualité de directeur d'usine en raison de ses connaissances et compétences professionnelles dans le domaine des exploitations des eaux de source ; que s'il est constant que l'usine dirigée par Philippe Y... était la seule appartenant à la société DES EAUX DE SAINT-GERON, celle-ci n'établit pas pour autant que son entreprise était d'une taille trop petite pour permettre une distinction aisée entre les fonctions sociales et techniques de l'intéressé ; que sa mission contractuelle de " mise en oeuvre de la politique de la société ", s'inscrivait bien dans le cadre de ses fonctions de directeur d'usine ayant pour objet la réalisation des objectifs fixés par les organes de gestion de la société DES EAUX DE SAINT-GERON ; que les pouvoirs dont il disposait (pouvoir de signer au nom de la société des chèques, de négocier des contrats avec des distributeurs de bouteilles d'eau ou des fabricants de bouteilles, de conclure des contrats de travail, de négocier des échéanciers de paiement avec les organismes de Sécurité Sociale) n'excédaient pas ceux qui lui étaient nécessaires pour exercer les attributions qui lui avaient été confiées dans son contrat de travail ; qu'il résulte ainsi de ces éléments qu'il exerçait des fonctions techniques nettement dissociées de ses fonctions de direction relevant de son mandat social ; en second lieu, que les éléments du débat font apparaître qu'il était soumis à un contrôle dans l'exercice de ses missions, de la part du Comité de Direction de la société DES EAUX DE SAINT-GERON ou de son Président ; Qu'ainsi, un tel contrôle ressort d'une lettre de M. C..., en date du 11 janvier 2008, dont il a été le destinataire, par laquelle le Président de la société DES EAUX DE SAINT GERON, pour la période du 11 au 17 janvier 2008, lui a donné des instructions très précises en vue du paiement de plusieurs créances de nature diverses (créances fiscales, remboursement d'échéances de crédit, créances de fournisseurs...) ; qu'aux termes de cette lettre, M. C... lui demandait en effet de " respecter scrupuleusement pour les jours à venir " ce " plan de paiement ", demande qui n'aurait pu être présentée si Philippe Y..., comme le soutient la société DES EAUX DE SAINT-GERON, n'avait été soumis à aucun lien de subordination ; enfin que Philippe Y... percevait une rémunération distincte pour ses activités de directeur d'usine ; que notamment, ses bulletins de paie mentionnent que son emploi est celui d'un directeur d'usine, et non pas de Directeur Général de la société DES EAUX DE SAINT-GERON ; qu'il importe peu que les statuts n'aient pas prévu de le rémunérer pour ses fonctions sociales ; que dans ces conditions qu'il résulte de l'ensemble de ces éléments que le contrat de travail conclu le 16 juillet 2005 n'était pas fictif ; qu'il n'est pas établi en outre que ce contrat a été conclu pour permettre à Philippe Y... de bénéficier du régime de l'assurance chômage, dans un but de fraude ; qu'une telle fraude ne saurait résulter de la conclusion du contrat de travail postérieurement à sa désignation comme Directeur Général ; qu'en outre, les statuts de la société DES EAUX DE SAINT-GERON envisageaient même une telle indemnisation puisqu'il résulte de l'article 20 des dits statuts que la révocation du Directeur Général, si elle ne lui ouvre droit à aucune indemnisation au titre de son mandat social, ne lui fait pas perdre ses droits tirés de l'application de la convention collective et de son contrat de travail ; que dans ces conditions que la société DES EAUX DE SAINT-GERON sera déboutée de sa demande d'annulation du contrat de travail » ;

ALORS, D'UNE PART, QUE les causes de la révocation du Président et des autres dirigeants de la société par actions simplifiée sont librement déterminées dans les statuts de la société ; qu'en retenant « qu'au regard du même article L. 227-1 du code de commerce, le principe d'ordre public de la révocabilité ad nutum prévu par l'article L. 225-47 alinéa 3 du même code est inapplicable dans une société par actions simplifiée, ce dont il résulte que le contrat de travail de Philippe Y... ne peut davantage être annulé au seul motif que les avantages et indemnités exorbitants, selon la société DES EAUX DE SAINT-GERON, stipulés par son contrat de travail, lui auraient été en réalité octroyés en vue de faire échec à ce principe » (arrêt p. 7 § 2), sans rechercher si les statuts de la SAS des EAUX DE SAINT GERON ne prévoyaient pas néanmoins la révocation ad nutum des fonctions de Directeur Général, et si, comme soutenu par l'exposante, le montant exorbitant des indemnités accordées à Monsieur Y... en cas de rupture de son contrat de travail ne lui avait pas en conséquence été octroyé pour faire échec au principe statutaire de révocation ad nutum, ce qui frappait ledit contrat de travail de nullité, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 227-1, L. 227-7 et L. 225-47 du code de commerce et L. 1221-1 du code du travail ;

ALORS, D'AUTRE PART, QU'en cas de cumul d'un mandat social et d'un contrat de travail, l'état de subordination caractérisant le contrat de travail doit concerner les fonctions techniques exercées cumulativement avec le mandat social et ne saurait résulter des seules directives émanant des autres organes de la société qui ne concernent que l'activité de mandataire social ; qu'en se bornant à faire état de l'existence d'un contrôle de Monsieur Y... « dans l'exercice de ses fonctions, de la part du Comité de Direction de la Société des EAUX DE SAINT-GERON ou de son Président », en se fondant exclusivement sur un courrier du Président du 11 janvier 2008 donnant des instructions à Monsieur Y... concernant un plan de paiement, sans constater, ni rechercher si ce contrôle du Président ou du Comité de Direction ne concernait pas les seules activités de l'intéressé en tant que Directeur Général, mandataire social, ce qui n'était pas de nature à caractériser un lien de subordination au sens du code du travail, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 227-1, L. 227-6 et L. 227-7 du code de commerce et L. 1221-1 du code du travail ;

ALORS, DE TROISIEME PART, QUE l'existence d'une relation de travail ne dépend ni de la volonté exprimée par les parties, ni de la dénomination qu'elles ont donnée à leur convention, mais des conditions de fait dans lesquelles est exercée l'activité des travailleurs ; qu'en se bornant à viser les clauses du contrat de travail de Monsieur Y... pour déduire l'existence d'une relation de travail subordonnée, en plus de son mandat de Directeur Général, sans rechercher si dans les faits l'intéressé exerçait effectivement une activité salariée et s'il était réellement soumis à ce titre à un pouvoir de direction, de contrôle et de sanction de la part de la Société des EAUX DE SAINT GERON, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1221- 1du code du travail ;

ALORS, DE QUATRIEME PART, QU'au demeurant en déduisant l'existence d'un contrat de travail du seul constat selon lequel, aux termes de son contrat de travail, Monsieur Y... disposait des pouvoirs de signer des chèques au nom de la société, de négocier les échéancier de paiement avec les créanciers de la société, de conclure les contrats de travail et négocier les contrats avec les distributeurs et fabricants de bouteilles, de diriger l'usine et enfin de mettre « en oeuvre la politique de la société », ce qui relevait des missions sociales de Directeur Général et ne caractérisait pas l'exercice de fonctions techniques distinctes, la cour d'appel a violé des articles L. 227-1, L. 227-6 et L. 227-7 du code de commerce et L. 1221-1 du code du travail.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION (à titre subsidiaire)

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR décidé que le licenciement de Monsieur Y... n'était pas motivé par une faute grave, ni même par une cause réelle et sérieuse, d'AVOIR en conséquence condamné l'exposante à payer à Monsieur Y... les sommes de 297. 408 ¿ au titre de l'indemnité conventionnelle de rupture, 37. 176 ¿ au titre de l'indemnité compensatrice de préavis, outre les congés payés afférents, 11. 439, 30 ¿ au titre du rappel de salaire afférent à la période de mise à pied, outre les congés payés afférents, 74. 352, 00 ¿ à titre de dommages-intérêts et 356. 889, 60 ¿ au titre de la clause de non concurrence, outre la somme de 1. 000 ¿ au titre de l'article 700 du code de procédure civile, et d'AVOIR ordonné le remboursement par la Société des EAUX DE SAINT GERON au POLE EMPLOI des indemnités de chômage versées au salarié suite à son licenciement, dans la limite de six mois ;

AUX MOTIFS QUE « la lettre de licenciement, qui fixe les limites du litige, est rédigée comme suit : " (...) Ainsi que nous vous l'avons exposé lors de l'entretien, les motifs du ce licenciement sont les suivants : Nous vous avons embauché en qualité de Directeur Technique eu égard à l'expérience que vous nous indiquiez avoir acquis dans le cadre de la Direction de la Source de Sainte Marguerite (...). Or, il s'avère que manifestement les compétences que vous avez fait valoir auprès de nous lors de votre embauche n'étaient nullement le reflet de la réalité. A ce jour votre incompétence s'est exprimée dans l'ensemble de vos champs d'activité et aboutit aujourd'hui à une véritable mise en danger de la société qui nous contraint évidemment à mettre fin à vos fonctions (...). (...) Or il s'avère que pour chacune de vos attributions mentionnées dans votre contrat de travail, notre constat est à ce jour accablant et vos manquements gravissimes. 1. Sur la mise en oeuvre de la politique de la société :- Eu égard à votre compétence de " Professionnel de l'Eau " et de Directeur Technique de la société, vous aviez en charge de définir et de mettre en place le processus technique adapté au besoin de production de la source et notamment de choisir la ligne d'embouteillage adaptée ; Fort de votre expertise un objectif de production de 30 millions de bouteilles par an était déterminé. Or, il s'est avéré très rapidement qu'une telle production était utopique sur les premières années. En tout et pour tous en 2006 le nombre de bouteilles produites a été de 200. 000 et en 2007 de 1. 200. 000. Il s'en est suivi que le système de déférisation dont vous avez fait choix, sans mettre en oeuvre un appel d'offre, sans comparer les devis était non seulement très coûteux mais également totalement surdimensionné et inadapté, ne nous laissant aucune possibilité de pouvoir l'adapter à une production moindre. Prévu pour produire 3m3/ heure nous avons dû jeter des millions de litre d'eau... pour finir par colmater le forage du fait d'un tirage insuffisant, entraînant par la même des problèmes bactériologiques conséquents (...). Votre incompétence a donc été totale. Allant plus loin vous n'avez rien fait pour tenter de trouver des solutions cohérentes, nous laissant faire face à une situation que seuls vos manquements professionnels avaient suscitée (...).- Dans le même temps en juin 2006, vous faisiez choix devant le Comité de direction, pour le conditionnement de l'eau d'une bouteille carrée, concept se voulant résolument original. Encore une fois, vous n'avez mis en oeuvre aucun appel d'offres, n'avez pris conseil auprès d'aucun expert, alors même que vous étiez très tôt alerté par le laboratoire SAINT GOBAIN sur le fait qu'il s'agissait là d'un projet dangereux les bouteilles carrées étant réputées pour se briser facilement. Vous avec poursuivi dans votre idée nous garantissant la possibilité d'une telle réalisation et mandatiez la VOA pour ce faire. En septembre 2007 la VOA vous indiquait, après que 3 moules aient été réalisés et toute notre campagne de distribution mise en oeuvre sur l'originalité de notre bouteille, que cette réalisation était impossible. Au total nous avons dû changer la chaîne d'embouteillage, soit un coût de 150. 000 ¿ pour une société en grande difficulté, gérer un contentieux avec la VOA mais surtout ce n'est qu'en avril 2008 que nous pouvions enfin disposer d'une bouteille. Là encore, vos manquements professionnels sont inacceptables et nous sommes bien loin des compétences que vous aviez su nous vanter lors de votre embauche. Tant en amont qu'en aval votre force de proposition a été inexistante et la société du fait de vos manquements placée au bord du dépôt de bilan. 2. Sur la supervision des achats et des expéditions. Nous sommes contraints de constater que pour ce qui concerne les achats et les expéditions, votre absence de diligences est absolument totale puisque vous n'avez absolument rien mis en oeuvre à ce titre. Vous ignorez jusqu'aux coûts unitaires applicables dans l'entreprise. En 2007 lors d'une réunion avec des consultants extérieurs vous étiez incapable de donner le prix de revient d'une bouteille ¿ En février 2008 interrogé par les actionnaires sur le nombre de bouteilles produites vous n'étiez pas plus capable de répondre à l'interrogation des actionnaires... Ceci se passe de commentaires.- Pour ce qui concerne les expéditions, là encore votre inertie a été totale puisque vous n'avez fait aucune proposition à ce titre et que nous avons été contraints d'embaucher un salarié de décembre 2007 à mars 2008 pour rechercher les meilleurs tarifs de transports en France et faire donc votre travail à votre place. 3. Sur les relations avec les clients, là encore votre intervention commerciale est parfaitement inexistante comme le démontrent d'ailleurs les chiffres de l'entreprise. Vous ne tentez d'ailleurs même pas de motiver vos équipes et de leur donner les moyens de réaliser leurs fonctions comme l'a démontré votre incapacité le 5 mai 2008 à apporter à l'un des commerciaux de l'entreprise, M. E..., le soutien auquel il pouvait prétendre. Celui-ci vous appelant de Nîmes pour vous indiquer qu'il lui manquait des sets de table, indispensables à ses clients pendant la Féria, vous lui répondez qu'il n'a qu'à faire l'aller retour de Nîmes à Saint-Géron pour en récupérer... et ce alors que des sets sont disponibles à Nîmes chez l'un de nos distributeurs... Ceci démontre que vous n'avez aucune connaissance des ressources dont vous disposez et ne mettez rien en oeuvre pour apporter à votre équipe le soutien qu'ils sont en droit d'attendre de vous et pour permettre à votre société de faire les chiffres qui seuls lui permettront de se redresser. Interrogé par le Comité de direction en février 2008 sur les démarches commerciales que vous envisagiez pour nous permettre de redresser la barre, vous avez alors indiqué avoir des contacts auprès de la grande distribution et avez mis en avant le Chiffre d'affaires pouvant en découler. Lorsque je vous ai relancé en mai 2008 sur le sujet vous m'avez répondu attendre des réponses. La réalité est que vous ne disposez d'aucun contact avec la grande distribution et n'avez fait aucune démarche pour en avoir. Il s'agissait là d'un moyen pour vous de faire patienter le Comité de direction. Vous avez ainsi la démonstration de votre volonté de tromper les actionnaires sur votre travail et de leur cacher la situation réelle de l'Usine. Depuis le mois de février les noms de distributeurs qui ont arrêté de travailler avec nous n'ont toujours pas été retirés du site internet. Le 23 mai dernier cela n'étant toujours pas fait et suite aux plaintes des distributeurs j'ai donc dû faire le nécessaire personnellement. Ceci relevait de vos attributions et non des miennes. 4- Sur les relations avec les élus et les administrations. Vos relations avec les Administrations sont totalement inexistantes. La société du fait de ses difficultés économiques a dû faire face à des relances de la part de l'URSSAF, des ASSEDICS, des Caisses de Retraites et de ses banques. Vous avez laissé la situation se dégrader. Alors que nous étions convoqués le 14 février devant le tribunal de commerce pour justifier de notre capacité à rétablir la situation de la société, j'ai été moi-même contraint d'intervenir le 13 février, du fait de votre inertie totale, auprès des URSSAF et des ASSEDIC pour obtenir un échéancier, ceux-ci ayant menacé de nous assigner (...). Vous avez parfaitement connaissance de ce que si un échéancier nous a été finalement accordé, il nous avait été rappelé qu'au moindre manquement à cet échéancier ne serait accepté. Le premier échéancier commençait le 31 mars 2008 avec une première échéance de 4. 000 ¿. Or vous avez oublié de payer cette première échéance. Votre seule réponse lorsque je vous ai interpellé sur ce point a été de m'indiquer le 1er avril 2008 " j'ai oublié ". Je découvrais par la suite qu'il en était de même pour :- l'échéancier que nous avions obtenu auprès de la banque HSBC pour les 50. 000 ¿ que nous leur devions sur 10 mois, échéancier qui datait du 25 mars 2008 ;- les ASSEDICS qui suite à des échéances impayées et à votre absence totale de démarches auprès d'eux pour tenter de trouver un accord nous adressait un huissier. Un accord fut trouvé le 21 mai du fait de mon intervention, alors que la demande des ASSEDICS datait du 25 mars.- les Caisses de Retraites ISICA et AG2R que vous m'avez là encore indiqué avoir tout simplement oubliées. Début avril, je constatais que nous n'avions plus de chéquier. Là encore vous aviez tout simplement oublié d'en faire la demande... Vous n'ignorez pas que le Service Comptabilité, suite au départ de la Chef Comptable, se trouvait composé uniquement d'une Comptable débutante et qu'il convenait bien entendu que vous vous assuriez de ce que les engagements que nous avions nous-mêmes pris auprès des Administrations et dont l'importance n'avait pas besoin de vous être rappelée, allaient être assurés. ¿ 5- Sur la Direction des Services présents dans l'usine et les relations sociales de l'usine. Quelle n'a pas été ma surprise le 8 avril 2008, alors que je procédais à la visite de l'usine avec un nouvel investisseur potentiel, de m'entendre dire par Mademoiselle Elodie F..., responsable du laboratoire, qu'en sa qualité de déléguée du personnel, qu'elle ne souhaitait plus avoir aucun contact avec vous. Mademoiselle F... a alors porté à mon attention le fait que votre désintérêt pour les différents Services de l'entreprise était manifeste et que les salariés étaient parfaitement démotivés devant l'absence totale de management à laquelle ils se trouvaient confrontés. Elle m'a d'ailleurs indiqué qu'elle entendait démissionner, toutes ses interventions pour tenter de vous alerter sur la situation étant demeurées vaines. J'ai alors pu faire le tour de l'ensemble des Services et constater qu'effectivement certains salariés clés de l'usine étaient sur le point de démissionner, tant leur démotivation était grande et tant ceux-ci avaient l'impression qu'aucune stratégie et aucun objectif n'étaient mis en place. Ceci était notamment le cas de Monsieur Laurent G..., Responsable de production. Vous ne nous avez jamais fait part d'une telle situation et n'avez manifestement porté aucun intérêt à vos équipes. Vous êtes seul responsable d'avoir non seulement suscité ce mécontentement mais également de l'avoir laissé s'installer sans réagir. Tout ceci n'est plus acceptable et met en péril l'entreprise ;- Sur votre comportement inacceptable, fin mars 2008, alors que Madame Catherine Z... était convoqué à un entretien préalable à son licenciement, vous lui indiquiez devant le conseiller qui l'assistait que si " c'était vous vous ne l'auriez pas licenciée... ". Votre attitude est inacceptable et est la démonstration de la façon dont vous vous êtes volontairement placé dans une situation d'obstruction et de démotivation de vos équipes, vous abstenant dans le même temps de relayer au Conseil d'administration la réalité d'une situation que vous avez tout fait pour générer. Votre déloyauté est manifeste et la mise en danger de l'entreprise évidente puisque vous ne pouviez ignorer le risque que votre comportement suscitait pour l'entreprise. Le 28 avril 2008 vous avez indiqué à Monsieur H... qui réalisait un Audit au sein de l'entreprise que vous " attendiez la fin " et que vous " n'étiez plus motivé ". Vous n'avez pas hésité en outre, dans un contexte financièrement difficile face auquel nous nous débattions, à diffuser dans l'entreprise le fait que cette situation n'était pas votre problème car en cas de licenciement vous percevriez une indemnité de 240. 000 ¿ et qu'en outre vous connaissiez des repreneurs susceptibles de reprendre l'affaire. Le 6 mai 2008 vous vendiez vos parts, ce qui est un geste extrêmement emblématique eu égard aux fonctions que vous occupez et à votre comportement actuel. Vos manquements sont gravissimes et rendent votre maintien dans l'entreprise impossible. Nous pensons en outre, qu'il s'agit là désormais d'une attitude volontaire de votre part, votre objectif semblant être de vous faire licencier pour ainsi bénéficier de l'indemnité prévue dans votre contrat (...). La réalité de votre niveau de compétence et d'expérience est bien loin de celui que vous avez fait valoir auprès de nous pour vous voir accorder une telle indemnité. Notre consentement a été totalement vicié par les informations que vous nous avez transmises et qui étaient complètement erronées sur votre connaissance du " métier de l'eau ". Nous avons pu au contraire constater quotidiennement votre incompétence. Pour l'ensemble des raisons ci-dessus exposées nous avons fait choix de vous licencier pour faute grave (...) " ; que la charge de la preuve de la faute grave pesant sur l'employeur, il lui appartient de produire les éléments propres à établir la réalité des manquements qu'il reproche à son salarié ; que si une insuffisance professionnelle peut caractériser une cause réelle et sérieuse de licenciement, elle ne peut pas être constitutive d'une faute ; qu'en l'espèce et en premier lieu la société DES EAUX DE SAINT-GERON, pour justifier de la faute grave reprochée à Philippe Y..., allègue dans ses écritures :- que Philippe Y... n'a appliqué aucune procédure de blocage des lots, ou de rappel de bouteilles, ainsi qu'en atteste Mlle F..., responsable qualité, alors que la société avait dû faire face à des problèmes de contaminations bactériologiques ;- que le salarié a déclaré s'être occupé pendants des dizaines d'années, sans aucun défraiement, des problèmes techniques et administratifs de la source de Saint-Géron, alors que c'était un mensonge ; que toutefois ces motifs n'étant pas indiqués dans la lettre de licenciement, la société DES EAUX DE SAINT-GERON ne sauraient les invoquer pour caractériser les fautes graves reprochées ; qu'en deuxième lieu au regard des écritures de Philippe Y..., celui-ci dénie l'existence des griefs suivants invoqués dans la lettre de licenciement :-1°) compétences alléguées lors de l'embauche qui n'ont pas été le reflet de la réalité et consentement de l'employeur vicié par les informations erronées transmises relatives à sa connaissance des métiers de " l'eau " ;-2°) choix défectueux du système de déférisation, de la ligne d'embouteillage et du conditionnement de l'eau dans une bouteille carrée ;-3°) incapacité de Phi lippe Y..., lors d'une réunion au mois de février 2007, et d'une autre en février 2008 à pouvoir donner le prix de revient d'une bouteille et le nombre de bouteilles produites ; aucune proposition faite en ce qui concerne les expéditions ;-4°) interven tion commerciale inexistante ; aucun contact établi avec la grande distribution et aucune démarche faite en ce sens, en dépit des engagements pris ;-5°) absence de retrait du site internet du nom des distributeurs qui ont arrêtés de travailler avec la société ;-6°) absence de relation avec les administrations (URSSAF, ASSEDICS, Caisses de retraite, Banques) ; non respect des échéanciers accordés par ces organismes pour le paiement des dettes de la société ; défaut de demande d'un chéquier à la banque, par suite d'un oubli ;-7°) démotivation des " salariés clés " de l'entreprise, en raison de l'absence de stratégie et de mise en place d'objectifs ; responsabilité du mécontentement de ces salariés, notamment de M. G..., au point de les conduire à envisager leur démission ;-8°) allégation selon laquelle, lors de l'entretien préalable au licenciement de Mme Z..., M. Y... aurait dit que si c'avait été lui, il ne l'aurait pas licencié ;- manifestation de démotivation, le 28 avril 2008, devant M. H... ; que les pièces produites par la société DES EAUX DE SAINT-GERON ne font pas la preuve de tous ces griefs ; qu'ainsi la lettre de M. I... (pièce 14), par laquelle il affirme n'avoir jamais eu de coopération technique ou de gestion avec Philippe Y..., ne peut suffire à établir l'allégation selon laquelle ce dernier aurait vicié le consentement de la société DES EAUX DE SAINT-GERON en transmettant des informations erronées sur ses connaissances ; que le procès-verbal de la réunion du Comité de Direction du 29 janvier 2008 (pièce 15) n'établit pas que lors d'une réunion le mois suivant avec les membres du Comité de Direction, M. Y... n'a pas été en mesure de leur indiquer le nombre de bouteilles produites ; que la lettre de M. J... en date du 11 avril 2008 (pièce 19), adressée à M. C..., qui fait état d'un surdimensionnement de l'usine, d'effectifs pléthoriques ; de matériel sous utilisé, une communication faible avec le personnel et une méconnaissance chez Philippe Y... de l'activité commerciale, fait ressortir seulement l'insuffisance professionnelle de ce dernier et non pas des comportements constitutifs de fautes ; qu'il en va de même de l'attestation rédigée par M. G..., responsable de production (pièce 24), par laquelle celui-ci déclare avoir signalé à la fin de l'année 2006 un problème de sureffectif, et constaté une sous occupation du personnel, l'inexpérience de la force de vente, l'existence de dépenses non prioritaires ; que les pièces 30 à 33 n'établissent en rien l'allégation de la société DES EAUX DE SAINT-GERON selon laquelle Philippe Y... aurait fait preuve d'impéritie en choisissant de faire produire des bouteilles carrées ; que pas davantage, elles n'établissent qu'il avait le pouvoir de choisir les lignes d'embouteillage ou le mode de conditionnement de l'eau ; que les pièces 35 et 36 produites par la société DES EAUX DE SAINT-GERON, établissent que Philippe Y..., a proposé au mois de mars 2008 à l'URSSAF, un échéancier pour le paiement des dettes de cotisation, et que cet organisme l'a accepté par un courrier en retour, du 14 mars 2008, mais nullement que l'intimé a oublié de payer le premier terme de ces échéances ; qu'au contraire, ce dernier produit une lettre du 11 janvier 2008 que lui avait adressée M. C..., par laquelle celui-ci lui avait imposé un plan de paiement de plusieurs dettes, ce qui conforte l'allégation du salarié selon laquelle il n'avait aucune latitude dans le maniement des deniers ; que la société DES EAUX DE SAINT-GERON ne produit aucune pièce établissant d'une part qu'elle avait donné à Philippe Y... des instructions pour le paiement du premier terme de l'échéancier accordé par l'URSSAF, et d'autre part que l'intimé n'a pas respecté les échéanciers accordés par les autres organismes ; qu'enfin, pour établir le mécontentement et la démotivation que Philippe Y... aurait provoqué chez les salariés, en raison d'une absence totale de management, la société DES EAUX DE SAINT-GERON produit l'attestation rédigée par Mme Elodie F..., qui était aussi déléguée du personnel ; que ce témoin déclare que depuis 2006, Philippe Y... s'était efforcé de faire régner une mauvaise ambiance, en montant ses cadres les uns contre les autres, et en colportant des rumeurs qui n'avaient rien à voir avec le travail ; qu'elle affirme qu'elle ne pouvait plus mener à bien sa mission, faute d'être consultée lors de la prise de décisions importantes, en rapport avec ses fonctions ; que par la suite, Philippe Y... n'a plus voulu prendre de décision et se serait vanté qu'il était " intouchable " en raison d'un contrat " en béton " et d'un " golden parachute " et que les problèmes rencontrés par la société n'étaient pas de sa faute ; que cependant de tels griefs ne sont pas exactement ceux qui sont reprochés à Philippe Y... dans la lettre de licenciement, et en tous cas n'établissent pas suffisamment le désintérêt de celui-ci pour les services de l'entreprise et son défaut de management ; que les témoignages de Mrs G... et K... (pièces 24 et 25), n'établissent pas de tels griefs ; qu'en troisième lieu l'examen de la lettre de licenciement fait ressortir que l'essentiel des griefs reprochés à Philippe Y..., à l'exception de ceux tirés de la volonté qu'il aurait eu de tromper les actionnaires sur la situation réelle de l'usine et de sa déloyauté, à l'occasion du licenciement de Mme Z..., griefs au demeurant non établis, sont constitutifs d'insuffisances professionnelles ; que la société ne produit aucun élément de nature à établir que ces insuffisances auraient procédé d'une mauvaise volonté de Philippe Y... ; que dans ces conditions que le licenciement de ce dernier, faute de reposer sur des motifs réels ou disciplinaires, est dépourvu de cause réelle et sérieuse » ;

ALORS, D'UNE PART, QUE la faute grave, qui résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits, imputables au salarié, constituant une violation des obligations s'attachant à son emploi, d'une telle importance qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise, n'implique pas nécessairement que le comportement reproché au salarié procède de sa mauvaise volonté ; que la cour d'appel a en l'espèce constaté que plusieurs des manquements reprochés à Monsieur Y... dans l'exécution de son contrat de travail étaient établis, à savoir le « surdimensionnement de l'usine, les effectifs pléthoriques, le matériel sous utilisé, une communication faible avec le personnel, une méconnaissance chez Philippe Y... de l'activité commerciale (¿) la sous occupation du personnel, l'inexpérience de la force de vente, et l'existence de dépenses non prioritaires » (arrêt p. 17 § 5) ; qu'en écartant néanmoins la faute grave au seul motif que la Société des EAUX DE SAINT GERON « ne produit aucun élément de nature à établir que ces insuffisances auraient procédé d'une mauvaise volonté de Philippe Y... » (arrêt p. 18 § 4), la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1232-1, L. 1235-3, L. 1234-1 et L. 1332-4 du code du travail ;

ALORS, D'AUTRE PART ET A TITRE SUBISIDIAIRE, QUE les juges du fond sont tenus de vérifier la réalité et le sérieux des griefs énoncés dans la lettre de licenciement ; qu'outre les griefs de licenciement écartés par la cour d'appel, l'exposante reprochait également à Monsieur Y... d'avoir mis en place un système de déférisation « sans mettre en oeuvre un appel d'offre, sans comparer les devis » engendrant des coûts exorbitants ainsi que de graves problèmes bactériologiques, d'avoir fait preuve d'une inertie récurrente concernant la question de la « supervision des achats et expédition », d'avoir abandonné ses missions commerciales, d'avoir menti sur ses contacts avec la grande distribution, d'avoir divulgué de fausses informations sur le site internet s'agissant des distributeurs partenaires, d'avoir vendu ses titres en pleine période de crise, et enfin d'avoir eu pour objectif de se faire licencier pour percevoir ses indemnités de départ ; qu'en omettant de vérifier si ces griefs visés dans la lettre de licenciement ne caractérisaient pas une faute grave, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1232-1, L. 1232-6, L. 1235-3 du code du travail ;

ALORS, DE TROISIEME PART ET A TITRE PLUS SUBSIDIAIRE, QU'à supposer que la cour d'appel ait implicitement jugé que ces griefs ne constituaient pas un motif disciplinaire, en statuant de manière affirmative sans motiver sa décision sur ce point, la cour d'appel a en tout état de cause violé l'article 455 du code de procédure civile ;

ALORS, DE QUATRIEME PART ET A TITRE INFINIMENT SUBSIDIAIRE, QUE présentaient un caractère disciplinaire les griefs, visés dans la lettre de licenciement, reprochant au salarié avoir indiqué faussement au comité direction avoir des contacts auprès de la grande distribution, avoir divulgué des informations mensongères sur le site internet de l'entreprise, avoir laissé la situation se dégrader auprès des créanciers et laisser les dettes se cumuler sans intervenir, s'être placé dans une situation d'obstruction, avoir argué à ses subordonnés qu'il « attendait la fin » et que la situation catastrophique de l'entreprise n'était pas « son problème » compte tenu du montant élevé des indemnités de rupture auxquelles il pouvait prétendre, avoir vendu ses parts en pleine période de crise, avoir démotivé ses subordonnés, leur avoir indiqué avoir pour objectif de se faire licencier, et avoir menti sur la réalité de ses compétences et de son expérience dans les métiers de l'eau lors de son embauche ; qu'en retenant au contraire, pour décider que le licenciement pour faute grave était injustifié, que « l'essentiel des griefs reprochés à Philippe Y..., à l'exception de ceux tirés de la volonté qu'il aurait eu de tromper les actionnaires sur la situation réelle de l'usine et de sa déloyauté à l'occasion du licenciement de Mme Z..., (¿), sont constitutifs d'insuffisances professionnelles », la cour d'appel a dénaturé la lettre de licenciement de Monsieur Y... et violé l'article 1134 du code civil ;

ALORS, DE CINQUIEME PART ET A TITRE INFINIMENT SUBSIDIAIRE, QU'en retenant que les griefs précités, visés dans la lettre de licenciement, étaient « constitutifs d'insuffisances professionnelles », alors qu'ils constituent sans conteste des motifs disciplinaires, la cour d'appel a violé les articles L. 1232-1, L. 1235-3, L. 1234-1 et L. 1332-4 du code du travail ;

ALORS, DE SIXIEME PART, QU'enfin en décidant que le grief tiré « de sa déloyauté à l'occasion du licenciement de Mme L... (¿) était non établi », sans s'expliquer sur ce point, et notamment sans analyser l'attestation de monsieur A... (pièce d'appel n° 39), indiquan t que, lors de l'entretien préalable au licenciement de la salariée, Monsieur Y... avait méconnu ses responsabilités et s'était désolidarisé de manière déloyale du Président de la Société en indiquant qu'il n'avait pas de faute à reprocher à la salariée, la cour d'appel a derechef violé l'article 455 du code de procédure civile.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION (à titre subsidiaire)

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné la société DES EAUX DE SAINT GERON à verser à Monsieur Y... la somme de 297. 408 euros au titre de l'indemnité conventionnelle de rupture et la somme de 356. 889, 60 euros au titre de la clause de non-concurrence ;

AUX MOTIFS QUE « sur l'indemnité conventionnelle de rupture du contrat de travail : que la société DES EAUX DE SAINT-GERON soutient que Philippe Y... a usé de manoeuvres dolosives pour lui faire croire qu'il avait directement participé à l'exploitation de la source des Eaux de Saint-Géron, et pour obtenir ainsi l'insertion dans le contrat de travail de la clause fixant cette indemnité de rupture ; qu'elle prétend qu'il lui a menti lors de son embauche en lui affirmant que l'exploitation de cette source avait été le résultat de son travail ; qu'elle s'appuie, pour démontrer ce mensonge, sur la lettre de M. I..., le propriétaire de la source, qui affirme n'avoir jamais eu de coopération technique, ni dans la gestion de sa société, avec Philippe Y... ; que cependant qu'il ressort de l'article Il du contrat de travail, qui institue cette indemnité de rupture, qu'elle a été convenue entre les parties, non seulement pour tenir compte du fait que l'exploitation de la sources des Eaux de Saint-Géron par la société DES EAUX DE SAINT-GERON était le résultat du travail de Philippe Y..., mais aussi en raison de sa perte d'emploi, avec ses avantages sociaux et son ancienneté, consécutive a son embauche en qualité de directeur de cette société ; que cette indemnité a été aussi prévue afin de prendre en considération son âge avec les risques que cela comportait pour lui d'accepter un poste de directeur dans une société nouvelle ; Qu'ainsi, à supposer même que Philippe Y... ait menti à la société DES EAUX DE SAINT-GERON, lors de sort embauche, sur la réalité de sa coopération avec M. I..., un tel mensonge, compte tenu des autres motifs mentionnés dans la clause de l'article Il, n'apparaît pas avoir été la cause déterminante de l'engagement pris par l'appelante en vertu de cet article ; qu'ensuite l'indemnité de licenciement, lorsqu'elle est prévue par le contrat de travail, a le caractère d'une clause pénale et peut être réduite par le juge si elle présente un caractère manifestement excessif ; que cependant qu'en l'espèce le montant de l'indemnité contractuelle fixée par les parties à l'article Il n'apparaît pas manifestement excessif, eu égard aux motifs qui ont conduit les parties à la prévoir ; qu'il y a donc lieu de confirmer le jugement en ce qu'il condamne la société DES EAUX DE SAINT-GERON en vertu de cet article Il à payer à Philippe Y... une indemnité de 297. 408 ¿ ; d) sur la clause de non concurrence : que la société DES EAUX DE SAINT-GERON prétend que Philippe Y... a usé de manoeuvres dolosives pour obtenir l'insertion dans le contrat de travail d'une clause de non concurrence ; que cependant, en dehors de ses seules affirmations, elle n'établit la réalité d'aucun fait d'où pourrait résulter un tel dol ; qu'elle considère aussi pour conclure à la nullité de la clause de non concurrence qu'elle est manifestement excessive ; mais que seul le salarié peut agir en nullité de la clause de non concurrence ; que par ailleurs, seules peuvent être modifiées les clauses qui ne permettent pas au salarié d'exercer une activité conforme à sa formation et à son expérience professionnelle ; que la société DES EAUX DE SAINT-GERON n'est donc pas fondée à solliciter l'annulation de la clause de non concurrence au motif que sa contrepartie financière serait excessive ; que celle dont le paiement est sollicité par Philippe Y... a été calculée conformément aux dispositions de l'article 10 du contrat de travail ; qu'il y a donc lieu de confirmer le jugement du conseil de prud'hommes en ce qu'il condamne la société DES EAUX DE SAINT GERON à payer à Philippe Y... une somme de 356. 889, 60 € au titre de cette clause de non concurrence » ;

ALORS QU'est nulle la clause du contrat de travail qui prévoit, en cas de licenciement pour quelque motif que ce soit, le versement d'indemnités d'un montant exorbitant qui interdisent à l'employeur d'exercer son droit de résiliation unilatérale ; qu'en l'espèce, il était stipulé au contrat de travail de Monsieur Y..., d'une part, qu'en cas de résiliation du contrat à l'initiative de la Société des EAUX DE SAINT GERON, Monsieur Y... percevra une indemnité de rupture égale à 24 mois de salaire et d'autre part, qu'en cas de cessation du contrat quelle qu'en soit la cause, Monsieur Y... percevra pendant trois ans une indemnité forfaitaire égale à 80 % de la moyenne mensuelle de son salaire brut des trois derniers mois de présence en contrepartie de son obligation de non-concurrence ou, s'il est dispensé du respect de cette obligation, une indemnité forfaitaire égale à 40 % de la moyenne mensuelle de son salaire brut ; qu'en s'abstenant de rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si, par leur cumul, ces stipulations contractuelles ne paralysaient pas le droit de résiliation unilatérale de la Société des EAUX DE SAINT GERON, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1780 du Code civil, ensemble les articles L. 1121-1, L. 1231-1 et L. 1231-4 du Code du travail.

ECLI:FR:CCASS:2013:SO02068
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