Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 20 novembre 2013, 12-23.864, Inédit

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :



Sur le moyen unique :

Vu l'article 1134 du code civil, ensemble les articles L. 1232-1 et L. 1235-3 du code du travail ;

Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué que l'Office national des forêts, ci-après désigné ONF, a, par courrier du 16 juin 2004, avisé M. X... que sa candidature était retenue comme auxiliaire de protection de la forêt méditerranéenne sur le site de Cucuron, pour un travail débutant le 30 juin 2004 ; que le 22 juin 2004, l'ONF ayant signifié à l'intéressé qu'il ne donnait pas suite à l'embauche, celui-ci a saisi la juridiction prud'homale pour faire juger que le non-respect de la promesse d'embauche s'analysait en une rupture abusive d'un contrat de travail et obtenir des dommages-intérêts ;

Attendu que pour débouter le salarié de sa demande, l'arrêt retient que l'employeur, informé du fait que le bénéficiaire de la promesse avait, dans le passé, commis des faits de violence à l'encontre d'ouvriers de l'équipe du site de Cucuron, devait prendre des mesures préventives pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs, de sorte qu'il avait légitimement rompu la promesse d'embauche ;

Qu'en statuant ainsi, alors que la prise de connaissance tardive par l'employeur de ce que le salarié avait été condamné dans le passé pour des faits de violence ne pouvait constituer en soi une cause de rupture de la promesse d'embauche, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déboute M. X... de sa demande de dommages-intérêts au titre de la rupture abusive de la promesse d'embauche, l'arrêt rendu le 13 octobre 2011, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence, autrement composée ;

Condamne l'Office national des forêts aux dépens ;

Vu l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, condamne l'Office national des forêts à payer à Me Delamarre la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt novembre deux mille treize.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par Me Delamarre, avocat aux Conseils pour M. X...

Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'avoir débouté Monsieur X... de sa demande en paiement de dommages-intérêts pour rupture abusive de la promesse d'embauche,

AUX MOTIFS QUE

« Attendu que par courrier du 22 juin 2004, l'O.N.F avisait Monsieur X... qu'il ne pouvait maintenir sa proposition d'embauche en précisant « Nous avons été informés de différents agissements de votre part, dans le passé, caractérisés par des faits violents à l'encontre d'ouvriers de l'équipe APFM de Cucuron.

Vous comprendrez dans ces circonstances, que nous ne pouvons pas maintenir notre proposition d'embauche pour compléter l'équipe APFM de Cucuron ... »

Que selon le jugement attaqué, la rupture de la promesse d'embauche a un motif légitime tiré de l'article L. 4121-1 du Code du travail.

Qu'en vertu dudit article, l'employeur est tenu d'une obligation de sécurité de résultat en matière de protection de la santé et de la sécurité des travailleurs.

Qu'il est établi par les pièces du dossier que Monsieur X... a été condamné par le Tribunal Correctionnel le 9 mars 1995 , confirmé en appel, à 1 an de prison pour violences volontaires (blessures avec arme blanche) commises en 1992 sur la personne de Monsieur Z... Brahim, lequel a été embauché par l'O.N.F en 1999 et affecté comme ouvrier forestier dans l'équipe APFM de Cucuron depuis.

Que peu importe que ce dernier ait également été condamné dans la même décision pour violences réciproques, il s'évince de ce contexte que l'employeur ne pouvait mettre dans la même équipe de travail deux salariés qui avaient eu un tel différent sans les exposer à un risque certain.

Que l'employeur se doit de prendre des mesures, en l'espèce préventives, pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs.

Qu'il a eu conscience du danger auquel aurait été exposé un de ses salariés de l'équipe de Cucuron et a légitimement mis un terme à la proposition d'embauche.

Qu'il convient de dire, à l'instar du jugement déféré, que la rupture de la promesse d'embauche était dès lors justifiée et de débouter Monsieur X... de sa demande en paiement de dommages et intérêts pour conséquences préjudiciables de celle-ci »,

ALORS, D'UNE PART, QUE

La lettre d'énonciation des motifs de licenciement fixe les limites du litige ; qu'ainsi, alors qu'il n'était nullement prétendu par l'employeur, dans la lettre de licenciement du 22 juin 2004, que la rupture aurait été motivée par le souci de l'employeur « de prendre des mesures, en l'espèce préventives, pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs », la Cour d'Appel a violé l'article L 1232-6 du Code du Travail,

ALORS, D'AUTRE PART, QUE

Il appartenait à l'Office National des Forêts de se renseigner sur la personnalité de l'intéressé, donc sur ses antécédents, avant de l'engager ; que l'Office National des Forêts ne pouvait donc licencier Monsieur X... pour des faits qu'il connaissait, ou aurait dû connaître, lors de son embauche, de sorte que la rupture présentait un caractère abusif ; qu'ainsi, en déboutant Monsieur X... de sa demande en paiement de dommages-intérêts, la Cour d'Appel a violé les articles L 1232-1, L 1235-3 et L 1235-5 du Code du Travail.

ECLI:FR:CCASS:2013:SO01982
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