Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 16 octobre 2013, 12-13.284, Inédit

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Colmar, 16 mars 2011), qu'après avoir démissionné de l'emploi occupé du 1er mai 1993 au 27 janvier 2004 au sein de la société société Olympic club sauna, M. X...a été engagé par la société Equateur sauna en qualité de réceptionniste dans le cadre d'un contrat à durée indéterminée avec effet au 1er février 2004 ; qu'il a été licencié pour faute grave le 22 avril 2005 pour avoir soustrait une cassette du système de vidéo surveillance, l'avoir visionnée et avoir refusé de la restituer spontanément ;

Sur le premier moyen :

Attendu que le salarié fait grief à l'arrêt de dire que son licenciement est justifié par une faute grave et de le débouter de ses demandes d'indemnités de rupture, alors, selon le moyen :

1°/ que sauf mauvaise foi du salarié qu'il appartient à l'employeur d'établir, ne constitue pas une faute grave le fait pour un salarié, travaillant dans un établissement placé sous vidéo ¿ surveillance en raison de l'activité exercée, de soustraire une cassette d'enregistrement aux fins de se constituer une preuve contre son employeur qu'il suspecte, par ce biais, d'écouter les conversations du personnel à son insu ; qu'en se bornant à retenir, pour conclure à une faute grave, que s'il était exact que l'installation de surveillance comportait la possibilité d'effectuer des enregistrements sonores, le salarié n'établissait pas, au moyen de la cassette soustraite qui ne comportait qu'un enregistrement vidéo sans son, un enregistrement illicite des conversations du personnel, la cour d'appel a violé les articles 1315 du code civil, L. 1234-1, L. 1234-5 et L. 1234-9, et L. 1232- 1du code du travail ;

2°/ que n'est pas constitutif d'une faute le fait pour un salarié d'avoir soustrait à l'insu et sans l'autorisation de son employeur des documents de l'entreprise dont il a eu connaissance à l'occasion de l'exercice de ses fonctions pour assurer sa défense dans le cadre d'un litige l'opposant à son employeur ; qu'en retenant, pour décider le contraire, que le salarié ne justifiait pas avoir demandé l'autorisation de son employeur pour se saisir de la cassette de vidéo ¿ surveillance et qu'il ne démontrait ni le sérieux de ses soupçons concernant les enregistrements audio clandestins qu'il imputait à son employeur, ni l'impossibilité dans laquelle il se serait trouvé de vérifier le contenu de la cassette par des moyens légaux ou des procédés juridiquement contrôlés, quand il lui appartenait seulement de vérifier si la cassette de vidéo-surveillance était nécessaire à l'exercice des droits de la défense du salarié, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles L. 1234-1, L. 1234-5 et L. 1234-9, et L. 1232- 1du code du travail ;

3°/ qu'il ressortait des constatations de la cour d'appel que les cassettes de vidéo-surveillance ne pouvaient être conservées par l'employeur que pendant une durée de huit jours, ce dont il résultait que le salarié n'avait pas d'autre choix, pour se pré-constituer une preuve des enregistrements audio clandestins imputés à son employeur, que de s'emparer de la cassette avant que celle-ci ne soit détruite ; qu'en reprochant pourtant au salarié, pour retenir l'existence d'une faute à son encontre, de ne pas justifier de l'impossibilité dans laquelle il se serait trouvé de vérifier le contenu de la cassette par des moyens légaux ou des procédés juridiquement contrôlés, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales qui s'évinçaient de ses propres constatations et partant, a violé les articles L. 1234-1, L. 1234-5 et L. 1234-9, et L. 1232- 1du code du travail ;

4°/ que la soustraction, par un salarié, d'une cassette de vidéo-surveillance du sauna dans lequel il exerce ses fonctions aux fins d'assurer sa défense dans le cadre d'un litige l'opposant à son employeur n'est pas fautive, pourvu que ladite cassette ne soit pas diffusée, peu important le fait que cette dernière soit soumise à un encadrement légal strict destiné à préserver la vie privée de la clientèle ; qu'en se bornant à relever, pour conclure au bien-fondé du licenciement pour faute grave, que la soustraction reprochée au salarié avait porté sur un enregistrement visuel protégé par la loi, dans le contexte particulier d'un sauna et de la nécessaire confidentialité à respecter pour préserver la vie privée de la clientèle, sans à aucun moment constater que cette cassette avait été diffusée, la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard des articles L. 1234-1, L. 1234-5 et L. 1234-9, et L. 1232- 1du code du travail ;

Mais attendu qu'ayant constaté que le salarié ne démontrait ni le sérieux de ses soupçons concernant des enregistrements illicites de conversations privées par l'employeur, ni l'impossibilité dans laquelle il se serait trouvé d'en vérifier le contenu par des moyens légaux ou des procédés juridiquement contrôlés, la cour d'appel a pu retenir que son comportement, ayant consisté à soustraire un support de vidéo surveillance soumis à des règles de conservation strictes liées au respect de la vie privée de la clientèle, rendait impossible son maintien dans l'entreprise et constituait une faute grave ; que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le deuxième moyen :

Attendu que le salarié fait grief à l'arrêt de le débouter de sa demande d'indemnité pour inexécution fautive par l'employeur de ses obligations contractuelles, alors, selon le moyen :

1°/ que la cassation sur le premier moyen critiquant le chef du dispositif relatif au bien-fondé du licenciement devra entraîner, par voie de conséquence et par application de l'article 625 du code de procédure civile, la cassation du chef du dispositif relatif à l'inexécution fautive par l'employeur de ses obligations que la cour d'appel a fondé sur l'inexistence d'un licenciement valide pour faute grave ;

2°/ que les juges sont tenus de répondre aux moyens des parties ; qu'en l'espèce, le salarié faisait valoir que les deux sociétés Olympic Club sauna et Equateur sauna avaient pour dirigeants officiels des gérants de paille, MM. Y...et Z..., que M. A..., véritable dirigeant de fait de ces deux sociétés faisait apparaître en ses lieux et place ; que le salarié, pour établir ses allégations, avaient régulièrement produit, à l'appui de la note en délibéré sollicitée par la cour d'appel, des procès-verbaux d'assemblée générales, des extraits de site internet ainsi qu'un document diffusé par la société Equateur sauna et intitulé « Atrium Equateur H2o- c'est quoi être employé chez nous ? », dont il résultait l'exercice par M. A...d'un pouvoir effectif de direction dans les deux sociétés ; que dès lors en se bornant à relever qu'il résultait d'un document officiel (extrait K-bis) que M. A...n'était pas le gérant des sociétés, sans répondre au moyen pris de l'existence des gérances de paille, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

Mais attendu d'abord que le rejet du premier moyen rend sans portée la première branche du moyen ;

Attendu ensuite qu'appréciant souverainement la valeur et la portée des éléments de preuve qui lui étaient soumis et sans avoir à s'expliquer sur ceux qu'elle entendait écarter, la cour d'appel, qui a répondu aux conclusions prétendument délaissées et n'était pas tenue de suivre les parties dans le détail de leur argumentation, a retenu qu'il était établi que les deux sociétés, employeurs successifs de M. X..., n'avaient pas les mêmes gérants et qu'en tout état de cause, celui-ci, licencié pour faute grave, n'avait subi aucun préjudice du fait d'une perte d'ancienneté éventuellement injustifiée ; que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le troisième moyen :

Attendu que le salarié fait grief à l'arrêt de le débouter de sa demande en nullité du licenciement alors, selon le moyen, que la cassation sur le premier moyen critiquant le chef du dispositif relatif au bien-fondé du licenciement devra entraîner, par voie de conséquence et par application de l'article 625 du code de procédure civile, la cassation du chef du dispositif relatif à la nullité du licenciement, que la cour d'appel a fondé sur les mêmes motifs tirés de la soustraction prétendument fautive par le salarié d'une cassette de vidéo-surveillance de l'établissement ;

Mais attendu que le rejet du premier moyen rend sans portée le troisième moyen ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

condamne M. X...aux dépens ;

Vu les articles 700 du code de procédure civile et 37 de la loi du 10 juillet 1991, rejette la demande ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du seize octobre deux mille treize.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils, pour M. Christophe X...

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit que le licenciement de Monsieur X...était fondé sur une faute grave et d'AVOIR en conséquence débouté Monsieur X...de ses demandes d'indemnités de rupture ;

AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE : « La nature particulière de l'établissement qui appelle la discrétion et la confidentialité justifiait la mise en place d'une vidéo-surveillance qui en l'espèce a été spécialement autorisée par arrêtée préfectoral ; ces cassettes se doivent d'être détruites et ne pas sortir du cadre de l'établissement ; il résulte de l'enquête de police qu'une cassette a été saisie au domicile de Monsieur X...; ce seul fait est constitutif d'une faute grave indépendamment des explications du demandeur qui entendait, selon ses explications, vérifier si la cassette était ou non sonorisée ; encore convient-il de relever que Monsieur X...avait soutenu dans un écrit du 8 avril 2005 qu'il avait restitué la cassette alors qu'une cassette (non sonorisée) a été saisie par la police et restituée par elle ; il est à craindre que le salarié ait dupliqué l'enregistrement et éventuellement diffusé ; la société défenderesse ne pouvait risquer une pareille diffusion et ne pouvait que sanctionner par une mesure d'exclusion un salarié qui a manqué gravement à ses obligations ; »

ET AUX MOTIFS QUE : Sur la nullité du licenciement : Attendu que pour soutenir sa demande additionnelle en annulation du licenciement litigieux et obtenir paiement d'une indemnité de 30 600 ¿ égale à 18 mois de salaire, l'appelant invoque la violence de la rupture du contrat de travail et des faits de harcèlement sur le lieu de travail ayant généré des troubles anxio dépressif et expose que les faits de harcèlement résultent de la mise en place d'un dispositif de vidéo surveillance dans les locaux de la société portant atteinte à sa vie privée avant même qu'une autorisation légale ait été obtenu par l'employeur ; que ce dispositif a été utilisé de façon non conforme, les salariés étant écoutés, y compris dans leurs conversations privées sur le lieu de travail, en violation des articles L 1121-1 et L 1222-4 du Code du travail et de l'article 9 du Code civil, comme le prouvent les copies de cassette réalisées par le salarié, ainsi qu'un constat d'huissier du 4 octobre 2008 ; que les dispositifs d'écoute portent atteinte à la vie privée et à la dignité des salariés sans que l'objectif de surveillance de la caisse puisse justifier cet état de chose, ce qui a généré un stress pour l'employé qui s'en doutait, d'autant que l'employeur les a utilisés en lui distillant des allusions sur ces conversations ; Attendu que l'intimée conclut au débouté, en faisant valoir qu'elle a toujours respecté la réglementation et l'autorisation préfectorale, qui lui a été délivrée, en relevant qu'il incombait au personnel lui-même de faire fonctionner le système pendant ses heures de service ; que le vol de cassette est bien constitué, la cassette n'ayant été rendue qu'après intervention des services de police et après duplication ; qu'il n'y a ainsi aucun fait de harcèlement ; attendu qu'il est constant que l'exploitant du sauna " Equateur Sauna " fait fonctionner un système de vidéo surveillance dans son établissement, en vertu d'une autorisation préfectorale du 21 octobre 2004 l'habilitant dans un objectif de sécurité des personnes et de prévention de l'atteinte aux biens à procéder à des enregistrements d'images conservées pendant 8 jours (annexe n° 12 de Me C...) ; Attendu qu'il résulte de la procédure d'enquête diligentée sur plainte de l'employeur que la cassette litigieuse ne comportait aucune bande son et qu'ainsi le grief adressé à l'employeur concernant l'enregistrement illicite des conversations de son personnel n'apparaît pas établi (annexe n° 15 de Me C...) ; Attendu, il est vrai, que l'installation comporte la possibilité d'effectuer de tels enregistrements ; Attendu, toutefois, qu'il résulte d'une attestation parfaitement circonstanciée de l'ancien collègue de l'appelant,. M. E... (annexe n° 13 de Me C...) BAJ n° 2011H03104 : Admission partielle par décision n° 9124/ 2011 du 15 décembre 2011 4 d'une part, que les réceptionnistes mettent en marche eux-mêmes le système à leur prise de service, d'autre part qu'il leur est formellement interdit de mettre en oeuvre l'enregistrement du son, enfin que cette mise en oeuvre ne peut être que volontaire et résulter d'une action du réceptionniste présent, le bouton du volume se trouvant à l'intérieur d'une petite trappe qu'il faut ouvrir, de telle sorte que tout enregistrement illicite ne pourrait provenir que de l'intéressé lui-même ; Attendu, il est exact que, par ailleurs, l'appelant produit un constat d'huissier daté de 2008 certifiant que la cassette présente un enregistrement sonore audible ; Attendu, néanmoins, que sans remettre en cause la réalité du constat d'huissier qui fait foi jusqu'à inscription de faux, la Cour estime que la pièce n'est pas pertinente pour contredire le procès-verbal de police, dès lors que le constat a été dressé près de trois ans après les faits, sur un enregistrement dupliqué se prêtant à toutes les manipulations, alors que les constatations de la police sont contemporaines des faits et ont été opérées sur la bande originale ; Attendu, en outre, qu'il est allégué que le système de vidéo surveillance aurait été exploité dès l'origine, avant même l'obtention de l'autorisation préfectorale ; Attendu cependant qu'à la supposer exacte cette assertion est sans conséquence, alors que l'existence d'aucun enregistrement sonore n'est rapportée pour cette période non plus et que exploité apparemment dans des conditions et en vue de fins similaires à celle postérieures à l'autorisation préfectorale, sous le contrôle et avec l'assentiment au moins tacite des réceptionnistes, dont M. X..., il n'apparaît pas que l'installation ait eu pour objet ou pour effet de porter atteinte à sa dignité, sa santé mentale, physique ou morale du salarié ; Attendu enfin, qu'en prenant la décision de le licencier pour faute grave, en le mettant à pied conservatoirement et en portant plainte pour vol, l'employeur n'a fait que faire usage de son pouvoir disciplinaire pour sanctionner des faits avérés, la soustraction d'une cassette, faits et sanctions qu'il appartient au juge de qualifier et de contrôler, mais qui ne constituent pas en soi des agissements de nature à caractériser un harcèlement au sens de l'article L 1152-1 du Code du travail ; Attendu, en conséquence, qu'il y a lieu de rejeter la demande de ce chef ; Sur la cause du licenciement sans cause réelle et sérieuse : attendu que pour contester la décision dont appel en ce qu'elle a déclaré que le licenciement a bien une cause grave et l'a débouté de ses demandes indemnitaires, aux motifs qu'une cassette a été saisie chez le salarié par la police, ce qui constitue une faute grave, indépendamment de savoir si elle était ou non sonorisée, l'appelant fait valoir que la plainte pénale a fait l'objet d'un classement sans suite et que par conséquent le motif du licenciement est nécessairement inexact et sans cause réelle et sérieuse ; qu'il n'a pris la cassette qu'après en avoir informé l'employeur pour assurer la défense de ses droits salariaux les plus élémentaires et que la nécessité de se procurer des preuves ne peut constituer un vol ; qu'il n'a pratiqué aucun chantage auprès de l'employeur et qu'une éventuelle duplication de la cassette ne pouvait légitimer rétroactivement le licenciement ; que le caractère confidentiel de l'enregistrement ne l'empêche pas de se procurer des preuves ; qu'il a rendu spontanément la cassette au commissariat et qu'ainsi le licenciement est abusif et justifie ses demandes de dommages et intérêts, ainsi que les demandes dérivées au titre du préavis, de l'indemnité conventionnelle de licenciement ; attendu que l'intimée fait les mêmes observations qu'à propos de la nullité, en relevant, en outre, que le salarié n'a demandé aucune autorisation à l'employeur ; que la cassette n'était pas sonorisée comme l'a constaté la police dont les constatations font foi jusqu'à preuve contraire ; que la faute grave est constituée, alors que le salarié s'est appropriée une cassette, est susceptible d'en faire un mauvais usage (pression, chantage ¿) et qu'il a violé la loi notamment l'article L. 226-1 du Code pénal, ainsi que ses obligations contractuelles ; attendu qu'il est constant comme résultant de l'enquête de police que le salarié a soustrait une cassette du système de vidéo surveillance de la société ; attendu qu'il ne justifie par avoir obtenu, ni même demandé l'autorisation de son employeur pour se saisir de cette cassette ; attendu qu'il ressort des motivations précédentes, auxquels il est expressément et plus amplement fait référence que ladite cassette ne comportait pas d'enregistrement sonore d'après les constatations policières et que la preuve contraire n'en n'a pas été rapportée utilement ; attendu que la décision de BAJ n° 2011H03104 : Admission partielle par décision n° 9124/ 2011 du 15 décembre 2011 5 classement sans suite prise par le parquet, à l'issue de l'enquête de police et après restitution de la cassette à sa demande, n'est pas une décision juridictionnelle s'imposant au juge ; attendu qu'à défaut pour le salarié, qui connaissait précisément le mode de mise en oeuvre du système de vidéo surveillance, de justifier par des éléments tangibles et vérifiables du sérieux de ses soupçons concernant les enregistrements audio clandestins, autres que de vagues insertions concernant des allusions de l'employeur sur des conversations privées qu'il aurait tenues et à défaut de justifier qu'il ne pouvait pas des moyens légaux ou du moins par des procédés juridiquement contrôlés, telle qu'une procédure sur requête devant la juridiction compétente, obtenir la saisie d'une cassette et sa vérification, par exemple, par un huissier mandaté pour ce faire, il y a lieu de juger que la soustraction reprochée est constitutive d'une faute du salarié au sens disciplinaire ; attendu que dans la mesure où cet agissement a porté sur un enregistrement visuel protégé par la loi et cantonné à des règles très strictes conservant notamment sa conservation limitée sur une durée de sept jours par l'autorisation préfectorale, dans le contexte particulier d'un sauna et de la nécessaire confidentialité à respecter pour préserver la vie privée de la clientèle, c'est à bon droit que le premier juge a pu estimer que l'employeur avait fait un usage légitime de son pouvoir disciplinaire en prononçant la mise à pied et le licenciement pour faute grave litigieux avec les conséquences pécuniaires qui en découlent ; attendu en conséquence, que la décision dont appel sera confirmée de ce chef ; »

1) ALORS QUE sauf mauvaise foi du salarié qu'il appartient à l'employeur d'établir, ne constitue pas une faute grave le fait pour un salarié, travaillant dans un établissement placé sous vidéo ¿ surveillance en raison de l'activité exercée, de soustraire une cassette d'enregistrement aux fins de se constituer une preuve contre son employeur qu'il suspecte, par ce biais, d'écouter les conversations du personnel à son insu ; qu'en se bornant à retenir, pour conclure à une faute grave, que s'il était exact que l'installation de surveillance comportait la possibilité d'effectuer des enregistrements sonores, le salarié n'établissait pas, au moyen de la cassette soustraite qui ne comportait qu'un enregistrement vidéo sans son, un enregistrement illicite des conversations du personnel, la Cour d'appel a violé les articles 1315 du Code civil, L. 1234-1, L. 1234-5 et L. 1234-9, et L. 1232- 1du Code du travail ;

2) ALORS QUE n'est pas constitutif d'une faute le fait pour un salarié d'avoir soustrait à l'insu et sans l'autorisation de son employeur des documents de l'entreprise dont il a eu connaissance à l'occasion de l'exercice de ses fonctions pour assurer sa défense dans le cadre d'un litige l'opposant à son employeur ; qu'en retenant, pour décider le contraire, que le salarié ne justifiait pas avoir demandé l'autorisation de son employeur pour se saisir de la cassette de vidéo ¿ surveillance et qu'il ne démontrait ni le sérieux de ses soupçons concernant les enregistrements audio clandestins qu'il imputait à son employeur, ni l'impossibilité dans laquelle il se serait trouvé de vérifier le contenu de la cassette par des moyens légaux ou des procédés juridiquement contrôlés, quand il lui appartenait seulement de vérifier si la cassette de vidéo-surveillance était nécessaire à l'exercice des droits de la défense du salarié, la Cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles L. 1234-1, L. 1234-5 et L. 1234-9, et L. 1232- 1du Code du travail ;

3) ALORS, en tout état de cause, QU'il ressortait des constatations de la Cour d'appel que les cassettes de vidéo-surveillance ne pouvaient être conservées par l'employeur que pendant une durée de 8 jours, ce dont il résultait que le salarié n'avait pas d'autre choix, pour se pré-constituer une preuve des enregistrements audio clandestins imputés à son employeur, que de s'emparer de la cassette avant que celle-ci ne soit détruite ; qu'en reprochant pourtant au salarié, pour retenir l'existence d'une faute à son encontre, de ne pas justifier de l'impossibilité dans laquelle il se serait trouvé de vérifier le contenu de la cassette par des moyens légaux ou des procédés juridiquement contrôlés, la Cour d'appel n'a pas tiré BAJ n° 2011H03104 : Admission partielle par décision n° 9124/ 2011 du 15 décembre 2011 6 les conséquences légales qui s'évinçaient de ses propres constatations et partant, a violé les articles L. 1234-1, L. 1234-5 et L. 1234-9, et L. 1232- 1 du Code du travail ;

4) ALORS QUE la soustraction, par un salarié, d'une cassette de vidéo-surveillance du sauna dans lequel il exerce ses fonctions aux fins d'assurer sa défense dans le cadre d'un litige l'opposant à son employeur n'est pas fautive, pourvu que ladite cassette ne soit pas diffusée, peu important le fait que cette dernière soit soumise à un encadrement légal strict destiné à préserver la vie privée de la clientèle ; qu'en se bornant à relever, pour conclure au bien-fondé du licenciement pour faute grave, que la soustraction reprochée au salarié avait porté sur un enregistrement visuel protégé par la loi, dans le contexte particulier d'un sauna et de la nécessaire confidentialité à respecter pour préserver la vie privée de la clientèle, sans à aucun moment constater que cette cassette avait été diffusée, la Cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard des articles L. 1234-1, L. 1234-5 et L. 1234-9, et L. 1232- 1du Code du travail.

SECOND MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l'arrêt attaqué avoir rejeté la demande du salarié tendant à la reconnaissance d'une inexécution fautive de ses obligations par l'employeur et d'AVOIR, en conséquence, rejeté la demande en paiement d'une indemnité de 25. 000 ¿ de ce chef,

AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE « le demandeur fait encore état d'une inexécution fautive du contrat de travail par l'employeur ; le salarié avait démissionné d'une société dans laquelle le gérant de la SARL EQUATEUR SAUNA avait des intérêts pour être immédiatement engagé par la société défenderesse ; le demandeur n'a subi aucun préjudice indemnisable à ce titre » ;

ET AUX MOTIFS QUE « Attendu que pour critiquer la décision du premier juge, en ce qu'elle l'a débouté de sa demande en paiement d'une indemnité de 25. 000 ¿ de ce chef, au motif de l'absence de préjudice indemnisable, l'appelant indique d'une part que l'employeur a épié ses conversations et s'en est servi pour le déstabiliser et pour lui tendre un piège de façon à le licencier, manquant ainsi à son obligation de bonne foi, d'autre part, alors qu'il était employé jusqu'en janvier 2004 par une autre société, son contrat de travail a été transféré à la société EQUATEUR SAUNA, appartenant au même propriétaire, par le moyen d'une fausse démission qui lui a été demandée aux fins de lui faire perdre son ancienneté et de biaiser la loi sur les transferts des contrats de travail, ainsi que le prouvent la rédaction de la lettre de démission et la grande similitude des contrats de travail successifs ; attendu que l'intimée conclut à la confirmation de la décision de première instance, en relevant que l'intéressé a été embauché en 2004 après avoir démissionné librement d'une autre société ¿ Olympic Club Sauna ¿ tout à fait indépendante juridiquement d'Equateur Sauna, comme le prouvent les extraits K-bis de l'époque, même si elles sont actuellement gérées par la même personne depuis le 23 juin 2007 ; (¿) attendu, sur le second grief, que sans méconnaître la similitude effective des contrats de travail successifs accordés au salarié par les deux employeurs successifs, la Cour note qu'il n'est pas démontré, par les extraits K-bis produits, qu'à l'époque du changement d'employeur, les deux sociétés en cause relevaient du même propriétaire ; qu'en particulier, il apparaît établi qu'elles n'avaient pas les mêmes gérants même si Monsieur D...est devenu associé minoritaire de l'Olympic Club Sauna le 29 novembre 2003 ; attendu au demeurant que le salarié n'a pas contesté sa démission, non motivée pendant près de 22 mois, ni justifié qu'elle était équivoque ou entaché d'un vice du consentement ; attendu enfin, qu'en présence d'un licenciement valide prononcé pour faute grave, une éventuelle fraude n'a pas créé de préjudice, les droits indemnitaires du salarié n'étant dans ce cas en rien affectés par une éventuelle perte injustifiée de l'ancienneté ; »

1) ALORS QUE la cassation sur le premier moyen critiquant le chef du dispositif relatif au bien-fondé du licenciement devra entraîner, par voie de conséquence et par application de l'article 625 du Code de procédure civile, la cassation du chef du dispositif relatif à l'inexécution fautive par l'employeur de ses obligations que la Cour d'appel a fondé sur l'inexistence d'un licenciement valide pour faute grave ;

2) ALORS QUE les juges sont tenus de répondre aux moyens des parties ; qu'en l'espèce, le salarié faisait valoir que les deux sociétés OLYMPIC CLUB SAUNA et EQAUTEUR SAUNA avaient pour dirigeants officiels des gérants de paille, Messieurs Y...et Z..., que Monsieur A..., véritable dirigeant de fait de ces deux sociétés faisait apparaître en ses lieux et place ; que le salarié, pour établir ses allégations, avaient régulièrement produit, à l'appui de la note en délibéré sollicitée par la Cour d'appel, des procès-verbaux d'assemblée générales, des extraits de site internet ainsi BAJ n° 2011H03104 : Admission partielle par décision n° 9124/ 2011 du 15 décembre 2011 17 qu'un document diffusé par la société EQUATEUR SAUNA et intitulé « Atrium Equateur H2o- c'est quoi être employé chez nous ? », dont il résultait l'exercice par Monsieur A...d'un pouvoir effectif de direction dans les deux sociétés ; que dès lors en se bornant à relever qu'il résultait d'un document officiel (extrait K-bis) que Monsieur D...n'était pas le gérant des sociétés, sans répondre au moyen pris de l'existence des gérances de paille, la Cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile ;

TROISIEME MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR rejeté la demande en nullité du licenciement au titre du harcèlement moral subi par le salarié,

AUX MOTIFS QUE « Sur la nullité du licenciement : attendu que pour soutenir sa demande additionnelle en annulation du licenciement litigieux et obtenir paiement d'une indemnité de 30 600 ¿ égale à 18 mois de salaire, l'appelant invoque la violence de la rupture du contrat de travail et des faits de harcèlement sur le lieu de travail ayant généré des troubles anxio dépressif et expose que les faits de harcèlement résultent de la mise en place d'un dispositif de vidéo surveillance dans les locaux de la société portant atteinte à sa vie privée avant même qu'une autorisation légale ait été obtenu par l'employeur ; que ce dispositif a été utilisé de façon non conforme, les salariés étant écoutés, y compris dans leurs conversations privées sur le lieu de travail, en violation des articles L 1121-1 et L 1222-4 du Code du travail et de l'article 9 du Code civil, comme le prouvent les copies de cassette réalisées par le salarié, ainsi qu'un constat d'huissier du 4 octobre 2008 ; que les dispositifs d'écoute portent atteinte à la vie privée et à la dignité des salariés sans que l'objectif de surveillance de la caisse puisse justifier cet état de chose, ce qui a généré un stress pour l'employé qui s'en doutait, d'autant que l'employeur les a utilisés en lui distillant des allusions sur ces conversations ; Attendu que l'intimée conclut au débouté, en faisant valoir qu'elle a toujours respecté la réglementation et l'autorisation préfectorale, qui lui a été délivrée, en relevant qu'il incombait au personnel lui-même de faire fonctionner le système pendant ses heures de service ; que le vol de cassette est bien constitué, la cassette n'ayant été rendue qu'après intervention des services de police et après duplication ; qu'il n'y a ainsi aucun fait de harcèlement ; attendu qu'il est constant que l'exploitant du sauna " Equateur Sauna " fait fonctionner un système de vidéo surveillance dans son établissement, en vertu d'une autorisation préfectorale du 21 octobre 2004 l'habilitant dans un objectif de sécurité des personnes et de prévention de l'atteinte aux biens à procéder à des enregistrements d'images conservées pendant 8 jours (annexe n° 12 de Me C...) ; Attendu qu'il résulte de la procédure d'enquête diligentée sur plainte de l'employeur que la cassette litigieuse ne comportait aucune bande son et qu'ainsi le grief adressé à l'employeur concernant l'enregistrement illicite des conversations de son personnel n'apparaît pas établi (annexe n° 15 de Me C...) ;

Attendu, il est vrai, que l'installation comporte la possibilité d'effectuer de tels enregistrements ; Attendu, toutefois, qu'il résulte d'une attestation parfaitement circonstanciée de l'ancien collègue de l'appelant,. M. E... (annexe n° 13 de Me C...) d'une part, que les réceptionnistes mettent en marche eux-mêmes le système à leur prise de service, d'autre part qu'il leur est formellement interdit de mettre en oeuvre l'enregistrement du son, enfin que cette mise en oeuvre ne peut être que volontaire et résulter d'une action du réceptionniste présent, le bouton du volume se trouvant à l'intérieur d'une petite trappe qu'il faut ouvrir, de telle sorte que tout enregistrement illicite ne pourrait provenir que de l'intéressé lui-même ; Attendu, il est exact que, par ailleurs, l'appelant produit un constat d'huissier daté de 2008 certifiant que la cassette présente un enregistrement sonore audible ; Attendu, néanmoins, que sans remettre en cause la réalité du constat d'huissier qui fait foi jusqu'à inscription de faux, la Cour estime que la pièce n'est pas pertinente pour contredire le procès-verbal de police, dès lors que le constat a été dressé près de trois ans après les faits, sur un enregistrement dupliqué se prêtant à toutes les manipulations, alors que les constatations de la police sont contemporaines des faits et ont été opérées sur la bande originale ; Attendu, en outre, qu'il est allégué que le système de vidéo surveillance aurait été exploité dès l'origine, avant même l'obtention de l'autorisation préfectorale ; Attendu cependant qu'à la supposer exacte cette assertion est sans conséquence, alors que l'existence d'aucun enregistrement sonore n'est rapportée pour cette période non plus et que exploité apparemment dans des conditions et en vue de fins similaires à celle postérieures à l'autorisation préfectorale, sous le BAJ n° 2011H03104 : Admission partielle par décision n° 9124/ 2011 du 15 décembre 2011 21 contrôle et avec l'assentiment au moins tacite des réceptionnistes, dont M. X..., il n'apparaît pas que l'installation ait eu pour objet ou pour effet de porter atteinte à sa dignité, sa santé mentale, physique ou morale du salarié ; Attendu enfin, qu'en prenant la décision de le licencier pour faute grave, en le mettant à pied conservatoirement et en portant plainte pour vol, l'employeur n'a fait que faire usage de son pouvoir disciplinaire pour sanctionner des faits avérés, la soustraction d'une cassette, faits et sanctions qu'il appartient au juge de qualifier et de contrôler, mais qui ne constituent pas en soi des agissements de nature à caractériser un harcèlement au sens de l'article L 1152-1 du Code du travail ; Attendu, en conséquence, qu'il y a lieu de rejeter la demande de ce chef » ;

ALORS QUE la cassation sur le premier moyen critiquant le chef du dispositif relatif au bien-fondé du licenciement devra entraîner, par voie de conséquence et par application de l'article 625 du Code de procédure civile, la cassation du chef du dispositif relatif à la nullité du licenciement, que la Cour d'appel a fondé sur les mêmes motifs tirés de la soustraction prétendument fautive par le salarié d'une cassette de vidéo-surveillance de l'établissement ;

ECLI:FR:CCASS:2013:SO01691
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