Cour de cassation, civile, Chambre civile 3, 9 octobre 2013, 12-21.809, Publié au bulletin

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Met hors de cause la société Zolpan et la société L'Auxiliaire ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 29 mars 2012), que le syndicat des copropriétaires de l'immeuble Le Lara (le syndicat des copropriétaires) a confié la rénovation de l'étanchéité du toit-terrasse de l'immeuble à la société Poly-rénov, assurée par la société Axa corporate solutions assurance ; que les travaux consistaient en la mise en oeuvre d'une pâte élastomère polyuréthanne fournie par la société Revalpa, actuellement dénommée Zolpan, sous le contrôle technique de la société Bureau Veritas, assurée par la société Mutuelles du Mans assurances IARD (les MMA) ; qu'une police dommages-ouvrage avait été souscrite par le syndicat des copropriétaires auprès de la société Le Continent, devenue Generali IARD ; que celle-ci a accusé réception le 30 avril 2001 d'une déclaration de sinistre effectuée par le syndicat des copropriétaires après l'apparition d'infiltrations ; que, le 18 juin 2002, l'assureur a notifié à son assuré un rapport préliminaire et reconnu sa garantie pour les infiltrations dans trois appartements ainsi qu'au droit des casquettes constituant les avancées de toiture ; que le syndicat des copropriétaires et plusieurs copropriétaires ont assigné, après expertise, l'assureur dommages-ouvrage, les différents intervenants et leurs assureurs en indemnisation de leurs préjudices ;

Sur le premier moyen :

Vu l'article L. 242-1 du code des assurances ;

Attendu que, pour limiter à la somme de 75 750, 73 euros la condamnation de la société Generali IARD et débouter le syndicat des copropriétaires et les différents copropriétaires du surplus de leurs demandes, l'arrêt retient que l'assureur dommages-ouvrage ne devait sa garantie que dans les limites du plafond puisque la sanction invoquée par le syndicat des copropriétaires ne concernait que les dommages déclarés en 2001, lesquels ne constituaient qu'une partie des dommages dont il demandait à ce jour réparation intégrale ;

Qu'en statuant ainsi, alors qu'elle avait constaté que l'assureur n'avait pas respecté le délai de soixante jours ce dont il résultait qu'il ne pouvait opposer le plafond de garantie à son assuré, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

Et sur le second moyen :

Vu l'article 566 du code de procédure civile ;

Attendu que les parties peuvent expliciter en appel les prétentions qui étaient virtuellement comprises dans les demandes et défenses soumises au premier juge et ajouter à celles-ci toutes les demandes qui en sont l'accessoire, la conséquence ou le complément ;

Attendu que pour rejeter la demande en paiement des intérêts au double du taux légal, l'arrêt retient qu'il s'agit d'une demande nouvelle, comme telle irrecevable ;

Qu'en statuant ainsi, alors que la demande constituait le complément de celle formée en première instance à titre principal, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne la société Generali IARD à payer au syndicat des copropriétaires de l'immeuble Le Lara la somme de 75 750, 73 euros, accueille les recours en garantie de la société Generali IARD pour ce montant, déboute le syndicat des copropriétaires du surplus de sa demande à l'encontre de la société Generali IARD et Mme X..., MM. Y..., Z..., A..., B... et H... de leurs demandes à l'encontre de la société Generali IARD, déboute le syndicat des copropriétaires de son recours en garantie contre la société Generali IARD du chef des condamnations prononcées au profit de MM. Joseph et Gilbert C... et déclare irrecevable la demande en paiement d'intérêts majorés, l'arrêt rendu le 29 mars 2012, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence, autrement composée ;

Condamne la société Generali IARD aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du neuf octobre deux mille treize.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits par la SCP Fabiani et Luc-Thaler, avocat aux Conseils pour le syndicat des copropriétaires de l'immeuble Le Lara, Mme X..., MM. Y..., Z..., A..., B... et H...

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR limité la condamnation de la compagnie GENERALI, au titre du sinistre déclaré le 30 avril 2001, au paiement de la somme de 75. 730, 73 ¿ et, par conséquent, d'AVOIR débouté les exposants du surplus de leurs demandes ;

AUX MOTIFS QUE sur les demandes du syndicat de copropriété LE LARA et des copropriétaires, au terme de ses investigations complètes et minutieuses, l'expert D... a déposé un rapport précis en concluant que l'ensemble de la toiture de l'immeuble dont le support est un plancher en béton est constituée de cinq petites terrasses séparées par une cage d'escalier, dont certaines parties sont accessibles depuis les appartements du dernier étage, d'autres non accessibles, et qu'en 1995, la copropriété a décidé de refaire la totalité des étanchéités des toitures terrasse du fait d'iifiltrations se produisant au travers du revêtement originel ; la technique qui a été proposée consistait à mettre en oeuvre un nouveau revêtement sans déposer celui qui était en place, les dommages d'infiltrations ont été constatés au dernier étage de l'immeuble dans les appartements E..., Y..., C..., Z..., A..., G..., H..., ainsi que dans le palier du dernier étage, les mises en eau réalisée en cours d'expertise ont confirmé que les terrasses suivantes sont fuyardes : terrasse accessible sur le séjour de M. C..., auvent Est cage 1, auvent Est et Ouest cage 2, terrasse carrelée sur séjour de M. E..., auvents Est et Ouest cage 3, terrasse carrelée nord auvent Est et Ouest cage 4, terrasse sur cuisine de l'appartement de M. A..., auvent Est, Ouest et Nord cage 5, terrasse non accessible sur appartement de M. F..., terrasse C... au travers des relevés d'étanchéité ; les sondages réalisés ont confirmé que la résine d'étanchéité n ¿ a pas été mise en oeuvre par POLYRENOV conformément au cahier des charges, le manquement le plus grave consistant dans l'absence totale de revêtement sur la terrasse carrelée accessible depuis l'appartement de M. E... ; pour remédier aux causes des désordres, il faut reprendre le revêtement d'étanchéité de la totalité de la toiture terrasse avec remplacement pour les terrasses fuyardes, des panneaux isolants, le coût de la reprise totale du revêtement d'étanchéité s'élève à la somme de 199. 966, 98 ¿ TTC outre la somme de 11. 998 TTC au titre des frais de maîtrise d'oeuvre et celle de 5. 739, 20 ¿ TTC au titre des frais d'avance de mise en eau ; le coût des seules réparations fuyardes s ¿ élève à 80. 000 ¿ TTC ; le coût total des revêtement intérieurs dégradés par les infiltrations dans les appartements s'élève à la somme de 16. 190, 47 ¿ TTC ; en application de l'article L 242-1 du Code des assurances, le contrat dommages-ouvrage pour objet de garantir, en dehors de toute recherche de responsabilité, le paiement de la totalité des travaux de réparation des dommages de la nature de ceux dont sont responsables les constructeurs au sens des dispositions de l'article 1792 et suivants du Code civil ; il en résulte que l'assureur dommages-ouvrage ne doit prendre en charge que le montant des travaux strictement nécessaires à la reprise des désordres de nature décennale ; les conditions particulières de la police souscrite précisent que le montant est limité au coût total de la construction prévisionnel déclaré à la souscription du contrat, éventuellement revalorisé en fonction de l'évolution de l'index BATIMENT NATIONAL BT 01 jusqu'à la date de déclaration du coût total définitif de la construction ; l'annexe 2 de l'article A 243 du Code des assurances dispose que la garantie du contrat dommages-ouvrage est limitée au montant du coût total de la construction déclarée aux conditions particulières, revalorisé selon modalité prévue à ces mêmes conditions particulières ; ainsi, le plafond de garantie du contrat dommages-ouvrage calculé conformément aux conditions particulières de la police s ¿ élève en l'espèce à la somme de 492. 379, 76 francs, soit 75. 750, 73 ¿ au titre des dommages matériels, et à 10 % de cette somme au titre des dommages immatériels ; le syndicat de copropriété soutient que la compagnie GENERALI est déchue du droit de contester le montant du sinistre, faute, en application de l'article L 242-1 al. 5 du Code des assurances, d'avoir pris position sur la déclaration de sinistre du 5 avril 2001 au-delà du délai de 60 jours ; le syndicat de copropriété ne verse pas l'accusé de réception de la déclaration de sinistre datée du 5 avril 2001 adressée au cabinet OMEGA Conseils... ; la compagnie d'assurances a adressé un courrier au syndic le 30 avril 2001 accusant réception de la déclaration de sinistre du 19 avril 2001 et l'informant de la désignation d'un expert ; la compagnie a notifié par courrier recommandé du 18 juin 2002 le rapport préliminaire et reconnu sa garantie acquise pour les infiltrations dans les appartements ALLIERI, A... et G..., ainsi qu'au droit des casquettes constituant les avancées de toiture ; comme précédemment indiqué, l'assureur dommages-ouvrage ne peut, en l'état des énonciations insuffisantes du contrat concernant les causes de suspension ou d'interruption du délai de l'article L 114-1 du Code des assurances, opposer à son assuré la prescription biennale au titre de ses demandes ; l'assureur dommages-ouvrage doit donc sa garantie au titre des dommages dans les limites de son contrat et notamment du plafond de garantie ci-dessus précisé, puisque la sanction invoquée par le syndicat de copropriété ne concerne que les dommages déclarés en 2001, lesquels ne constituent qu'une partie des dommages dont il demande à ce jour réparation intégrale ; en l'état du plafond de garantie applicable, les contestations soulevées sur la base du rapport d'expertise sur le montant des travaux de réfection totale ou partielle de l'étanchéité sont sans objet puisque leur montant, tel que résultant du rapport d'expertise, est en toute hypothèse supérieur au plafond de garantie ; en conséquence, le jugement sera réformé sur le montant de l'indemnisation due par l'assureur dommages-ouvrage et la compagnie GENERALI sera condamnée à payer au syndicat de copropriété LE LARA somme de 75. 750, 73 ¿ TTC au titre des réparations ; le plafond de garanti étant atteint, les copropriétaires ne peuvent obtenir, à titre personnel, aucune indemnisation de l'assureur dommages-ouvrage ; le jugement sera reformé du chef des condamnations prononcées au bénéfice de Madame Fatemeh G..., M. Philippe Y..., M. Gilbert C..., M. Pierre Z..., M. Wakil A..., M. Yves B... et M. Werner H... (arrêt, pages 7 à 9) ;

ALORS DE PREMIERE PART QUE la sanction prévue à l'article L 242-1 du Code des assurances s'applique à toutes les conséquences dommageables du sinistre déclaré par l'assuré, sans distinction selon la date à laquelle ces conséquences sont apparues, dès lors qu'elles se rapportent audit sinistre ; qu'en l'espèce, pour estimer que la compagnie GENERALI n'était tenue à garantie, au titre des dommages subis par la copropriété, que dans la limite du plafond contractuel de 75. 750, 73 ¿ TTC, la Cour d'appel a estimé que la sanction invoquée par le syndicat de copropriété ne concerne que les dommages déclarés en 2001, lesquels ne constituent qu'une partie des dommages dont il demande à ce jour réparation intégrale » ; qu'en statuant ainsi, quoiqu'il résulte des mentions de l'arrêt attaqué que si l'expert D..., aux termes de ses investigations, a conclu à la nécessité, pour remédier aux désordres des terrasses fuyardes, de procéder à la reprise du revêtement d'étanchéité de la totalité de la toiture terrasse, ces réparations, dont le coût dépassaient le montant du plafond de garantie, se rapportaient à un seul et même sinistre, dont l'assureur a été informé le 30 avril 2001, sans faire part à l'assuré-dans le délai de soixante jours prévu par le texte susvisé-de sa position quant au principe de la mise en jeu des garanties prévues au contrat, la Cour d'appel a violé le texte susvisé ;

ALORS DE DEUXIEME PART ET SUBSIDIAIREMENT, QUE les juges du fond ne peuvent méconnaître les termes du litige, fixés par les prétentions respectives des parties ; qu'en l'espèce, il résulte des conclusions d'appel récapitulatives n° 5 de la compagnie GENERALI que, s ¿ agissant du plafond de garantie, l'assureur a admis que dans l'hypothèse où le principe de son obligation à couvrir le sinistre litigieux serait acquis, le montant de sa condamnation devrait être fixé à la somme de 121. 697, 34 ¿ afin de tenir compte de la revalorisation du plafond de garantie selon l'indice BT 01, tandis que les exposants, s'agissant du quantum de la prise en charge du sinistre par l'assureur, sollicitaient la confirmation du jugement ayant condamné la compagnie GENERALI, à ce titre, à régler au syndicat des copropriétaires de l'immeuble LE LARA la somme de 356. 646, 97 ¿ ; que, dès lors, en limitant la condamnation de l'assureur à la somme de 75. 750, 73 ¿ TTC, en faisant ainsi abstraction de la revalorisation du plafond de garantie, laquelle était pourtant admise par la compagnie GENERALl, la Cour d'appel qui méconnaît les termes du litige, a violé les articles 4 et 5 du Code de procédure civile ;

ALORS DE TROISIEME PART ET QUE dans leurs conclusions d'appel, les exposants ont expressément fait valoir, à titre subsidiaire (conclusions récapitulatives, pages 5 à 7) qu'en tout état de cause, l'indemnisation de la totalité des dommages consécutifs au sinistre déclaré par l'assuré était due par l'assureur, dès lors que celui-ci avait engagé sa responsabilité contractuelle sur le fondement de l'article 1147 du Code civil, en multipliant les manoeuvres dilatoires, en se prévalant avec mauvaise foi et tardivement du plafond de garantie, en omettant de préfinancer les travaux et en affectant d'en ignorer l'importance ; que, dès lors, en statuant comme elle l'a fait, sans répondre à ce chef péremptoire des conclusions d'appel des exposants, la Cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile ;

SECOND MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR déclaré irrecevable la demande des exposants tendant, par application de l'article L 242-1 du Code des assurances, à ce que l'indemnité mise à la charge de la compagnie GENERALI soit majorée d'un intérêt égal au double du taux de l'intérêt légal ;

AUX MOTIFS QUE la demande en paiement des intérêts au double de l'intérêt au taux légal formée pour la première fois en cause d'appel par le syndicat de copropriété à l'encontre de l'assureur dommages-ouvrage, qui est donc nouvelle en cause d'appel sera déclarée irrecevable en application de l'article 564 du Code de procédure civile (arrêt, page 9) ;

ALORS QU'en application de l'article 566 du Code de procédure civile, les parties peuvent, pour la première fois en cause d'appel expliciter les prétentions qui étaient virtuellement comprises dans les demandes et défenses soumises au premier juge et ajouter à celles-ci toute les demandes qui en sont l'accessoire, la conséquence ou le complément ; qu'il en est ainsi de la demande tendant à ce que l'indemnité mise à la charge de l'assureur soit majorée d'un intérêt égal au double du taux de l'intérêt légal en application de l'article L 242-1 du Code des assurances, une telle demande n ¿ étant que l'accessoire de la demande tendant à ce que, en vertu du même texte, l'assureur soit tenu d'indemniser intégralement le sinistre, faute d'avoir respecté les délais prévus par ce texte, que dès lors, en déclarant une telle demande irrecevable, motif pris de sa nouveauté, la Cour d'appel a violé les textes susvisés.

ECLI:FR:CCASS:2013:C301116
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