Cour de cassation, civile, Chambre civile 3, 9 avril 2013, 12-13.622, Inédit
Cour de cassation - Chambre civile 3
- N° de pourvoi : 12-13.622
- ECLI:FR:CCASS:2013:C300429
- Non publié au bulletin
- Solution : Rejet
- Président
- M. Terrier (président)
Texte intégral
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 9 novembre 2011), que Mme X..., aux droits de laquelle viennent M. Charles Y... et Mme Véronique Y..., propriétaire d'un local donné à bail à la société Stock des affaires pour le commerce « d'articles de Paris, maroquinerie, bimbeloterie et solde de tous ces articles », a donné congé à sa locataire pour le 30 juin 2004, sans offre de renouvellement et avec offre d'une indemnité d'éviction ; que la société Stock des affaires a assigné la bailleresse en paiement de cette indemnité ;
Sur le premier moyen :
Attendu que la société Stock des affaires fait grief à l'arrêt de fixer l'indemnité d'éviction à une certaine somme, alors, selon le moyen, qu'en cas de refus de renouvellement du bail, le bailleur doit payer au locataire évincé une indemnité d'éviction égale au préjudice causé par le défaut de renouvellement et devant comprendre la valeur marchande du fonds de commerce ; que, dans ses conclusions d'appel, la société Stock des affaires avait sollicité la confirmation du jugement en ce que le tribunal avait assimilé l'activité de « bimbeloterie » indiquée comme destination commerciale contractuelle à celle de bazar au regard des définitions sémantiques données par la majorité des dictionnaires pour retenir l'intégralité du chiffre d'affaires réalisé ; qu'en affirmant que l'activité de bazar aurait été contraire à la destination contractuelle de bimbeloterie' et ainsi inopposable à Mme X..., motif pris que certains articles ne seraient pas des « bibelots », la cour d'appel, qui a ainsi procédé à une distinction artificielle et erronée entre les notions de « bimbeloterie » et de bazar, en méconnaissance des terminologies actuelles, pour exclure du chiffre d'affaires global celui réalisé à raison de l'activité de bazar, a violé l'article L. 145-14 du code de commerce ;
Mais attendu qu'ayant constaté que le bail n'autorisait d'autre commerce que celui d'articles de Paris, maroquinerie, bimbeloterie et solde et qu'il était acquis que le preneur y exploitait un bazar et souverainement retenu que la bimbeloterie n'était pas assimilable à des produits bon marché ou soldés tels qu'articles de plage, produits d'entretien ou d'hygiène proposés à la vente par le preneur, la cour d'appel en a déduit, à bon droit, que le bailleur était tenu de régler une indemnité d'éviction calculée sur la seule activité autorisée par le bail ;
D'où il suit que le moyen est mal fondé ;
Sur le second moyen :
Attendu que la société Stock des affaires fait grief à l'arrêt de fixer l'indemnité d'occupation à une certaine somme, alors, selon le moyen,
que la contradiction de motifs équivaut à un défaut de motifs ; qu'en décidant à la fois d'écarter l'évaluation de l'indemnité d'éviction proposée par l'expert amiable, M. Z..., à hauteur de la somme de 246 000 euros sur la base de la valeur locative du marché et d'entériner en revanche son évaluation de l'indemnité d'occupation à hauteur de la somme de 42 000 euros avant abattement, sur la base de cette même valeur locative, la cour d'appel, qui devait choisir entre soit écarter ces deux évaluations comme ne correspondant pas à la valeur locative réelle devant être retenue, soit les adopter ensemble, a entaché son arrêt d'une contradiction en violation de l'article 455 du code de procédure civile ;
Mais attendu qu'ayant retenu la valeur locative de marché pour le calcul de l'indemnité d'éviction et la valeur locative de renouvellement pour la fixation de l'indemnité d'occupation, la cour d'appel a, sans contradiction, souverainement fixé cette dernière selon la méthode de calcul qui lui a paru la plus appropriée ;
D'où il suit que le moyen est mal fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Stock des affaires aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Stock des affaires à payer 2 500 euros à M. Charles Y... et Mme Véronique Y... ; rejette la demande de la société Stock des affaires ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du neuf avril deux mille treize.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt
Moyens produits par la SCP Odent et Poulet, avocat aux Conseils, pour la société Stock des affaires
PREMIER MOYEN DE CASSATION
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué D'AVOIR fixé à seulement la somme de 196 100 le montant de l'indemnité d'éviction, toutes causes confondues, due par Mme X... à la SARL STOCK DES AFFAIRES ;
AUX MOTIFS QUE, par le contrat de bail, la société STOCK DES AFFAIRES s'est engagée à ne pouvoir exercer dans les lieux loués d'autre commerce que celui « d'articles de Paris, maroquinerie, bimbeloterie et solde de tous ces articles » ; que cependant, il est acquis que la société STOCK DES AFFAIRES exploite un bazar ; que les premiers juges ont exactement relevé que « si dans les objets divers offerts à la vente, il est probable que se trouvent certains articles de Paris et des éléments de maroquinerie, il est manifeste que l'activité ne se limite pas à ce type d'objets » ; que pour le surplus, c'est à tort que les premiers juges ont estimé qu'il résultait des définitions données du mot « bimbeloterie » par les différents dictionnaires et du caractère désuet de ce terme que l'activité de bazar était incluse dans celle de bimbeloterie, alors que c'est précisément l'inverse ; qu'en effet, si des articles de bimbeloterie sont susceptibles d'être offerts par la vente dans un bazar, l'activité de bazar ne se limite pas à la vente de tels articles définis comme étant de « petits objets curieux, décoratifs, babioles, souvenirs » par le dictionnaire Robert, voire de « bibelots » par le dictionnaire Larousse ; que l'éventuelle désuétude du terme bimbeloterie ne saurait conduire à assimiler à des articles de « bimbeloterie » les produits bon marché ou soldés offerts à la vente par la société STOCK DES AFFAIRES dans son bazar, notamment les articles de plage, les pendules et autres articles pour la maison, les produits d'entretien et les produits d'hygiène visibles en grand nombre sur les photographies ; que l'essentiel du chiffre d'affaires et des bénéfices retirés par la société STOCK DES AFFAIRES de son commerce ne provient pas des activités autorisées par le bail et est inopposable à la bailleresse ; que le chiffre d'affaires résiduel étant faible, la valeur marchande du fonds est inférieure, quelle que soit la méthode choisie pour l'apprécier, à la valeur du droit au bail ;
ALORS QU'en cas de refus de renouvellement du bail, le bailleur doit payer au locataire évincé une indemnité d'éviction égale au préjudice causé par le défaut de renouvellement et devant comprendre la valeur marchande du fonds de commerce ; que, dans ses conclusions d'appel, la société STOCK DES AFFAIRES avait sollicité la confirmation du jugement en ce que le tribunal avait assimilé l'activité de bimbeloterie' indiquée comme destination commerciale contractuelle à celle de bazar au regard des définitions sémantiques données par la majorité des dictionnaires pour retenir l'intégralité du chiffre d'affaires réalisé ; qu'en affirmant que l'activité de bazar aurait été contraire à la destination contractuelle de bimbeloterie' et ainsi inopposable à Mme X..., motif pris que certains articles ne seraient pas des bibelots', la cour d'appel, qui a ainsi procédé à une distinction artificielle et erronée entre les notions de bimbeloterie' et de bazar, en méconnaissance des terminologies actuelles, pour exclure du chiffre d'affaires global celui réalisé à raison de l'activité de bazar, a violé l'article L. 145-14 du code de commerce.
SECOND MOYEN DE CASSATION
Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR fixé à la somme de 35 700 par an, outre les taxes et charges, l'indemnité d'occupation due par la société Stock des Affaires à Mme X... à compter du 1er juillet 2004 ;
AUX MOTIFS QU'aux termes de l'article L. 145-28 du code de commerce, l'indemnité d'occupation est déterminée conformément aux dispositions des sections 6 et 7, compte tenu de tous éléments d'appréciation ;qu'elle correspond à la valeur locative non pas de marché mais de renouvellement dans des conditions exclusives de tout plafonnement ; que pour sa part, la société STOCK DES AFFAIRES n'indique aucunement dans ses écritures la valeur locative de marché qu'il conviendrait de retenir ; qu'elle s'en remet, à défaut d'une nouvelle expertise qu'il n'y a pas lieu d'ordonner au rapport de son expert amiable qui retient une valeur locative de renouvellement de 42 000 ; qu'à titre principal, elle demande toutefois mais s'en expliquer clairement la fixation de l'indemnité d'occupation à la somme de 28 200 avant abattement de 30 % au titre de la précarité ; que tenant compte de l'ensemble des références produites et eu égard à l'activité exercée, à l'emplacement des locaux, à leurs caractéristiques et aux obligation respectives des parties, la valeur locative de renouvellement proposée par l'expert amiable, en considération d'un prix de 350 /m² pour la partie commerciale et de 16,66 /mois/m² pour l'appartement soit 42 000 au total apparaît bien fondée et sera retenue ;
ALORS QUE la contradiction de motifs équivaut à un défaut de motifs ; qu'en décidant à la fois d'écarter l'évaluation de l'indemnité d'éviction proposée par l'expert amiable, M. Z..., à hauteur de la somme de 246 000 sur la base de la valeur locative du marché et d'entériner en revanche son évaluation de l'indemnité d'occupation à hauteur de la somme de 42 000 avant abattement, sur la base de cette même valeur locative, la cour d'appel, qui devait choisir entre soit écarter ces deux évaluations comme ne correspondant pas à la valeur locative réelle devant être retenue, soit les adopter ensemble, a entaché son arrêt d'une contradiction flagrante en violation de l'article 455 du code de procédure civile.