Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 20 mars 2013, 11-26.705, Inédit
Cour de cassation - Chambre sociale
- N° de pourvoi : 11-26.705
- ECLI:FR:CCASS:2013:SO00545
- Non publié au bulletin
- Solution : Cassation
- Président
- M. Béraud (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Texte intégral
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Vu l'article L.2411-7 du code du travail ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X..., embauché par la société Future France, aux droits de laquelle vient la société Yellow media placée en liquidation judiciaire, a été convoqué a un entretien préalable à son licenciement par une lettre du 20 octobre 2006 ; qu'il a été présenté par le syndicat CFTC sur les listes de candidats aux élections des membres du comité d'entreprise et des délégués du personnel ; que son employeur a procédé à son licenciement le 3 novembre 2006 sans avoir sollicité l'autorisation de l'inspecteur du travail ; que l'intéressé a saisi la juridiction prud'homale afin d'obtenir la nullité de son licenciement et le paiement de diverses sommes ;
Attendu que pour dire nul le licenciement, l'arrêt retient qu'en l'absence de preuve de la date du dépôt des candidatures, il y a lieu de considérer que, s'agissant de dispositions visant à protéger le salarié, M. X... était protégé par l'obligation imposée à l'employeur de demander à l'autorité administrative l'autorisation de le licencier ;
Qu'en se déterminant ainsi sans constater que le dépôt de la liste des candidatures était antérieur à l'engagement de la procédure de licenciement, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard du texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 15 septembre 2011, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Orléans ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de M. Y... ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt mars deux mille treize.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt
Moyen produit par la SCP Boré et Salve de Bruneton, avocat aux Conseils, pour M. Y...
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR déclaré nul le licenciement de Monsieur X... et condamné la Société Yellow Media à lui verser les sommes de 30 000 à titre de dommages et intérêts, 4 893,20 à titre d'indemnité compensatrice de préavis, outre les congés payés y afférents, 9 786,40 à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement, 782,91 à titre de rappel de salaires pour la période de mise à pied, 2 000 au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;
AUX MOTIFS QUE "la Société Yellow Media entend prouver qu'elle a eu connaissance de la candidature de Monsieur X... aux élections professionnelles le jour de la date limite de dépôt des dites candidatures, soit le 24 octobre 2006, en produisant le témoignage de l'assistante ressources humaines qui atteste que les listes des candidats ont été remises en main propres par les organisations professionnelles le 24 octobre au Directeur des ressources humaines et un courriel de celui-ci daté du 25 octobre 2006 communiquant la liste des candidats ;
QU'il appartient à l'employeur de prouver la date laquelle les listes de candidats ont été déposées ;
QUE toutefois, ainsi qu'il est rappelé par la Société Yellow Media, en application de l'accord pré-électoral, les listes de candidats devaient être déposées à la direction des ressources humaines contre récépissé, au plus tard le 24 octobre ; qu'il ressort du même accord qu'elles ne pouvaient être déposées avant le 10 octobre, date de sa signature ; qu'il s'en déduit que l'employeur, sur qui repose l'obligation d'organiser matériellement les élections et ainsi d'enregistrer les candidatures, ne peut attester de la date du dépôt des listes qu'en en produisant le récépissé et que le témoignage d'un salarié appartenant à la Direction des ressources humaines, rédigé près de cinq ans après les faits, ne peut y suppléer ; que par ailleurs le courriel du Directeur des ressources humaines rédigé au lendemain de la date limite du dépôt des listes ne prouve pas la date effective de leur dépôt auprès de ses services, dès lors qu'il ne pouvait dresser une liste complète et définitive avant cette date ;
QU'en application de l'article L.2411-7 du code du travail l'autorisation de licenciement est requise pendant une durée de six mois courant à compter de l'envoi de la lettre recommandée de la candidature à l'employeur ; qu'au cas d'espèce il avait été prévu une remise contre récépissé, dont la force probante équivaut à celle d'une lettre recommandée ; qu'en l'absence de preuve de la date du dépôt des candidatures et s'agissant de dispositions visant à protéger le salarié, il y a lieu de considérer que Monsieur X... était protégé par l'obligation imposée à l'employeur de demander l'autorisation de licencier ; qu'il résulte de l'absence d'autorisation de la direction départementale du travail, non contestée, la nullité du licenciement de Monsieur X..." ;
1°) ALORS QUE lorsque l'enregistrement des candidatures par l'employeur, conforme aux stipulations du protocole préélectoral, est postérieur à la date de convocation à l'entretien préalable introduisant la procédure de licenciement, c'est au salarié qu'il appartient de démontrer que l'employeur a eu connaissance de sa candidature à une date antérieure ; qu'en faisant peser sur la Société Yellow Media, qui avait enregistré les listes de candidatures le 24 octobre 2004, dernier jour prévu par le protocole préélectoral pour leur dépôt, et les avait publiées le lendemain, la charge de la preuve de la date à laquelle ces listes avaient été déposées, la Cour d'appel a violé les articles L.2411-7 du Code du travail et 1315 du Code civil ;
2°) ALORS subsidiairement QUE la preuve prud'homale est libre ; qu'en subordonnant la preuve, ainsi mise à la charge de l'employeur, de la date du dépôt des candidatures aux élections professionnelles, à la production du récépissé délivré aux organisations syndicales contre la remise des listes de candidatures à l'exclusion de tout autre procédé, la Cour d'appel a violé le principe susvisé, ensemble l'article 1315 du Code civil ;
3°) ALORS en outre QUE le protocole d'accord préélectoral du 10 octobre 2010 prévoyait que les listes de candidatures seraient "déposées à la direction des ressources humaines contre récépissé" ; qu'il en résultait qu'au moment de la remise des listes, un récépissé était délivré aux organisations syndicales par l'employeur, qui dès lors ne pouvait le détenir, ni le produire au débat prud'homal ; qu'en prétendant déduire de cette stipulation conventionnelle "que l'employeur
ne peut attester de la date du dépôt des listes qu'en produisant le récépissé" la Cour d'appel a violé le principe selon lequel le juge ne doit pas dénaturer les documents de la cause et l'article 1134 du Code civil, 4°) ALORS très subsidiairement QU'en subordonnant la validité du licenciement de Monsieur X... à la production, par la Société Yellow Media, du récépissé qu'elle avait délivré aux organisations syndicales lors de la remise des listes de candidatures et qu'elle ne pouvait détenir la Cour d'appel, qui a méconnu le principe d'égalité des armes, a violé l'article 6 §.1er de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
5°) ALORS enfin et en toute hypothèse QUE lorsqu'un tiers détient une pièce nécessaire à l'appréciation, par le juge prud'homal, de la régularité du licenciement d'un salarié, il appartient au juge, qui constate que cette pièce est indispensable pour trancher le litige qui lui est soumis, de prendre les mesures utiles pour se la faire remettre ; qu'en déclarant nul le licenciement de Monsieur X... faute, pour la Société Yellow Media, d'avoir produit le récépissé de dépôt des listes de candidatures, détenu par l'organisation syndicale à qui il avait été remis lors de ce dépôt la Cour d'appel, qui a méconnu son office, a violé l'article 455 du Code de procédure civile.