Cour de cassation, civile, Chambre civile 3, 6 mars 2013, 12-13.962, Publié au bulletin
Cour de cassation - Chambre civile 3
- N° de pourvoi : 12-13.962
- ECLI:FR:CCASS:2013:C300277
- Publié au bulletin
- Solution : Cassation
- Président
- M. Terrier
Texte intégral
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Vu l'article L. 145-34 du code de commerce, ensemble l'article L. 145-33 du même code ;
Attendu que le montant des loyers des baux à renouveler ou à réviser doit correspondre à la valeur locative ; qu'à moins d'une modification notable des éléments mentionnés aux 1° à 4° de l'article L. 145-33 du code de commerce, le taux de variation du loyer applicable lors de la prise d'effet du bail à renouveler, si sa durée n'est pas supérieure à neuf ans, ne peut excéder la variation de l'indice national trimestriel mesurant le coût de la construction publié par l'Institut national de la statistique et des études économiques intervenue depuis la fixation initiale du loyer du bail expiré ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 9 novembre 2011), que, la société Maison de la Truffe leur ayant, par acte du 22 avril 1998, demandé le renouvellement du bail commercial qu'ils lui avaient consenti le 14 décembre 1989, Mme X... et son fils, M. Y..., aux droits desquels se trouve Mme Z..., ont assigné la société locataire en acquisition de la clause résolutoire et subsidiairement en fixation d'un loyer déplafonné ; qu'après avoir, le 11 mars 2003, conclu une transaction aux termes de laquelle les bailleurs ont notamment renoncé à solliciter le bénéfice de l'acquisition de la clause résolutoire et accepté le renouvellement du bail pour neuf années à compter du 1er octobre 1998, en contrepartie de quoi la société preneuse a accepté la fixation d'un loyer progressif par paliers, les parties ont signé le 7 septembre 2006 un nouveau bail reprenant les termes de cet accord ; que, par acte du 22 février 2007, les bailleurs ont délivré congé pour le 30 septembre 2007 avec offre de renouvellement à compter du 1er octobre 2007 ; que les parties ne s'étant pas accordées sur le prix du bail renouvelé, le juge des loyers commerciaux a été saisi ;
Attendu que pour dire que le prix du loyer du bail renouvelé devait être déplafonné, l'arrêt retient que la modalité de fixation du loyer par paliers dans le bail à renouveler, qui exclut la fixation d'un loyer de base, met obstacle à l'application de la règle du plafonnement et impose d'apprécier le loyer lors du renouvellement à sa valeur locative ;
Qu'en statuant ainsi , alors que, pour la fixation du prix du bail renouvelé, la variation indiciaire prévue par l'article L. 145-34 du code de commerce doit être appliquée au loyer initial acquitté par le preneur lors de la prise d'effet du bail à renouveler, nonobstant la fixation dans le bail expiré d'un loyer progressif par paliers, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 9 novembre 2011, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;
Condamne Mme A... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne Mme A... à payer à la société Maison de la truffe la somme de 2 500 euros ; rejette la demande de Mme A... ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du six mars deux mille treize.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt
Moyen produit par la SCP Defrenois et Levis, avocat aux Conseils, pour la société Maison de la truffe
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit que le prix du loyer du bail renouvelé devait être fixé à sa valeur locative ;
AUX MOTIFS QUE la bailleresse fait valoir que s'agissant d'un bail prévoyant un loyer progressif par paliers, la règle de plafonnement posée par l'article L. 145-34 du code de commerce qui prévoit la variation de l'indice trimestriel mesurant le coût de la construction intervenue depuis la fixation du loyer initial du bail expiré, ne peut trouver à s'appliquer puisque le loyer initial n'a été que temporaire ; que la locataire fait observer que le loyer à prendre en considération pour apprécier la variation indiciaire est celui fixé par les parties lors de la prise d'effet du bail renouvelé de sorte que le plafonnement ne saurait être exclu du fait de l'existence d'un loyer à paliers et cite à cet égard un arrêt de la Cour de cassation 3° chambre civile du 17 mai 2006 ; que dans le cas soumis à la Cour de cassation, la situation juridique était distincte de celle de l'instance actuelle dans la mesure où les parties avaient convenu d'un loyer initial puis de remises temporaires s'étalant sur plusieurs années, à la différence du bail litigieux dans lequel les parties ont expressément prévu que « La Maison de la Truffe accepte que son loyer annuel, hors charges et hors taxes et frais de toute nature, soit déplafonné et fixé selon les trois paliers successifs définis dans le bail » ; que cette modalité de fixation du loyer par paliers dans le bail à renouveler qui exclut la fixation d'un loyer de base, met obstacle à l'application de la règle du plafonnement et impose d'apprécier le loyer lors du renouvellement à sa valeur locative ;
ALORS QUE, à moins d'une modification notable des éléments mentionnés aux 1° et 4° de l'article L. 145-33 du code de commerce, le taux de variation du loyer applicable lors de la prise d'effet du bail à renouveler, si sa durée n'est pas supérieure à neuf ans, ne peut excéder la variation intervenue depuis la fixation du loyer du bail expiré, de l'indice trimestriel mesurant le coût de la construction ou, s'il est applicable, de l'indice trimestriel des loyers commerciaux ; que le loyer applicable lors de la prise d'effet du bail à renouveler s'entend nécessairement du loyer exigible pendant la première période triennale du bail, lequel constitue le loyer de base pour le calcul du loyer plafonné, quand bien même les parties auraient fixé conventionnellement un loyer payable par paliers successifs ; qu'en décidant que la fixation d'un loyer par paliers dans le bail à renouveler excluait la fixation d'un loyer de base susceptible de servir d'assiette au calcul du loyer plafonné, de sorte qu'il convenait d'apprécier le loyer du bail renouvelé le 1er octobre 2007 à sa valeur locative, la cour d'appel a ajouté un cas de déplafonnement de loyer non prévu par le statut des baux commerciaux, et violé l'article L. 145-34 du code de commerce.