Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 20 février 2013, 11-26.403, Inédit
Cour de cassation - Chambre sociale
- N° de pourvoi : 11-26.403
- ECLI:FR:CCASS:2013:SO00375
- Non publié au bulletin
- Solution : Cassation partielle
- Président
- M. Lacabarats
Texte intégral
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Grenoble, 21 septembre 2011), que M. X..., agent de sécurité du Commissariat à l'énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA), affecté dans des "formations locales de sécurité", travaillait selon un rythme "24X48", alternant une amplitude de travail de vingt-quatre heures trente minutes, comprenant quatre heure trente minutes de "pause", et une période de quarante-huit heures de repos ; qu'il a saisi la juridiction prud'homale d'une demande tendant, notamment, à obtenir la prise en compte comme temps de travail les quatre heures trente de "pause" ;
Sur le second moyen du pourvoi principal de l'employeur :
Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur ce moyen qui n'est pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
Sur le premier moyen du pourvoi principal de l'employeur :
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt d'accueillir cette demande, alors, selon le moyen ;
1°/ qu'en vertu de l'article L. 3121-2, alinéa 2, du code du travail, le temps nécessaire à la restauration et le temps consacré aux pauses peuvent ne pas être considérés comme temps de travail effectif et laisser place à une rémunération prévue librement par les partenaires sociaux, si l'ensemble des critères de l'article L. 3121-1 du code du travail ne sont pas réunis ; qu'en se bornant à affirmer que les salariés restés à disposition ne pourraient « vaquer à des occupations personnelles » et devraient « se conformer aux directives de l'employeur », sujétions qui n'existent que dans le cas d'une éventuelle intervention décidée par le CEA, sans s'expliquer, comme elle y était invitée (conclusions p. 9), sur les dispositions de l'accord collectif en vertu desquelles de telles interventions en matière de rémunération n'obéissent pas au régime des pauses et donnent lieu au contraire au versement d'un plein salaire, la cour d'appel n'a pas caractérisé, pour les temps de pauses et de restauration proprement dits, la réunion de tous les critères de l'article L. 3121-1 du code du travail et a ainsi privé sa décision de base légale au regard des textes susvisés ainsi que de l'article L. 2221-2 du code du travail ;
2°/ qu'il ressort tant de la finalité que du libellé même de leurs dispositions que les directives 93/104 et 03/88 ne trouvent pas à s'appliquer à la rémunération des travailleurs et ne concernent que les prescriptions minimales relatives à la durée du travail en vue d'améliorer les conditions de vie et de travail des salariés ; qu'en considérant cependant que lesdites directives ne permettraient aucune dérogation en matière de rémunération, la cour d'appel a violé par fausse application les textes susvisés ;
3°/ que constitue un travail effectif au sens des articles L. 3121-1 et L. 3121-5 du code du travail, le temps pendant lequel le salarié est à la disposition de l'employeur et doit se conformer à ses directives sans pouvoir vaquer librement à des occupations personnelles ; que constitue au contraire une astreinte, la période pendant laquelle le salarié peut vaquer à des occupations personnelles sans être à la disposition permanente et immédiate de l'employeur mais a l'obligation d'être en mesure d'intervenir pour effectuer un travail au service de l'entreprise, la durée de cette intervention étant considérée comme un temps de travail effectif ; qu'il était constant ,en l'espèce, que durant les quatre heures trente de pause litigieuse, les salariés des formations locales de sécurité étaient hébergés dans des « bases-vie » entièrement aménagées, comprenant notamment cuisine et dortoirs, où ils pouvaient librement vaquer à des occupations personnelles ; qu'en se fondant, pour dire que ces périodes constituaient un temps de travail effectif, sur le fait que les salariés devaient être en mesure d'intervenir en cas de nécessité, ce qui est le propre de l'astreinte, et sans caractériser autrement en quoi les sujétions imposées aux salariés durant ces périodes les auraient empêchés de vaquer à des occupations personnelles, la cour d'appel a statué par des motifs inopérants et a ainsi privé sa décision de base légale au regard des textes précités ;
Mais attendu que constitue un travail effectif, le temps pendant lequel le salarié est tenu de rester sur le lieu de travail dans des locaux déterminés imposés par l'employeur, peu important les conditions d'occupation de tels locaux, afin de répondre à toute nécessité d'intervention sans pouvoir vaquer librement à des occupations personnelles ;
Et attendu qu'ayant constaté que pendant leur temps de "pause", les salariés étaient tenus de demeurer dans les locaux du CEA, qualifiés de base-vie, qu'ils pouvaient être appelés à tout moment pour effectuer des interventions immédiates de sécurité, lesquelles étaient fréquentes tant pendant leur sommeil que pendant les repas, devaient se conformer aux directives de leur employeur et rester à sa disposition, de sorte qu'ils ne pouvaient vaquer librement à des occupations personnelles, la cour d'appel a exactement décidé que cette période constituait un temps de travail effectif qui devait être rémunéré comme tel ;
D'où il suit que le moyen, qui, en sa deuxième branche, critique des motifs surabondants, n'est pas fondé pour le surplus ;
Mais sur le moyen unique du pourvoi incident du salarié :
Vu l'article 455 du code de procédure civile ;
Attendu que pour limiter la condamnation de l'employeur à titre de rappel de salaire l'arrêt retient que la demande de M. X... n'est justifiée que pour la période de juin 2003 à mai 2009 ; qu'il lui est dû la somme de 37 171,52 euros, congés payés afférents inclus, à titre de rappel de salaire ;
Qu'en statuant ainsi, alors que la demande du salarié portait sur la période de mai 2003 à mai 2010, la cour d'appel, qui n'a pas mis la Cour de cassation en mesure d'exercer son contrôle, n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a limité à 37 171,52 euros la condamnation du Commissariat à l'énergie atomique et aux énergies alternatives au paiement d'un rappel de salaire, l'arrêt rendu le 21 septembre 2011, entre les parties, par la cour d'appel de Grenoble ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Grenoble, autrement composée ;
Condamne le Commissariat à l'énergie atomique et aux énergies alternatives aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne le Commissariat à l'énergie atomique et aux énergies alternatives à payer à M. X... la somme de 2 500 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt février deux mille treize.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt
Moyens produits au pourvoi principal par la SCP Célice, Blancpain et Soltner, avocat aux Conseils pour le Commissariat à l'énergie atomique et aux énergies alternatives
PREMIER MOYEN DE CASSATION
Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'AVOIR dit que les 4h30 de pause constituaient une période de travail effectif et d'AVOIR, en conséquence, condamné le CEA à payer un rappel de salaire pour la période comprise entre le mois de juin 2003 et celui de mai 2010, congés payés inclus ;
AUX MOTIFS QUE « sur le temps de pause : que l'article L. 3121.1 du code du travail dispose : « la durée du travail effectif est le temps pendant lequel le salarié est à la disposition de l'employeur et se conforme à ses directives sans pouvoir vaquer librement à des occupations personnelles » ; que l'article L. 3121.2 du même code précise : « le temps nécessaire à la restauration ainsi que les temps consacrés aux pauses sont considérés comme du temps de travail effectif lorsque les critères définis à l'article L. 3121.1 sont réunis. Même s'ils ne sont pas reconnus comme du temps de travail effectif, ces temps peuvent faire l'objet d'une rémunération prévue par une convention ou un accord collectif de travail ou par le contrat de travail » ; que les parties s'accordent sur la nature des missions exercées par les salariés affectés aux FLS ; que les fonctions exercées par les intimés obéissent à des exigences particulières, et répondent à des contraintes tant législatives que réglementaires imposées au CEA, en raison de la nature des activités de celui-ci et des risques, notamment nucléaires, liés à ces activités ; que les missions des formations locales de sécurité ont été définies par une note de la direction centrale de la sécurité du CEA en date du 1er juin 1994 ; que les missions exercées par les salariés affectés aux formations locales de sécurité imposent la présence de ceux-ci sur le site afin de leur permettre une intervention immédiate et efficace ; que les salariés concernés reçoivent une formation hautement spécialisée, notamment en matière de risques nucléaires que seul le CEA est en mesure de leur donner. Ils doivent maîtriser les techniques permettant l'extinction des incendies dans les installations nucléaires de toute nature (installations de base, installation de bases secrètes et installations classées pour la protection de l'environnement à caractère radioactif) ; qu'ils sont formés à la protection et au contrôle des matières nucléaires de même qu'à la protection des installations en contenant. Ils doivent pouvoir faire face à des situations de tentative de vol ou d'intrusion sur le site, et pour ce motif, ils sont armés ; qu'ils sont formés également à la prévention des risques particuliers liés à l'exploitation de salles blanches pour des activités de haute technologie et à l'utilisation de produits dangereux ; que la nature des missions exercées exige des salariés une polyvalence réelle ; que pendant leur temps de pause, les salariés intimés sont tenus de demeurer dans les locaux du CEA. Ils peuvent, en effet, être appelés à tout moment pour effectuer une intervention. Ils doivent ainsi se conformer aux directives de leur employeur et rester à sa disposition, de sorte qu'ils ne peuvent vaquer librement à des occupations personnelles ; que l'organisation du travail des salariés intimés montre que tout est mis en oeuvre pour qu'ils demeurent sur place : ils disposent d'une cuisine et de dortoirs ; que les locaux dans lesquels sont situées ces installations sont dénommés « base-vie » ; ils sont équipés de haut-parleurs qui diffusent les appels d'intervention ; que pendant les temps de pause où les salariés doivent rester dans les locaux à la disposition de leur employeur, ils sont soumis au pouvoir disciplinaire de ce dernier ; que les rapports d'intervention que doivent établir les salariés intimés, font apparaître que les interventions sont fréquentes tant pendant leurs repas que pendant leur sommeil ; que la circonstance que l'accord d'entreprise du 10 novembre 1999 « relatif au régime de travail des salariés affectés dans les formations locales de sécurité » prévoit que les temps de repos et de pause n'entrent pas dans le décompte de la durée de travail effectif est sans incidence, eu égard à la nature des contraintes imposées aux salariés faisant partie des dites formations locales de sécurité ; que contrairement à ce que soutient la partie appelante, l'accord en question ne fait nullement référence au système dit d'équivalence. L'article 2 dudit accord dispose : « la rémunération du temps de présence au titre des 4 heures 30 de pause et de repos est portée forfaitairement à 65 points, sans que cela se cumule avec le paiement d'heures supplémentaires du fait d'une intervention éventuelle » ; que si les salariés affectés aux formations locales de sécurité sont appelés à intervenir pendant leur temps de pause, l'intervention est rémunérée comme du temps de travail effectif ; que si les directives 93/104 et 03/88 permettent des dérogations dans la détermination des temps de pause, elles n'autorisent pas de dérogation en ce qui concerne leur rémunération ; que la demande de M. X... est fondée ; qu'il peut prétendre à un rappel de salaire dans la limite des cinq années précédent l'enregistrement de sa demande devant le conseil des prud'hommes ; que le rappel de salaire inclura la période écoulée depuis la saisine du premier juge, dans la limite des justificatifs produits ; que la demande de M. X... n'est justifiée que pour la période de juin 2003 à mai 2009 ; qu'il lui est dû, ainsi que l'a retenu le premier juge, la somme de 37.171,52 , congés payés afférents inclus, à titre de rappel de salaire ; que le jugement sera confirmé à cet égard » ;
ET AUX MOTIFS, À LES SUPPOSER TACITEMENT ADOPTÉS DES PREMIERS JUGES QUE « Sur les repos non rémunérés : que l'article L. 3121-1 du code du travail dispose que « la durée du travail effectif est le temps pendant lequel le salarié est à la disposition de l'employeur et se conforme à ses directives sans pouvoir vaquer librement à ses occupations personnelles » ; qu'en l'espèce, Monsieur Jean Raymond X... travaille 24h30 consécutives incluant 4h30 de pause non rémunérées ; qu'il en réclame le paiement ; que le C.E.A. soutient que l'article L. 3121-1 du code du travail est inapplicable en l'espèce puisque ces heures correspondent à un temps réel de repos de nuit ; que l'agent ne reçoit aucune directive de son employeur et peut vaquer à diverses occupations personnelles ; qu'au surplus, ces 4h30 de pause sont rémunérées par le "forfait repos" sous forme de 65 points de paiement supplémentaire ; que le Conseil de Prud'hommes de GRENOBLE a, dès l'audience de conciliation, diligenté une enquête qui a révélé que pendant leur temps de pause, les salariés ne peuvent sortir de l'entreprise ; que dès lors, le salarié est confiné à l'intérieur de l'entreprise ; que cette décision est imposée par l'employeur afin de pouvoir répondre sans délai à toute demande d'intervention ; que contrairement à ce que soutient le C.E.A., le salarié ne peut dès lors vaquer librement à ses occupations personnelles puisqu'il est soumis à répondre à une mesure d'intervention pour effectuer un travail au sein de l'entreprise ; que l'argumentaire du C.E.A. selon lequel les salles de repos sont remarquablement aménagées afin que le salarié puisse vaquer librement à ses occupations personnelles est inopérant ; que retenir un tel argumentaire aurait des conséquences néfastes pour toute personne salariée ; qu'en effet ce serait remettre en question le droit de toute personne à effectuer librement toute occupation personnelle en dehors de son activité salariale, ce qui est contraire au droit le plus élémentaire dont chacun peut se prévaloir ; qu'en conséquence et conformément au calcul qui a été fait par le demandeur, le Conseil allouera à Monsieur Jean Raymond X... la somme de 37.171,52 y compris les congés payés ; que cependant le salarié bénéficie d'une majoration de 65 ans dite « forfait repos » en contrepartie de ses 4H30 de repos non rémunérées, le Conseil dira que ces 4H30 doivent être rémunérées comme du temps de travail effectif ; que dès lors cette majoration dite « forfait repos » n'a plus lieu d'exister ; que conserver ce forfait reviendrait à payer 2 fois les 4H30 de pause ; que par conséquent, l'employeur devra déduire des sommes allouées à Monsieur Jean Raymond X... l'indû du « forfait repos » dont il a déjà bénéficié, ce dans la limite de la prescription quinquennale » ;
ALORS, D'UNE PART, QU'en vertu de l'article L. 3121-2 al. 2 du Code du travail, le temps nécessaire à la restauration et le temps consacré aux pauses peuvent ne pas être considérés comme temps de travail effectif et laisser place à une rémunération prévue librement par les partenaires sociaux, si l'ensemble des critères de l'article L. 3121-1 du Code du travail ne sont pas réunis ; qu'en se bornant à affirmer que les salariés restés à disposition ne pourraient « vaquer à des occupations personnelles » et devraient « se conformer aux directives de l'employeur », sujétions qui n'existent que dans le cas d'une éventuelle intervention décidée par le CEA, sans s'expliquer, comme elle y était invitée (conclusions p. 9), sur les dispositions de l'accord collectif en vertu desquelles de telles interventions en matière de rémunération n'obéissent pas au régime des pauses et donnent lieu au contraire au versement d'un plein salaire, la cour d'appel n'a pas caractérisé, pour les temps de pauses et de restauration proprement dits, la réunion de tous les critères de l'article L. 3121-1 du Code du travail et a ainsi privé sa décision de base légale au regard des textes susvisés ainsi que de l'article L. 2221-2 du Code du travail ;
ALORS, D'AUTRE PART, QU'il ressort tant de la finalité que du libellé même de leurs dispositions que les directives 93/104 et 03/88 ne trouvent pas à s'appliquer à la rémunération des travailleurs et ne concernent que les prescriptions minimales relatives à la durée du travail en vue d'améliorer les conditions de vie et de travail des salariés ; qu'en considérant cependant que lesdites directives ne permettraient aucune dérogation en matière de rémunération, la cour d'appel a violé par fausse application les textes susvisés ;
ALORS, DE TROISIEME PART ET SUBSIDIAIREMENT, QUE constitue un travail effectif au sens des articles L. 3121-1 et L. 3121-5 du Code du travail, le temps pendant lequel le salarié est à la disposition de l'employeur et doit se conformer à ses directives sans pouvoir vaquer librement à des occupations personnelles ; que constitue au contraire une astreinte la période pendant laquelle le salarié peut vaquer à des occupations personnelles sans être à la disposition permanente et immédiate de l'employeur mais a l'obligation d'être en mesure d'intervenir pour effectuer un travail au service de l'entreprise, la durée de cette intervention étant considérée comme un temps de travail effectif ; qu'il était constant en l'espèce que durant les 4h30 de pause litigieuse, les salariés des formations locales de sécurité étaient hébergés dans des « bases-vie » entièrement aménagées, comprenant notamment cuisine et dortoirs, où ils pouvaient librement vaquer à des occupations personnelles ; qu'en se fondant, pour dire que ces périodes constituaient un temps de travail effectif, sur le fait que les salariés devaient être en mesure d'intervenir en cas de nécessité, ce qui est le propre de l'astreinte, et sans caractériser autrement en quoi les sujétions imposées aux salariés durant ces périodes les auraient empêchés de vaquer à des occupations personnelles, la cour d'appel a statué par des motifs inopérants et a ainsi privé sa décision de base légale au regard des textes précités ;
SECOND MOYEN DE CASSATION (SUBSIDIAIRE)
Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'AVOIR dit que les 4h30 de pause constituaient une période de travail effectif et d'AVOIR, en conséquence, condamné le CEA à payer un rappel de salaire pour la période comprise entre le mois de juin 2003 et celui de mai 2010, congés payés inclus ;
AUX MOTIFS QUE « sur le temps de pause : que l'article L. 3121.1 du code du travail dispose : « la durée du travail effectif est le temps pendant lequel le salarié est à la disposition de l'employeur et se conforme à ses directives sans pouvoir vaquer librement à des occupations personnelles » ; que l'article L. 3121.2 du même code précise : « le temps nécessaire à la restauration ainsi que les temps consacrés aux pauses sont considérés comme du temps de travail effectif lorsque les critères définis à l'article L. 3121.1 sont réunis. Même s'ils ne sont pas reconnus comme du temps de travail effectif, ces temps peuvent faire l'objet d'une rémunération prévue par une convention ou un accord collectif de travail ou par le contrat de travail » ; que les parties s'accordent sur la nature des missions exercées par les salariés affectés aux FLS ; que les fonctions exercées par les intimés obéissent à des exigences particulières, et répondent à des contraintes tant législatives que réglementaires imposées au CEA, en raison de la nature des activités de celui-ci et des risques, notamment nucléaires, liés à ces activités ; que les missions des formations locales de sécurité ont été définies par une note de la direction centrale de la sécurité du CEA en date du 1er juin 1994 ; que les missions exercées par les salariés affectés aux formations locales de sécurité imposent la présence de ceux-ci sur le site afin de leur permettre une intervention immédiate et efficace ; que les salariés concernés reçoivent une formation hautement spécialisée, notamment en matière de risques nucléaires que seul le CEA est en mesure de leur donner. Ils doivent maîtriser les techniques permettant l'extinction des incendies dans les installations nucléaires de toute nature (installations de base, installation de bases secrètes et installations classées pour la protection de l'environnement à caractère radioactif) ; qu'ils sont formés à la protection et au contrôle des matières nucléaires de même qu'à la protection des installations en contenant. Ils doivent pouvoir faire face à des situations de tentative de vol ou d'intrusion sur le site, et pour ce motif, ils sont armés ; qu'ils sont formés également à la prévention des risques particuliers liés à l'exploitation de salles blanches pour des activités de haute technologie et à l'utilisation de produits dangereux ; que la nature des missions exercées exige des salariés une polyvalence réelle ; que pendant leur temps de pause, les salariés intimés sont tenus de demeurer dans les locaux du CEA. Ils peuvent, en effet, être appelés à tout moment pour effectuer une intervention. Ils doivent ainsi se conformer aux directives de leur employeur et rester à sa disposition, de sorte qu'ils ne peuvent vaquer librement à des occupations personnelles ; que l'organisation du travail des salariés intimés montre que tout est mis en oeuvre pour qu'ils demeurent sur place : ils disposent d'une cuisine et de dortoirs ; que les locaux dans lesquels sont situées ces installations sont dénommés « base-vie » ; ils sont équipés de haut-parleurs qui diffusent les appels d'intervention ; que pendant les temps de pause où les salariés doivent rester dans les locaux à la disposition de leur employeur, ils sont soumis au pouvoir disciplinaire de ce dernier ; que les rapports d'intervention que doivent établir les salariés intimés, font apparaître que les interventions sont fréquentes tant pendant leurs repas que pendant leur sommeil ; que la circonstance que l'accord d'entreprise du 10 novembre 1999 « relatif au régime de travail des salariés affectés dans les formations locales de sécurité » prévoit que les temps de repos et de pause n'entrent pas dans le décompte de la durée de travail effectif est sans incidence, eu égard à la nature des contraintes imposées aux salariés faisant partie des dites formations locales de sécurité ; que contrairement à ce que soutient la partie appelante, l'accord en question ne fait nullement référence au système dit d'équivalence. L'article 2 dudit accord dispose : « la rémunération du temps de présence au titre des 4 heures 30 de pause et de repos est portée forfaitairement à 65 points, sans que cela se cumule avec le paiement d'heures supplémentaires du fait d'une intervention éventuelle » ; que si les salariés affectés aux formations locales de sécurité sont appelés à intervenir pendant leur temps de pause, l'intervention est rémunérée comme du temps de travail effectif ; que si les directives 93/104 et 03/88 permettent des dérogations dans la détermination des temps de pause, elles n'autorisent pas de dérogation en ce qui concerne leur rémunération ; que la demande de M. X... est fondée ; qu'il peut prétendre à un rappel de salaire dans la limite des cinq années précédent l'enregistrement de sa demande devant le conseil des prud'hommes ; que le rappel de salaire inclura la période écoulée depuis la saisine du premier juge, dans la limite des justificatifs produits ; que la demande de M. X... n'est justifiée que pour la période de juin 2003 à mai 2009 ; qu'il lui est dû, ainsi que l'a retenu le premier juge, la somme de 37.171,52 , congés payés afférents inclus, à titre de rappel de salaire ; que le jugement sera confirmé à cet égard » ;
ET AUX MOTIFS, À LES SUPPOSER TACITEMENT ADOPTÉS DES PREMIERS JUGES QUE « Sur les repos non rémunérés : que l'article L. 3121-1 du code du travail dispose que « la durée du travail effectif est le temps pendant lequel le salarié est à la disposition de l'employeur et se conforme à ses directives sans pouvoir vaquer librement à ses occupations personnelles » ; qu'en l'espèce, Monsieur Jean Raymond X... travaille 24h30 consécutives incluant 4h30 de pause non rémunérées ; qu'il en réclame le paiement ; que le C.E.A. soutient que l'article L. 3121-1 du code du travail est inapplicable en l'espèce puisque ces heures correspondent à un temps réel de repos de nuit ; que l'agent ne reçoit aucune directive de son employeur et peut vaquer à diverses occupations personnelles ; qu'au surplus, ces 4h30 de pause sont rémunérées par le "forfait repos" sous forme de 65 points de paiement supplémentaire ; que le Conseil de Prud'hommes de GRENOBLE a, dès l'audience de conciliation, diligenté une enquête qui a révélé que pendant leur temps de pause, les salariés ne peuvent sortir de l'entreprise ; que dès lors, le salarié est confiné à l'intérieur de l'entreprise ; que cette décision est imposée par l'employeur afin de pouvoir répondre sans délai à toute demande d'intervention ; que contrairement à ce que soutient le C.E.A., le salarié ne peut dès lors vaquer librement à ses occupations personnelles puisqu'il est soumis à répondre à une mesure d'intervention pour effectuer un travail au sein de l'entreprise ; que l'argumentaire du C.E.A. selon lequel les salles de repos sont remarquablement aménagées afin que le salarié puisse vaquer librement à ses occupations personnelles est inopérant ; que retenir un tel argumentaire aurait des conséquences néfastes pour toute personne salariée ; qu'en effet ce serait remettre en question le droit de toute personne à effectuer librement toute occupation personnelle en dehors de son activité salariale, ce qui est contraire au droit le plus élémentaire dont chacun peut se prévaloir ; qu'en conséquence et conformément au calcul qui a été fait par le demandeur, le Conseil allouera à Monsieur Jean Raymond X... la somme de 37.171,52 y compris les congés payés ; que cependant le salarié bénéficie d'une majoration de 65 ans dite « forfait repos » en contrepartie de ses 4H30 de repos non rémunérées, le Conseil dira que ces 4H30 doivent être rémunérées comme du temps de travail effectif ; que dès lors cette majoration dite « forfait repos » n'a plus lieu d'exister ; que conserver ce forfait reviendrait à payer 2 fois les 4H30 de pause ; que par conséquent, l'employeur devra déduire des sommes allouées à Monsieur Jean Raymond X... l'indû du « forfait repos » dont il a déjà bénéficié, ce dans la limite de la prescription quinquennale » ;
ALORS QU'un horaire d'équivalence peut découler, en dehors du cas où il est prévu par un décret conformément aux dispositions de l'article L. 212-4 alinéa 5 devenu L. 3121-9 du Code du travail, d'une convention ou d'un accord dérogatoire conclu en application de l'article L. 212-2 du même Code dans sa rédaction antérieure à la Loi n° 2000-37 du 19 janvier 2000 loi « AUBRY II » , une telle convention ou un tel accord pouvant être, d'une part, une convention de branche ou un accord professionnel ou interprofessionnel étendu, d'autre part, une convention ou un accord d'entreprise ou d'établissement soumis aux dispositions de l'article L. 132-26 devenu L. 2232-21 et suivants du Code du travail ; qu'il résulte, par ailleurs, de l'article 28 de la Loi n° 2000-37 du 19 janvier 2000 que les clauses des accords conclus en application des dispositions de la Loi n° 98-461 du 13 juin 1998 loi « AUBRY I » continuent à produire leurs effets jusqu'à la conclusion d'un accord collectif s'y substituant ; qu'en l'espèce, le CEA avait fait valoir (conclusions, pages 20 et suivantes) que selon l'accord d'entreprise en date du 10 novembre 1999, conclu en application de la Loi AUBRY I et conforme à la réglementation alors en vigueur, les temps de repos et de pause n'entrent pas dans le décompte de la durée de travail effectif de telle sorte qu'à supposer même que ces périodes eussent constitué une période de travail, l'accord collectif aurait alors dû s'analyser comme instaurant un horaire d'équivalence, de façon valable dès lors qu'il s'agissait d'un accord d'entreprise soumis aux dispositions de l'article L. 132-26 devenu L. 2232-21 et suivants du Code du travail ; qu'en déclarant, pour rejeter ce moyen de défense, que l'accord d'entreprise en date du 10 novembre 1999 n'instaurait pas un système d'équivalence, la cour d'appel a violé par fausse interprétation ledit accord et par refus d'interprétation, l'article L. 212-2 du Code du travail dans sa rédaction applicable à l'espèce ainsi que l'article 28 de la Loi n° 2000-37 du 19 janvier 2000. Moyen produit au pourvoi incident par la SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray, avocat aux Conseils pour M. X...
Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir limité la demande de rappel de salaire de Monsieur X... à la somme de 37 171,52 .
AUX MOTIFS QUE la demande de M. X... est fondée. Il peut prétendre à un rappel de salaire dans la limite des cinq années précédant l'enregistrement de sa demande devant le conseil des prud'hommes. Le rappel de salaire inclura la période écoulée depuis la saisine du premier juge, dans la limite des justificatifs produits. La demande de M. X... n'est justifiée que pour la période de juin 2003 à mai 2009. Il lui est dû, ainsi que l'a retenu le premier juge, la somme de 37 171,52 euros, congés payés afférents inclus, à titre de rappel de salaire. Le jugement sera confirmé à cet égard.
ALORS QUE les juges du fond ne peuvent accueillir ou rejeter les demandes dont ils sont saisis sans examiner tous les éléments de preuve qui leur sont soumis par les parties au soutien de leurs prétentions ; QU'en considérant que la demande de Monsieur X... n'est justifiée que pour la période de juin 2003 à mai 2009 cependant que le salarié justifiait par la production d'un tableau la mise à jour de ses demandes jusqu'au mois de mai 2010 (production n° 64 communiquée par Monsieur X... en appel), la Cour d'appel ainsi violé ensemble les articles 455 et 563 du code de procédure civile et 1353 du code civil.
QU'a tout le moins elle a dénaturé ladite pièce 64 produite aux débats et violé l'article 1134 du Code civil.