Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 6 février 2013, 11-19.382, Publié au bulletin
Cour de cassation - Chambre sociale
- N° de pourvoi : 11-19.382
- ECLI:FR:CCASS:2013:SO00244
- Publié au bulletin
- Solution : Rejet
- Président
- M. Lacabarats
Texte intégral
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Grenoble, 12 janvier 2011), que l'association Union départementale des organismes de gestion des établissements d'enseignement catholique de l'Isère (l'association) a conclu avec les organisations syndicales le 18 septembre 1992 un accord départemental faisant bénéficier les salariés de ces établissements d'une garantie complémentaire pour le remboursement de frais médicaux et chirurgicaux ; qu'invoquant l'entrée en vigueur de la loi n° 2005-5 du 5 janvier 2005, l'association a indiqué aux enseignants attachés aux établissements sous contrat d'association que la garantie mise en place par cet accord ne leur était plus ouverte ; que le syndicat CFDT de l'Isère SEP-CFDT (le syndicat) a saisi la juridiction civile de diverses demandes ;
Attendu que le syndicat fait grief à l'arrêt de le débouter de ses demandes tendant à faire juger que l'accord du 18 décembre 1992 est toujours en vigueur, que les garanties souscrites doivent être maintenues et restaurées à compter du 1er janvier 2006 ainsi qu'à lui payer des dommages-intérêts au titre du préjudice subi, alors, selon le moyen :
1°/ que si les enseignants des établissements privés sous contrat ont, de par la loi, la qualité d'agents publics, et si, au titre de leurs fonctions d'enseignement pour lesquelles ils sont rémunérés par l'Etat, ils n'ont pas la qualité de salariés, il n'en reste pas moins qu'ils sont soumis à l'autorité de l'établissement gestionnaire, qui organise leur activité ; que les heures supplémentaires éventuellement exercées pour le compte de cet organisme sont rémunérées par lui ; qu'ils sont électeurs et éligibles aux élections professionnelles, et compris dans l'effectif à cette fin ; que leurs rémunérations versées par l'Etat sont comprises dans la masse salariale pour le calcul des contributions de l'employeur aux activités sociales ; qu'il en résulte que, quoiqu'agents de droit public et non liés par un contrat de travail avec l'organisme gestionnaire, ils restent salariés et enseignants ; qu'en décidant en conséquence qu'un accord collectif conclu par un tel organisme au profit de « tous les salariés, cadres et non cadres, enseignants et non enseignants » ne leur est pas applicable, la cour d'appel a violé ledit accord, ensemble la loi n° 2005-5 du 5 janvier 2005 ;
2°/ qu'en l'absence de dénonciation selon les règles fixées par l'article L. 2261-9 du code du travail, la convention collective demeure en vigueur ; qu'à défaut de disposition expresse, la convention collective ne peut faire l'objet d'une dénonciation partielle ; qu'en déclarant que l'Udogec avait pu exclure du bénéfice de l'accord collectif du 18 décembre 1992 les enseignants sous contrat d'association devenus agents publics, quand aucune dénonciation n'était intervenue, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
3°/ que les effets des contrats conclus antérieurement à la loi nouvelle, même s'ils continuent de se réaliser postérieurement à cette loi, demeurent régis par les dispositions sous l'empire desquelles ils ont été passés ; qu'en appliquant à l'accord collectif du 18 décembre 1992 qui avaient attribué aux enseignants sous contrat d'association un droit acquis à une garantie complémentaire « maladie-chirurgie » les dispositions de la loi n° 2005-5 du 5 janvier 2005 ayant pour effet de les en priver, la cour d'appel a violé les articles 2 et 1134 du code civil ;
Mais attendu qu'ayant retenu que depuis l'entrée en vigueur de la loi du 5 janvier 2005, les maîtres des établissements d'enseignement sous contrat d'association avec l'Etat ne sont plus liés par un contrat de travail avec l'établissement au sein duquel ils enseignent, la cour d'appel en a déduit à bon droit qu'ils ne remplissaient plus à compter de cette date par l'effet de la loi la condition nécessaire pour continuer à bénéficier de la garantie complémentaire que l'accord départemental du 18 septembre 1992 attribue aux salariés ; que le moyen, inopérant en sa deuxième branche et nouveau et, mélangé de fait et de droit, irrecevable en sa troisième branche, n'est pas fondé pour le surplus ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne le syndicat CFDT de l'Isère SEP-CFDT aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du six février deux mille treize.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt
Moyen produit par la SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray, avocat aux Conseils, pour le syndicat CFDT de l'Isère SEP-CFDT
Le moyen fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'AVOIR débouté le syndicat SEP-CFDT de ses demandes tendant à ce qu'il soit constaté qu'aucune dénonciation de l'accord paritaire départemental conclu afin de mettre en place un complément de remboursement maladie-chirurgie au bénéfice de tous les enseignants et non enseignants, cadres et non cadres, du département n'était intervenue, à ce qu'il soit jugé qu'il est toujours en vigueur et à ce que les garanties du contrat IGIREL soient maintenues, voire restaurées à compter du 1er janvier 2006 et à ce que l'UDOGEC soit condamnée à lui verser des dommages et intérêts en réparation du préjudice subi ;
AUX MOTIFS propres QUE le 18 décembre 1992, L'UDOGEC de l'Isère et les organisations syndicales ont signé un accord intitulé « Régime prévoyance maladie-chirurgie » en vertu duquel était mise en place « une garantie maladie-chirurgie généralisée au bénéfice de tous les salariés cadres et non cadres, enseignants et non enseignants de ce département » ; que la loi du 5 janvier 2005 relative à la situation des maîtres des établissements privés sous contrat, a mis un terme à des divergences d'appréciation, en leur conférant la qualité d'agents publics ; que ce texte précise encore qu'ils ne sont pas liés par un contrat de travail à l'établissement au sein duquel ils enseignent ; qu'ils n'ont donc pas la qualité de salariés de ces établissements, comme le sont les membres du personnel administratif ou du personnel d'entretien ; que l'UDOGEC de l'Isère soutient ajuste titre qu'ils sont désormais exclus du champ d'application du contrat souscrit auprès d'IGIREL Prévoyance en vertu de l'accord du 18 décembre 1992 qui ne concerne que ses salariés ; que cet accord n'a cependant pas à être dénoncé dès lors qu'il continue de s'appliquer à tous ceux qui sont effectivement salariés des établissements privés sous contrat ; qu'il importe peu à cet égard que la commission de suivi de la loi du 5 janvier 2005 ait préconisé la dénonciation ou la résiliation des accords ;
AUX MOTIFS éventuellement adoptés QU'il résulte des travaux parlementaires préparatoires à la loi n°2005-5 du 5 janvier 2005 que celle-ci avait notamment pour finalité de mettre fin à une divergence d'appréciation entre les juridictions de l'ordre administratif et celles de l'ordre judiciaire sur la nature des liens susceptibles d'unir un maître de l'enseignement privé sous contrat d'association à l'organisme de gestion de l'établissement, la Cour de cassation estimant qu'il s'agissait d'un contrat de droit privé relevant des dispositions an code du. travail à l'inverse de la juridiction administrative ; qu'il apparaît dès lors clairement à l'analyse des dispositions susvisées que l'enseignant d'un établissement privé sous contrat d'association n'est pas lié par un contrat de travail avec l'organisme de gestion mais par un contrat de droit public avec l'Etat ; que tout au plus, l'article L. 442-5 du code de l'éducation prévoit ensuite par exception que les maîtres de l'enseignement privé des établissements sous contrat d'association, en dépit de l'absence de contrat de travail avec l'organisme de gestion participent et bénéficient des institutions représentatives du personnel ; que l'article L 914-1 alinéa 1er du même code indique que les règles générales qui déterminent les conditions de service et de cessation d'activité des maîtres titulaires de l'enseignement public ainsi que les mesures sociales et les possibilités de formation dont ils bénéficient, sont applicables également et simultanément aux maîtres justifiant du même niveau de formation, habilités par agrément ou par contrat à exercer leur fonction dans des établissements d'enseignements privés liés à l'Etat par contrat ; que ces maîtres bénéficient également des mesures de promotion et d'avancement prises en faveur des maîtres de l'enseignement public ; qu'il résulte de l'ensemble de ces éléments que la loi n°2005-5 du 5 janvier 2005 a levé toute ambiguïté s'agissant des liens entre les organismes de gestion des établissements privés sous contrat d'association et les maîtres de l'enseignement privé en déniant l'existence entre ces parties de tout contrat de travail de sorte qu'à compter de son entrée en vigueur le 1er septembre 2005, les organismes de gestion, dépourvus de la qualité d'employeurs, étaient dispensés de l'application de tout accord professionnel ; qu'en l'espèce, il apparaît que les organisations patronales et syndicales, dont l'UDOGEC de l'Isère et le syndicat SEP CFDT ont conclu le 18 décembre 1992 un accord prévoyant la souscription d'un contrat de groupe auprès de l'IGIREL PREVOYANCE pour la couverture des risques complémentaires maladie-chirurgie au bénéfice du personnel des établissements privés dont les enseignants des établissements sous contrat d'association ; que contrairement à ce qu'affirme le syndicat, l'UDOGEC n'était nullement tenue de dénoncer cet accord en application des articles L. 2261-9 et suivants du code du travail pour que l'accord cesse de bénéficier aux maîtres de l'enseignement sous contrat d'association ; que d'une manière générale, le changement de forme juridique de l'employeur a en effet pour conséquence de mettre en cause de manière automatique les accords d'entreprise aux termes de l'article L. 2261-14 du code du travail sans qu'il soit nécessaire de procéder à une dénonciation de l'accord ; qu'en tout état de cause, le maintien des avantages individuels acquis ne pourrait être opposé qu'au nouvel employeur de sorte que l'UDOGEC de l'ISERE ne saurait être condamnée à appliquer l'accord du 18 décembre 1992 ; que pour autant, l'application de l'article L 2261-14 du code du travail n'est absolument pas certaine s'agissant du transfert de personnel vers une entité publique, soumise à statut qui s'applique immédiatement, (cass. Soc. 17 mai 2005, n° 03-13582) ;
ALORS QUE si les enseignants des établissements privés sous contrat ont, de par la loi, la qualité d'agents publics, et si, au titre de leurs fonctions d'enseignement pour lesquelles ils sont rémunérés par l'Etat, ils n'ont pas la qualité de salariés, il n'en reste pas moins qu'ils sont soumis à l'autorité de l'établissement gestionnaire, qui organise leur activité ; que les heures supplémentaires éventuellement exercées pour le compte de cet organisme sont rémunérées par lui ; qu'ils sont électeurs et éligibles aux élections professionnelles, et compris dans l'effectif à cette fin ; que leurs rémunérations versées par l'Etat sont comprises dans la masse salariale pour le calcul des contributions de l'employeur aux activités sociales ; qu'il en résulte que, quoiqu'agents de droit public et non liés par un contrat de travail avec l'organisme gestionnaire, ils restent salariés et enseignants ; qu'en décidant en conséquence qu'un accord collectif conclu par un tel organisme au profit de « tous les salariés, cadres et non cadres, enseignants et non enseignants » ne leur est pas applicable, la Cour d'appel a violé ledit accord, ensemble la loi n° 2005-5 du 5 janvier 2005 ;
ALORS aussi QU'en l'absence de dénonciation selon les règles fixées par l'article L. 2261-9 du code du travail, la convention collective demeure en vigueur ; qu'à défaut de disposition expresse, la convention collective ne peut faire l'objet d'une dénonciation partielle ; qu'en déclarant que l'UDOGEC avait pu exclure du bénéfice de l'accord collectif du 18 décembre 1992 les enseignants sous contrat d'association devenus agents publics, quand aucune dénonciation n'était intervenue, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
ALORS QUE les effets des contrats conclus antérieurement à la loi nouvelle, même s'ils continuent de se réaliser postérieurement à cette loi, demeurent régis par les dispositions sous l'empire desquelles ils ont été passés ; qu'en appliquant à l'accord collectif du 18 décembre 1992 qui avaient attribué aux enseignants sous contrat d'association un droit acquis à une garantie complémentaire « maladie-chirurgie » les dispositions de la loi n° 2005-5 du 5 janvier 2005 ayant pour effet de les en priver, la Cour d'appel a violé les articles 2 et 1134 du Code civil.