Cour d'appel de Nouméa, 13 septembre 2012, 11/00110

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE NOUMÉA
Arrêt du 13 Septembre 2012

Chambre Civile
Numéro R. G. : 11/ 00110

Décision déférée à la cour :
rendue le : 27 Septembre 2010
par le : Tribunal de première instance de NOUMEA

Saisine de la cour : 28 Février 2011


PARTIES DEVANT LA COUR

APPELANT

M. Eric X...
né le 19 Août 1959 à NOUMEA (98800)
demeurant...-98809 MONT-DORE

représenté par la SELARL AGUILA-MORESCO

INTIMÉE

Mme Sema Y... veuve X...
née le 18 Août 1943 à WALLIS (98600)
demeurant...-98800 NOUMEA

représentée par la SELARL LOUZIER-FAUCHE-CAUCHOIS


COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 09 Août 2012, en audience publique, devant la cour composée de :

Bertrand DAROLLE, Président de Chambre, président,
Jean-Michel STOLTZ, Conseiller,
Régis LAFARGUE, Conseiller,
qui en ont délibéré,
Jean-Michel STOLTZ, Conseiller, ayant présenté son rapport.

Greffier lors des débats : Mikaela NIUMELE

ARRÊT : contradictoire,
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 451 du code de procédure civile de la Nouvelle-Calédonie,
- signé par Bertrand DAROLLE, président, et par Mikaela NIUMELE, greffier, auquel la minute de la décision a été transmise par le magistrat signataire.


PROCÉDURE DE PREMIÈRE INSTANCE

Par requête introductive d'instance du 8 février 2007, M. Eric X..., au motif de recel successoral, a fait citer sa belle-mère Mme Séma Y... veuve X... devant le tribunal de première instance de Nouméa aux fins de voir condamner celle-ci :

+ à lui payer les sommes suivantes :

-42 432 271 F CFP au titre du capital du contrat d'assurance-vie AFER souscrit le 1er octobre 1988 avec intérêts au taux légal à compter du 2 avril 1999,

-19 128 890 F CFP au titre du compte Société Générale Calédonienne de Banque avec intérêts au taux légal à compter du 19 octobre 1998,

-2 600 000 F CFP au titre de la valeur du véhicule Chevrolet,

-20 millions F CFP au titre de la valeur de bijoux subtilisés,

-2 millions F CFP au titre du préjudice moral engendré par la perte des bijoux,

+ à justifier sous astreinte du contrat d'assurance de l'appartement situé... à Nouméa.

Par jugement du 27 septembre 2010 auquel il est référé pour le rappel de la procédure ainsi que l'exposé des faits, moyens et demandes, le tribunal de première instance de Nouméa a :

- débouté M. Eric X... de toutes ses demandes,

- débouté Mme Séma Y... veuve X... de sa demande de dommages-intérêts pour procédure abusive,

- condamné M. X... à payer à Mme Y... la somme de 200 000 FCFP au titre de l'article 700 du Code de procédure civile de la Nouvelle-Calédonie,

- condamné M. X... aux entiers dépens comprenant les frais des expertises judiciaires B... et C....


PROCÉDURE D'APPEL

Par requête déposée au greffe le 28 février 2011, M. Eric X... a interjeté appel de cette décision signifiée le 9 février 2011.

Par mémoire ampliatif déposé le 30 mai 2011 complété par des conclusions enregistrées au greffe de la cour les 5 décembre 2011 et 5 juin 2012, écritures auxquelles il est expressément référé pour le détail de l'argumentation et des moyens, il sollicite de la cour :

- de condamner Mme Y... à lui verser la somme de 42 432. 271 F CFP avec intérêts au taux légal à compter du 2 avril 1999, ou, le cas échéant, à rapporter cette somme à la succession,

- de condamner Mme Y... à rapporter à la succession la somme de 15. 000. 000 F CFP avec intérêts au taux légal à compter du 19 octobre 1998, date de décès de M. Michel X..., et à lui verser la somme de 4. 128. 890 F. CFP frauduleusement prélevée sur le compte après le décès de M. Michel X...,

- de désigner telle étude notariale qu'il plaira à la Cour aux fins de réouverture des opérations de succession,

- de condamner Mme Y... à lui verser la somme de 2. 600. 000 F CFP correspondant à la valeur du véhicule CHEVROLET dont elle n'était que l'usufruitière,

- de condamner Mme Y... à lui restituer les bijoux subtilisés dans le coffre et ce sous astreinte de 100. 000 F. CFP par jour de retard, ou le cas échéant, à lui verser la somme de 20. 000. 000 F CFP correspondant à leur valeur, outre 2. 000. 000 F CFP à titre de dommages et intérêts du fait de leur disparition,

- de condamner Mme Y... à lui verser la somme de 2. 600. 000 F. CFP correspondant à la valeur du véhicule Chevrolet dont elle n'était qu'usufruitière à la date de la succession et, subsidiairement, la somme de 1. 310. 000 F. CFP correspondant à l'estimation du véhicule avant le sinistre établie par M. Z...,

- d'enjoindre à Mme Y..., sous astreinte de 50. 000 F CFP par jour de retard, de justifier du contrat d'assurance pris sur l'appartement F4 sis... à Nouméa, dont elle est usufruitière,

- de condamner Mme Y... à lui verser la somme de 500. 000 F CFP au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile applicable en Nouvelle Calédonie,

- de condamner Mme Y... aux entiers dépens de cette instance, ainsi qu'à ceux afférents à la procédure de référé, dont distraction au profit de la SELARL AGUILA-MORESCO, avocat, sur ses offres de droit.

Par conclusions déposées le 8 août 2011 complétées par des conclusions enregistrées au greffe de la cour les 12 janvier et 20 juin 2012, écritures auxquelles il est expressément référé pour le détail de l'argumentation et des moyens, Mme Y... sollicite de la cour :

- de confirmer la décision rendue en toutes ses dispositions sauf en ce qu'elle a rejeté sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive,
- de débouter M. Eric X... de l'ensemble de ses demandes,
- de lui donner acte de la production du certificat d'assurance,

A titre subsidiaire, d'ordonner la réouverture de la succession de Mme A... puis de la succession de M. X... pour y réintégrer les bijoux dont la restitution est sollicitée,

- de condamner M. Eric X... à lui payer la somme de 500. 000 FCFP à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive,

- de condamner M. Eric X... à lui payer la somme de 250. 000 FCFP au titre de l'article 700 du CPC-NC en cause d'appel,

- de le condamner enfin aux entiers dépens dont distraction.

La clôture a été fixée au 13 juillet 2012 par ordonnance rendue le 6 juin 2012.


MOTIFS DE LA DÉCISION

Attendu que M. Michel X... est décédé le 19 octobre 1998 à Nouméa laissant pour recueillir sa succession :

- Mme Séma Y..., son épouse en seconde noces, avec laquelle il s'était marié le 6 décembre 1996 sous le régime de la séparation de biens, le contrat de mariage étant complété le 13 décembre 1996 par une donation au dernier vivant de l'usufruit de l'universalité des biens composant la succession du donateur à son décès,

- M. Eric X..., son fils, né de sa précédente union avec Evelyne A..., décédée en 1984 ;

Attendu que M. Eric X... soutient que par différentes manoeuvres, Mme Séma Y... s'est appropriée indûment diverses sommes à son préjudice ainsi que des bijoux ayant appartenu à sa mère ;

Qu'il convient de reprendre successivement ses demandes ;

Sur le contrat AFER :

Attendu que ce contrat d'assurance-vie a été souscrit par M. Michel X... le 1er octobre 1988 avec comme bénéficiaire unique son fils Eric ;

Que par une lettre datée du 25 octobre 1998, M. Michel X... a ajouté son épouse en qualité de bénéficiaire ; que, de ce fait, le montant du capital décès qui s'élevait à la somme de 84 864 542 F CFP a été partagé à parts égales entre M. Eric X... et Mme Séma Y... ;

Attendu que M. Eric X... soutient que la modification de la clause ne pouvait être prise en considération d'une part parce qu'elle est postérieure au décès de son père, d'autre part en raison du caractère dactylographié de la demande de modification alors qu'un courrier manuscrit est exigé ;

Qu'il sollicite dès lors la restitution de la somme perçue par Mme Séma Y... ou, subsidiairement, le rapport de cette somme à la succession par application de l'article 843 du code civil, cette modification à quelques jours du décès devant être requalifiée en donation ;

Attendu que Mme Séma Y... réplique :

- que le courrier a été, par erreur, daté du 25 octobre 1998 mais qu'il est établi par les dates des reçus émanant de la Westpac (25 septembre 1998) d'Haussman Patrimoines (7 octobre 1998) et d'AFER (8 octobre 1998) qu'il a été établi le 25 septembre 1998,

- que l'enquête et les expertises ont établi que ce courrier avait été signé en toute connaissance de cause par le défunt,

- qu'aucun texte n'exige que la clause bénéficiaire soit modifiée par un courrier manuscrit,

- qu'il n'y a aucune raison que cet ajout de bénéficiaire soit analysé comme une donation, que subsidiairement, s'il devait y avoir rapport à la succession pour le calcul de la quotité disponible, elle recevra cette somme en sa qualité de donataire sur la quotité disponible ;

Sur quoi,

Attendu que le premier juge, par des motifs que la cour adopte, a retenu à bon droit d'une part que le courrier par lequel M. Michel X... a ajouté son épouse en qualité de bénéficiaire avait été, par erreur, daté du 25 octobre 1998 mais avait bien été signé par l'intéressé en pleine connaissance de cause, d'autre part qu'aucun texte n'exigeait la rédaction d'un courrier manuscrit pour procéder audit ajout ;

Que l'on doit tenir la modification de la liste des bénéficiaires de l'assurance-vie comme l'expression de la volonté libre de M. Michel X... ;

Mais attendu que l'article 843 du code civil dans sa version applicable au jour du décès, disposait, sous réserves d'exceptions prévues par le même article mais non présentes en l'espèce, que " Tout héritier, même ayant accepté à concurrence de l'actif, venant à une succession, doit rapporter à ses cohéritiers tout ce qu'il a reçu du défunt, par donations entre vifs, directement ou indirectement " ;

Qu'il résulte d'une jurisprudence établie qu'un contrat d'assurance-vie peut être requalifié en donation si les circonstances dans lesquelles son bénéficiaire a été désigné révèlent la volonté du souscripteur de se dépouiller de manière irrévocable (Cass Chambre mixte 21 Décembre 2007) ;

Attendu que M. Michel X... se savait atteint depuis plusieurs années d'une maladie incurable dont il a compris l'issue fatale proche compte tenu de la dégradation rapide de son état de santé respiratoire à compter de juin 1998 imposant son hospitalisation du 7 au 9 septembre 1998 puis à nouveau le 6 octobre 1998 alors qu'il avait perdu une grande partie de ses facultés motrices et avait décidé de mettre de l'ordre dans ses affaires et d'organiser sa succession ainsi que cela résulte des pièces produites ;

Que la modification de la clause bénéficiaire du contrat d'assurance-vie trois semaines avant le décès alors qu'il avait deux jours auparavant, le 23 septembre 1998, déjà opéré un virement de la somme de 15 millions F CFP sur le compte personnel BNP de Mme Séma Y..., révèle, en l'absence d'aléa dans les dispositions prises, le caractère illusoire de la faculté de rachat et l'existence chez M. Michel X... d'une volonté actuelle et irrévocable de se dépouiller qui justifie la requalification de cette assurance-vie en donation ;

Qu'en conséquence, la cour, sur infirmation, ordonnera le rapport à la succession de la somme de 42 432. 271 F CFP avec intérêts au taux légal à compter de sa perception ;

Sur le compte Société Générale Calédonienne de Banque :

Sur le virement de la somme de 15 millions F CFP

Attendu que le 23 septembre 1998, M. Michel X... a procédé à un virement de 15 millions F CFP sur le compte personnel BNP de Mme Séma Y... ;

Attendu que M. Eric X... soutient qu'en application de l'article 792 du code civil, le fait d'effectuer des retraits sur le compte du défunt au moyen d'une procuration constitue un recel successoral en l'absence de preuve d'un don manuel et sollicite le rapport à la succession de la somme de 15 millions F CFP ;

Attendu que Mme Séma Y... réplique que c'est M. Michel X... qui a procédé au virement de la somme de 15 millions F CFP, l'enquête ayant établi qu'il s'agissait d'une volonté clairement exprimée ; que ce versement n'est sujet ni à contestation ni à restitution ;

Attendu que s'agissant d'un virement opéré par M. Michel X..., l'argumentation développée sur le fondement d'un abus de procuration et d'un recel successoral est inopérante ;

Attendu cependant que ce virement s'analyse en une donation dont il ne résulte d'aucun élément du dossier qu'elle ait été dispensée de rapport ;

Qu'en conséquence, Mme Séma Y... devra faire rapport de la somme de 15 millions F CFP à la succession ;

Sur l'utilisation du compte-joint postérieure au décès

Attendu que le 23 septembre 1998, M. Michel X... a donné procuration sur son compte Société Générale à son épouse ;

Que le compte a été transformé en compte-joint le 15 octobre 1998 et présentait un solde créditeur de 4 138 499 F CFP au 19 octobre 1998, date du décès de M. Michel X... ; que le solde n'était plus que de 9 609 F CFP au 1er septembre 2003 ;

Attendu que M. Eric X... soutient qu'en application de l'article 792 du code civil, le fait d'effectuer des retraits sur le compte du défunt au moyen d'une procuration constitue un recel successoral en l'absence de preuve d'un don manuel et sollicite la restitution de la somme de 4 128 890 F CFP ;

Attendu que Mme Séma Y... réplique :

- qu'aucun élément n'établit qu'elle a utilisé la procuration entre le 23 septembre et le décès de son mari le 19 octobre 1998 ce qui rend sans intérêt la jurisprudence opposée,

- qu'il a été fait rapport à la succession de l'intégralité du solde de 4 138 499 F CFP,

- qu'elle a utilisé les fonds après le décès pour régler les frais d'obsèques et des frais de succession et que M. Eric X... n'est donc pas fondé à obtenir le remboursement des 4 138 499 F CFP,

Sur quoi,

Attendu qu'il ne résulte d'aucun élément du dossier que Mme Séma Y... a utilisé la procuration entre le 23 septembre et le décès de son mari le 19 octobre 1998 ce qui rend sans portée toute l'argumentation développée sur ce fondement ;

Attendu ensuite qu'il résulte de la déclaration de succession aux services fiscaux que Mme Séma Y... a précisé que le solde de 4 138 499 F CFP était la propriété de son mari décédé et en a fait rapport à la succession ; qu'il n'y a donc eu aucune dissimulation assimilable à un recel ;

Attendu au demeurant que par acte du 13 décembre 1996 Mme Séma Y... a été déclarée donataire de l'usufruit de l'universalité des biens composant la succession du donateur à son décès et bénéficie donc d'un usufruit sur la somme de 4 138 499 F CFP ;

Qu'aux termes de l'article 587 du code civil, l'usufruitier a le droit de se servir des sommes d'argent à charge de restitution à la fin de l'usufruit ;

Qu'en conséquence, l'action de M. Eric X... est mal fondée de ce chef comme anticipée ;

Sur le véhicule Chevrolet :

Attendu que ce véhicule a été estimé à la somme de 2 600 000 F CFP dans la déclaration de succession du 1er septembre 1999 ;

Que Mme Séma Y... en a eu la jouissance jusqu'à un accident de circulation en 1999, sa valeur avant sinistre étant évaluée à 1 310 000 F CFP par expertise ;

Attendu que M. Eric X... soutient que Mme Séma Y... n'étant qu'usufruitière du véhicule dont il était le nu propriétaire, elle doit justifier des sommes perçues au titre de l'assurance et, à défaut, lui restituer la valeur déclarée à la succession, subsidiairement la valeur au jour de l'accident ;

Attendu que Mme Séma Y... réplique :

- qu'elle a réglé les droits de succession sur l'usufruit du véhicule,

- qu'elle n'a perçu aucune indemnisation de l'assurance suite au sinistre, le véhicule étant assuré au tiers,

- que M. Eric X... n'est donc pas fondé en sa demande ;

Sur quoi,

Attendu que Mme Séma Y... usufruitière du véhicule justifie de la réalité de sa destruction et de l'absence d'indemnisation suite au sinistre ;

Que M. Eric X... sera débouté de sa demande ;

Sur les bijoux :

Attendu que M. Eric X... soutient que son père détenait dans un coffre de nombreux bijoux d'une valeur de 20 millions F CFP ayant appartenu à sa première épouse et qu'au jour du décès, Mme Séma Y... se les est appropriés ; qu'elle en doit restitution en nature ou en argent ;

Qu'il sollicite, en outre, la somme de 2 millions F CFP au titre du préjudice moral pour la perte des bijoux de sa mère ;

Attendu que Mme Séma Y... réplique, à titre principal, :

- que la déclaration de succession d'Evelyne A... ne mentionnait aucun bijou et que la succession a été liquidée sans contestation,

- que son mari lui a offert certains bijoux de son ancienne épouse en lui indiquant qu'il les avait financés seul et que, s'agissant de biens propres, il pouvait en disposer librement,

- qu'aucune preuve n'est rapportée de la donation de ces bijoux à l'épouse défunte,

- que M. Eric X... doit être débouté de sa demande ;

Que subsidiairement, elle fait valoir :

- qu'elle a revendu une partie de ces bijoux devant faire face à des dépenses impérieuses et qu'il ne lui reste qu'une médaille, une bague, une croix et un coupe-papier ainsi que des boucles d'oreilles qui ont été modifiées par son mari,

- qu'il conviendra, au cas où la cour estimerait que les bijoux sont rentrés dans la succession d'Evelyne A..., de rouvrir sa succession puis celle de M. Michel X... et d'opérer distribution entre elle et M. Eric X... ; qu'en aucun cas il ne peut y avoir restitution ;

Sur quoi,

Attendu que dans son audition à la gendarmerie le 13 décembre 1999 sur plainte de M. Eric X..., Mme Séma Y... a reconnu détenir les bijoux suivants ayant appartenu à la première épouse de son mari lequel les lui aurait donnés :
- une chaîne forçat avec une médaille de 20 dollars,
- trois bagues or avec diamant,
- une croix avec diamants,
- un coupe-papier en argent ;

Que la preuve est bien rapportée par les propres déclarations du défunt rapportées par Mme Séma Y... que ces bijoux avaient été offerts par M. Michel X... à son épouse défunte et que si Mme Séma Y... pouvait se méprendre sur le sort juridique de ces bijoux-ce qui exclut le recel successoral à défaut d'intention frauduleuse-ces bijoux doivent néanmoins faire l'objet d'un rapport à la succession d'Evelyne A... puis de M. Michel X... ;

Qu'en raison du lien qui s'opérera entre les deux successions, la cour désignera un notaire unique pour la réouverture des opérations de liquidation-partage de la succession ;

Attendu par contre que M. Eric X... ne justifie pas de la consistance des autres bijoux qu'il accuse Mme Séma Y... d'avoir soustrait dans le coffre-fort de son père après son décès ni de leur origine ; qu'il sera donc débouté du surplus de ses demandes ;

Attendu, sur la demande de dommages-intérêts en réparation du préjudice moral, que c'est le père de M. Eric X... qui a soustrait les bijoux à la succession de sa première épouse sans qu'apparemment M. Eric X... qui ne l'ignorait pas y ait trouvé à redire, et qu'ainsi qu'observé ci-avant, Mme Séma Y... pouvait se méprendre sur le sort juridique de ces bijoux ;

Que la demande en réparation d'un préjudice moral dirigée contre Mme Séma Y... sera déclarée mal fondée ;

Sur l'appartement de la résidence le Nautile :

Attendu que Mme Séma Y... bénéficie de l'usufruit de cet appartement dont M. Eric X... est propriétaire et que ce dernier a demandé qu'elle justifie, sous astreinte de 50. 000 FCFP par jour de retard, de l'assurance des lieux ;

Attendu que Mme Séma Y... a produit le justificatif de l'assurance de cet appartement ;

Que cette demande est devenue sans objet ;

Sur la demande reconventionnelle en dommages-intérêts pour procédure abusive :

Attendu que Mme Séma Y... soutient que depuis le décès de son époux, M. Eric X... a fait preuve d'un acharnement judiciaire au pénal tout d'abord puis au civil, multipliant les demandes d'expertises et maintenant ses accusations en dépit des témoignages qui lui sont défavorables ; qu'elle estime établie l'intention de nuire ;

Mais attendu qu'au regard de la décision de la cour faisant partiellement droit aux demandes de M. Eric X..., l'action de celui-ci ne peut être qualifiée d'abusive ;

Sur les frais irrépétibles et les dépens :

Attendu qu'il sera alloué à ce titre à M. Eric X... la somme de 200. 000 FCFP, les dépens étant mis à la charge de Mme Séma Y..., à l'exclusion toutefois des frais des expertises judiciaires qui seront partagés par moitié entre les parties ;

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Statuant par arrêt contradictoire déposé au greffe ;

Infirme la décision déférée en toutes ses dispositions ;

Requalifie le contrat d'assurance-vie AFER souscrit par M. Michel X... le 1er octobre 1988 en donation ;

Dit que Mme Séma Y... devra faire rapport à la succession de M. Michel X... :

- de la somme de quarante-deux millions quatre cent trente-deux mille deux cent soixante et onze (42 432. 271) F CFP provenant du contrat d'assurance-vie avec intérêts au taux légal à compter de sa perception,

- de la somme de quinze (15 millions) F CFP au titre du virement du 23 septembre 1998 avec intérêts au taux légal à compter du 19 octobre 1998 ;

Dit que Mme Séma Y... devra faire rapport à la succession de Mme Evelyne A... des bijoux ci-après énumérés :
- une chaîne forçat avec une médaille de 20 dollars,
- trois bagues or avec diamant,
- une croix avec diamants,
- un coupe-papier en argent ;

Désigne l'Office notarial D...- E... & F... pour procéder à la réouverture des opérations de succession de Mme Evelyne A... puis de M. Michel X... en tenant compte des réintégrations ci-avant prononcées ;

Déclare sans objet la demande de M. Eric X... au titre de l'appartement ;

Rejette comme non fondées :

- les demandes formées par M. Eric X... au titre du solde du compte-joint, du véhicule CHEVROLET, des bijoux autres que ceux ci-avant énumérés, et en réparation d'un préjudice moral causé par la disparition des bijoux de sa mère ;

- la demande en dommages et intérêts formée par Mme Séma Y... pour procédure abusive ;

Condamne Mme Séma Y... à payer à M. Eric X... la somme de deux cent mille (200. 000) FCFP au titre de l'article 700 du code de procédure civile de la Nouvelle-Calédonie ;

La condamne en outre aux entiers dépens dont distraction au profit de la Selarl AGUILA-MORESCO, avocat, sur ses offres de droit ;

Dit toutefois que les frais des expertises judiciaires seront partagés par moitié entre les parties.

Le greffier, Le président.

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