Cour de cassation, civile, Chambre commerciale, 23 octobre 2012, 11-23.511, Inédit
Cour de cassation - Chambre commerciale
- N° de pourvoi : 11-23.511
- Non publié au bulletin
- Solution : Cassation
- Président
- M. Espel (président)
Texte intégral
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Vu l'article 1604 du code civil ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société Languedoc hydrolic service (la société LHS), ayant pour objet la restauration et la préparation de voitures pour la compétition sportive, a passé commande à la société Da Luz développement (la société DLD) de cinq jeux de pistons forgés, destinés à des véhicules Citroën DS 21 ; que ces pièces ont été livrées et payées ; que le moteur ayant cassé, lors des premiers essais, la société LHS a assigné la société DLD en restitution du paiement des pièces et en dommages-intérêts ;
Attendu que pour rejeter cette demande, l'arrêt retient que les angles de façonnage des pistons sont erronés par rapport à la dissymétrie du positionnement des soupapes de la culasse et que l'acceptation sans réserve de la marchandise par l'acquéreur lui interdit de se prévaloir du défaut de conformité ;
Attendu qu'en se déterminant ainsi, sans constater que le défaut de conformité des pistons présentait un caractère apparent, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la seconde branche :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 19 mai 2011, entre les parties, par la cour d'appel de Rennes ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Rennes, autrement composée ;
Condamne la société DLD aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, la condamne à payer à la société LHS la somme de 2 500 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-trois octobre deux mille douze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt
Moyen produit par la SCP Hémery et Thomas-Raquin, avocat aux Conseils, pour la société Languedoc hydrolic service (LHS).
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR débouté la société LANGUEDOC HYDROLIC SERVICE de toutes ses demandes ;
AUX MOTIFS QU'« ainsi que le rappelle la société LANGUEDOC HYDROLIC SERVICE, ce qui est reproché à la société DA LUZ DEVELOPPEMENT, ce n'est pas la livraison de pistons de mauvaise qualité, l'expert X... relevant, au contraire, la qualité de la matière et un usinage remarquable, mais d'avoir fourni des pistons nonconformes à ce qui est requis pour ce type de moteurs, et qui avait été commandé ; qu'il résulte des constatations de l'expert judiciaire que les angles de façonnage sont erronés par rapport à la dissymétrie du positionnement des soupapes de la culasse ; que la société DA LUZ DEVELOPPEMENT fait valoir que l'acceptation sans réserve de la marchandise pour l'acquéreur lui interdit de se prévaloir du défaut de conformité ; qu'elle insiste sur le fait que la première réclamation a eu lieu en mars 2007, soit un an et demi après la livraison des pièces ; que LANGUEDOC HYDROLIC SERVICE tente d'écarter ce moyen en se fondant sur l'avis émis par l'expert qui, après avoir envisagé d'imputer à M. Y..., le gérant de cette société, la responsabilité de ne pas avoir contrôlé les pistons, indique que celui-ci n'est pas spécialiste dans ce domaine et qu'à son avis, il n'a pas les capacités techniques de les vérifier ; que l'expert n'indique pas en quoi M. Y... aurait été incapable de contrôler la conformité des pistons livrés à ce qu'il avait commandé ; qu'en effet, la société LANGUEDOC HYDROLIC SERVICE se revendique, sur le site Internet dont les copies versées aux débats ne sont pas contestées, comme un « spécialiste ID et DS », tenant à disposition toutes pièces hydrauliques LHS/LHM pour Citroën ID et DS, faisant fabriquer toutes pièces de rechange indisponibles à partir d'originaux et aux normes Citroën, et susceptible de produire sur simple demande un devis pour le réusinage des pièces spécifiques ; qu'il est en outre constant que M. Y... a réalisé, quoique postérieurement à la naissance du litige, un modèle de piston en résine, ce qui démontre ses capacités techniques dans ce domaine ; qu'il échet en conséquence, infirmant le jugement sur ce point, de dire n'y avoir lieu à résolution de la vente et à remboursement du prix par la société DA LUZ DEVELOPPEMENT ; que la société LANGUEDOC HYDROLIC SERVICE doit également être déboutée de sa demande de dommages et intérêts » (arrêt attaqué, p.4, §2 à 7).
ALORS QUE la réception sans réserve couvre uniquement les défauts apparents de conformité de la chose vendue ; qu'au cas particulier, il est constant que seule la mise en service des pistons et les dégâts que celle-ci a causés sur le moteur de la voiture à laquelle ils étaient destinés ont permis de détecter que lesdits pistons présentaient un défaut de conformité ; que par conséquent il ne saurait être considéré que les défauts de conformité litigieux étaient apparents ; qu'aussi, en décidant que l'exposante ne pouvait se prévaloir de la non-conformité des pistons dès lors que son gérant les aurait acceptés sans réserve au jour de la livraison, la cour d'appel a violé l'article 1604 du code civil ;
ALORS, subsidiairement, QUE seule la réception sans réserve faite par un acheteur qualifié couvre les défauts apparents de la chose vendue ; qu'en retenant que monsieur Y... serait capable de contrôler la conformité des pistons livrés à ce qu'il avait commandé aux motifs inopérants tirés, d'une part, de ce que le site Internet de la société LANGUEDOC HYDROLIC SERVICE indique qu'elle serait un spécialiste « ID/DS » et, d'autre part, de ce que monsieur Y... aurait postérieurement à la naissance du litige réalisé un modèle de piston en résine, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1604 du code civil.