Cour de cassation, civile, Chambre commerciale, 18 septembre 2012, 11-21.744, Publié au bulletin

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :



Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société coopérative vinicole Les Vignerons d'Opoul (la coopérative) a été mise en redressement puis liquidation judiciaires les 3 juillet 2001 et 4 juin 2002 ; que le juge-commissaire a rejeté les actions en revendication de stocks formées le 1er août 2002 par M. X... et vingt-cinq autres adhérents à la coopérative (les adhérents) ; qu'un arrêt irrévocable du 11 janvier 2005 a jugé que les adhérents sont restés propriétaires de leurs stocks de vin conservés par la coopérative au prorata de leurs apports respectifs et, avant dire droit, ordonné une expertise pour réunir tous les éléments permettant de déterminer les droits effectifs de chacun des adhérents ; que par jugement du 3 octobre 2006, M. Y... a été condamné, en sa qualité de liquidateur, à payer aux vingt-six propriétaires revendiquants diverses sommes évaluées par l'expertise ; que Mme Z... et sept autres adhérents, soutenant que le liquidateur avait commis une faute en répartissant le prix des stocks sur les vingt-six propriétaires revendiquants, ces stocks étant pour partie et à proportion de leurs apports respectifs leur propriété, ont recherché la responsabilité de M. Y... ;

Sur le moyen unique, pris en sa première branche :

Vu l'article L. 621-116 du code de commerce dans sa rédaction antérieure à loi du 26 juillet 2005 de sauvegarde des entreprises ;

Attendu que pour rejeter la demande des adhérents, l'arrêt retient, par motifs propres, qu'ils n'ont pas exercé d'action en revendication et, par motifs adoptés, qu'ils ne peuvent invoquer le bénéfice de l'article L. 621-116 du code de commerce qui s'applique essentiellement aux contrats de crédit bail faisant l'objet d'une publication spécifique ;

Attendu qu'en se déterminant ainsi, sans rechercher, comme elle y était invitée, si les biens que constituaient les récoltes confiées à la coopérative n'étaient pas restés la propriété des adhérents en vertu d'un contrat publié, de sorte qu'ils n'auraient pas eu à agir en revendication, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard du texte susvisé ;

Et sur le moyen, pris en sa seconde branche :

Vu l'article 85-4 du décret du 27 décembre 1985 ;

Attendu que pour statuer encore comme il fait, l'arrêt retient, par motifs adoptés, que si le propriétaire d'un bien, lorsque le contrat sur ce bien a été publié, est dispensé de faire reconnaître sa propriété, il doit néanmoins exercer une action en restitution dans les conditions de l'article 85-4 du décret du 27 décembre 1985 et est soumis à des délais ;

Attendu qu'en statuant ainsi, alors que l'action en restitution n'est qu'une simple faculté ouverte au propriétaire dispensé de faire reconnaître son droit de propriété et n'est soumise à aucun délai, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 10 mai 2011, entre les parties, par la cour d'appel de Montpellier ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Montpellier, autrement composée ;

Condamne M. Y... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du dix-huit septembre deux mille douze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt


Moyen produit par la SCP Vincent et Ohl, avocat aux Conseils, pour M. et Mme Z..., M. A..., Mme B... et le GAEC Thibaudeau.

En ce que l'arrêt attaqué a rejeté les demandes formées par les consorts Marie-Carmen et René Z..., Bernard A..., Josette B..., et par le Gaec Thibaudeau tendant à la condamnation, à titre personnel, de Maître Y..., mandataire judiciaire, à leur payer diverses sommes à titre de dommages et intérêts pour avoir engagé à leur égard sa responsabilité professionnelle ;

Aux motifs propres que le litige relève des dispositions de la loi n° 85-98 du 25 janvier 1985 et du décret n° 85-1388 du 27 décembre 1985 ; qu'aux termes des articles L. 621-115 et suivants du code de commerce dans sa rédaction applicable en la cause et 85-1 et suivants du décret précité, la revendication des meubles ne peut être exercée que dans le délai de trois mois suivant la publication du jugement ouvrant la procédure de redressement judiciaire ou de liquidation judiciaire immédiate et la demande de revendication est adressée dans ce délai par lettre recommandée avec demande d'avis de réception au mandataire de justice ; qu'aucun des appelants n'a exercé d'action en revendication dans ces forme et délai ; que, dès lors, ils ne sont pas fondés à reprocher à M. Y... d'avoir commis une faute engageant sa responsabilité en ayant procédé à la distribution des stocks de vin entre les seuls vingt-six propriétaires revendiquants ; que le jugement entrepris sera confirmé ;

Et aux motifs éventuellement adoptés des premiers juges que de même les demandeurs ne peuvent invoquer le bénéfice des dispositions de l'article L. 621-116 qui est applicable au propriétaire d'un bien lorsque le contrat sur ce bien a fait l'objet d'une publicité ; que cette disposition s'applique essentiellement aux contrats de crédit bail qui font l'objet d'une publication spécifique ; qu'en toute hypothèse, dans le cadre de cet article, le propriétaire, s'il est dispensé de faire reconnaître sa propriété, doit néanmoins exercer une action en restitution dans les conditions spécifiées à l'article 85-4 du décret et est soumis à des délais ; que force est de constater que les demandeurs n'ont diligenté aucune action en revendication, voire même en restitution, dans les délais impartis ;

1°/ Alors que la dispense de revendication bénéficie à tous les propriétaires de biens mobiliers qui se trouvent confiés au débiteur en procédure collective, par suite d'un contrat publié ayant fait l'objet d'une publicité ; qu'en opposant aux prétentions des adhérents à la coopérative, par motifs adoptés des premiers juges, que ce texte « s'applique essentiellement aux contrats de crédit-bail qui font l'objet d'une publication spécifique », au lieu de rechercher ainsi qu'elle y était invitée, si les biens que constituaient les récoltes confiées à la coopérative n'étaient pas restés la propriété des adhérents en vertu d'un contrat publié, de sorte qu'ils étaient dispensés de revendication, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 621-115 et L. 621-116 du code de commerce, dans leur rédaction antérieure à la loi du 26 juillet 2005 de sauvegarde des entreprises ;

2°/ Et alors que l'article 85-4 du décret n° 85-1388 du 27 décembre 1985 se limite à prévoir qu'en l'absence de restitution du bien, celui-ci peut être vendu à l'expiration d'un délai d'un mois après l'envoi d'une mise en demeure au propriétaire ; qu'en opposant aux prétentions des adhérents à la coopérative la circonstance qu'ils n'auraient pas formé de demande de restitution dans le délai prétendument imparti, la cour d'appel a violé par fausse application les dispositions de ce texte.

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