Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 27 juin 2012, 10-23.408, Inédit
Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 27 juin 2012, 10-23.408, Inédit
Cour de cassation - Chambre sociale
- N° de pourvoi : 10-23.408
- Non publié au bulletin
- Solution : Cassation partielle
Audience publique du mercredi 27 juin 2012
Décision attaquée : Cour d'appel de Lyon, du 09 juillet 2010- Président
- M. Linden (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Vu l'article L. 1231-5 du code du travail ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X..., engagé le 3 juin 1985 en qualité de directeur régional logistique par la société Distribution Casino France aux droits de laquelle se trouve la société Casino Guichard-Perrachon (la société Casino), a été affecté aux Etats-Unis en qualité de "chief executive officer" auprès d'une filiale, la société Smart and final (la société SF) à compter du 1er août 2003 ; qu'un avenant à son contrat de travail avec la maison mère du 7 juillet 2003 prévoyait la suspension de ce contrat pendant le détachement et à l'issue de ce dernier la réintégration du salarié au sein de la société Casino ou d'une filiale à un niveau de responsabilité au moins équivalent à celui des fonctions exercées avant l'expatriation ; que le détachement a été renouvelé jusqu'au 1er août 2007 ; que la société SF, vendue à une société tierce le 6 juin 2007, a mis fin au contrat de travail de M. X... le 1er juin 2007 ; que ce dernier et la société SF ont signé une transaction le 7 juillet 2007 prévoyant le versement d'indemnités de rupture ; qu'une clause du contrat de travail conclu avec la filiale faisant perdre à M. X... le bénéfice de celles-ci en cas d'acceptation d'un poste au sein de la société Casino dans les six mois à compter de la fin du détachement, la suspension du contrat de travail avec la société Casino a été prorogée jusqu'au 31 janvier 2008 ; que le salarié a occupé divers postes au sein de sociétés tierces à l'étranger en 2007 et en janvier 2008 ; qu'invoquant un abandon de poste pour défaut de reprise du travail le 1er février 2008, la société Casino a licencié le salarié pour faute grave par lettre du 17 mars 2008 ; que celui-ci a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes au titre d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
Attendu que, pour juger fondé sur une cause réelle et sérieuse le licenciement du salarié, l'arrêt retient que celui-ci aurait dû se mettre à la disposition de la société Casino pour venir travailler en France ; qu'il n'est pas été établi qu'il ait manifesté une intention en ce sens ; qu'il a créé à Los Angeles une société en mars 2007 et a occupé, à compter du 1er janvier 2008, un poste de président dans une autre société ; qu'il ne s'est manifesté auprès de la société Casino pour solliciter un poste que par lettre du 5 mars 2008 ; que le salarié a de fait refusé le 1er février 2008 de réintégrer les effectifs en France de la société Casino ;
Qu'en statuant ainsi, par des motifs inopérants, alors qu'il appartenait à la société Casino qui, après le licenciement du salarié par la société SF, avait consenti à la suspension du contrat de travail jusqu'au 1er février 2008, de prendre l'initiative du rapatriement du salarié et de lui proposer un reclassement, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il condamne la société Casino à payer à M. X... une somme de 450 000 euros au titre de l'indemnité contractuelle de licenciement, l'arrêt rendu entre les parties le 9 juillet 2010 par la cour d'appel de Lyon ; remet, en conséquence, sur les autres points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Lyon, autrement composée ;
Condamne la société Casino Guichard Perrachon aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Casino Guichard Perrachon à payer à M. X... la somme de 2 500 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-sept juin deux mille douze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt
Moyen produit par Me Foussard, avocat aux Conseils, pour M. X....
L'arrêt attaqué encourt la censure
EN CE QU'IL a décidé que le licenciement était fondé sur une cause réelle et sérieuse et en ce qu'il a débouté Monsieur X... de ses demandes tendant au paiement de diverses sommes à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement, des congés payés y afférents, d'indemnité compensatrice de préavis, des congés payés y afférents, d'indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse, de rappel de salaire pour la période du 1er février au 24 mars 2008, des congés payés y afférents, de solde de la prime d'expatriation pour l'année 2007, du remboursement des frais de scolarité des enfants de Monsieur X..., de remboursement des frais de voyage exposés en 2008 et de prise en charge des frais irrépétibles ;
AUX MOTIFS QUE « il est constant que la société CASINO a pris l'initiative de la rupture en convoquant Monsieur X... à un entretien préalable et en lui envoyant une lettre de licenciement le 17 mars 2008 ; qu'il est constant aussi que l'avenant du 7 juillet 2003 avait été prolongé d'un accord comme jusqu'au 31 janvier 2008 ; qu'il est certain que l'avenant de suspension du contrat français signé le 7 juillet 2003 faisait peser sur la société CASINO une obligation de réintégration de Monsieur X... au sein du groupe CASINO à l'expiration du contrat conclu avec la filiale SFI selon le droit américain ; qu'il est constant que Monsieur X... a fait l'objet d'un licenciement à l'initiative de SFI intervenu par une lettre du 1er juin 2007, mesure de rupture sur l'initiative de l'employeur prise avant la cession définitive de cette filiale par le groupe CASINO, cession faite le 6 juin 2007 ; que le fait d'accepter un accord transactionnel le 7 juillet 2007 et de bénéficier d'indemnités de rupture en avantages accordés lors de celle-ci par la société SFI, société devenue indépendante du groupe CASINO et le fait de respecter les engagements contenus dans le contrat de droit américain notamment l'obligation de ne pas travailler pendant six mois à compter de la rupture au sein du groupe CASINO ne caractérise pas, en soi et par conséquence directe, une démission et une renonciation au bénéfice du contrat de travail de droit français qui reprenait effet le 1er février 2008 ; que la société CASINO ne peut pas non plus valablement et sérieusement soutenir qu'il appartient à Monsieur X... de démissionner de son contrat dont il bénéficiait à compter du 1er février 2008 et de renoncer aux avantages que l'avenant du 7 juillet 2003 lui accordait ; qu'ainsi donc, il est bien évident que la rupture du contrat est intervenue à l'initiative de l'employeur par le licenciement prononcé le 17 mars 2008 ; que la cour relève que la société CASINO admet que la réintégration et le reclassement de Monsieur X... était bien une obligation qui pesait sur elle à compter du 1er février 208 ; que le versement des salaires de juin 2007 par la société CASINO démontre que cette société entendait le réintégrer au sein du groupe et assumer ses obligations à la suite de la cession de sa filiale américaine ; que ce versement de salaire que Monsieur X... a encaissé, sans aucune réserve, avant de le restituer en décembre 2007, dans la mesure où la suspension du contrat français se poursuivait jusqu'au 31 janvier 2008, n'est pas d'une malice ou un piège ; qu'il s'agit de l'exécution loyale des engagements pris dans l'avenant du 7 juillet 2003 est conforme aux dispositions de l'article 1134 du Code civil et de l'article L. 1222-1 du code du travail ; que Monsieur X... était tenu à compter du 1er février 2008 d'occuper un poste au sein du groupe CASINO, en France : l'avenant du 7 juillet 2003 promet à Monsieur X... une réintégration dans un poste équivalent en France, (il) devait se mettre à la disposition de la société CASINO pour venir travailler en France dans un poste à niveau de responsabilité au moins équivalent aux fonctions qu'il exerçait avant son expatriation ; que la cour constate qu'il n'est pas établi que Monsieur X... ait manifester une quelconque intention de venir en France pour occuper un quelconque poste ; qu'en effet, comme l'observe à juste titre la société CASINO, Monsieur X... a été silencieux ; que, de plus, il a créé en mars 2007, à Los Angeles, une société dénommée SNI IDEE, pour exercer en « free-lance » des prestations de services ; que dans le cadre de cette société, il a même accompli pour le groupe CASINO des prestations de services au Brésil à l'automne de 2007, mission pour laquelle il a reçu une somme de 10 000 US$ ; que cette activité témoigne bien d'une volonté de ne pas reprendre un poste au sein du groupe CASINO en 1008 à l'expiration de la prolongation de la suspension de son contrat faite dans son seul intérêt personnel ; qu'il est également établi que Monsieur X... a occupé, à compter du 1er janvier 2008, un poste de président de la société COLD PACK comme « Chef Executive Officer » ; que ce n'est que dans une lettre du 5 mars 2008, soit plus d'un mois après le 1er février 2008 que Monsieur X... se manifeste pour solliciter la société CASINO en vue d'obtenir un poste alors qu'il aurait dû être à la disposition de l'employeur dès le 1er février 2008, en France ; que dans ces conditions, le licenciement de Monsieur X... est bien fondé sur une cause réelle et sérieuse : il a, de fait, le 1er février 2008, refusé de réintégrer les effectifs en France de la société CASINO et contraint son employeur à engager une procédure de licenciement pour mettre fin à la relation contractuelle qui avait été suspendue jusqu'au 31 janvier 2008, dans son intérêt exclusif ; que le licenciement est donc bien fondé sur une cause réelle et sérieuse au 1er février 2008, date à laquelle Monsieur X... devait être à la disposition exclusive de son employeur et ce en France, ce qu'il n'a pas fait et ce qui est parfaitement établi au point de ne pas être contesté ; qu'en conséquence, Monsieur X... n'a droit à aucune indemnité qu'il réclame en rapport avec la rupture du contrat, intervenue par licenciement légitime et fondé sur une cause réelle et sérieuse, sauf l'indemnité contractuelle de licenciement prévue par son contrat de travail, puisque la rupture ne repose pas sur une faute lourde ou une faute grave ; qu'il n'a pas droit non plus aux demandes de rappels de salaires puisqu'il a lui-même créé sa situation qui l'a empêchée de fournir du travail ; qu'il n'a pas droit au solde de la prime d'expatriation qui lui a été intégralement versée ; qu'il n'a pas droit au remboursement des frais de scolarité de ses enfants et aux frais de voyage la mesure même où il n'a pas démontré qu'il entendait revenir s'établir en France pour travailler au sein du groupe CASINO »;
ALORS QUE, premièrement, selon l'article L. 122-14-8 devenu L. 1231-5 du code du travail, lorsqu'un salarié, mis par la société au service de laquelle il était engagé à la disposition d'une filiale étrangère dans le cadre d'un contrat de travail, est licencié par cette filiale, la société mère doit assurer son rapatriement et lui procurer un nouvel emploi compatible avec l'importance de ses précédentes fonctions au sein de la société mère ; que ce texte ne subordonne pas son application à une demande ni à une quelconque manifestation de volonté de la part du salarié ; de sorte qu'en exigeant, en l'espèce, de Monsieur X... qu'il manifeste une intention de venir en France pour occuper un poste et en décidant, par conséquent, qu'en ne se manifestant pas en vue de solliciter son rapatriement et sa réintégration immédiatement après l'expiration de la période de suspension de son contrat de travail, à savoir dès le 1er février 2008, il avait libéré la société CASINO de ses obligations de rapatriement et de réintégration, ce après avoir constaté, d'une part, que la société CASINO avait admis que la réintégration et le reclassement de Monsieur X... était bien une obligation qui pesait sur elle à compter du 1er février 2008 et, d'autre part, que la société CASINO n'établissait pas avoir fait des recherches en vue de trouver un poste ni qu'elle ait fait une quelconque proposition à Monsieur X..., la cour d'appel a violé les dispositions de l'article L. 122-14-8 devenu L. 1231-5 du code du travail ;
ALORS QUE, deuxièmement, en décidant, en l'espèce, que Monsieur X... avait témoigné d'une volonté de ne pas reprendre un poste au sein du groupe et, par conséquent, libéré la société CASINO de ses obligations de rapatriement et de réintégration, aux motifs inopérants qu'il avait accompli, en tant qu'associé fondateur d'une société dénommée SNO IDEE, une mission pour le groupe CASINO en automne de l'année 2007, à savoir pendant la période de suspension du contrat de travail et qu'il avait occupé un poste de direction au sein de la société COLD PACK à compter du 1er janvier 2008, soit à la fin de la période de suspension du contrat de travail, sans relever aucune initiative de la part de la société CASINO afin d'inviter Monsieur X... à reprendre un poste au sein du groupe ou de préparer son rapatriement et sa réintégration, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de L. 122-14-8 devenu L. 1231-5 du code du travail ;
ALORS QUE, troisièmement, et en toute hypothèse, seule la faute lourde et la faute grave sont privatives de l'indemnité légale ou conventionnelle de licenciement, de l'indemnité compensatrice de préavis et des congés payés y afférents ; de sorte qu'en décidant que Monsieur X... n'avait droit à aucune indemnité en rapport avec la rupture du contrat, à l'exception de l'indemnité contractuelle de rupture, dès lors que la rupture était intervenue par un licenciement légitime et fondé sur une cause réelle et sérieuse, tout en considérant qu'aucune faute grave n'était établie par l'employeur, qui n'était pas même invoquée par celui-ci, la Cour d'Appel a violé les articles L. 122-6 du Code du travail, recodifié sous l'article L 1234-1, L. 122-8 du Code du travail, recodifié sous les articles L 1234-4, L 1234-5, L 1234 -6, L 122-9 du Code du travail recodifié sous l'article L 1234-9 et L. 122-14-3 du Code du travail, recodifié sous les articles L 1232-1, L. 1233-2, L1235-1 et L1235-9 ;
ALORS QUE, quatrièmement, la société mère doit verser les indemnités de rupture à un salarié déjà licencié par la filiale au sein de laquelle il été mis à disposition, même s'il a déjà perçu des indemnités de rupture à ce titre de la part de la filiale, dès lors que les indemnités n'ont pas la même cause et s'appliquent à des périodes différentes ; de sorte qu'en déboutant Monsieur X... de ses demandes au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement, de l'indemnité compensatrice de préavis et des congés payés y afférents, sans rechercher, comme elle y était invitée (conclusions, p. 9), si Monsieur X... n'avait pas conservé le droit de percevoir des indemnités de rupture indépendamment des sommes perçues, pour une cause différente et pour une période différente, au titre du contrat de travail de droit américain, la Cour d'Appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L 122-6 du Code du travail, recodifié sous l'article L. 1234-1, L 122-8 du Code du travail, recodifié sous les articles L. 1234-4, L 1234-5, L 1234-6, L 122-9 du Code du travail recodifié sous l'article L 1234-9 et L 122-14-3 du Code du travail, recodifié sous les articles L 1232-1, L 1233-2, L1235-1 et L1235-9.
Sur le moyen unique :
Vu l'article L. 1231-5 du code du travail ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X..., engagé le 3 juin 1985 en qualité de directeur régional logistique par la société Distribution Casino France aux droits de laquelle se trouve la société Casino Guichard-Perrachon (la société Casino), a été affecté aux Etats-Unis en qualité de "chief executive officer" auprès d'une filiale, la société Smart and final (la société SF) à compter du 1er août 2003 ; qu'un avenant à son contrat de travail avec la maison mère du 7 juillet 2003 prévoyait la suspension de ce contrat pendant le détachement et à l'issue de ce dernier la réintégration du salarié au sein de la société Casino ou d'une filiale à un niveau de responsabilité au moins équivalent à celui des fonctions exercées avant l'expatriation ; que le détachement a été renouvelé jusqu'au 1er août 2007 ; que la société SF, vendue à une société tierce le 6 juin 2007, a mis fin au contrat de travail de M. X... le 1er juin 2007 ; que ce dernier et la société SF ont signé une transaction le 7 juillet 2007 prévoyant le versement d'indemnités de rupture ; qu'une clause du contrat de travail conclu avec la filiale faisant perdre à M. X... le bénéfice de celles-ci en cas d'acceptation d'un poste au sein de la société Casino dans les six mois à compter de la fin du détachement, la suspension du contrat de travail avec la société Casino a été prorogée jusqu'au 31 janvier 2008 ; que le salarié a occupé divers postes au sein de sociétés tierces à l'étranger en 2007 et en janvier 2008 ; qu'invoquant un abandon de poste pour défaut de reprise du travail le 1er février 2008, la société Casino a licencié le salarié pour faute grave par lettre du 17 mars 2008 ; que celui-ci a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes au titre d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
Attendu que, pour juger fondé sur une cause réelle et sérieuse le licenciement du salarié, l'arrêt retient que celui-ci aurait dû se mettre à la disposition de la société Casino pour venir travailler en France ; qu'il n'est pas été établi qu'il ait manifesté une intention en ce sens ; qu'il a créé à Los Angeles une société en mars 2007 et a occupé, à compter du 1er janvier 2008, un poste de président dans une autre société ; qu'il ne s'est manifesté auprès de la société Casino pour solliciter un poste que par lettre du 5 mars 2008 ; que le salarié a de fait refusé le 1er février 2008 de réintégrer les effectifs en France de la société Casino ;
Qu'en statuant ainsi, par des motifs inopérants, alors qu'il appartenait à la société Casino qui, après le licenciement du salarié par la société SF, avait consenti à la suspension du contrat de travail jusqu'au 1er février 2008, de prendre l'initiative du rapatriement du salarié et de lui proposer un reclassement, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il condamne la société Casino à payer à M. X... une somme de 450 000 euros au titre de l'indemnité contractuelle de licenciement, l'arrêt rendu entre les parties le 9 juillet 2010 par la cour d'appel de Lyon ; remet, en conséquence, sur les autres points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Lyon, autrement composée ;
Condamne la société Casino Guichard Perrachon aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Casino Guichard Perrachon à payer à M. X... la somme de 2 500 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-sept juin deux mille douze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt
Moyen produit par Me Foussard, avocat aux Conseils, pour M. X....
L'arrêt attaqué encourt la censure
EN CE QU'IL a décidé que le licenciement était fondé sur une cause réelle et sérieuse et en ce qu'il a débouté Monsieur X... de ses demandes tendant au paiement de diverses sommes à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement, des congés payés y afférents, d'indemnité compensatrice de préavis, des congés payés y afférents, d'indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse, de rappel de salaire pour la période du 1er février au 24 mars 2008, des congés payés y afférents, de solde de la prime d'expatriation pour l'année 2007, du remboursement des frais de scolarité des enfants de Monsieur X..., de remboursement des frais de voyage exposés en 2008 et de prise en charge des frais irrépétibles ;
AUX MOTIFS QUE « il est constant que la société CASINO a pris l'initiative de la rupture en convoquant Monsieur X... à un entretien préalable et en lui envoyant une lettre de licenciement le 17 mars 2008 ; qu'il est constant aussi que l'avenant du 7 juillet 2003 avait été prolongé d'un accord comme jusqu'au 31 janvier 2008 ; qu'il est certain que l'avenant de suspension du contrat français signé le 7 juillet 2003 faisait peser sur la société CASINO une obligation de réintégration de Monsieur X... au sein du groupe CASINO à l'expiration du contrat conclu avec la filiale SFI selon le droit américain ; qu'il est constant que Monsieur X... a fait l'objet d'un licenciement à l'initiative de SFI intervenu par une lettre du 1er juin 2007, mesure de rupture sur l'initiative de l'employeur prise avant la cession définitive de cette filiale par le groupe CASINO, cession faite le 6 juin 2007 ; que le fait d'accepter un accord transactionnel le 7 juillet 2007 et de bénéficier d'indemnités de rupture en avantages accordés lors de celle-ci par la société SFI, société devenue indépendante du groupe CASINO et le fait de respecter les engagements contenus dans le contrat de droit américain notamment l'obligation de ne pas travailler pendant six mois à compter de la rupture au sein du groupe CASINO ne caractérise pas, en soi et par conséquence directe, une démission et une renonciation au bénéfice du contrat de travail de droit français qui reprenait effet le 1er février 2008 ; que la société CASINO ne peut pas non plus valablement et sérieusement soutenir qu'il appartient à Monsieur X... de démissionner de son contrat dont il bénéficiait à compter du 1er février 2008 et de renoncer aux avantages que l'avenant du 7 juillet 2003 lui accordait ; qu'ainsi donc, il est bien évident que la rupture du contrat est intervenue à l'initiative de l'employeur par le licenciement prononcé le 17 mars 2008 ; que la cour relève que la société CASINO admet que la réintégration et le reclassement de Monsieur X... était bien une obligation qui pesait sur elle à compter du 1er février 208 ; que le versement des salaires de juin 2007 par la société CASINO démontre que cette société entendait le réintégrer au sein du groupe et assumer ses obligations à la suite de la cession de sa filiale américaine ; que ce versement de salaire que Monsieur X... a encaissé, sans aucune réserve, avant de le restituer en décembre 2007, dans la mesure où la suspension du contrat français se poursuivait jusqu'au 31 janvier 2008, n'est pas d'une malice ou un piège ; qu'il s'agit de l'exécution loyale des engagements pris dans l'avenant du 7 juillet 2003 est conforme aux dispositions de l'article 1134 du Code civil et de l'article L. 1222-1 du code du travail ; que Monsieur X... était tenu à compter du 1er février 2008 d'occuper un poste au sein du groupe CASINO, en France : l'avenant du 7 juillet 2003 promet à Monsieur X... une réintégration dans un poste équivalent en France, (il) devait se mettre à la disposition de la société CASINO pour venir travailler en France dans un poste à niveau de responsabilité au moins équivalent aux fonctions qu'il exerçait avant son expatriation ; que la cour constate qu'il n'est pas établi que Monsieur X... ait manifester une quelconque intention de venir en France pour occuper un quelconque poste ; qu'en effet, comme l'observe à juste titre la société CASINO, Monsieur X... a été silencieux ; que, de plus, il a créé en mars 2007, à Los Angeles, une société dénommée SNI IDEE, pour exercer en « free-lance » des prestations de services ; que dans le cadre de cette société, il a même accompli pour le groupe CASINO des prestations de services au Brésil à l'automne de 2007, mission pour laquelle il a reçu une somme de 10 000 US$ ; que cette activité témoigne bien d'une volonté de ne pas reprendre un poste au sein du groupe CASINO en 1008 à l'expiration de la prolongation de la suspension de son contrat faite dans son seul intérêt personnel ; qu'il est également établi que Monsieur X... a occupé, à compter du 1er janvier 2008, un poste de président de la société COLD PACK comme « Chef Executive Officer » ; que ce n'est que dans une lettre du 5 mars 2008, soit plus d'un mois après le 1er février 2008 que Monsieur X... se manifeste pour solliciter la société CASINO en vue d'obtenir un poste alors qu'il aurait dû être à la disposition de l'employeur dès le 1er février 2008, en France ; que dans ces conditions, le licenciement de Monsieur X... est bien fondé sur une cause réelle et sérieuse : il a, de fait, le 1er février 2008, refusé de réintégrer les effectifs en France de la société CASINO et contraint son employeur à engager une procédure de licenciement pour mettre fin à la relation contractuelle qui avait été suspendue jusqu'au 31 janvier 2008, dans son intérêt exclusif ; que le licenciement est donc bien fondé sur une cause réelle et sérieuse au 1er février 2008, date à laquelle Monsieur X... devait être à la disposition exclusive de son employeur et ce en France, ce qu'il n'a pas fait et ce qui est parfaitement établi au point de ne pas être contesté ; qu'en conséquence, Monsieur X... n'a droit à aucune indemnité qu'il réclame en rapport avec la rupture du contrat, intervenue par licenciement légitime et fondé sur une cause réelle et sérieuse, sauf l'indemnité contractuelle de licenciement prévue par son contrat de travail, puisque la rupture ne repose pas sur une faute lourde ou une faute grave ; qu'il n'a pas droit non plus aux demandes de rappels de salaires puisqu'il a lui-même créé sa situation qui l'a empêchée de fournir du travail ; qu'il n'a pas droit au solde de la prime d'expatriation qui lui a été intégralement versée ; qu'il n'a pas droit au remboursement des frais de scolarité de ses enfants et aux frais de voyage la mesure même où il n'a pas démontré qu'il entendait revenir s'établir en France pour travailler au sein du groupe CASINO »;
ALORS QUE, premièrement, selon l'article L. 122-14-8 devenu L. 1231-5 du code du travail, lorsqu'un salarié, mis par la société au service de laquelle il était engagé à la disposition d'une filiale étrangère dans le cadre d'un contrat de travail, est licencié par cette filiale, la société mère doit assurer son rapatriement et lui procurer un nouvel emploi compatible avec l'importance de ses précédentes fonctions au sein de la société mère ; que ce texte ne subordonne pas son application à une demande ni à une quelconque manifestation de volonté de la part du salarié ; de sorte qu'en exigeant, en l'espèce, de Monsieur X... qu'il manifeste une intention de venir en France pour occuper un poste et en décidant, par conséquent, qu'en ne se manifestant pas en vue de solliciter son rapatriement et sa réintégration immédiatement après l'expiration de la période de suspension de son contrat de travail, à savoir dès le 1er février 2008, il avait libéré la société CASINO de ses obligations de rapatriement et de réintégration, ce après avoir constaté, d'une part, que la société CASINO avait admis que la réintégration et le reclassement de Monsieur X... était bien une obligation qui pesait sur elle à compter du 1er février 2008 et, d'autre part, que la société CASINO n'établissait pas avoir fait des recherches en vue de trouver un poste ni qu'elle ait fait une quelconque proposition à Monsieur X..., la cour d'appel a violé les dispositions de l'article L. 122-14-8 devenu L. 1231-5 du code du travail ;
ALORS QUE, deuxièmement, en décidant, en l'espèce, que Monsieur X... avait témoigné d'une volonté de ne pas reprendre un poste au sein du groupe et, par conséquent, libéré la société CASINO de ses obligations de rapatriement et de réintégration, aux motifs inopérants qu'il avait accompli, en tant qu'associé fondateur d'une société dénommée SNO IDEE, une mission pour le groupe CASINO en automne de l'année 2007, à savoir pendant la période de suspension du contrat de travail et qu'il avait occupé un poste de direction au sein de la société COLD PACK à compter du 1er janvier 2008, soit à la fin de la période de suspension du contrat de travail, sans relever aucune initiative de la part de la société CASINO afin d'inviter Monsieur X... à reprendre un poste au sein du groupe ou de préparer son rapatriement et sa réintégration, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de L. 122-14-8 devenu L. 1231-5 du code du travail ;
ALORS QUE, troisièmement, et en toute hypothèse, seule la faute lourde et la faute grave sont privatives de l'indemnité légale ou conventionnelle de licenciement, de l'indemnité compensatrice de préavis et des congés payés y afférents ; de sorte qu'en décidant que Monsieur X... n'avait droit à aucune indemnité en rapport avec la rupture du contrat, à l'exception de l'indemnité contractuelle de rupture, dès lors que la rupture était intervenue par un licenciement légitime et fondé sur une cause réelle et sérieuse, tout en considérant qu'aucune faute grave n'était établie par l'employeur, qui n'était pas même invoquée par celui-ci, la Cour d'Appel a violé les articles L. 122-6 du Code du travail, recodifié sous l'article L 1234-1, L. 122-8 du Code du travail, recodifié sous les articles L 1234-4, L 1234-5, L 1234 -6, L 122-9 du Code du travail recodifié sous l'article L 1234-9 et L. 122-14-3 du Code du travail, recodifié sous les articles L 1232-1, L. 1233-2, L1235-1 et L1235-9 ;
ALORS QUE, quatrièmement, la société mère doit verser les indemnités de rupture à un salarié déjà licencié par la filiale au sein de laquelle il été mis à disposition, même s'il a déjà perçu des indemnités de rupture à ce titre de la part de la filiale, dès lors que les indemnités n'ont pas la même cause et s'appliquent à des périodes différentes ; de sorte qu'en déboutant Monsieur X... de ses demandes au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement, de l'indemnité compensatrice de préavis et des congés payés y afférents, sans rechercher, comme elle y était invitée (conclusions, p. 9), si Monsieur X... n'avait pas conservé le droit de percevoir des indemnités de rupture indépendamment des sommes perçues, pour une cause différente et pour une période différente, au titre du contrat de travail de droit américain, la Cour d'Appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L 122-6 du Code du travail, recodifié sous l'article L. 1234-1, L 122-8 du Code du travail, recodifié sous les articles L. 1234-4, L 1234-5, L 1234-6, L 122-9 du Code du travail recodifié sous l'article L 1234-9 et L 122-14-3 du Code du travail, recodifié sous les articles L 1232-1, L 1233-2, L1235-1 et L1235-9.