Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 27 juin 2012, 10-28.048, Inédit

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :


Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été engagé le 17 juin 1994 par la société Delta diffusion, aux droits de laquelle vient la société Médiapost, en qualité de distributeur d'imprimés publicitaires et de journaux gratuits, à temps partiel ; que le 16 mai 2005 a été signé un avenant au contrat de travail prévoyant un horaire de travail mensuel à temps partiel modulé ; qu'estimant qu'il n'avait pas été rempli de ses droits, le salarié a saisi la juridiction prud'homale d'une demande en requalification du contrat de travail à temps partiel en contrat de travail à temps plein et en paiement de diverses sommes ;

Sur le premier et le second moyen du pourvoi principal de l'employeur :

Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur ces moyens qui ne sont pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;

Mais sur le premier moyen du pourvoi incident du salarié :

Vu l'article L. 3123-14 du code du travail ;

Attendu que pour dire que le rappel de salaire, de prime d'ancienneté, d'indemnité compensatrice de préavis et d'indemnité de licenciement résultant du rappel de salaire auquel a droit M. X... sur l'ensemble de la période en litige, était limité à un horaire hebdomadaire de 9 heures duquel seront déduits les salaires déjà versés sur cette période, l'arrêt retient que les pièces du dossier révèlent que le salarié occupait parallèlement un emploi à temps depuis octobre 1999, et qu'en conséquence il ne se tenait pas à la disposition de la société, pendant ce temps de travail chez un autre employeur et que son droit à percevoir une rémunération à temps plein en raison de conditions irrégulières du travail à temps partiel doit dès lors être limité ;

Qu'en statuant ainsi, alors qu'elle avait constaté que le contrat de travail était présumé à temps complet et que l'employeur ne démontrait pas que le salarié connaissait les rythmes de travail et n'avait pas l'obligation de se tenir en permanence à sa disposition, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, a violé le texte susvisé ;

Et sur le second moyen du pourvoi incident du salarié :

Vu l'article L. 3141-22 du code du travail ;

Attendu que pour rejeter la demande de majoration au titre des congés payés, l'arrêt retient que le rappel de salaire accordé inclut la période de prise de congés ;

Qu'en se déterminant ainsi, sans préciser en quoi le maintien du salaire était plus favorable que l'indemnité représentant un dixième du rappel de salaire sollicité, la cour d'appel a privé sa décision de base légale ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il dit que le salarié a droit à un rappel de salaires sur l'ensemble de la période en litige y compris la partie antérieure à juillet 2005, à hauteur de 9 heures par semaine, soit la différence entre sa durée hebdomadaire d'emploi chez son second employeur et la durée maximale moyenne hebdomadaire de travail effectif sur une période de 12 semaines soit 44 heures, sans compensation possible entre les semaines et déduction faite des salaires déjà versés par la la société Médiapost, ainsi qu'au paiement d'un rappel de prime d'ancienneté, d'un rappel d'indemnité compensatrice de préavis et d'indemnité de licenciement résultant du rappel de salaire et renvoie les parties à effectuer le calcul de ces créances avec faculté de saisir la cour par requête en cas de difficulté et déboute le salarié de ses demandes relatives aux congés payés afférents aux rappels de salaire ordonnés tant pour la période antérieure que postérieure au 1er juillet 2005, l'arrêt rendu le 4 novembre 2010, entre les parties, par la cour d'appel de Rennes ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Angers ;

Condamne la société Médiapost aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, la condamne à payer la somme de 500 euros à M. X... ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-sept juin deux mille douze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat aux Conseils, pour la société Mediapost (demanderesse au pourvoi principal)

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir condamné la Société MEDIAPOST à verser à Monsieur X... la somme de 11.339,50 € à titre de rappel de salaire pour la période antérieure au 1er juillet 2005, ainsi que des dommages-intérêts au titre du défaut de paiement de l'intégralité du salaire ;

AUX MOTIFS PROPRES QU'en application des dispositions de l'article L. 212-4-3 devenu l'article L. 3123-14 du Code du Travail, le contrat de travail à temps partiel doit comporter par écrit, outre les éléments de la rémunération, la durée hebdomadaire ou le cas échéant mensuelle de travail ainsi que la répartition de cette durée du travail entre les jours de la semaine ou les semaines du mois ; qu'en l'espèce, le contrat de travail initialement conclu, ne mentionne aucune durée de travail, ni ne précise la répartition de celle-ci dans la semaine ou dans le mois ; qu'il doit donc être présumé conclu pour un temps plein, sauf pour l'employeur à établir la réalité d'un emploi à temps partiel, notamment la durée de travail convenue, que le salarié pouvait prévoir à quel rythme il devait travailler et qu' il n'était pas contraint de se tenir en permanence à sa disposition ; que la société MEDIAPOST ne fait pas cette démonstration ;

QU'ainsi les tableaux des heures de travail payées entre décembre 2001 et juin 2005 témoignent d'une grande variation des horaires de travail de Monsieur X... d'un mois à l'autre (de 32 heures à 107 heures), alors qu'il n'est pas contesté que le nombre de documents à distribuer variait également chaque semaine et que l'employeur s'était réservé au terme de son contrat de travail, de fixer l'activité de son salarié sur des secteurs économiques et géographiques variant selon ses besoins ; que de plus, aucun élément ne fait apparaître que le salarié était informé suffisamment à l'avance de la durée de travail qui allait lui être confié, avant la remise de la feuille de route et des documents à distribuer le vendredi pour la semaine suivante, alors que les dispositions du contrat de travail lui interdisaient plus de deux refus de distribution sous la sanction d'être considéré comme démissionnaire ; qu'il en résulte que, quand bien même l'employeur se serait efforcé de cantonner le travail confié sur certains jours de la semaine avec en l'espèce des variations entre 2002 et 2005 (le mardi et mercredi, lundi et le mardi, et le lundi et mercredi) et que le salarié pouvait avoir un emploi complémentaire était dans l'impossibilité de prévoir à quel rythme il devait travailler et en raison des dispositions de son contrat de travail, était contraint de se tenir en permanence à la disposition de la SA MEDIAPOST ; qu'enfin, la circonstance que Monsieur X... ait signé le 16 mai 2005 un avenant à son contrat de travail, fixant à compter du 1er juillet 2005 un horaire mensuel de travail à temps partiel de 39 heures en moyenne modulé, ne peut valoir reconnaissance d'un contrat à temps partiel respectant les dispositions légales précitées, pour la période antérieure ; que le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a retenu l'existence d'un contrat de travail à temps plein jusqu'au 30 juin 2005 et a accordé des rappels de salaire ;

QUE cependant, alors que les pièces du dossier révèlent que le salarié occupait parallèlement un emploi à temps plein soit de 35 heures par semaine depuis octobre 1999, et qu'en conséquence il ne se tenait pas à la disposition de la SA MEDIAPOST pendant ce temps de travail chez un autre employeur, son droit à percevoir une rémunération à temps plein en raison des conditions irrégulières du travail à temps partiel, sera limité pour l'ensemble de la période de travail en litige y compris la partie antérieure à 2005, à 9 heures par semaine, soit la différence entre sa durée hebdomadaire d'emploi chez le second employeur et la durée légale maximale moyenne hebdomadaire de travail effectif sur une période de 12 semaines soit 44 heures, sans compensation possible entre les semaines et déduction faite des salaires déjà versés par la SA MEDIAPOST ;

ET AUX MOTIFS ADOPTES DES PREMIERS JUGES QUE l'article L.212-4, alinéa 1, du Code du travail stipule que la durée du travail effectif est le temps pendant lequel le salarié est à la disposition de l'employeur et doit se conformer à ses directives sans pouvoir vaquer librement à des occupations personnelles ; que le contrat de travail de Monsieur X... ne prévoyait pas la répartition des horaires de travail sur la semaine ou sur le mois, conformément aux dispositions de l'article L.212-4-3 du Code du travail, alors même qu'il est qualifié de contrat à temps partiel ; que les bulletins de salaire de Monsieur X... font apparaître un nombre d'heures variable d'un mois à l'autre ; que la SA MEDIAPOST expose que Monsieur X... doit se rendre au dépôt afin de se faire remettre la feuille de route qu'il aura à effectuer dans la journée et recevoir les consignes, ce qui prouve que Monsieur X... ignore tout de son temps de travail en arrivant au dépôt ; que le contrat de travail de Monsieur X..., en son article 3, précise qu'il pourra être amené à effectuer des distributions selon les précisions qui lui seront données au fur et à mesure des besoins de la société ; que lors de la conclusion de son contrat de travail, Monsieur X... ignorait tout de la quantité de travail qu'il serait appelé à fournir et du temps qu'il devrait y consacrer ; que la société reconnaît elle-même qu'elle est soumise au marché et qu'elle ne connaît pas à l'avance la charge de travail qu'elle aura à fournir à ses distributeurs ; que la rédaction même du contrat de travail de Monsieur X... démontre que l'employeur peut donner chaque jour à son salarié des horaires de travail différents ; que le salarié est contractuellement à la disposition de la SA MEDIAPOST sur l'ensemble des jours de la semaine et du mois, ce qui est en totale opposition avec le droit du travail à temps partiel ; qu'en conséquence, le Conseil de Prud'hommes de Nantes dit que Monsieur X... était à la disposition permanente de son employeur et requalifie son contrat de travail en contrat de travail à temps complet ;

ALORS, D'UNE PART, QU'en relevant, pour dire que Monsieur X... était dans l'impossibilité de prévoir à quel rythme il travaillait et en raison des dispositions de son contrat de travail, contraint de se tenir en permanence à la disposition de la Société MEDIAPOST, à relever les stipulations du contrat du travail selon lesquelles l'employeur s'était réservé de fixer l'activité de son salarié selon ses besoins, qu'il lui était interdit plus de deux refus de distribution sous peine d'être considéré comme démissionnaire et la variation du nombre d'heures mensuel effectué au cours de la période considérée entre un minimum de 32 heures et un maximum de 107 heures, sans rechercher comme elle y était invitée, si le travail n'avait pas été effectué toujours le même jour le mercredi et un autre jour une fois par mois, ce qui permettait à Monsieur X... d'occuper un autre emploi, la Cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision en regard de l'article L. 212-4-3, devenu L. 3123-14 du Code du travail ;

ALORS, D'AUTRE PART ET SURTOUT, QU'en requalifiant le contrat de travail de Monsieur X... en contrat à temps plein tout en constatant qu'au cours de la période considérée il occupait un emploi à temps plein dans une autre entreprise, ce dont il résultait qu'il n'était pas dans l'obligation de se tenir en permanence à la disposition de la Société MEDIAPOST, la Cour d'appel n'a pas tiré les conséquences qui se déduisaient de ses propres constatations et a ainsi violé l'article L.3123-14 du Code du travail.

SECOND MOYEN DE CASSATION

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir requalifié le contrat de travail à temps partiel de Monsieur X... en contrat de travail à temps plein et d'avoir dit que Monsieur X... a droit à un rappel de salaire sur la période du 1er juillet 2005 au 31 octobre 2009 à hauteur de 26 heures par semaine soit la différence entre la durée hebdomadaire d'emploi chez le second employeur et la duré légale maximale moyenne hebdomadaire de travail effectif sur une période de 12 semaines sans compensation possible entre les semaines et déduction faite des salaires déjà versés par la SA MEDIAPOST ainsi qu'un paiement de rappel de prime d'ancienneté et renvoyé les parties à effectuer le calcul de cette créance avec faculté de saisir la Cour par requête en cas de difficulté et de l'avoir condamnée à lui verser 1.000 € de dommages-intérêts au titre du défaut de paiement de l'intégralité du salaire, et à délivrer un décompte et un bulletin de salaire conforme ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE sur le contrat de travail à temps partiel modulé : Monsieur X... a signé le 4 mai 2005 un avenant à son contrat de travail fixant à compter du 1er juillet 2005 un horaire de travail mensuel moyen à temps partiel de 26 heures avec modulation conformément aux dispositions de l'accord du 22 octobre 2004 (plus ou moins 8 heures), avec remise d'un calendrier indicatif au moins 15 jours avant chaque période de modulation, indiquant la répartition du temps de travail sur l'année, faite sur trois à cinq jours par semaine en conformité avec les jours de disponibilité du salarié, la modification des horaires de travail pouvant intervenir sous réserve d'un délai de prévenance de sept jours ouvrés exceptionnellement réduit à trois jours ouvrés, conformément aux dispositions de l'accord de modulation (art 2.3 ) ; que la durée de travail a, suivant avenant du 7 décembre 2005 été portée à 43H33 à compter du 1er janvier 2006 avec une modulation de plus ou moins 14 heures ; que conformément à l'article 2.2 de l'accord de modulation, le contrat prévoit que sera indiqué chaque semaine au salarié, le nombre d'heures précis pour la semaine suivante ; que ces dispositions contractuelles relèvent de l'article L. 212-4-6 du Code du Travail alors applicable devenu l'article L. 3123 -25 du même code applicable aux contrats de travail à temps partiel modulé, qui stipule notamment que la convention ou l'accord collectif prévoyant une durée hebdomadaire ou mensuelle de travail variant sur tout ou partie de l'année, doit fixer, outre les modalités selon lesquelles le programme indicatif de la répartition de la durée du travail est communiqué au salarié : 7° les conditions et les délais dans lesquels les horaires de travail sont notifiés par écrit au salarié, et 8° les modalités et délais selon lesquels ces horaires peuvent être modifiés; cette modification ne pouvant intervenir moins de sept jours après la date à laquelle le salarié en a été informé, délai pouvant être ramené à trois jours par accord ou convention ; qu'il résulte des modalités de rédaction de ce texte que l'information du nombre précis d'heures de travail à effectuer doit normalement intervenir au moins 7 jours (exceptionnellement trois jours par convention ou accord) à l'avance ;

QU'en l'espèce, le contrat fixe la durée mensuelle moyenne de travail, les limites de la variation de cette durée, les modalités de remise d'un calendrier indicatif indiquant la répartition du temps de travail sur l'année et se borne à prévoir que chaque semaine, sera indiqué au salarié le nombre d'heures précis de travail pour la semaine suivante ; que si l'accord de modulation prévoyant la notification chaque semaine du nombre d'heures précis pour la semaine suivante, n'indique pas précisément le délai minimal de prévenance, l'avenant au contrat de travail ne le fait pas davantage, contrairement aux prescriptions du texte légal précité ; qu'alors que le salarié soutient qu'il ne connaît ses heures de travail qu'au fur et à mesure qu'il les effectue et est ainsi placé dans l'impossibilité de connaître son rythme de travail, aucun élément ne démontre que les horaires précis de travail de chaque semaine ont été portés à la connaissance du salarié avec un délai de prévenance minimal ; que les récapitulatifs mensuels d'activité et les feuilles de route ne satisfont pas à cette exigence alors que ces derniers documents seuls remis à l'avance pour les besoins de la distribution, ne comportent pas la date de leur remise au salarié, de sorte qu'il ne peut en être déduit une information de l'horaire précis de chaque semaine avec un délai prévenance minimal et qu'ils ne mentionnent pas le programme horaire de la semaine suivant la distribution qu'ils concernent ; que les modalités d'application temps de travail partiel et modulé n'ayant pas été satisfaites, faute de respecter les dispositions combinées de l'article L.212 - 4-6 ,7° et 8° du Code du Travail alors applicable, l'employeur ne justifie pas du respect des conditions d'un contrat de travail à temps partiel modulé, de sorte que ce contrat doit être présumé à temps plein ; qu'il appartient dès lors à la SA MEDIAPOST de démontrer d'une part la réalité d'un emploi à temps partiel et d'autre part que le salarié pouvait prévoir à quel rythme il devait travailler, et n'était pas dans l'obligation de se tenir en permanence à sa disposition ; qu'une telle preuve n'est pas rapportée ;

QU'il est établi que Monsieur X... a fait en février 2005 une déclaration de ses jours de disponibilité portant sur les 5 premiers jours de la semaine, puis le 1er juillet 2005, une autre déclaration selon laquelle il ne souhaitait travailler que le lundi et le mercredi après 17 h 30 ; que contrairement à ce que soutient l'employeur, les récapitulatifs de feuilles de route démontrent des temps de travail sur chacun des cinq premiers jours de la semaine ;

QU'en conséquence, la SA MEDIAPOST ne démontre pas que Monsieur X... était en capacité de prévoir, dans le délai de prévenance minimal applicable, à quel rythme il devait travailler et qu'il n'était pas dans l'obligation de se tenir en permanence à sa disposition ;

QUE cependant, les pièces du dossier établissent que le salarié occupait parallèlement un emploi à plein temps à hauteur de 35 heures par semaine depuis octobre 1999 et qu'en conséquence il ne se tenait pas à la disposition de la SA MEDIAPOST pendant ce temps de travail chez un autre employeur, son droit à percevoir une rémunération à temps plein en raison des conditions irrégulières du travail à temps partiel, sera limité pour l'ensemble de la période de travail en litige y compris la partie antérieure à 2005, à 9 heures par semaine, soit la différence entre sa durée hebdomadaire d'emploi chez le second employeur et la durée légale maximale moyenne hebdomadaire de travail effectif sur une période de 12 semaines soit 44 heures, sans compensation possible entre les semaines et déduction faite des salaires déjà versés par la SA MEDIAPOST ;

ET AUX MOTIFS ADOPTES DES PREMIERS JUGES QUE l'article L. 212-4, alinéa 1, du Code du travail stipule que la durée du travail effectif est le temps pendant lequel le salarié est à la disposition de l'employeur et doit se conformer à ses directives sans pouvoir vaquer librement à des occupations personnelles ; que le contrat de travail de Monsieur X... ne prévoyait pas la répartition des horaires de travail sur la semaine ou sur le mois, conformément aux dispositions de l'article L. 212-4-3 du Code du travail, alors même qu'il est qualifié de contrat à temps partiel ; que les bulletins de salaire de Monsieur X... font apparaître un nombre d'heures variable d'un mois à l'autre ; que la SA MEDIAPOST expose que Monsieur X... doit se rendre au dépôt afin de se faire remettre la feuille de route qu'il aura à effectuer dans la journée et recevoir les consignes, ce qui prouve que Monsieur X... ignore tout de son temps de travail en arrivant au dépôt ; que le contrat de travail de Monsieur X..., en son article 3, précise qu'il pourra être amené à effectuer des distributions selon les précisions qui lui seront données au fur et à mesure des besoins de la société ; que lors de la conclusion de son contrat de travail, Monsieur X... ignorait tout de la quantité de travail qu'il serait appelé à fournir et du temps qu'il devrait y consacrer ; que la société reconnaît elle-même qu'elle est soumise au marché et qu'elle ne connaît pas à l'avance la charge de travail qu'elle aura à fournir à ses distributeurs ; que la rédaction même du contrat de travail de Monsieur X... démontre que l'employeur peut donner chaque jour à son salarié des horaires de travail différents ; que le salarié est contractuellement à la disposition de la SA MEDIAPOST sur l'ensemble des jours de la semaine et du mois, ce qui est en totale opposition avec le droit du travail à temps partiel ; qu'en conséquence, le Conseil de Prud'hommes de Nantes dit que Monsieur X... était à la disposition permanente de son employeur et requalifie son contrat de travail en contrat de travail à temps complet ;

ALORS, D'UNE PART, QU'en énonçant que le contrat de travail se bornait à prévoir que chaque semaine serait indiqué au salarié le nombre d'heures précis de travail pour la semaine suivante, et que ni l'accord de modulation, ni l'avenant au contrat de travail n'indiquaient précisément le délai minimal de prévenance, alors qu'il était stipulé par l'avenant au « contrat de travail distributeur contrat à temps partiel modulé » de Monsieur X..., qu'un calendrier indicatif indiquant la répartition du temps de travail sur l'année serait communiqué à Monsieur X... au moins quinze jours avant le début de chaque période de modulation, et que ce calendrier indicatif pourrait être modifié sous réserve d'un délai de prévenance de sept jours ouvrés, pouvant être exceptionnellement réduit à trois jours ouvrés afin de faire face à des variations d'activité modifiant la qualification de la semaine, la Cour d'appel a dénaturé cet avenant, et ainsi violé l'article 1134 du Code civil ;

ALORS, D'AUTRE PART, QU'en requalifiant le contrat de travail de Monsieur X... en contrat à temps plein tout en constatant qu'au cours de la période considérée elle occupait un emploi à temps partiel à hauteur de 18 heures hebdomadaires, ce dont il résultait qu'elle n'était pas dans l'obligation de se tenir en permanence à la disposition de la Société MEDIAPOST, la Cour d'appel n'a pas tiré les conséquences qui se déduisaient de ses propres constatations et a ainsi violé l'article L.3123-14 du Code du travail.
Moyens produits par la SCP Ancel, Couturier-Heller et Meier-Bourdeau, avocat aux Conseils, pour M. X..., (demandeur au pourvoi incident)


Premier moyen du pourvoi incident

Le moyen du pourvoi incident reproche à l'arrêt attaqué d'avoir dit que le rappel de salaire, de prime d'ancienneté, d'indemnité compensatrice de préavis et d'indemnité de licenciement résultant du rappel de salaire auquel a droit M. X... sur l'ensemble de la période en litige, était limité à un horaire hebdomadaire de 9 heures duquel seront déduits les salaires déjà versés sur cette période ;

AUX MOTIFS QUE

A / Sur la période antérieure au 1er juillet 2005

En l'espèce, le contrat de travail conclu en 1994 ne mentionne aucune durée de travail, ni ne précise la répartition de celle-ci dans la semaine ou dans le mois. Il doit donc être présumé conclu pour un temps plein, sauf pour l'employeur à établir la réalité d'un emploi à temps partiel, notamment la durée de travail convenue, que le salarié pouvait prévoir à quel rythme il devait travailler et qu'il n'était pas contraint de se tenir en permanence à sa disposition ;

Or, la Sa Mediapost ne fait pas cette démonstration ;

Il en résulte que, quand bien même l'employeur se serait efforcé de cantonner le travail confié sur certains jours de la semaine avec en l'espèce des variations entre 2002 et 2005 (le mardi et mercredi, lundi et mardi, et le lundi et mercredi) et que le salarié pouvait avoir un emploi complémentaire dont la durée sur la période antérieure à juillet 2005 est inconnue, le salarié jusqu'à cette date était dans l'impossibilité de prévoir à quel rythme il devait travailler et en raison des dispositions de son contrat de travail était contraint de se tenir en permanence à la disposition de la Sa Mediapost …

Le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a retenu l'existence d'un contrat de travail à temps plein jusqu'au 30 juin 2005, sous réserve des dispositions infra ;

B / Sur la période postérieure au 1er juillet 2005

M. X... a signé le 16 mai 2005 un avenant à son contrat de travail, fixant à compter du 1er juillet 2005 un horaire de travail mensuel moyen à temps partiel de 39 heures avec modulation conformément aux dispositions de l'accord du 22 octobre 2004 (plus ou moins 13 heures), avec remise d'un calendrier indicatif au moins 15 jours avant chaque période de modulation, indiquant la répartition du temps de travail sur l'année, faite sur trois à cinq jours par semaine en conformité avec les jours de disponibilité du salarié, la modification des horaires de travail pouvant intervenir sous réserve d'un délai de prévenance de sept jours ouvrés exceptionnellement réduit à trois jours ouvrés, conformément aux dispositions de l'accord de modulation (art 2.3 ) ;

les modalités d'application du temps de travail partiel et modulé n'ayant pas été satisfaites, faute de respecter les dispositions combinées de l'article L. 212 - 4-6 ,7° et 8° du Code du Travail alors applicable, l'employeur ne justifie pas du respect des conditions d'un contrat de travail à temps partiel modulé, de sorte que ce contrat doit être présumé à temps plein ;

il appartient dès lors à la SA Médiapost de démontrer d'une part la réalité d'un emploi à temps partiel et d'autre part que le salarié pouvait prévoir à quel rythme il devait travailler, et n'était pas dans l'obligation de se tenir en permanence à sa disposition ;

or une telle preuve n'est pas rapportée ;

il est établi que M. X... a fait en février 2005 une déclaration de ses jours de disponibilité portant sur les 5 premiers jours de la semaine, puis le 1er juillet 2005, une autre déclaration selon laquelle il ne souhaitait travailler que le lundi et le mercredi après 17 h 30 ; que contrairement à ce que soutient l'employeur, les récapitulatifs de feuilles de route démontrent des temps de travail sur chacun des cinq premiers jours de la semaine ;

en conséquence, la SA Médiapost ne démontre pas que M. X... était en capacité de prévoir, dans le délai de prévenance minimal applicable, à quel rythme il devait travailler et qu'il n'était pas dans l'obligation de se tenir en permanence à sa disposition ;

cependant, alors que les pièces du dossier révèlent que le salarié occupait parallèlement un emploi à plein temps soit de 35 heures par semaine depuis octobre 1999 et qu'en conséquence il ne se tenait pas à la disposition de la SA Médiapost pendant ce temps de travail chez un autre employeur, son droit à percevoir une rémunération à temps plein en raison des conditions irrégulières du travail à temps partiel, sera limité pour l'ensemble de la période de travail en litige y compris la partie antérieure à 2005, à 9 heures par semaine, soit la différence entre sa durée hebdomadaire d'emploi chez le second employeur et la durée légale maximale moyenne hebdomadaire de travail effectif sur une période de 12 semaines soit 44 heures, sans compensation possible entre les semaines et déduction faite des salaires déjà versés par la SA Médiapost ;

le jugement sera donc confirmé sur le principe d'un rappel de salaire qu'il a ordonné, mais les parties seront renvoyées en faire le calcul sur les bases définies par le présent arrêt, sans qu'il y ait lieu à allouer de sommes au titre des congés payés dans la mesure où le rappel de salaire accordé inclut la période de prise de congés ;

Alors que la Cour d'appel a entaché son arrêt d'une contradiction de motifs en relevant d'une part (p. 4 § 2) que quand bien même le salarié pouvait avoir « un emploi complémentaire dont la durée sur la période antérieure à juillet 2005 est inconnue » et d'autre part (p. 7 § 5) « que le salarié occupait parallèlement un emploi à temps plein soit de 35 heures par semaine depuis octobre 1999 » ; qu'elle a ainsi violé l'article 455 du code de procédure civile ;

Alors en tout état que la Cour d'appel ne pouvait relever que « les pièces du dossier révèlent que le salarié occupait parallèlement un emploi à plein temps soit de 35 heures par semaine depuis octobre 1999 », sans préciser sur quels documents reposait cette constatation de fait, qui n'était pas invoquée par les parties ; qu'elle a ainsi violé l'article 455 du Code de procédure civile ;

Alors en outre que à supposer que la Cour d'appel ait entendu se référer à un courrier du 19 février 2007 adressé par M. X... à son employeur, produit par la société Mediapost, elle ne pouvait en déduire sans dénaturation l'existence d'un emploi à plein temps de 35 heures par semaine pour un autre employeur, dès lors que par ce courrier M. X... se bornait à solliciter que son horaire mensuel moyen soit réduit de 39 heures à 26 heures à compter du 1er mars 2007 ; qu'elle a ainsi violé l'article 1134 du code civil ;

Alors également que si la Cour d'appel s'est référée au curriculum vitae de M. X... communiqué lors de son entretien de reclassement, il n'en résultait qu'un emploi pour un autre employeur depuis le mois d'octobre 1999 sans aucune précision sur la durée de cet emploi ; qu'en en déduisant l'existence d'un emploi à temps plein, la Cour d'appel a dénaturé ce document en violation de l'article 1134 du code civil ;

Alors enfin que le contrat de travail à temps partiel qui ne remplit pas les exigences légales est présumé à temps plein ; qu'il appartient à l'employeur qui conteste cette présomption de rapporter la preuve, d'une part, de la durée exacte convenue, et d'autre part, que le salarié n'était pas placé dans l'impossibilité de prévoir à quel rythme il devait travailler et qu'il n'avait pas à se tenir constamment à sa disposition ;

De sorte que la Cour d'appel qui, après avoir retenu que l'employeur ne démontrait pas que le salarié était en capacité de prévoir dans le délai de prévenance minimal suffisant à quel rythme il devait travailler et qu'il n'était pas dans l'obligation de se tenir en permanence à sa disposition, limite la requalification du contrat à temps partiel en contrat à temps plein sur la base d'un horaire hebdomadaire de 9 heures, correspondant à la différence entre la durée hebdomadaire de l'emploi chez un second employeur (35 h) et la durée légale maximale moyenne hebdomadaire de travail effectif sur une période de 12 semaines, soit 44 h, lorsqu'une éventuelle irrégularité au regard de l'interdiction du cumul d'emplois ne pouvait exonérer l'employeur de son obligation de payer les heures de travail effectuées, n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, en violation de l'article L 3123-1 du Code du travail ;

Second moyen du pourvoi incident

Le second moyen du pourvoi incident reproche à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir débouté M. X... de ses demandes relatives aux congés payés afférents aux rappels de salaire ordonnés tant pour la période antérieure que postérieure au 1er juillet 2005, à la prime d'ancienneté, à l'indemnité compensatrice de préavis et à l'indemnité de licenciement résultant du rappel de salaire ;

Aux motifs que

1/ Sur la demande en rappel de salaire

A / Sur la période antérieure au 1er juillet 2005

Que le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a retenu l'existence d'un contrat de travail à temps plein jusqu'au 30 juin 2005, sous réserve des dispositions infra ;

B / Sur la période postérieure au 1er juillet 2005

que le jugement sera donc confirmé sur le principe d'un rappel de salaire qu'il a ordonné, mais les parties seront renvoyées en faire le calcul sur les bases définies par le présent arrêt, sans qu'il y ait lieu à allouer de sommes au titre des congés payés dans la mesure où le rappel de salaire accordé inclut la période de prise de congés ;

Alors que un rappel de salaire, qui modifie la «rémunération brute totale» perçue par le salarié au cours de la période de référence constituant l'assiette de calcul de l'indemnité de congés payés ouvre nécessairement droit à un rappel de l'indemnité de congés payés y afférents ;

D'où il résulte que la Cour d'appel qui, après avoir requalifié la relation de travail antérieurement et postérieurement au 1er juillet 2005 en contrat de travail à temps complet et partant condamné l'employeur au paiement de rappels de salaire, déboute le salarié de ses demandes de rappel d'indemnités de congés payés afférentes, aux motifs que le rappel de salaire accordé incluait la période de prise de congés, a violé les dispositions de l'article L 3141-22 du Code du travail ;

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