Cour d'appel de Bastia, 30 mai 2012, 10/00989

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS


Ch. civile A

ARRET No

du 30 MAI 2012

R. G : 10/ 00989 RC-JG

Décision déférée à la Cour :
jugement du 14 décembre 2010
Tribunal de Grande Instance de BASTIA
R. G : 09/ 1214


CONSORTS
Y...

C/

X...
C...

COUR D'APPEL DE BASTIA

CHAMBRE CIVILE

ARRET DU

TRENTE MAI DEUX MILLE DOUZE

APPELANTS :

Madame Fanny Y... épouse Z...
née le 03 Février 1952 à MARSEILLE (13000)
...
...
75014 PARIS

assistée de Me Jean louis SEATELLI, avocat au barreau de BASTIA, et de Me Antoine-Paul ALBERTINI, avocat au barreau de BASTIA


Monsieur Jean Y...
né le 27 Août 1946 à BELGODERE (20226)
...
13003 MARSEILLE 03

assisté de Me Jean louis SEATELLI, avocat au barreau de BASTIA, et de Me Antoine-Paul ALBERTINI, avocat au barreau de BASTIA


INTIMEES :

Madame Justine X...
née le 07 Mai 1927 à BELGODERE (20226)
...
...
72000 LE MANS

assistée de la SCP JOBIN, avocats au barreau de BASTIA, et de la SCP TOMASI-SANTINI-VACCAREZZA-BRONZINI DE CARAFFA, avocats au barreau de BASTIA


Madame Pauline C... épouse D...
née le 03 Novembre 1955 à CASABLANCA
...
20226 BELGODERE

défaillante


COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue à l'audience publique du 19 mars 2012, devant la Cour composée de :

Madame Julie GAY, Président de chambre
Madame Rose-May SPAZZOLA, Conseiller
Madame Marie-Noëlle ABBA, Conseiller

qui en ont délibéré.


GREFFIER LORS DES DEBATS :

Madame Marie-Jeanne ORSINI.

Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aura lieu par mise à disposition au greffe le 30 mai 2012


ARRET :

Rendu par défaut,

Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par Madame Julie GAY, Président de chambre, et par Madame Martine COMBET, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.


*

* *
Dans l'immeuble figurant au cadastre de la commune de BELGODERE sous le no E 479, Madame Justine C... née X...est propriétaire notamment d'un appartement au deuxième étage avec une entrée indépendante au sud et d'une pièce mansardée au 3ème étage.


Jean Y... et sa soeur Fanny Y... épouse Z...sont quant à eux propriétaires dans le même immeuble de lots sis au rez de chaussée et au premier étage et disposent d'une entrée située à l'est donnant dans une courette.


Madame Justine C... et sa fille Madame Pauline D...ont attrait Fanny et Jean Vincent devant le Tribunal de grande instance de


BASTIA aux fins de voir :

- dire et juger :

que la courette et la porte d'entrée par lesquelles on accède à la bâtisse cadastrée E 479 commune de BELGODERE sont des parties communes dudit immeuble,

que l'escalier unique du même immeuble constitue également une partie commune,

qu'en apposant des cadenas Madame Z...a causé une atteinte grave au droit de jouissance dont elle disposent sur les dites parties communes et en conséquence enjoindre sous astreinte à Madame Fanny Z...d'avoir à libérer lesdites parties communes de toutes entraves et de s'abstenir de tout acte qui puisse limiter la jouissance paisible des autres copropriétaires,

- ordonner la publication du jugement à interdire à la conservation des hypothèques,

- condamner Madame Z...au paiement d'une somme de 5. 000 euros à titre de dommages et intérêts, de celle de 2. 000 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.


Par jugement du 14 décembre 2010, le Tribunal de grande instance de BASTIA a :

- déclaré Madame Pauline C... épouse D...irrecevable en toutes ses demandes,

- dit que la courette, la porte d'entrée et le corridor avec escalier situés sur la façade Est de l'immeuble cadastré section E 479 sur la commune de BELGODERE, lieu dit ..., sont des parties communes dudit immeuble,

- ordonné la publication du jugement à intervenir au Bureau des hypothèques de BASTIA, à la diligence des parties,

- fait injonction à Madame Fanny Y... épouse Z...de libérer lesdites parties communes de toute entrave dès signification du présent jugement et sous astreinte provisoire de 100 euros par jour de retard, à compter de la signification du présent jugement et pendant un délai de 6 mois,

- condamné Madame Fanny Y... épouse Z...à payer à Madame Justine X...veuve C... à titre de dommages et intérêts une indemnité de 1. 000 euros avec intérêts au taux légal à compter du présent jugement,


- rejeté la demande tendant à voir ordonner à Madame Fanny Y... épouse Z...de s'abstenir de tout acte qui puisse limiter la jouissance paisible des autres copropriétaires,

- débouté Madame Fanny Y... épouse Z...et Monsieur Jean Y... de leur demande de dommages et intérêts,

- condamné Madame Fanny Y... épouse Z...à payer à Madame Justine X...veuve C... une indemnité de 1. 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- ordonné l'exécution provisoire,

- condamné Madame Fanny Y... épouse Z...aux dépens.


Fanny Z...et Jean Y... ont relevé appel de ce jugement dont ils sollicitent la réformation par déclaration du 31 décembre 2010.


Après échanges d'écritures, la procédure a été clôturée par ordonnance du 8 septembre 2011.


La requête en révocation de cette ordonnance présentée par Madame C... a été rejetée par ordonnance du magistrat chargé de la mise en état 30 septembre 2011.


La clôture a été en revanche révoquée par décision de la cour avant l'ouverture des débats à l'audience du 18 octobre 2011 pour une bonne administration de la justice afin d'admettre les dernières pièces de l'intimée.


Les appelants font valoir en leurs dernières écritures signifiées le 20 octobre 2011 auxquelles il sera référé pour plus ample exposé de leurs moyens et conclusions que les dispositions de l'article 784 du code de procédure civile imposent de constater que la clôture est intervenue le 8 septembre 2011 et de rejeter les pièces communiquées par l'intimée le 15 septembre et 13 octobre 2011 postérieurement à cette ordonnance.


Ils demandent à titre subsidiaire si la cour estimait régulière la révocation de cette ordonnance d'admettre aux débats les pièces supplémentaires qu'ils produisent (attestation de Monsieur H..., l'impôt sur les revenus 1997 au nom de Monsieur et Madame H...épouse I..., la déclaration de revenus 2000 de Madame I..., les déclarations de revenus 2005 et 2010 de Monsieur et Madame H..., l'attestation de Madame J...née Y... du 17 décembre 2011).

Ils font observer sur le fond que sous couvert d'une demande fondée sur la loi sur la copropriété, les premiers juges ont accueilli une action en revendication immobilière, à partir d'une interprétation erronée des titres et de l'évolution cadastrale du bien litigieux.


Ils soulignent que l'auteur des intimées, Monsieur Marius X..., est devenu propriétaire en 1952 dans l'immeuble litigieux du premier étage avec mansardes, des écuries au rez de chaussée et d'une cave en dessous de la maison de Monsieur O..., le tout figurant au cadastre de la commune de BELGODERE sous les numéros 428, 406, 407, 408 section E mais nullement de la parcelle anciennement cadastrée E 429 constituant le lot no 3 de l'état descriptif de division, à savoir le premier étage composé de cinq pièces et d'un couloir, repris dans le titre de propriété de leur père Dominique Y... établi le 19 janvier 1967 par Maître K..., notaire à l'ILE-ROUSSE et qu'ils ont reçu en donation.


Ils concluent en conséquence à la réformation de la décision déférée et demandent à la cour de :

- constater, dire et juger que Monsieur Dominique Y... est propriétaire du lot no 3 représentant le bien aujourd'hui revendiqué par les dames C...depuis un acte notarié en date du 19 janvier 1967 établi à ILE-ROUSSE par Maître K...,

- constater, dire et juger que dès lors l'action engagée par Justice X...et Pauline C... le 2 juillet 2009 se trouve prescrite,

subsidiairement et non autrement,

- constater, dire et juger que le couloir revendiqué, anciennement cadastré E 429, n'a jamais fait l'objet d'une vente à Monsieur X...tel que cela ressort dans son titre de propriété du 10 janvier 1952,

- constater, dire et juger que la dévolution successorale à partir du titre de propriété de Dominique Y... est conforme à l'état de descriptif de division établi par Maître L...et repris par ce même notaire dans l'acte de partage des intimés qui constitue leur titre de propriété,

- constater dire et juger que Madame Fanny Y... épouse Z...et Jean Y... sont seuls propriétaires du bien revendiqué,

- en présence de ces titres, clairs et précis, dire que l'article 3 de la loi du 10 juillet 1965 ne saurait recevoir application,

- recevant les consorts Y... en leur demande reconventionnelle, condamner les dames C...et X...à la somme de 20. 000 euros de dommages et intérêts pour procédure abusive,


- les condamner également à payer la somme de 5. 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel.


En ses conclusions signifiées le 17 mai 2011, Madame Justine X...veuve C... expose que suivant acte de partage dressé le 8 juillet 1982 par Maître L..., elle est devenue propriétaire des lots 4, 7 et 9 dépendant d'un immeuble sis sur le territoire de la commune de BELGODERE, figurant au cadastre à la section E sous le no 479, représentant au rez-de-chaussée, côté ouest deux caves contiguës, au 2ème côté sud un appartement avec entrée indépendante comprenant 3 pièces, 1 vestibule et 1 remise donnant sur une courette extérieure et au 3ème côté sud une pièce mansardée avec chambrette et terrasse extérieure.


Elle souligne qu'aux termes d'une nouvelle division de l'immeuble établie unilatéralement et qui lui est donc inopposable :

- le lot no 2 correspondant au rez-de-chaussée côté Est a été divisé en :

lot 12 rez-de-chaussée côté Est accessible par un escalier intérieur, une pièce avec cheminée, un placard et une porte-fenêtre ouvrant sur la rue,

lot 13 rez-de-chaussée côté Est : une cave sous la terrasse couverte avec entrée sous le balcon,

- et le lot 3 comprenant cinq pièces et le couloir en :

lot 14 côté Est un logement composé d'une chambre avec porte-fenêtre ouvrant sur un balcon, d'un séjour avec deux fenêtres et une cheminée, d'un débarras, d'une salle de bain avec vasistas donnant sur le couloir et cavité sous l'escalier, du couloir à usage privatif formant entrée avec escalier en pierre,

lot 15 côté Est Nord Est : un logement composé d'une chambre avec deux fenêtres orientées Est et Nord Est, d'une cuisine avec porte d'entrée, porte sur balcon, double fenêtre sur chemin, fenêtre sur terrasse et porte-fenêtre sur cuisine, d'un balcon et d'une terrasse couverte,

lot 16 attenant à la terrasse couverte et au couloir d'entrée du lot no 14 un perron commun servant d'accès aux deux logements du 1er étage.


Soutenant que l'examen de ce titre ne révèle pas une telle propriété et surtout pas l'usage exclusif de l'escalier unique, et reprochant à Madame Z...de n'avoir pas hésité à s'approprier la courette et l'escalier qui ont toujours été affectés à l'usage commun des différents propriétaires de l'immeuble, elle fait observer que son action est une action en revendication de parties communes : en l'espèce l'entrée située sur la façade Est du bâti 479 ainsi que l'escalier sur lequel elle donne et par lequel on accède aux différents étages de l'immeuble et notamment à l'appartement du 2ème étage et une pièce située au troisième dont elle est propriétaire.


Elle fait observer que la mention du premier étage dans l'acte de vente de 1952 est sans rapport avec l'entrée attribuée à l'appartement dont s'agit et ne procède que d'une erreur, l'acte en comportant d'autres.


Elle précise que son bien se situe au dessus de celui des Y...et qu'il ne peut être contesté que l'attribution en copropriété par moitié pour chacun du corridor et de la place cadastrés sous le numéro E 429 n'avait de sens que pour permettre à chacun des propriétaires de la parcelle 428 un accès à son lot par cette place. Elle fait valoir que cette parcelle E 429 est cadastrée aujourd'hui comme les parcelles E 427, 428, 430 sous le no 479 et que les consorts M...qui ont vendu à son auteur n'avaient aucun intérêt à conserver uniquement la propriété de la moitié de la place et d'un corridor. Elle ajoute que la consultation du relevé de propriété de Monsieur X...avant rénovation révèle que les parcelles cadastrées E 427 à 430 ont été portées à son compte, après avoir été retirées du compte de M....


Elle ajoute qu'il ressort de la configuration des lieux que l'escalier desservant les trois étages de l'immeuble, des mentions cadastrales et surtout de l'usage qu'en ont eu les occupants de l'immeuble que la parcelle 429 constituait une dépendance de l'immeuble 428, raison pour laquelle ces parcelles ont été confondues à la rénovation sous un même numéro (E 479) et que c'est à la faveur de ce faisceau d'indices concordants que le Tribunal a retenu qu'il était de la commune intention des consorts M...et X...d'englober la parcelle 429 dans la cession intervenue entre elles.


Elle fait valoir que les appelants ne peuvent sérieusement soutenir que leurs auteurs étaient seuls propriétaires de la place ou courette et du corridor, alors qu'il s'agit d'une copropriété verticale soumise à la loi du 10 juillet 1965 et qu'elle a toujours joui de l'entrée et de l'escalier et dispose la clef de la porte d'entrée dont elle-même et ses auteurs se sont toujours servis, ce qui exclut toute prescription de son action.


Elle conclut en conséquence à la confirmation en toutes ses dispositions du jugement déféré et au déboutement des appelants de toutes leurs demandes fins et conclusions.


Elle demande à la cour de :

- dire et juger que la courette et la porte d'entrée par lesquelles on accède à la bâtisse cadastrée E 479 (commune de BELGODERE) sont des parties communes dudit immeuble,

- dire et juger que l'escalier unique du même immeuble constitue également une partie commune,


- dire et juger qu'en apposant des cadenas, Madame Z...a causé une atteinte grave au droit de jouissance dont les demanderesses disposent sur lesdites parties communes,

en conséquence,

- enjoindre sous astreinte à Madame Fanny Z...d'avoir à libérer lesdites parties communes de toutes entraves afin de permettre la jouissance paisible des autres copropriétaires,

- ordonner la publication du jugement à intervenir à la conservation des hypothèques,

- condamner les appelants au paiement de la somme de 5. 000 euros à titre de dommages et intérêts pour le préjudice qu'elle subit depuis trois années,

- condamner les mêmes aux entiers dépens, ainsi qu'au paiement de la somme de 3. 000 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.


Madame C... épouse D...régulièrement assignée à son domicile n'a pas comparu. Il sera donc statué par arrêt de défaut.


L'instruction de la procédure a été déclarée close le 8 décembre 2011.


*

* *

SUR CE :


Attendu qu'il sera observé que l'ordonnance de clôture du 8 septembre 2012 a été révoquée par la cour avant tout débat au fond pour une bonne administration de la justice afin d'admettre des documents produits par l'intimée, susceptible de l'éclairer sur le différend opposant les parties, ce qui a d'ailleurs permis aux appelants de verser eux-mêmes à leur dossier des pièces utiles à la solution du litige ;

Que leur demande tendant à voir constater que la clôture est intervenue le 8 septembre 2011 et écarter les pièces communiquées postérieurement sera ainsi rejetée et la clôture maintenue au 8 décembre 2011.


Attendu qu'il résulte des éléments du dossier que l'immeuble litigieux cadastré actuellement E 479 était jusqu'à la rénovation cadastrale intervenue en 1955 morcelé en différentes parcelles, portant notamment les numéros 427, 428, 429 et 430 ;

Attendu que les parcelles 427 et 430 étaient portées au compte de Monsieur X..., auteur des intimées et les parcelles 428 et 429 étaient selon les indications cadastrales partagées entre Marie N... épouse Y..., auteur des appelants propriétaire du premier étage (428) et de la moitié du rez-de-chaussée, couloir et place (429) et Charles Philippe N... époux de Nonciade M...propriétaire du 2ème étage (428) et de la moitié du rez-de-chaussée, couloir et place (429) ;


Attendu que les deux étages étaient desservis par un escalier intérieur, aujourd'hui en litige, que les propriétaires utilisaient ainsi que l'atteste Madame P...née le 5 janvier 1920 qui indique que " dans son enfance, alors qu'elle habitait le quartier ..., près de la maison de Madame N..., elle voyait cette dernière accompagner son frère Barthélémy, aveugle, de l'étage supérieur où elle vivait au rez de chaussée en passant par l'escalier intérieur, le couloir et la porte donnant sur la ruelle et qu'il lui est arrivé très souvent d'emprunter ce même chemin pour se rendre chez Madame N... pour lui acheter des oeufs, d'autres voisins faisant le même trajet pour les mêmes raisons " ;


Attendu que Charles Philippe N... et son épouse née M...n'ont pas eu d'enfant et suite au décès de celle-ci ses ayants-droit, les consorts M..., ont, par acte du 10 janvier 1952, versé le 22 janvier au rang des minutes de Maître K..., notaire à l'ILE-ROUSSE, vendu à Monsieur Marius X..." une maison sise à BELGODERE au lieu-dit ... comprenant le premier étage avec mansardes, des écuries au rez-de-chaussée et une cave en dessous de la maison de Monsieur Jean O...le tout cadastré sous les no 428, 406, 407, 408 section E " ;

Qu'il sera ainsi observé que la parcelle E 429 concernant le corridor ou couloir et la place n'est pas visée dans cet acte d'achat et que celui-ci ne prévoit pas davantage à l'exception d'une clause générale, sans valeur particulière, de servitude de passage par cette même parcelle ;


Attendu que le 19 janvier 1967, suite au décès de Jean Y..., héritier de ses père et mère Marie N... et Dominique Y..., son fils Dominique Y..., père des appelants a par devant Maître K...notaire à l'ILE-ROUSSE, confirmé accepter purement et simplement la succession de son père ;

Que cet acte notarié dûment enregistré à BASTIA le 26 janvier 1967 précise qu'il dépend notamment de cette succession une partie de maison sise sur le territoire de BELGODERE cadastrée no 479 section E élevée d'un étage sur rez-de-chaussée, ladite partie comprenant une écurie au rez-de-chaussée côté sud (lot no 1) une pièce en rez de chaussée côté Est (lot no 2) et tout le premier étage composé de cinq pièces et un couloir (lot no 3) attribué par Monsieur le conservateur des hypothèques de BASTIA ;

Attendu que de leur côté suite au décès de Monsieur Marius Ignace X..., ses héritiers dont Madame C..., ont procédé au partage de ses biens par acte passé en l'étude de Maître L...le 8 juillet 1982 ;


Attendu qu'aux termes de cet acte établi plus de trente ans après l'achat d'une partie de cet immeuble, le notaire a procédé à un état descriptif de division des lots 4 à 10 de l'immeuble cadastré E 479 au lieu dit ... après avoir indiqué que le lot no 1 était composé d'une écurie, le lot no 2 d'une pièce côté Est, le lot no 3 de cinq pièces et du couloir et attribué à Justine X..., le lot 4, côté ouest deux caves contiguës, le lot 7 composé au 2ème étage côté sud d'un appartement avec entrée indépendante comprenant 3 pièces, un vestibule, et une remise donnant sur une courette extérieure ainsi que le lot 9 composé au sud d'une pièce mansardée avec chambrette et terrasse extérieure ;


Attendu que s'il est fait expressément référence dans cet acte pour le lot 7 à une entrée indépendante, aucune indication de cet ordre n'est portée pour la pièce mansardée ;

Qu'il n'y est pas davantage fait mention de l'escalier intérieur pouvant permettre à cette pièce mansardée un accès au couloir litigieux dont la propriété est attribuée sur les fiches établies par la conservation des hypothèques de BASTIA à Monsieur Dominique Y... puis à ses enfants suite à l'acte de donation partage de ce dernier passé en l'étude de Maître L...le 28 décembre 2007, ainsi que le démontrent les documents produits par les appelants ;


Attendu que si avec cet acte, Maître L...partant de l'état descriptif de division antérieurement établi par ses soins le 8 juillet 1982 à l'occasion du partage des biens de Monsieur X...a procédé à une nouvelle description des lots 2 et 3 en précisant que le couloir à usage privatif formant entrée avec escalier de pierre est affecté au lot no 14, ce dernier a remplacé avec les lots 15 et 16 l'ancien lot no 3 composé de cinq pièces et d'un couloir ;


Attendu qu'il appartient à Madame C... de rapporter la preuve des droits dont elle se prévaut sur le corridor litigieux seuls susceptibles de lui permettre de revendiquer par l'escalier intérieur un autre accès vers l'extérieur de son appartement lui permettant de rejoindre la porte Est de l'immeuble et la courette ;

Que des éléments du dossier, il ressort qu'elle ne dispose sur ce corridor d'aucun titre, la parcelle E 429, comprenant la courette et celui-ci, n'ayant pas été cédée à son auteur en 1952 et ce couloir composant avec cinq pièces le lot no 3 aux termes de l'état descriptif de division contenu dans l'acte de partage des biens de son père, lot dont ce dernier n'était pas propriétaire ;


Attendu que si ce passage a pu être utilisé par la famille X...et servir de refuge aux enfants du village par temps de pluie selon les attestations produites par Madame C... émanant de Madame Q...Claire née en 1934 qui fait référence à son enfance comme Madame R...et Madame S...nées toutes deux en 1921, ou Madame T...née en 1948, ces témoignages sont contredits pour une période plus récente par les documents versés aux débats par les appelants ;

Que Madame U...dont le témoignage a été recueilli par Maître Alain V..., huissier de justice indique que " dans les années 60, Dominique Y... qui demeurait à MARSEILLE donnait l'autorisation à Monsieur X...Marius d'étaler ses pommes de terre dans le hall aujourd'hui revendiqué " et que " ce dernier ne pouvait le faire que parce que Monsieur Y... l'avait autorisé " ;

Que Madame W...habitant BELGODERE atteste pour sa part n'avoir jamais vu d'autres personnes que Monsieur et Madame Y... et leurs enfants emprunter l'entrée de leur maison du ... ;

Qu'il en est de même de Monsieur XX..., de Monsieur H...ou de Madame YY...qui assure quant à elle que le couloir était un lieu de vie utilisé quotidiennement pour se restaurer et prendre le frais et qu'il n'était pas emprunté par des personnes étrangères à la famille Y... ;


Attendu que l'attestation de Madame ZZ...qui indique avoir emprunté l'escalier au cours des mois de juillet et d'août de 1986 à 2002, n'est pas de nature à entraîner la conviction de la cour dans la mesure où elle précise avoir utilisé une chambre au " bas de la maison " qui ne pouvait se trouver dans le logement de Madame C... situé aux 2ème et 3ème étages de l'immeuble en question, et qui a pu profiter de la tolérance dont bénéficiait les X...de la part des Y...;

Que d'ailleurs la mise à disposition de Madame C... d'une clef de la porte Est ne constitue nullement la preuve du droit pour celle-ci d'utiliser le corridor litigieux, une telle remise pouvant parfaitement se situer dans la droite ligne de cette même tolérance, dont le témoignage de Madame U...se fait l'écho et qui est toujours révocable ;


Attendu que Madame C... ne peut se retrancher derrière les erreurs, de date notamment contenues dans l'acte d'acquisition de 1952 pour soutenir que la parcelle E 429 a été omise par erreur dans cet acte ; qu'en effet, même si les éléments du dossier n'établissent nullement comment Dominique Y... (ou son père) a acquis la propriété de l'intégralité de cette parcelle dont la moitié seulement était portée au compte de son auteur avant 1952, il n'en demeure pas mois que tous les titres postérieurs, y compris le propre acte de partage des biens de Monsieur X...vont à l'encontre des prétentions de l'intimée sur ce point ;


Qu'en l'état de ces actes régulièrement publiés depuis plus de trente ans avant l'introduction de la présente procédure, les seules indications cadastrales qui n'ont qu'une valeur fiscale et ne constituent que de simples indices, attribuant en 1953 à Monsieur Marius X...dans l'immeuble litigieux les parcelles E 427 à E 430 ne rapportent pas la preuve des droits de l'intimée sur le corridor litigieux pour lequel les appelants sont dûment titrés et dont le titre n'a jamais été contesté ;


Attendu que si l'article 3 de la loi du 10 juillet 1965 portant statut de la copropriété précise que sont réputées parties communes les passages et les corridors, ce texte n'est toutefois applicable, ainsi qu'il en dispose expressément, que dans le silence ou la contradiction des titres ;

Que tel n'est pas le cas en l'espèce puisque le titre dont les appelants sont titulaires depuis 1967, fait référence à la composition d'un lot no 3, comprenant cinq pièces et un couloir attribué par le conservateur des hypothèques de BASTIA, titre régulièrement publié, qui n'est pas contredit par celui de Madame C... et qui est conforté par la configuration des lieux telle qu'elle est décrite par les deux parties, avec plusieurs entrées indépendantes et sans cage d'escalier commune à tous les copropriétaires ;


Attendu que si la division opérée par Maître L...de l'ancien lot no 3 tel que décrit dans l'acte de donation partage de 2007 actualise l'état descriptif de division précédemment établi par ses soins en 1982 à l'occasion du partage des X...n'est pas opposable à Madame C..., il n'en demeure pas moins que celle-ci ne justifie nullement de droits sur le corridor lui permettant de relier l'escalier à la porte d'entrée des appelants ;

Que ce corridor constitue une partie privative appartenant aux appelants qui disposent seuls de l'entrée Est ;

Qu'il en va de même de la courette anciennement cadastrée E 429 où selon les photographies produites une construction a été édifiée par les Y...sans opposition de leurs voisins copropriétaires et a conduit Maître L...à procéder à une nouvelle description de leurs lots ;

Qu'ainsi le jugement déféré qui sera confirmé en ce qu'il a déclaré Madame C... épouse D...qui ne justifiait pas de sa qualité à agir irrecevable en ses demandes, ne peut qu'être infirmé en toutes ses autres dispositions ;


Attendu que si aucune prescription de l'action qu'elle a introduite ne saurait être opposée à Madame C... du fait de l'utilisation qu'elle a pu faire du corridor litigieux, les appelants ne précisant d'ailleurs nullement sur ce point le fondement juridique qu'ils invoquent, les demandes formées par l'intimée seront en revanche purement et simplement rejetées en l'état des titres clairs et précis des parties, le corridor n'ayant jamais été vendu à son auteur et la dévolution successorale à partir du titre de propriété de Dominique Y... étant conforme à l'état descriptif de division établi par Maître L...dans l'acte de partage de la succession X...et repris dans l'acte de donation-partage établi au profit des appelants ;


Attendu que Madame C... n'ayant toutefois jamais fait dégénérer en abus son droit d'ester en justice, les appelants seront déboutés de la demande de dommages-intérêts pour procédure abusive qu'ils formulent ;

Qu'ils ont en revanche été contraints d'exposer des frais non compris dans les dépens dont il est équitable de leur accorder compensation à hauteur de 3. 500 euros ;


Attendu que Madame Justine C... née X...qui succombe supportera les entiers dépens de première instance et d'appel.

*

* *

PAR CES MOTIFS,

LA COUR :


Infirme le jugement déféré sauf en ce qu'il a déclaré Madame C... épouse D...irrecevable en ses demandes et statuant à nouveau,

Dit et juge que le couloir et la courette revendiquée constitue des parties privatives de l'immeuble figurant au cadastre de la commune de BELGODERE sous le no 479 de la section E et n'ont jamais fait l'objet d'une vente à Monsieur Marius X...,

Dit et juge que la dévolution successorale à partir du titre de propriété de Dominique Y... du 19 janvier 1967 est conforme à l'état descriptif de division établi par Maître L...notaire dans l'acte de partage des biens de Monsieur Marius X...et repris dans l'acte de donation-partage dont Jean et Fanny Y... sont bénéficiaires,

Constate que Jean Y... et Fanny Y... épouse Z...sont seuls propriétaires du corridor auquel donne accès la porte Est de l'immeuble,

Dit que l'article 3 de la loi du 10 juillet 1965 portant statut de la copropriété ne peut trouver application en l'espèce,


Déboute Madame Justine C... née X...de ses demandes, fins et conclusions,

Déboute les appelants de leur demande de dommages-intérêts pour procédure abusive,

Condamne Madame Justine C... à payer à Fanny Y... épouse Z...et à Jean Y... ensemble une somme de TROIS MILLE CINQ CENTS EUROS (3. 500 euros) sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

La condamne aux entiers dépens de première instance et d'appel.


LE GREFFIER LE PRESIDENT

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