Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 7 février 2012, 10-18.686, Publié au bulletin
Cour de cassation - Chambre sociale
- N° de pourvoi : 10-18.686
- Publié au bulletin
- Solution : Cassation
- Président
- M. Lacabarats
Texte intégral
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le deuxième moyen, pris en sa première branche :
Vu les articles L. 1222-1 du code du travail, ensemble les articles 1134 et 1184 du code civil ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué que Mme X... a été engagée le 11 mai 1981, par la société Mecarungis, en qualité d'employée de bureau et exerçait en dernier lieu les fonctions d'adjointe du chef de service du contentieux ; qu'elle s'est trouvée en arrêt de maladie à partir du 3 août 2007 ; qu'elle a saisi la juridiction prud'homale d'une demande de résiliation judiciaire de son contrat de travail et de condamnation de son employeur au paiement de dommages-intérêts en faisant valoir qu'elle avait été victime de harcèlement moral et de comportements portant atteinte à sa dignité ; qu'elle a fait l'objet, le 30 novembre 2009, d'un avis d'inaptitude à tout poste dans l'entreprise par la médecine du travail, mais a été déclarée apte à un travail à son domicile ; que licenciée pour inaptitude et impossibilité de reclassement, le 28 décembre 2009, elle a formé des demandes subsidiaires de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, d'indemnité compensatrice de préavis, de congés payés afférents, et de dommages-intérêts pour préjudice moral et conditions vexatoires de la rupture ;
Attendu que pour débouter la salariée de sa demande tendant à la résiliation judiciaire de son contrat de travail, l'arrêt énonce que si l'employeur ne conteste pas avoir tenu à son égard, au cours d'un entretien le 7 juin 2007, des propos indélicats aux termes desquels il lui reprochait de dégager des odeurs nauséabondes en évoquant " une gangrène, une incontinence ", ces faits ne justifient pas, à eux seuls, la résiliation du contrat de travail aux torts de l'employeur ;
Qu'en statuant ainsi, alors que l'atteinte à la dignité de son salarié constitue pour l'employeur un manquement grave à ses obligations, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS, sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres moyens :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 15 avril 2010, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;
Condamne la société Mecarungis aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Mecarungis à payer à Mme X... la somme de 2 500 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du sept février deux mille douze.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt
Moyens produits par la SCP Masse-Dessen et Thouvenin, avocat aux Conseils, pour Mme X...
PREMIER MOYEN DE CASSATION
Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté la salariée de sa demande de résiliation judiciaire de son contrat de travail et partant d'avoir rejeté ses demandes de condamnation de l'employeur à lui verser les sommes de 115. 000 à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, 9. 496 à titre d'indemnité compensatrice de préavis, 950 au titre des congés payés y afférents, et 25. 000 à titre de dommages et intérêts ;
AUX MOTIFS QUE sur l'entretien du 7 juin 2007, que Madame Joëlle X... verse aux débats plusieurs pièces à l'appui de son argumentation et, notamment, les deux courriers relatifs aux propos tenus lors de l'entretien du 7 juin 2007 ; que, dans son courrier du 7 juin 2007, Madame Joëlle X... a reproché à Monsieur Y... de lui avoir dit : « Mme X... auriez-vous une grave maladie, un ulcère qui pourrit, des incontinences, un cancer ?... quand je sors de votre bureau j'ai mes vêtements qui sont imprégnés des odeurs nauséabondes » ; que, dans sa réponse du 15 juin 2007, Monsieur Y... lui a répondu : «... C'est en m'excusant auprès de vous de ma démarche, avec beaucoup de précaution et de gêne que j'ai dû, ce 7 juin, vous faire part de l'important désagrément olfactif que j'avais ressenti en travaillant dans votre bureau, à vos côtés, le matin même. Il n'a jamais été dans ma démarche, certes difficile à mener mais qui s'imposait à moi, contrairement à ce que vous prétendez, de vous « déstabiliser », et de vous « discriminer ». J'ai souhaité, comme c'est mon devoir, vous alerter sur une difficulté avant qu'elle ne pose un véritable problème à notre entreprise toute entière, difficulté à laquelle je vous invite à remédier pour le bien de tous et, en premier lieu, pour le vôtre comme je vous l'avais fait précédemment en vous demandant de vous abstenir de fumer dans les locaux de l'entreprise. Je ne souhaite pas donner à cet incident plus d'importance, mais pour qu'il soit définitivement clos, je me devais de rectifier la présentation des propos que vous me prêtez » ; que, suivant le plumitif de l'audience du bureau de jugement, en date du 17 mars 2008, Monsieur Y... a admis avoir parlé, lors de l'entretien du 7 juin 2007, de « gangrène ou d'incontinence », et qu'il reconnaît avoir fait part à la salariée de désagréments olfactifs sans nier les termes notés au plumitif ; qu'ainsi, la tenue de ces deux propos lors de l'entretien du 7 juin 2007 est établie ; que sur les autres faits de harcèlement moral, Madame Joëlle X... produit divers documents à l'appui de son argumentation ; que le médecin du travail, dans un courrier du 2 juillet 2007, indique que lors des visites périodiques l'ensemble de l'équipe médicale et lui-même n'ont noté aucune odeur particulière émanant de sa personne et que, lors de son passage dans son bureau, en janvier 2007, il n'a rien senti de particulier ; que le docteur généraliste Z... certifie ne jamais avoir constaté d'odeurs nauséabondes de pourriture, de matière en décomposition ou d'urine émanant de la salariée ; que les certificats médicaux produits mentionnent que la salariée présente un syndrome anxio-dépressif, que ceux qui ont été établis les 27 novembre 2008 et 14 septembre 2009, par le docteur Z..., précisent que son état de santé est en rapport avec son conflit avec son employeur, avec le comportement humiliant de celui-ci et avec la dégradation des conditions de travail, que la lettre rédigée par le docteur A..., le 25 août 2009, à l'attention de son confrère mentionne que le syndrome dépressif résulte de la discrimination de l'employeur ; que les divers courriers et attestations de clients de la société ou d'anciens salariés, Mesdames B..., C... et D..., et de Messieurs E..., F..., G..., H..., I..., J..., K..., L..., M... et T..., font état des qualités professionnelles et de l'absence d'odeurs de la salariée ; que les courriers que la salariée a envoyé à l'inspection du travail et à son employeur, ainsi que la main courante qu'elle a faite, par téléphone, le 11 juin 2007 pour se plaindre des soucis qu'elle avait avec son employeur, révèlent les reproches qu'elle émettait vis à vis de son employeur ; que l'employeur, pour répondre à cette argumentation verse aux débats les attestations de salariés, Madame N... et Monsieur O... ainsi que de la personne chargée du nettoyage des locaux, qui font état des odeurs nauséabondes qui émanaient du bureau de Madame Joëlle X... et des odeurs corporelles de celle-ci ; qu'il résulte de l'examen de ces divers documents :- que les certificats médicaux ne reposent que sur les seules informations que la salariée a données aux médecins ; que ceux-ci ne peuvent donc permettre de retenir un lien de causalité entre son état de santé et un comportement de l'employeur ;- que les divers courriers et attestations des clients de la société ou d'anciens salariés, qui sont produits par la salariée, ne font état d'aucun fait précis, daté et circonstancié, et sont totalement contredits partes attestations d'autres salariés ;- que les courriers que la salariée a envoyé à l'inspection du travail et à son employeur, ainsi que la main courante téléphonique du 11 juin 2007, ne peuvent être retenus, la salariée n'ayant pu se faire des preuves à elle-même ; qu'il résulte de ce qui précède qu'il ne peut être relevé, à rencontre de l'employeur, aucun agissement répété ayant pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte aux droits et a la dignité de la salariée ou d'altérer sa santé physique ou mentale ; qu'ainsi, le harcelèment moral, tel que défini à l'article L 1152-1 du code du travail, n'est pas caractérisé ; que, par ailleurs, la salariée ne justifie d'aucune dégradation continue de ses conditions de travail ; que la tenue de propos indélicats, lors de l'entretien du 7 juin 2007, ne justifie pas, à elle seule, la résiliation du contrat de travail aux torts de celui-ci ; qu'il y a lieu, en conséquence, de débouter Madame Joëlle X... de ses demandes de résiliation judiciaire, aux torts de son employeur, de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et de dommages et intérêts pour le préjudice moral occasionné par le harcèlement moral ;
ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE Madame X... sollicite la résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts de son employeur en invoquant une dégradation continue de ses conditions de travail, outre un harcèlement moral constitué par les propos tenus à son égard le 7 juin 2007, qui sont manifestement contraires à sa dignité ; qu'il importe préalablement de relever que la demanderesse ne rapporte aucune preuve de l'envoi d'un courrier en date du 24 septembre 2004 à son employeur (que ce dernier dément formellement avoir reçu), dans laquelle la première se plaindrait d'une dégradation de ses conditions de travail ; que sur ce dernier point, il doit être également estimé que le caractère prétendument exigu du bureau attribué à Mme X... n'est aucunement démontré (le médecin du travail n'ayant émis aucune observation lors de ses visites dans l'entreprise), étant par ailleurs observé qu'il apparaît que l'intéressée disposait d'une rampe d'accès à son bureau, adaptée à son handicap, qui lui permettait d'éviter d'emprunter les trois marches ; qu'en outre, force est également de constater que suivant les attestations émanant des délégués du personnel, Mme X... ne s'est jamais ouverte auprès d'eux d'une dégradation de ses conditions de travail ou d'un harcèlement moral ; que par suite, le grief relatif à une dégradation continue des conditions de travail ne saurait être retenu en l'occurrence ; que s'agissant du harcèlement moral, il convient de considérer que : 1- s'il est exact que suivant un courrier émanant du médecin du travail en date du 2 juillet 2007, celui-ci indique à Mme X... que lors d'une visite dans l'entreprise en janvier 2007 et d'une visite médicale en date du 8 mars 2007, il n'avait remarqué aucune odeur particulière émanant de sa personne, de même qu'il n'avait senti rien de particulier lors de son passage dans son bureau, il importe toutefois de relever que suivant le témoignage de Mme Nathalie P... (femme de ménage employée par l'entreprise chargée du nettoyage des lieux), cette dernière a constaté, dans le bureau de Mme X..., : " une odeur nauséabonde d'urine et de pourriture, ainsi que la présence de cendres de cigarettes dans les tiroirs ", étant précisé que ce témoignage est corroboré par les attestations de Mr. O... (directeur administratif) et de Mme N... (collègue de travail travaillant dans un bureau contigu), ainsi que par les photographies produites aux débats (s'agissant des cendres de cigarettes), 2- dès lors, et sans qu'il soit nécessaire de se prononcer plus amplement sur la réalité de cette situation (et par voie de conséquence sur la pertinence des témoignages versés aux débats par Mme X..., et en particulier ceux des clients, dont certains ont par la suite attesté que leurs premières attestations avaient été obtenues par des procédés déloyaux, étant par ailleurs observé que les collègues ayant témoigné en faveur de Mme X... n'étaient en tout état de cause plus présents dans l'entreprise au cours de l'année 2007), Mr. Y... pouvait légitimement, eu égard aux difficultés ainsi signalées par des membres du personnel et telles que confirmées par les constatations de Mme P..., évoquer avec Mme X..., dans un entretien dont la confidentialité n'est pas contestée, les problèmes dont s'agit, 3- la teneur exacte des propos tenus par Monsieur Y... le 7 juin 2007 (tout comme leur contexte), ne peut être déterminée de manière indiscutable, de sorte qu'il est impossible notamment de conclure si ceux-ci ont été proférés avec une volonté de blesser et d'humilier Mme X..., ou auraient été seulement maladroits en raison d'un manque de tact ; qu'il se déduit de ces seuls motifs que le harcèlement moral ne peut être regardé comme suffisamment établi (lequel suppose en tout état de cause des agissements répétés), tout comme une atteinte ponctuelle à la dignité de Mme X... susceptible de conduire à la résiliation judiciaire de son contrat de travail ; qu'en conséquence, la demande de résiliation judiciaire ne saurait prospérer ;
1- ALORS QUE le salarié qui se prétend victime d'agissements de harcèlement moral doit établir des faits permettant de présumer l'existence du harcèlement, et au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs de harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement ; que le harcèlement moral est constitué indépendamment de l'intention de son auteur ; qu'en l'espèce, en relevant pour écarter la présomption de harcèlement moral, les termes de la lettre de réponse de Monsieur Y... du 15 juin 2007 qui tentait de justifier son comportement humiliant à l'égard de la salariée lors de l'entretien du 7 juin 2007 et en retenant qu'il est impossible de conclure si ces propos ont été proférés avec une volonté de blesser et d'humilier la salariée, ou auraient été seulement maladroits en raison d'un manque de tact, la Cour d'appel a violé les articles L 1154-1 et L 1152-1 du Code du travail ;
2- ALORS QUE les juges du fond ont relevé que les certificats médicaux mentionnaient un syndrome anxio-dépressif en rapport avec le comportement humiliant de l'employeur et la dégradation des conditions de travail ; qu'en écartant lesdits certificats médicaux au motif inopérant et non établi qu'ils ne reposent que sur les affirmations de la salariée données aux médecins, alors qu'il appartenait seulement à la salariée d'apporter des éléments laissaient présumer l'existence du harcèlement invoqué, la Cour d'appel a violé les articles L 1154-1 et L 1152-1 du Code du travail ;
3- ALORS SURTOUT QUE la salariée avait fait valoir qu'en raison du harcèlement moral dont elle était victime, elle avait fait l'objet, le 30 novembre 2009, d'un avis d'inaptitude à tout poste dans l'établissement par la médecine du travail en raison du danger immédiat pour sa santé en cas de maintien au poste, la médecine du travail la déclarant néanmoins apte à un travail à domicile ; qu'en ignorant cet élément laissant présumer l'existence du harcèlement moral, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L 1154-1 et L 1152-1 du Code du travail ;
4- ALORS ENSUITE QUE la salariée avait produit des attestations qui faisait état du comportement dégradant de Monsieur Y... dirigeant de la société MECARUNGIS et des propos humiliants tenus, de manière récurrente, par ce dernier à l'égard de la salariée ; qu'en écartant ces attestations au motif qu'elles ne font état d'aucun fait précis, daté et circonstancié, sans rechercher si elles ne laissaient pas présumer l'existence du harcèlement invoqué, mettant ainsi à la charge de la salariée la preuve du harcèlement et non pas seulement la charge de l'allégation, la Cour d'appel a violé les articles L 1154-1 et L 1152-1 du Code du travail ;
5 ALORS QU'à tout le moins en n'expliquant pas en quoi ces attestations auraient été contredites par des attestations d'autres salariés, la Cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles L 1154-1 et L 1152-1 du Code du travail ;
6- ALORS QUE la salariée avait fait valoir la dégradation de ses conditions de travail relatives aux locaux en ce qu'elle travaillait dans un bureau de 7 m2 vétuste sans fenêtre et sans accès adapté à son handicap ; qu'en se contentant de retenir que la preuve de l'envoi de la lettre du 24 septembre 2004 adressée à l'employeur dans laquelle elle se plaignait de la dégradation de ses conditions de travail n'était pas rapportée, que le caractère exigu du bureau, pourtant non contesté par l'employeur, n'avait fait l'objet d'aucune observation du médecin de travail et que la salariée ne s'en était pas ouverte aux délégués du personnel, statuant ainsi par des motifs inopérants relatifs à une absence de protestation préalable de la salariée auprès de l'employeur, du médecin du travail ou des délégués du personnel, relevant seulement l'existence d'une rampe d'accès à l'entrée marchande, sans rechercher les conditions réelles de travail de la salariée, déclarée travailleur handicapé à 80 %, la Cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles L 1154-1 et L 1152-1 du Code du travail ;
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION
Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté la salariée de sa demande de résiliation judiciaire de son contrat de travail et partant d'avoir rejeté ses demandes de condamnation de l'employeur à lui verser les sommes de 115. 000 à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, 9. 496 à titre d'indemnité compensatrice de préavis, 950 au titre des congés payés y afférents, et 25. 000 à titre de dommages et intérêts ;
AUX MOTIFS énoncés au premier moyen
ALORS QUE, la Cour d'appel qui a constaté la tenue de propos particulièrement indélicats à l'encontre de la salariée lors de l'entretien du 7 juin 2007, propos portant atteinte à sa dignité, ne pouvait sans omettre de tirer de ses constatations les conséquences qui s'en déduisaient dire que la seule tenue de ces propos ne justifiait pas résiliation du contrat aux torts de l'employeur : qu'ainsi elle a violé les articles 1134 et 1184 du Code civil.
ALORS surtout QU'en ne recherchant pas si ces seuls propos n'avaient pas eu de sur l'état de santé de la salariée, la Cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard de l'article L 1222-1 du Code du travail et des articles 1134 et 1184 du Code civil.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION plus subsidiaire
Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit que le licenciement repose sur une cause réelle et sérieuse et d'AVOIR débouté la salariée de sa demande de condamnation de l'employeur à lui verser la somme de 115. 000 à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
AUX MOTIFS QUE le 30 novembre 2009, la médecine du travail a déclaré Madame Joëlle X... inapte à tout poste de l'établissement, lors d'une unique visite de reprise en application de l'article R. 4624-31 du Code du travail, mais apte à un travail à son domicile ; que Madame Joëlle X... a été licenciée, le 28 décembre 2009, par courrier ainsi rédigé : « Par la présente, nous vous notifions votre licenciement pour impossibilité de reclassement suite à votre inaptitude médicalement constatée. Nous avons immédiatement contacté le médecin du travail pour lui demander de nous préciser par retour vos aptitudes physiques ainsi que ses recommandations sur un poste éventuel de reclassement. Le médecin du travail nous a confirmé que vous n'étiez pas inapte à tout poste au sein de MECARUNGIS mais apte à un poste à votre domicile. Au sein de MECARUNGIS, tous les postes sont pourvus et se trouvent basés au sein du MIN. Il est matériellement impossible de créer un poste à votre domicile dans la mesure où notre activité impose une présence physique dans les locaux de l'entreprise ou sur le MIN. Par conséquent, nous sommes dans l'incapacité de vous proposer un poste de télétravail au sein de notre société. Nous avons également recherché un poste de reclassement externe au sein des adhérents des syndicats professionnels. Cette recherche n'a pas aboutie, aucun poste compatible avec les recommandations du médecin du travail n'étant disponible. Dans ces conditions, et en l'absence de poste de reclassement, nous sommes contrains de vous licencier pour impossibilité de reclassement. » ; que l'employeur expose qu'il emploie 17 salariés répartis en cinq services, commençant entre 3 heures et 7 heures du matin, qui tous doivent travailler sur le site du Marché d'Intérêt National de Rungis afin d'être en contact direct avec les adhérents qui fréquentent chaque jour en très grand nombre les locaux de la société MECARUNGIS ; qu'il ajoute qu'il est, dès lors, impossible de recourir au télétravail ; qu'il fait valoir qu'il a sollicité plusieurs entreprises adhérentes afin de savoir si elles pouvaient offrir un poste de télétravail pour Madame Joëlle X..., mais qu'il n'a reçu que des réponses négatives et produit 18 réponses négatives ; qu'il résulte de ce qui précède que l'employeur justifie, du fait de l'activité et du faible effectif de la société, ne pas pouvoir créer un poste de télétravail à domicile, conforme à l'avis de la médecine du travail, et d'avoir recherché activement à reclasser la salariée de manière externe dans une autre entreprise ; qu'ainsi, le licenciement repose sur une cause réelle et sérieuse ; qu'il y a lieu de débouter la salariée de sa demande de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
ALORS QU'à l'issue des périodes de suspension du contrat de travail consécutives à une maladie ou un accident non professionnel, lorsque le salarié est déclaré inapte par le médecin du travail à reprendre l'emploi qu'il occupait précédemment, l'employeur lui propose un autre emploi approprié à ses capacités aussi comparable que possible à l'emploi précédemment occupé, au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, transformations de postes de travail ou aménagement du temps de travail ; qu'en l'espèce, la Cour d'appel a relevé que l'employeur avait déclaré dans la lettre de licenciement que tous les postes sont pourvus, et se trouvent basés au sein du MIN et qu'il est matériellement impossible de créer un poste à domicile dans la mesure où notre activité impose une présence physique dans les locaux de l'entreprise ou sur le MIN ; qu'il s'évinçait de cette déclaration que l'employeur n'avait pas tenté de transformer le poste de la salariée ni mis en oeuvre les mesures qu'impose la loi en matière de reclassement du salarié inapte ; qu'en estimant néanmoins que l'employeur avait satisfait à son obligation de reclassement, la Cour d'appel a violé l'article L. 1226-2 du Code du travail ;
ALORS QU'à tout le moins en décidant que l'employeur du fait de l'activité et du faible effectif de la société, justifie ne pas pourvoir créer de poste de télétravail sans rechercher si, en réalité, le poste existant de la salariée pouvait néanmoins être aménagé ou si un autre emploi approprié à ses capacités par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, transformations de postes de travail ou aménagement du temps de travail pouvait être proposé à la salariée, la Cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de L. 1226-2 du Code du travail.
QUATRIEME MOYEN DE CASSATION subsidiaire
Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté la salariée de sa demande de condamnation de l'employeur à lui verser les sommes de 9. 496 à titre d'indemnité compensatrice de préavis et de 950
au titre des congés payés y afférents ;
AUX MOTIFS QUE le licenciement étant fondé sur une cause réelle et sérieuse et le préavis n'ayant pas été effectué en raison de la seule inaptitude médicalement constatée, la salariée ne peut prétendre au versement d'une indemnité compensatrice de préavis et aux congés payés y afférents ;
ALORS QUE si un salarié ne peut en principe prétendre au paiement d'une indemnité pour un préavis qu'il est dans l'impossibilité physique d'exécuter en raison de son inaptitude physique à son emploi, cette indemnité est due en cas de rupture du contrat de travail imputable à l'employeur en raison du manquement à son obligation de reclassement ; QUE la cassation qui ne manquera pas d'être prononcée sur le fondement du deuxième moyen, entraînera par voie de conséquence l'annulation du chef ici querellé en application de l'article 624 du Code de procédure civile.
CINQUIEME MOYEN DE CASSATION subsidiaire
Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté la salariée de sa demande de condamnation de l'employeur à lui verser la somme de 15. 000 à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral et conditions vexatoires de la rupture ;
AUX MOTIFS QUE sur les augmentations de salaires, que Madame Joëlle X... soutient qu'elle n'aurait pas bénéficié des augmentations de salaires intervenues pendant son absence pour maladie ; que la SA MECARUNGIS répond qu'elle s'est conformée aux dispositions conventionnelles applicables ; qu'en application des dispositions conventionnelles la garantie salariale doit être calculée par rapport à la dernière rémunération perçue par la salariée avant son arrêt de travail ; qu'ainsi, les augmentations intervenues postérieurement à la suspension du contrat de travail de Madame Joëlle X... ne pouvaient avoir d'incidence sur les rémunérations qu'elle a perçues pendant toute la durée de son arrêt de maladie ; que sur la visite de reprise, Madame Joëlle X... affirme qu'elle a eu des difficultés pour obtenir une visite médicale de reprise ; que l'employeur disposait d'un délai de 8 jours à compter du retour de Madame Joëlle X... dans la société, intervenu le 30 novembre 2009, pour lui faire passer la visite de reprise ; que l'avis d'inaptitude de la médecine du travail, versé aux débats, est daté du 30 novembre 2009, soit le jour même de son retour ; qu'ainsi, il est incontestable que le délai légal a été respecté ; que sur la remise de l'attestation Pôle emploi, Madame Joëlle X... soutient que l'attestation ASSEDIC lui a été remise tardivement ; que l'article R 1234-9 du Code du travail prévoit que l'employeur doit délivrer au salarié les attestations qui lui permettent d'exercer ses droits auprès des organismes gestionnaires du régime chômage au moment de l'expiration ou de la rupture du contrat de travail ; qu'il n'est pas contesté que l'employeur a délivré l'attestation Pôle emploi à l'issue de la période de préavis ; qu'ainsi, les dispositions de l'article R 1234-9 précité ont été respectées, la non-exécution du préavis n'ayant pas avancé la date de la rupture du contrat de travail ; qu'il résulte de ce qui précède que Madame Joëlle X... ne justifie de l'existence ni d'un quelconque préjudice moral, ni de conditions vexatoires en ce qui concerne la rupture de la relation contractuelle ;
ALORS QUE l'exclusion des salariés absents pour cause de maladie du bénéfice de l'augmentation générale des salaires est une mesure affectant la rémunération des salaires en raison de l'état de santé et partant prohibée ; qu'en estimant que la salariée ne pouvait bénéficier de l'augmentation générale des salaires pendant la suspension du contrat de travail pour cause de maladie en raison des dispositions conventionnelles applicables, la Cour d'appel a violé les articles 1132-1 et 1132-2 du Code du travail et l'article 1147 du Code civil ;
ALORS ENCORE QUE la salariée avait fait valoir qu'elle avait eu de grandes difficultés à obtenir une convocation de son employeur pour la visite de reprise du travail et elle avait produit des pièces au soutien de sa prétention ; qu'en écartant le moyen de la salariée au motif que l'avis d'inaptitude avait été obtenu le 30 novembre 2009 dans le délai légal, sans rechercher les conditions dans lesquelles s'était déroulé la visite de reprise du fait du comportement de l'employeur ayant conduit à l'intervention répétée de la médecine du travail pour obtenir finalement la convocation sollicitée que l'employeur avait refusé de délivrer, la Cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des articles L. 1222-1 du Code du travail et 1147 du Code civil ;
ALORS ENSUITE QUE la remise tardive à un salarié des documents ASSEDIC lui permettant de s'inscrire au chômage entraîne nécessairement pour lui un préjudice qui doit être réparé par les juges du fond ; QUE le salarié qui n'a pas de préavis à exécuter et est privé de l'indemnité compensatrice de préavis doit pouvoir faire valoir immédiatement ses droits au titre de l'assurance chômage ; qu'en l'espèce, en estimant à tort que l'employeur pouvait remettre l'attestation Pôle Emploi à l'issue de la période de préavis non exécutée et non indemnisée, la Cour d'appel a violé les articles L. 1234-19 et R. 1234-9 du Code du travail ;
ALORS ENFIN que l'employeur doit remettre les documents nécessaires à la détermination exacte des droits du salarié et qu'à défaut il en résulte nécessairement pour l'intéressé un préjudice qui doit être réparé par les juges du fond ; qu'en l'espèce en ne recherchant pas le préjudice qui était résulté pour la salariée de la remise d'une attestation Pôle Emploi erronée et comportant des résultats négatifs, la Cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles L. 1234-19 et R. 1234-9 du Code du travail et 1147 du Code civil.