Cour de cassation, civile, Chambre civile 3, 18 octobre 2011, 10-24.950, Inédit

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :



Sur le moyen unique, ci-après annexé :

Attendu qu'ayant retenu que l'expert judiciaire avait constaté que l'amiante se trouvait dans la toiture et dans les faux plafonds sur des lieux inaccessibles, que la toiture ne faisait pas partie des composants de la construction à vérifier, que l'avis de la société Cofassur immo Cabinet Activ'Expertise était fondé sur des éléments visuels des parties accessibles et qu'il ne pouvait lui être reproché, comme le faisait à tort l'expert, de ne pas avoir demandé d'accéder à des parties du bâtiment qu'il ne pouvait atteindre, la cour d'appel, qui n'était pas tenue de répondre à des conclusions ou de procéder à des recherches que ses constatations rendaient inopérantes, par une appréciation souveraine des éléments de faits qui lui étaient soumis et sans dénaturation, a pu en déduire que la responsabilité délictuelle de la société Cofassur immo Cabinet Activ'Expertise n'était pas engagée à l'égard de la société civile immobilière Jumacel ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Jumacel aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Jumacel à payer à la société Cofassur Immo cabinet Activ'Expertise et à la société MMA IARD assurances mutuelles la somme globale de 2 500 euros ; rejette la demande de la société Jumacel ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-huit octobre deux mille onze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par Me Ricard, avocat aux Conseils pour la société Jumacel.

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir confirmé le jugement entrepris dans toutes ses dispositions ;

AUX MOTIFS QUE

La SCI JUMACEL a acquis le 18 août 2003 un immeuble abritant une salle de spectacle et des bureaux, avec l'indication du vendeur que selon rapport technique établi par la SARL COFASSUR « Cabinet ACTIV'EXPERTISE », les parties visibles et accessibles de l'immeuble inspectées ne présentaient pas de matériaux et produits contenant de l'amiante.

En 2004, elle a saisi le juge des référés afin que soit examiné l'immeuble acheté compte tenu de la présence d'amiante constatée par le cabinet GONDOUIN dans un rapport en date du 25 novembre 2003.

L'expert judiciaire dans son rapport a indiqué que « le rapport d'ACTIV'EXPERTISE en date du 20 juin 2003 joint en annexe N°3 répond dans la forme à la législation en vigueur.

Si le complexe de couverture de l'immeuble était accessible le jour du constat amiante, il appartenait à l'opérateur d'émettre une réserve et de réclamer au propriétaire les moyens d'accéder au toit ou au sous-plafond.

Par conséquent-dans le fond- le rapport n'est pas conforme à la procédure normalisée. » ,

Il précise que si l'immeuble présentait des matériaux contenant de l'amiante sur la toiture et sur le faux-plafond, la présence de ces matériaux inertes et non friables ne contrevenait pas aux dispositions de l'article L. 1334.7 du Code de la santé publique.

Aux termes de l'article R 1334-24 du Code de la santé publique les propriétaires des immeubles mentionnés à l'article R. 1334-23 produisent au plus tard à la date de toute promesse de vente ou d'achat, un constat précisant la présence ou le cas échéant l'absence de matériaux et produits contenant de l'amiante mentionné dans l'annexe 13-9. Ce constat indique la localisation et l'état de conservation des matériaux et produits. Ce constat ou, lorsque le dossier technique « amiante » existe, la fiche récapitulative contenue dans le dossier constitue l'état mentionné à l'article L. 1334-7 du code de la santé publique.

L'article R. 1334-26 du même code précise que le dossier technique «amiante» est établi sur la base d'un repérage portant sur les matériaux et produits sur la liste définie à l'annexe 13-9 et accessibles sans travaux destructifs.

L'expert judiciaire a constaté que l'amiante se trouvait dans la toiture et dans les faux plafonds sur des lieux inaccessibles.

La toiture ne fait pas partie des composants de la construction à vérifier et les parties du composant à vérifier dans la situation de faux plafonds sont : les flocages, les enduits projetés, les panneaux collés et visés.

En conséquence, le constat du 20 juin 2003 a répondu à la mission tel que rappelée dans les articles sus-visés, et ACTIV'EXPERTISE n'a pas manqué à ses obligations envers son mandant.

Elle n'a pas commis non plus de faute susceptible d'engager sa responsabilité envers l'acquéreur pour défaut d'information exacte sur la présence d'amiante Son avis était fondé sur les éléments visuels des parties accessibles et ne peut lui être reproché comme le fait à tort l'expert de ne pas avoir demandé d'accéder à des parties du bâtiment qu'elle ne pouvait atteindre.

En conséquence, La SCI JUMACEL n'est pas fondée à invoquer la responsabilité délictuelle d'ACTIV'EXPERTISE et sa condamnation à de quelconques dommages et intérêts, sera déboutée de l'ensemble de ses demandes et la décision entreprise sera confirmée.

1°) ALORS QUE le juge ne doit pas dénaturer les documents de la cause ; que l'expert judiciaire a indiqué que « si le complexe de couverture de l'immeuble était inaccessible le jour du constat amiante, il appartenait à l'opérateur d'émettre une réserve et de réclamer au propriétaire les moyens d'accéder en toiture ou sous le faux-plafond » (Rapport p.10), que « l'accès à la couverture n'était pas insurmontable et l'opérateur d'Activ'Expertise devait exiger l'installation d'une échelle et revenir le lendemain, ou encore devait réclamer le dossier technique de l'immeuble qui aurait révélé des matériaux susceptibles de contenir de l'amiante » (Rapport p.15) ; qu'en retenant que l'expert judiciaire avait constaté que l'amiante se trouvait dans la toiture et dans les faux plafonds sur des lieux inaccessibles, la Cour d'appel a dénaturé le rapport d'expertise en violation de l'article 1134 du code civil ;

2°) ALORS QUE le défaut de réponse à conclusion équivaut à un défaut de motifs ; que l'exposante a fait valoir que le premier diagnostic était erroné et que le contrôleur avait commis une faute en concluant sans réserve à l'absence d'amiante ; que la Cour d'appel s'est bornée à affirmer que le constat du 20 juin 2003 a répondu à la mission réglementaire et que le contrôleur technique n'a pas manqué à ses obligations sans répondre à ces conclusions et a violé les articles 455 et 458 du code de procédure civile ;

3°) ALORS QUE la souveraineté du juge du fond pour apprécier les éléments de preuve qui lui sont soumis et constater les faits, ne dispense pas celui-ci de procéder à une appréciation d'ensemble de ces faits et de ces preuves ; que la SCI JUMACEL a fait valoir que le contrôleur était de mauvaise foi en prétendant ne pas avoir eu accès au toit, que le plafond était visible à l'oeil nu et que trois diagnostics postérieurs ont tous révélé sans aucune difficulté, par simple contrôle visuel, la présence d'amiante dans le plafond ; qu'en s'abstenant de prendre en considération ces éléments, la Cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des articles L.1334-13, R.1334-24 du code de la santé publique et 1382 du Code civil ;

4°) ALORS QUE le contrôleur technique établit son constat amiante sur la base d'un repérage portant sur les matériaux et produits sur la liste définie à l'annexe 13-9 -parmi lesquels figurent les plafonds - et accessibles sans travaux destructifs ; que pour considérer que le constat du 20 juin 2003 avait répondu à la mission réglementaire et qu'ACTIV'EXPERTISE n'avait pas manqué à ses obligations envers son mandant, la Cour d'appel a relevé que l'amiante se trouvait dans les faux plafonds sur des lieux inaccessibles ; qu'en statuant comme elle l'a fait, sans rechercher si les plafonds n'étaient pas accessibles sans travaux destructifs, la Cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des articles R.1334-24, l'annexe 13-9 du code de la santé publique et 1382 du code civil.

5°) ALORS QUE le contrôleur technique établit son constat amiante sur la base d'un repérage portant sur les matériaux et produits sur la liste définie à l'annexe 13-9 -parmi lesquels figurent les plafonds - et accessibles sans travaux destructifs ; que pour dire que le contrôleur n'avait pas commis de faute susceptible d'engager sa responsabilité envers l'acquéreur pour défaut d'information exacte sur la présence d'amiante, la Cour d'appel a retenu que son avis était fondé sur les éléments visuels des parties accessibles sans qu'il ne puisse lui être reproché comme le fait l'expert de ne pas avoir demandé d'accéder à des parties du bâtiment ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la Cour d'appel a violé les articles L. 1334-13, R.1334-24 du code de la santé publique et 1382 du Code civil ;

6°) ALORS QUE le contrôleur technique chargé d'établir un diagnostic réglementaire est tenu d'une obligation d'information et de conseil, doit s'enquérir de tous les éléments lui permettant d'exécuter sa mission et ne peut s'exonérer de sa responsabilité qu'en établissant avoir communiqué un avis complet, ce qui implique, le cas échéant, des réserves formelles sur les éléments auxquels il n'aurait pas eu accès ; que si la toiture ne fait pas partie des éléments à vérifier dans le cadre réglementaire de la mission, il incombe au spécialiste de ne pas induire en erreur l'acquéreur et d'émettre dans son rapport des réserves sur les parties non contrôlées et éventuellement susceptibles de contenir de l'amiante ; qu'en se bornant, pour écarter l'existence d'une faute du contrôleur, à relever que l'expert judiciaire a constaté la présence d'amiante dans la toiture et que la toiture ne fait pas partie des composants de la construction à vérifier, la Cour d'appel a violé l'article 1382 du Code civil.

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