Cour de cassation, civile, Chambre commerciale, 21 juin 2011, 10-23.136, Inédit
Cour de cassation - Chambre commerciale
- N° de pourvoi : 10-23.136
- Non publié au bulletin
- Solution : Rejet
- Président
- Mme Favre (président)
Texte intégral
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 24 juin 2010), qu'à la suite d'une mutation professionnelle, M. X... est allé habiter en Egypte du 1er juin 2005 au 31 août 2009 ; que, le 15 juin 2005, il a déposé une déclaration au titre de l'impôt de solidarité sur la fortune (ISF) et a acquitté l'imposition correspondante ; que, le 20 janvier 2006, il a interrogé le centre des impôts, demandant, en application de l'article 81 A du code général des impôts le bénéfice de l'exonération de l'imposition sur les revenus pour les salaires perçus dans son entreprise en 2005 et a obtenu une réponse de l'administration le 1er février 2006 ; que, le 30 mai 2006, il a déposé sa déclaration relative à l'impôt sur le revenu et a déclaré les salaires perçus avant le 1er juin 2005, ajoutant que les revenus des valeurs et capitaux mobiliers et les plus-values et gains taxables à 16 % n'avaient pas été portés sur cette déclaration en application de la convention fiscale France-Egypte prévoyant que ce type de revenu est imposable dans l'Etat de domiciliation fiscale du contribuable ; que, le 11 janvier 2007, M. X... a transmis au centre des impôts une déclaration rectificative au titre de l'ISF de 2005, demandant un remboursement en application de l'article 885 L du code général des impôts, que l'administration fiscale a rejeté par lettre du 9 mars 2007 ; que M. X... a saisi le tribunal de grande instance d'un recours contre cette décision et formé une demande de dégrèvement au titre de l'ISF de 2005 ;
Sur le premier moyen :
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté son recours contre la décision de rejet du 9 mars 2007, et sa demande de dégrèvement au titre de l'ISF de l'année 2005 ainsi que toutes ses demandes consécutives, alors, selon le moyen, que le domicile fiscal d'un contribuable doit être déterminé pour l'ensemble de l'année fiscale considérée ; que pour fixer les modalités d'imposition d'un contribuable à l'impôt de solidarité sur la fortune, le juge doit donc déterminer son domicile fiscal pour l'ensemble de l'année en cause, avant d'en déduire s'il avait son domicile fiscal en France au 1er janvier ; que dès lors, en appréciant le domicile fiscal de M. X... au 1er janvier 2005 indépendamment du reste de l'année concernée, la Cour d'appel a violé l'article 4 B du code général des impôts, ensemble l'article 885 A du même code ;
Mais attendu que l'arrêt retient qu'aux termes de l'article 885 A du code général des impôts, le fait générateur de l'ISF se situe au 1er janvier de chaque année, date à laquelle il faut se placer pour apprécier les conditions d'assujettissement ; qu'il relève qu'à la date du 1er janvier 2005, le domicile fiscal des époux X... était incontestablement fixé en France au regard de tous les critères visés par l'article 4 B § 1 du code général des impôts et qu'inversement, à partir du 1er juin 2005, il ne remplissait plus aucun des critères de l'article 4 B précité ; qu'il retient qu'au regard de l'application de l'article 885 L du code général des impôts, le transfert de leur domicile fiscal à l'étranger au cours de l'année 2005 ne pouvait pas avoir d'incidence sur leur imposition sur la fortune au titre de l'année 2005, mais seulement au 1er janvier suivant et que rien ne permet à M. X... de prétendre que l'effet de son transfert en Egypte au 1er juin 2005 l'a fait bénéficier d'un domicile fiscal à l'étranger dès le 1er janvier précédent ; que la cour d'appel a ainsi fait l'exacte application des textes visés au moyen ; que celui-ci n'est pas fondé ;
Sur le troisième moyen :
Attendu que M. X... fait le même grief à l'arrêt, alors, selon le moyen, que selon la Convention fiscale France-Egypte, signée le 19 juin 1980 et approuvée par la loi n° 85. 522 du 21 juin 1982 la résidence fiscale d'une personne assujettie à l'impôt dans l'un au moins des deux Etats doit être déterminée pour l'ensemble de l'année fiscale considérée ; que dès lors, en déterminant la résidence fiscale de M. X... pour la période allant de janvier à juin 2005, indépendamment du reste de l'année concernée, la cour d'appel a violé l'article 4 de la Convention fiscale France-Egypte ;
Mais attendu que l'article 4-1 de la convention signée le 19 juin 1980 entre le gouvernement de la République française et celui de la République arabe d'Egypte en vue d'éviter les doubles impositions et de prévenir l'évasion fiscale en matière d'impôts sur le revenu et sur la fortune stipule que l'expression " résident d'un Etat " désigne toute personne qui, en vertu de la législation de cet Etat, est assujettie à l'impôt dans cet Etat, en raison de son domicile, de sa résidence, de son siège de direction ou de tout autre critère de nature analogue ; qu'ayant retenu que le fait générateur de l'ISF se situe au 1er janvier de chaque année, date à laquelle il faut se placer pour apprécier les conditions d'assujettissement, comme l'énonce l'article 885 A du code général des impôts, puis que rien ne permet à M. X... de prétendre que l'effet de son transfert en Egypte au 1er juin 2005 l'a fait bénéficier d'un domicile fiscal à l'étranger dès le 1er janvier précédent et que les dispositions de la convention fiscale France-Egypte ne lui permettent pas de revendiquer le bénéfice d'un domicile fiscal à l'étranger au 1er janvier 2005 et que rien, dans ces dispositions conventionnelles, n'indique que la qualité de résident fiscal en Egypte acquise en cours d'année doit rétroagir au 1er janvier de l'année du transfert pour l'imposition sur la fortune, la cour d'appel a fait l'exacte application des stipulations conventionnelles visées au moyen ; que celui-ci n'est pas fondé ;
Et attendu que le deuxième moyen ne serait pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, le condamne à payer au directeur général des finances publiques la somme de 2 500 euros et rejette sa demande ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt et un juin deux mille onze.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt
Moyens produits par la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat aux Conseils pour M. X...
PREMIER MOYEN DE CASSATION
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR rejeté le recours de M. X... contre la décision de rejet du 9 mars 2007, et d'AVOIR rejeté sa demande de dégrèvement au titre de l'ISF de l'année 2005 ainsi que toutes ses demandes consécutives ;
AUX MOTIFS QUE le fait générateur de l'impôt de solidarité sur la fortune se situe au 1er janvier de chaque année, date à laquelle il faut se placer pour apprécier les conditions d'assujettissement, comme l'énonce l'article 885 A du Code général des impôts ; qu'à la date du 1er janvier 2005, le domicile fiscal des époux X... était incontestablement fixé en France au regard de tous les critères visés par l'article 4 B § 1 du code général des impôts ; qu'inversement à partir du 1er juin 2005, il ne remplissait plus aucun des critères de l'article 4 B précité ; qu'au regard de l'application de l'article 885 L du code général des impôts, le transfert de leur domicile fiscal à l'étranger au cours de l'année 2005 ne pouvait pas avoir d'incidence sur leur imposition sur la fortune au titre de l'année 2005, mais seulement au 1er janvier suivant ; que rien ne permet à M. X... de prétendre que l'effet de son transfert en Egypte au 1er juin 2005 l'a fait bénéficier d'un domicile fiscal à l'étranger dès le 1er janvier précédent ; que M. X... prétend à tort que le domicile fiscal au sens de l'article 4 B du Code général des impôts doit s'appliquer pour l'ensemble de l'année considérée ; que le principe de l'unité du domicile fiscal, qui signifie qu'un contribuable ne peut être imposé qu'en un seul lieu, n'a pas pour conséquence de faire rétroagir au premier jour de l'année civile un changement de domicile fiscal intervenu au cours de l'année ; que la position de l'administration face à la réclamation concernant l'impôt de solidarité sur la fortune des époux X... pour l'année 2005 n'est donc pas contraire au principe de l'unité du domicile ; que le Tribunal de grande instance de Bobigny ne pouvait donc pas reconnaître à M. X... pour 2005 le bénéfice de l'exonération réservée par l'article 885 L du code général des impôts aux personnes physiques n'ayant pas en France leur domicile fiscal ;
ALORS QU'en droit interne, le domicile fiscal d'un contribuable doit être déterminé pour l'ensemble de l'année fiscale considérée ; que pour fixer les modalités d'imposition d'un contribuable à l'impôt de solidarité sur la fortune, le juge doit donc déterminer son domicile fiscal pour l'ensemble de l'année en cause, avant d'en déduire s'il avait son domicile fiscal en France au 1er janvier ; que dès lors, en appréciant le domicile fiscal de M. X... au 1er janvier 2005 indépendamment du reste de l'année concernée, la Cour d'appel a violé l'article 4 B du Code général des impôts, ensemble l'article 885 A du même code.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR rejeté le recours de M. X... contre la décision de rejet du 9 mars 2007, et d'AVOIR rejeté sa demande de dégrèvement au titre de l'ISF de l'année 2005 ainsi que toutes ses demandes consécutives ;
AUX MOTIFS QUE le fait générateur de l'impôt de solidarité sur la fortune se situe au 1er janvier de chaque année, date à laquelle il faut se placer pour apprécier les conditions d'assujettissement, comme l'énonce l'article 885 A du Code général des impôts ; qu'à la date du 1er janvier 2005, le domicile fiscal des époux X... était incontestablement fixé en France au regard de tous les critères visés par l'article 4 B § 1 du code général des impôts ; qu'au regard de l'application de l'article 885 L du code général des impôts, le transfert de leur domicile fiscal à l'étranger au cours de l'année 2005 ne pouvait pas avoir d'incidence sur leur imposition sur la fortune au titre de l'année 2005, mais seulement au 1er janvier suivant ; que rien ne permet à M. X... de prétendre que l'effet de son transfert en Egypte au 1er juin 2005 l'a fait bénéficier d'un domicile fiscal à l'étranger dès le 1er janvier précédent ; qu'il ne résulte des termes de la lettre du 1er février 2006 en réponse à la question de M. X... concernant l'imposition de ses revenus, aucune prise de position formelle, au sens des articles L 80 A et L 80 B du livre des procédures fiscales, de l'administration fiscale sur la situation de son domicile fiscal au 1er janvier 2005 ; qu'au contraire celle-ci, qui n'avait d'ailleurs pas tous les éléments de fait sur la situation du contribuable, envisage les deux hypothèses (« il semble que votre domicile fiscal ne se situait pas en France en 2005... Par contre si en 2005 votre domicile fiscal était en France... ») et rappelle les dispositions légales et l'obligation pour le contribuable d'apporter des justificatifs permettant d'établir la situation dont il revendiquait le bénéfice ;
ALORS QUE lorsque l'Administration a formellement pris position sur une situation de fait au regard d'un texte fiscal, elle ne peut procéder à des rehaussements d'impositions antérieures qui seraient fondées sur une appréciation différente de cette situation ; qu'en l'espèce, M. X... faisait valoir que dans sa demande de rescrit du 20 janvier 2006, il avait communiqué à l'Administration tous les éléments de faits nécessaires à l'appréciation de sa situation ; qu'il en déduisait que les réserves émises par l'Administration dans sa réponse du 1er février 2006, qui ne concernaient que d'éventuels éléments de fait dont elle n'aurait pas eu connaissance et qui aurait pu modifier son appréciation selon laquelle il avait son domicile fiscal hors de France en 2005, ne retiraient pas à cette réponse son caractère de prise de position formelle sur sa situation de fait (conclusions d'appel, p. 7 § 9 et p. 10 § § 4-7) ; que dès lors, en s'abstenant de rechercher si l'absence d'éléments de fait de nature à modifier l'appréciation de l'Administration ne conférait pas à sa réponse le caractère d'un rescrit opposable, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L 80 B du Livre des procédures fiscales.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR rejeté le recours de M. X... contre la décision de rejet du 9 mars 2007, et d'AVOIR rejeté sa demande de dégrèvement au titre de l'ISF de l'année 2005 ainsi que toutes ses demandes consécutives ;
AUX MOTIFS QUE le fait générateur de l'impôt de solidarité sur la fortune se situe au 1er janvier de chaque année, date à laquelle il faut se placer pour apprécier les conditions d'assujettissement, comme l'énonce l'article 885 A du Code général des impôts ; qu'à la date du 1er janvier 2005, le domicile fiscal des époux X... était incontestablement fixé en France au regard de tous les critères visés par l'article 4 B § 1 du code général des impôts ; qu'au regard de l'application de l'article 885 L du code général des impôts, le transfert de leur domicile fiscal à l'étranger au cours de l'année 2005 ne pouvait pas avoir d'incidence sur leur imposition sur la fortune au titre de l'année 2005, mais seulement au 1er janvier suivant ; que rien ne permet à M. X... de prétendre que l'effet de son transfert en Egypte au 1er juin 2005 l'a fait bénéficier d'un domicile fiscal à l'étranger dès le 1er janvier précédent ; que les dispositions de la convention fiscale France-Egypte citées par M. X... ne lui permettent pas de revendiquer le bénéfice d'un domicile fiscal à l'étranger au 1er janvier 2005 ; que rien dans ces dispositions conventionnelles n'indique que la qualité de résident fiscal en Egypte acquise en cours d'année doit rétroagir au 1er janvier de l'année du transfert pour l'imposition sur la fortune ; que de plus, si M. X... a été assujetti à l'IRPP en France en 2005, c'est non seulement parce qu'il y a perçu des revenus mais aussi parce qu'au regard des critères de l'article 4 B du code général des impôts, il avait incontestablement son domicile fiscal en France pour les premiers mois de l'année 2005 ; qu'inversement à partir du 1er juin 2005, il ne remplissait plus aucun des critères de l'article 4 B précité ; qu'il ne peut donc pas se prévaloir de la jurisprudence concernant une situation différente, comme celle de Madame K... qui avait conservé le centre de ses intérêts économiques en France pendant toute l'année litigieuse ; que s'il a été considéré comme résident fiscal en Egypte pour des revenus de 2005, les pièces produites ne démontrent pas que cela concernait la période antérieure au 1er juin 2005 ; que la position de l'administration face à la réclamation concernant l'impôt de solidarité sur la fortune des époux X... pour l'année 2005 n'est donc pas contraire à l'interdiction de la double imposition résultant de la convention franco-égyptienne ;
ALORS QUE selon la Convention fiscale France-Egypte, signée le 19 juin 1980 et approuvée par la loi n° 85. 522 du 21 juin 1982 la résidence fiscale d'une personne assujettie à l'impôt dans l'un au moins des deux Etats doit être déterminée pour l'ensemble de l'année fiscale considérée ; que dès lors, en déterminant la résidence fiscale de M. X... pour la période allant de janvier à juin 2005, indépendamment du reste de l'année concernée, la Cour d'appel a violé l'article 4 de la Convention fiscale France-Egypte.