Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 16 juin 2011, 10-14.727, Inédit

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :



Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été engagé le 9 décembre 1994 par la société Ufifrance patrimoine en qualité de démarcheur stagiaire ; que son contrat de travail prévoyait une rémunération sur la base du SMIC, les frais professionnels étant intégrés dans les commissions ; qu'à la suite de la conclusion d'un accord d'entreprise, le 28 février 2003, les parties ont signé, le 3 mars 2003, un nouveau contrat stipulant notamment que la partie fixe, appelée également traitement de base, était constituée d'un salaire égal au SMIC majorée de la somme brute de 230 euros correspondant au remboursement forfaitaire des frais professionnels et que les versements au titre de la partie variable (commissions) incluront une indemnité de 10 % correspondant à un complément de remboursement forfaitaire des frais professionnels ; qu'après avoir pris acte de la rupture du contrat de travail aux torts de l'employeur par lettre du 7 juin 2006, le salarié a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes ;

Sur le moyen unique du pourvoi incident :

Attendu que le salarié fait grief à l'arrêt de déclarer prescrites les demandes de remboursement de frais pour la période antérieure au 10 juillet 2001, alors, selon le moyen, qu'il résulte de l'article 2248 du code civil que la prescription est interrompue par la reconnaissance, même partielle, que le débiteur fait du droit de celui contre lequel il prescrivait ; qu'en l'espèce, la société Ufifrance a abandonné son système initial de remboursement de frais professionnels selon lequel le remboursement des frais était compris dans la rémunération et a mis en place en mars 2003 un nouveau mode de remboursement prévoyant l'attribution forfaitaire d'une somme de 230 euros pour se conformer à la position prise par la Cour de cassation qui a considéré la clause d'origine illicite ; que cette substitution vaut reconnaissance du droit des salariés à un remboursement des frais sur la base de ceux exposés et non par référence à une prétendue intégration au commissionnement ; que dès lors, en déclarant que le salarié ne justifiait d'aucun acte interruptif de prescription quand l'accord d'entreprise du 28 février 2003 valait reconnaissance par l'employeur du droit des salariés et donc interruption de la prescription de sorte que M. X... était en droit de réclamer le remboursement des frais exposés pour la période antérieure au 10 juillet 2001, la cour d'appel a violé l'article susvisé ;

Mais attendu que la prescription peut être interrompue, d'une part, par une citation en justice, un commandement ou une saisie, signifiés par la reconnaissance que le débiteur fait du droit de celui qui veut empêcher de prescrire et, d'autre part, par la reconnaissance que le débiteur fait du droit de celui contre lequel il prescrivait ; qu'en l'absence de disposition particulière, la signature d'un accord d'entreprise ne constitue pas pour l'employeur la reconnaissance des droits individuels allégués par le salarié pour la période antérieure à cette signature ;

Et attendu que la cour d'appel, qui a constaté que le salarié ne justifiait d'aucun acte interruptif de prescription intervenu dans les cinq années précédant la saisine du conseil de prud'hommes, a exactement décidé que les demandes tendant au remboursement des frais antérieurs au 10 juillet 2001 était irrecevable ;

Mais, sur le premier moyen du pourvoi principal, pris en sa première branche :

Vu l'article 1134 du code civil ;

Attendu que pour condamner l'employeur au remboursement de frais professionnels pour la période postérieure au 3 mars 2003 et au paiement de certaines sommes à titre de dommages-intérêts, indemnité de préavis et de congés payés afférents, d'indemnité de licenciement et de dommages-intérêts en réparation de la rupture, l'arrêt retient qu'il ressort des dispositions du contrat de travail conclu le 3 mars 2003, lequel est l'application individuelle de l'accord d'entreprise du 28 février 2003, que si les frais professionnels dépassent le montant forfaitaire de 230 euros, le surplus s'imputera sur le salaire ; que la rémunération étant le SMIC, il s'en infère que la rémunération réellement perçue par le salarié lui sera nécessairement inférieure ; qu'il s'ensuit qu'une partie des frais professionnels est en réalité supportée par M. X..., entamant ainsi son salaire pour le ramener en dessous du SMIC ; que cette clause est également illicite au regard de l'article L. 3211-1 précité et ne peut être opposée au salarié ;

Attendu cependant que les frais qu'un salarié justifie avoir exposés pour les besoins de son activité professionnelle et dans l'intérêt de l'employeur, doivent être remboursés sans qu'il ne puissent être imputés sur la rémunération qui lui est due, à moins qu'il n'ait été contractuellement prévu qu'il en conserverait la charge moyennant le versement d'une somme fixée à l'avance de manière forfaitaire et à la condition que la rémunération proprement dite du travail reste au moins égale au SMIC ;

Qu'en statuant comme elle a fait, alors que la clause contractuelle fixant un forfait de remboursement mensuel des frais professionnels étant licite, la créance du salarié ne pouvait porter que sur la différence entre sa rémunération proprement dite et le SMIC, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

Et, sur le premier moyen du pourvoi principal, pris en sa quatrième branche :

Vu l'article 1315 du code civil ;

Attendu que pour condamner l'employeur au paiement d'une certaine somme à titre de remboursement des frais professionnels et au paiement de certaines sommes à titre de dommages-intérêts, indemnité de préavis et de congés payés afférents, d'indemnité de licenciement et de dommages-intérêts en réparation de la rupture, l'arrêt retient qu'il ne peut être reproché au salarié de n'avoir pas conservé les justificatifs des frais exposés ; que la société, pour tenter de se soustraire à ses obligations, est mal venue à reprocher au salarié une prétendue insuffisance de preuve s'agissant des frais professionnels dont il réclame le paiement alors que la clause litigieuse qu'elle lui a imposée, le dispensait par nature de produire tous justificatif ; qu'aucun élément produit aux débats ne permet d'établir que les frais détaillés par le salarié n'ont pas été engagés dans l'intérêt de l'entreprise ;

Qu'en statuant ainsi, alors qu'il appartient au salarié de prouver l'existence des frais professionnels allégués, la cour d'appel, qui a inversé la charge de la preuve, a violé le texte susvisé ;

Et attendu que conformément à l'article 624 du code de procédure civile, la cassation sur le premier moyen emporte la cassation par voie de conséquence sur le troisième moyen ;

PAR CES MOTIFS, sans qu'il y ait lieu de statuer sur le deuxième moyen du pourvoi principal :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a condamné la société Ufifinance patrimoine à payer à M. X... les sommes de 25 000 euros à titre de frais professionnels, 10 000 euros à titre de dommages-intérêts, 3 742,46 euros à titre d'indemnité de préavis, 374,24 euros à titre de congés payés afférents, 2 412,67 euros à titre d'indemnité de licenciement, 11 226 euros à titre de dommages-intérêts en réparation de la rupture, 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, l'arrêt rendu le 20 janvier 2010, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles ;

Condamne M. X... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du seize juin deux mille onze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits au pourvoi principal par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils pour la société Ufifrance patrimoine.

PREMIER MOYEN DE CASSATION

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné la SA UFIFRANCE PATRIMOINE à payer à Monsieur Fabrice X... les sommes de 25 000 euros au titre des frais professionnels, avec intérêts au taux légal à compter de la convocation de l'employeur devant le bureau de conciliation, et d'AVOIR en conséquence condamné l'exposante à lui verser 10 000 euros à titre de dommages et intérêts en application de l'article 1153 du code civil, 3742, 46 euros à titre d'indemnité de préavis, et 374, 24 euros à titre de congés payés afférents, 2412, 67 euros à titre d'indemnité de licenciement, 11 226 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de la rupture, et 1500 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile

AUX MOTIFS QUE « Monsieur Fabrice X... a été engagé par contrat à durée indéterminée en date du 9 décembre 1994, en qualité de démarcheur stagiaire, puis de conseiller le 17 juin 1995 et de superviseur à compter du 3 juillet de la même année, moyennant une rémunération égale au SMIC augmentée le cas échéant d'une part variable, par la SAS UFIFRANCE PATRIMOINE qui a pour activité la commercialisation de produits d'épargne auprès d'une clientèle composée de personnes physiques ou morales .
Considérant que le contrat conclu le 9 décembre 1994 prévoyait que « les traitements fixes et commissions versés couvrent tous les frais, avances et débours que le signataire pourrait être amené à exposer ». Considérant que suite à la conclusion d'un accord d'entreprise, en date du 28 février 2003, un nouveau contrat a été signé entre les parties, le 3 mars 2003, moyennant une rémunération comportant une partie fixe et une partie variable selon les modalités ci-après:
« Article 2-2 : la partie fixe, appelée également traitement de base, est constituée d'un salaire égal au SMIC majorée de la somme brute de 230 euros correspondant au remboursement forfaitaire des frais professionnels ;
Article 2-3 : les versements au titre de la partie variable (commissions) incluront une indemnité de 10% correspondant à un complément de remboursement forfaitaire des frais professionnels " ;
Considérant en application des dispositions de l'article L 3211 -1 du code du travail, que les frais qu'un salarié justifie avoir exposés pour les besoins de son activité professionnelle et dans l'intérêt de l'employeur doivent lui être remboursés sans qu'ils puissent être imputés sur la rémunération due ; que les clauses ayant pour finalité de faire supporter au salarié partie de ses frais professionnels ne sont valables que si elles prévoient le versement au salarié d'une somme fixée à l'avance de manière forfaitaire et d'un montant tel que la rémunération proprement dite du travail reste au moins égale au SMIC.
Considérant que la clause du contrat de travail conclu le 9 décembre 1994 prévoyant alors que le salarié est rémunéré sur la base du SMIC, l'intégration des frais dans les commissions , est illicite en ce qu'elle ne garantit pas un remboursement intégral des frais professionnels exposés et comporte le risque, pour les mois où ces frais seraient particulièrement élevés, de réduire la rémunération à un montant inférieur au SMIC de sorte que la demande de M. X..., auquel il ne peut être reproché de n'avoir pas conservé les justificatifs des frais exposés, est fondée en son principe. Considérant qu'il ressort des dispositions du contrat de travail conclu le 3 mars 2003 lequel est l'application individuelle de l'accord d'entreprise du 28 février 2003, que si les frais professionnels dépassent le montant forfaitaire de 230 euros, le surplus s'imputera sur le salaire ; que la rémunération étant le SMIC, il s'en infère que la rémunération réellement perçue par le salarié lui sera nécessairement inférieure ; Considérant que compte-tenu des exigences contractuelles, qui fixent à 16 le nombre de rendez-vous par semaine travaillée, les 11,5 euros par jour (230/20) d'indemnisation des frais engagés pour l'exercice de son activité professionnelle par le salarié, pour ses trajets, repas, péages, parkings, qu'offre le remboursement forfaitaire sont manifestement insuffisants, ainsi que cela ressort des pièces produites telles que les agendas prévisionnels, les bordereaux de visites, les récapitulatifs des déplacements. Qu'il s'ensuit qu'une partie des frais professionnels est en réalité supportée par Monsieur X..., entamant ainsi son salaire pour le ramener en dessous du SMIC.
Considérant que cette clause est également illicite au regard de l'article L 3211 -1 précité, et pas davantage que la précédente, elle ne peut être opposée au salarié.
Considérant que la société UFIFRANCE qui a inséré les clauses litigieuses dans le contrat de travail de Monsieur X..., les sachant illicites, puisqu'elles ont déjà été sanctionnées dans le passé, notamment par la cour de cassation dans un arrêt du 24 octobre 2001, dans la cause duquel l'intimée était partie, il se déduit de ces éléments que la mauvaise foi de la société UFIFRANCE est établie.
Considérant que cette société, pour tenter de se soustraire à ses obligations, est donc aujourd'hui mal venue de reprocher à Monsieur X... une prétendue insuffisance de preuve s'agissant des frais professionnels dont il réclame le paiement alors que la clause litigieuse illicite qu'elle lui a imposée, le dispensait par nature de produire tout justificatif; qu'en tout état de cause, les pièces précitées attestent de l'activité de Monsieur X..., tenu de se déplacer quotidiennement pour démarcher des clients qu'il rencontrait non à l'agence mais à leur domicile, ce qui l'obligeait à exposer des frais de déplacement, de téléphone mais aussi pour se restaurer hors de son domicile. Qu'en outre, aucun élément produit aux débats ne permet d'établir que les frais détaillés par le salarié n'ont pas été engagés dans l'intérêt de l'entreprise.
Considérant que compte-tenu des pièces produites aux débats, la cour a les éléments d'appréciation suffisants pour fixer à 25000 euros, déduction faite de l'indemnité forfaitaire de 230 euros payée depuis mars 2003 et toutes causes confondues, la somme que devra lui rembourser la société UFIFRANCE, sans que celle-ci puisse valablement lui opposer un quelconque abattement fiscal et social dont il aurait pu bénéficier.
Considérant que l'article L 242-1 du code de la sécurité sociale dispose que les sommes versées en contrepartie ou à l'occasion du travail sont soumises à cotisations à l'exclusion des sommes afférentes aux frais professionnels ; qu'il s'ensuit que les sommes allouées au salarié au titre du remboursement de ses frais professionnels doivent être exclues de l'assiette des cotisations.
Considérant que le jugement du conseil de prud'hommes de Paris sera infirmé en ces termes »

1. ALORS QUE les frais qu'un salarié justifie avoir exposés pour les besoins de son activité professionnelle et dans l'intérêt de l'employeur doivent être remboursés sans qu'ils puissent être imputés sur la rémunération qui lui est due, à moins qu'il n'ait été contractuellement prévu qu'il en conserverait la charge moyennant le versement d'une somme fixée à l'avance de manière forfaitaire et à la condition que la rémunération proprement dite du travail reste au moins égale au SMIC ; que, dès lors, la clause prévoyant un remboursement forfaitaire des frais professionnels moyennant le versement d'une somme fixée à l'avance n'est pas illicite, le salarié ayant seulement droit, dans l'hypothèse où ses frais seraient tels que sa rémunération réelle deviendrait inférieure au SMIC, qu'à un complément de salaire pour qu'elle atteigne le salaire minimum ; qu'en l'espèce, la Cour d'appel a elle-même constaté que le contrat de travail du 3 mars 2003 stipulait « Article 2-2 : la partie fixe, appelée également traitement de base, est constituée d'un salaire égal au SMIC majorée de la somme brute de 230 € correspondant au remboursement forfaitaire des frais professionnels ; Article 2-3 : les versements au titre de la partie variable (commissions) incluront une indemnité de 10 % correspondant à un complément de remboursement forfaitaire des frais professionnels. » ; qu'en condamnant l'employeur à rembourser l'intégralité des frais professionnels sollicités par le salarié, y compris pour la période postérieure au 3 mars 2003, au prétexte que les clauses susvisées auraient été illicites parce que les frais réels du salarié auraient été supérieurs au forfait prévu et la rémunération réellement perçue par le salarié inférieure au SMIC, la Cour d'appel a violé l'article L.3211-1 du Code du travail ;

2. ALORS QU'il résultait des propres constatations de l'arrêt attaqué que le contrat de travail initial de Monsieur X... avait été conclu en 1994, soit bien antérieurement à l'arrêt rendu par la Cour de cassation le 24 octobre 2001, ayant condamné la prise en charge forfaitaire des frais professionnels, sans détermination de montant ; qu'en affirmant néanmoins que la société a inséré les clauses litigieuses dans le contrat de travail de Monsieur X..., en les sachant illicites, pour en déduire sa mauvaise foi, la Cour d'appel n'a pas tiré les conséquences qui s'évinçaient de ses propres constatations en violation de l'article L1222-1 du Code du travail ;

3. ALORS QUE dans son arrêt rendu le 24 octobre 2001, la Cour de cassation s'est bornée à juger illicite la prise en charge forfaitaire des frais professionnels, sans détermination de montant, sans à aucun moment se prononcer sur la validité des clauses insérées en 2003 dans les contrats de travail en application de l'accord collectif du 28 février 2003 ; qu'en affirmant que la société a inséré les clauses litigieuses dans le contrat de travail de Monsieur X..., en les sachant illicites, pour en déduire sa mauvaise foi, la Cour d'appel a violé les articles L1222-1 du Code du travail et 1134 du Code civil ;

4. ALORS QU'il appartient au salarié qui prétend obtenir de remboursement de frais professionnels de rapporter la preuve de leur réalité et qu'il les a effectivement engagés dans l'intérêt de l'entreprise, peu important l'existence dans son contrat de travail d'une clause prétendument nulle prévoyant le remboursement forfaitaire des frais professionnels ; qu'en affirmant que la société était « mal venue de reprocher à Monsieur X... une prétendue insuffisance de preuve s'agissant des frais professionnels » au prétexte qu'elle aurait été de mauvaise foi et que « la clause litigieuse illicite qu'elle lui a imposée, le dispensait par nature de produire tout justificatif » et encore qu'« aucun élément produit aux débats ne permet d'établir que les frais détaillés par le salarié n'ont pas été engagés dans l'intérêt de l'entreprise », la Cour d'appel a inversé la charge de la preuve et violé l'article 1315 du Code civil ;

5. ALORS QU'il appartient au salarié qui prétend obtenir le remboursement de frais professionnels de rapporter la preuve de leur réalité ; qu'en faisant droit aux demandes du salarié au prétexte que les pièces versées aux débats « attestent de l'activité de Monsieur X..., tenu de se déplacer quotidiennement pour démarcher des clients qu'ils rencontraient non à l'agence mais à leur domicile, ce qui l'obligeait à exposer des frais de déplacement, de téléphone mais aussi à se restaurer hors de son domicile», sans dire en quoi ces pièces étaient de nature à justifier de l'existence de frais, de leur montant et du fait qu'ils avaient été engagés pour les besoins de l'activité professionnelle, la Cour d'Appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L.140-1 devenu L.3211-1 du Code du travail ;

6. ALORS ENFIN QUE la Cour d'appel a elle-même constaté (arrêt page 3) que le contrat de travail applicable à compter du 1er mars 2003 ne prévoyait pas simplement le paiement d'une somme de 230 euros au titre du remboursement forfaitaire de frais professionnels (article 2.2), mais encore (article 2.3 dernier alinéa) que « les versements au titre de la partie variable incluront une indemnité de 10 % correspondant à un complément de remboursement forfaitaire des frais professionnels » ; qu'en jugeant en l'espèce qu'il convenait de déduire de la somme due – selon elle – au titre des frais professionnels, les seuls 230 euros versés mensuellement par application de l'article 2.2 du contrat du travail, sans expliquer en quoi il n'y aurait pas eu lieu de déduire également 10 % de la rémunération variable, par application de l'article 2.3 du même contrat de travail, la Cour d'appel a derechef privé sa décision de base légale au regard de l'article L.140-1 devenu L.3211-1 du Code du travail.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné la SA UFIFRANCE PATRIMOINE à payer à Monsieur Fabrice X... 10 000 euros à titre de dommages et intérêts en application de l'article 1153 du code civil et 1500 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile

AUX MOTIFS QUE « Monsieur X... demande des dommages et intérêts en réparation des préjudices moral et matériel causés par le non remboursement des frais professionnels. La société UFIFRANCE conclut en contestant que l'intimé ait subi un préjudice distinct du simple retard dans le paiement de ces frais. Elle se prévaut, en outre, de sa bonne foi.
Considérant qu'il résulte des pièces produites aux débats, que Monsieur X... qui, sur son salaire égal au SMIC, a supporté des frais professionnels d'un montant non négligeable, que la société UFIFRANCE savait, de surcroît, lui devoir, a subi un préjudice distinct de celui engendré par le simple retard dans le remboursement des sommes dues.
Que compte tenu des éléments versés aux débats, la cour est en mesure d'évaluer le préjudice subi par Monsieur X... de ce chef à la somme de 10 000 euros. Que le jugement déféré sera également infirmé de ce chef »

ALORS QU'à peine de nullité, les jugements doivent être motivés ; qu'en se bornant, pour accorder au salarié des dommages et intérêts distincts des remboursements de frais alloués, à affirmer qu'il résulte des pièces produites aux débats, que Monsieur X... qui, sur son salaire égal au SMIC, a supporté des frais professionnels d'un montant non négligeable, que la société UFIFRANCE savait, de surcroît, lui devoir, a subi un préjudice distinct de celui engendré par le simple retard dans le remboursement des sommes dues, sans à aucun moment préciser en quoi consistait ce préjudice, la Cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné la SA UFIFRANCE PATRIMOINE à payer à Monsieur Fabrice X... 3742, 46 euros à titre d'indemnité de préavis, et 374, 24 euros à titre de congés payés afférents, 2412, 67 euros à titre d'indemnité de licenciement, 11 226 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de la rupture, et 1500 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile

AUX MOTIFS QUE « la prise d'acte de la rupture par le salarié en raison de faits qu'il reproche à son employeur entraîne la cessation immédiate du contrat de travail. Considérant qu'il appartient alors au juge de se prononcer sur la seule prise d'acte mais en prenant en considération l'ensemble des faits invoqués par le salarié, étant précisé que ceux ci doivent constituer des manquements suffisamment graves aux obligations de l'employeur pour justifier la rupture aux torts de ce dernier. Considérant que dans un tel cas la prise d'acte de rupture produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse ; que dans le cas contraire, la prise d'acte produit les effets d'une démission. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que l'employeur par l'insertion dans le contrat de travail du salarié de clauses ayant pour effet de le priver d'une partie de sa rémunération en lui faisant supporter des frais exposés pour les besoins de son activité professionnelle et dans l'intérêt de l'employeur constitue un manquement d'autant plus grave à ses obligations que, son attention ayant été attirée sur l'illicéité de la première clause, il a fait souscrire au salarié un nouveau contrat comportant toujours une clause illicite aboutissant aux mêmes conséquences préjudiciables aux droits du salarié.
Que ces faits justifiaient pleinement la prise d'acte de la rupture par le salarié de son contrat de travail aux torts de l'employeur.
Considérant que la prise d'acte de rupture produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, ce qui ouvre droit au salarié aux indemnités légales ou conventionnelles de rupture ainsi qu'à dommages et intérêts.
Considérant qu'il y a lieu d'allouer au salarié les sommes sollicitées par lui au titre des indemnités de préavis et de licenciement au demeurant non contestées dans leur montant par l'employeur, et qui sont conformes aux textes applicables et à ses droits.
Considérant qu'il y a lieu à application des dispositions de l'article L. 1235-3 du Code du travail et qu'eu égard à l'ancienneté du salarié, aux circonstances particulières de la rupture et aux justificatifs produits, la somme de 11 226 euros réparera justement le préjudice qu'il a subi »

ALORS QUE la cassation à intervenir sur le premier moyen de cassation, de la disposition de l'arrêt condamnant l'employeur à verser au salarié des remboursements de frais après avoir jugé illicites les clauses de remboursement forfaitaires de frais, entrainera par voie de conséquence la cassation de ce chef de dispositif, en application de l'article 624 du Code de procédure civile.Moyen produit au pourvoi incident par la SCP Delaporte, Briard et Trichet, avocat aux Conseils pour M. X....

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir déclaré prescrites les demandes de remboursement de frais de Monsieur X... pour la période antérieure au 10 juillet 2001 ;

AUX MOTIFS QUE « Qu'en application de l'article 2277 du Code civil se prescrivent par cinq ans les actions en paiement des salaires de même que celles tendant au remboursement de frais professionnels qui sont liés à l'exécution d'un travail salarié ,-que Monsieur X... qui ne justifie d'aucun acte interruptif de prescription entrant dans les prévisions de l'article 2244 du Code civil en deça de la date de saisine de la juridiction prud'homale, doit être déclaré irrecevable en son action tendant au remboursement de frais antérieurs au 10 juillet 2001 » (arrêt p. S, « 3èrne et 4'' al.) ;

Alors qu'il résulte de l'article 2248 du Code civil que la prescription est interrompue par la reconnaissance, même partielle, que le débiteur fait du droit de celui contre lequel il prescrivait ; n'en l 'espèce, la société Ufifrance a abandonné son système initial de remboursement de frais professionnels selon lequel le remboursement des frais était compris dans la rémunération et a mis en place en mars 2003 un nouveau mode de remboursement prévoyant l'attribution forfaitaire d'une somme de 230 E pour se conformer à la position prise par la Cour de cassation qui a considéré la clause d'origine illicite ; toue cette substitution vaut reconnaissance du droit des salariés à un remboursement des frais sur la base de ceux exposés et non par référence à une prétendue intégration au commissionnement; que dès lors en déclarant que le salarié ne justifiait d'aucun acte interruptif de prescription quand l'accord d'entreprise du 28 février 2003 valait reconnaissance par l'employeur du droit des salariés et donc interruption de la prescription de sorte que Monsieur X... était en droit de réclamer le remboursement des frais exposés pour la période antérieure au 10 juillet 2001, la Cour d'appel a violé l'article susvisé ;

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