Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 31 mai 2011, 09-71.350 09-71.504, Publié au bulletin
Cour de cassation - Chambre sociale
- N° de pourvoi : 09-71.350, 09-71.504
- Publié au bulletin
- Solution : Cassation partielle
- Président
- Mme Collomp
Texte intégral
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Vu leur connexité, joint les pourvois n° R 09-71.350 et G 09-71.504 ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été engagé par la Fédération nationale du crédit agricole le 28 janvier 2004, en qualité de directeur général ; que la Fédération applique la convention collective nationale des cadres de direction des caisses régionales du crédit agricole mutuel laquelle prévoit en son avenant du 17 avril 2003 la souscription d'une "retraite chapeau" ; que le salarié s'est vu notifier son licenciement le 25 janvier 2006 pour insuffisances dans l'accomplissement de ses fonctions ; que contestant la régularité et le bien fondé de la rupture, il a saisi la juridiction prud'homale aux fins de se voir allouer diverses sommes à titre de dommages et intérêts notamment pour licenciement abusif, perte de rémunération différée et respect d'une clause de non concurrence illicite ;
Sur les premier et second moyens du pourvoi de la Fédération nationale du crédit agricole :
Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur ces moyens qui ne sont pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
Sur le troisième moyen du pourvoi de M. X... :
Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur ce moyen qui n'est pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
Sur le premier moyen, pris en ses quatre premières branches, du pourvoi de M. X... :
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande en paiement de dommages-intérêts pour perte d'une chance de bénéficier d'une rémunération différée dite "retraite chapeau", alors, selon le moyen :
1°/ que l'avantage de la retraite chapeau dont bénéficient statutairement tous les bénéficiaires de la convention collective des cadres dirigeants de la FNCA constitue un avantage conventionnel accordé au salarié dès la conclusion de son contrat de travail ; qu'en l'espèce, en affirmant que la retraite complémentaire servie aux cadres dirigeants de la FNCA résulte de l'engagement unilatéral de celle-ci, quand celle-ci figure également sur le contrat de détachement et les bulletins de paie de M. X..., la cour d'appel a violé les articles L. 1221-1 et L. 2254-1 du code du travail et l'article 1134 du code civil ;
2°/ que dans ses conclusions délaissées, M. X... faisait valoir que le régime complémentaire des cadres de direction de la FNCA lui était individuellement acquis en application du statut conventionnel qui lui avait été remis lors de la conclusion de son contrat de travail, par un régime de rémunération différée , octroyée et financée par une dotation proportionnelle versée définitivement pour tous les bénéficiaires de la convention collective des cadres dirigeants, ce qui avait d'ailleurs conduit à un redressement fiscal de son employeur, précisément parce que la retraite chapeau constituait une rémunération différée acquise, ce que confirmaient les conclusions rapport ALTEDIA du 19 avril 2005 qui démontrait que ce régime de retraite était doté en 2009 de près d'un milliard d'euros qu'il était un complément de rémunération, spécifique à la FNCA et aux caisses régionales de crédit agricole CRCA et le fait que, nonobstant la rupture de leur contrat de travail, les cadres dirigeants de CRCA qui intégraient des entreprises du groupe CASA, non couvertes par cette convention collective, conservaient au titre de leurs droits acquis le bénéfice de ce régime qu'en omettant de répondre à ce moyen pertinent démontrant que la FNCA versait définitivement un complément de retraite correspondant au pourcentage de la rémunération de chaque cadre dirigeant, ce qui constituait une rémunération différée acquise à chacun de ces salariés, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
3°/ que la perte, du fait de l'employeur, des droits acquis dans le régime de retraite chapeau donne nécessairement lieu à une indemnisation du salarié correspondant à son temps de présence dans l'entreprise, peu important que son éviction soit intervenue avant la liquidation de ses droits à retraite ; que la cour d'appel, qui a rejeté la demande d'indemnisation de M. X... au titre de ses droits acquis dans le régime de retraite chapeau, après avoir qualifié ce régime d'avantage différé, ce dont il résultait que le salarié avait acquis une quote-part de droits à retraite chapeau, au cours de sa carrière au sein de la FNCA, dont la perte devait donner lieu à une indemnisation, n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, violant ensemble les articles 1134 du code civil, L. 911-1 et L. 913-2 du code de la sécurité sociale ;
4°/ que dans ses conclusions délaissées, M. X... avait fait valoir que la retraite chapeau constitue une rémunération différée acquise au salarié et qui reste due après la rupture du contrat de travail, au sens de l'article 141 CE (ancien article 119 du Traité CE) et de l'article 1er de la Directive 75/117, ainsi que l'a jugé la Cour de justice des communautés européennes en retenant qu'une pension d'entreprise, même versée après la cessation de la relation de travail, constitue une rémunération différée ; qu'en l'espèce, la retraite chapeau de la FNCA, qui n'est pas un régime de substitution, mais un complément du régime légal et conventionnel externe, constitue une rémunération différée acquise ; qu'en s'abstenant de répondre à ce moyen pertinent, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
Mais attendu qu'abstraction faite du motif erroné mais surabondant critiqué par la première branche du moyen, la cour d'appel a fait ressortir que l'accord du 17 avril 2003 mettait en place un régime de retraite à prestations définies, en ce qu'il avait pour objet de procurer à une catégorie de salariés, en contrepartie d'un travail accompli au service de l'employeur, un avantage consistant en la garantie, sous condition de leur présence dans l'entreprise jusqu'à l'âge de la retraite, du versement d'un complément de pension de retraite qui ne pouvait être individualisé qu'au moment de son règlement ; qu'elle en a exactement déduit que ce régime ne conférait au salarié aucun droit acquis à bénéficier d'une quote-part de la pension en cas de rupture de son contrat de travail avant l'âge de la retraite ; que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le premier moyen, pris en sa cinquième branche, du pourvoi de M. X... :
Vu les articles 1134 et 1147 du code civil ;
Attendu que pour débouter M. X... de sa demande de dommages-intérêts pour perte d'une rémunération différée, l'arrêt retient que la retraite complémentaire servie aux cadres dirigeants de la Fédération nationale du crédit agricole lors de leur départ en retraite après 15 années de service, résulte de l'engagement unilatéral de l'employeur qui verse les cotisations, que M. X... ayant une ancienneté de moins de deux ans dans l'entreprise ne saurait prétendre avoir perdu, du fait de son licenciement, la chance de bénéficier de cet avantage différé ;
Qu'en statuant ainsi, alors que la perte d'une chance de pouvoir bénéficier un jour de l'avantage de retraite applicable dans l'entreprise constitue un préjudice qui doit être réparé, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
Et sur le deuxième moyen du pourvoi de M. X... :
Vu l'article 14 de la convention collective des cadres de direction de la caisse du crédit agricole mutuel ;
Attendu que pour rejeter la demande de dommages-intérêts de M. X... au titre du respect d'une clause de non concurrence illicite, l'arrêt retient que l'application de l'article 14 de la convention collective qui soumet le cadre de direction à une obligation de non concurrence pour une durée de deux années étant subordonnée à la volonté de l'employeur de s'en prévaloir et à l'envoi préalable d'une mise en demeure, le salarié ne peut soutenir qu'elle lui a été imposée sans contrepartie pécuniaire ;
Attendu cependant que selon l'article 14, alinéa 1er de la convention collective des cadres de direction de la caisse de crédit agricole mutuel, au cas où un cadre de direction viendrait à quitter la caisse régionale par suite de démission, mise à la retraite, licenciement ou pour toute autre cause, il s'engage pour une durée de deux années à compter du jour de son départ, à n'exercer au service de sociétés particulières, établissements, organismes ou entreprises quelconques effectuant des opérations de banque, crédit, épargne, prêt, escompte, placement de titres, aucune activité professionnelle dans la circonscription de la caisse régionale et les départements limitrophes ;
Qu'en statuant comme elle l'a fait la cour d'appel, qui a ajouté à la convention une condition d'application qu'elle ne prévoit pas, a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déboute M. X... de ses demandes de dommages-intérêts au titre de la perte de chance de bénéficier d'une "retraite chapeau" et de la clause de non-concurrence, l'arrêt rendu le 24 septembre 2009, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;
Condamne la Fédération nationale du crédit agricole aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la Fédération nationale du crédit agricole à payer à M. X... la somme de 2 500 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du trente et un mai deux mille onze.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt
Moyens produits au pourvoi n° R 09-71.350 par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils pour la Fédération nationale du crédit agricole.
PREMIER MOYEN DE CASSATION
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR condamné la FNCA à payer à Monsieur X... 80.000 à titre de dommages et intérêts pour licenciement abusif, et 3.000 en application de l'article 700 du Code de procédure civile,
AUX MOTIFS QU'aux termes de sa lettre du 25 janvier 2006, la FEDERATION NATIONALE DU CREDIT AGRICOLE fonde le licenciement de Jean-Yves X... sur une insuffisance professionnelle caractérisée par un manque d'écoute, un manque de souplesse et des difficultés managériales ; que plusieurs attestations de collaborateurs se plaignent d'un comportement autoritaire du directeur général et du fait qu'il les ignorait, ne tenait pas compte de leurs suggestions ou de leur expérience ou les plaçait dans une situation inconfortable ; que cependant, un tel comportement n' est pas apparu subitement et pouvait aisément être détecté par l'employeur pendant la période d'essai du salarié qui a duré une année, jusqu'au 16 février 2005 ; que dans la mesure où ce comportement n'a pas semblé incompatible avec l'exercice des fonctions de directeur général pendant un an, il apparaît que les attestations versées aux débats qui ne sont pas exemptes de susceptibilités personnelles révèlent des faits, pour la plupart non datés, qui ne sont pas de nature à caractériser une insuffisance professionnelle ; que les difficultés managériales qui sont reprochées par ailleurs à Jean-Yves X... procèdent en partie du manque d'écoute et de souplesse développé dans les deux premières pages de la lettre de licenciement ; que pour le surplus, elles visent la concentration de son activité sur certains dossiers plutôt que d'autres, la délégation de ses tâches à des collaborateurs et ses relations distantes avec les dirigeants des caisses régionales ; qu'en qualité de directeur général, Jean-Yves X... devait diriger les services de la FNCA sous le contrôle et l'autorité du bureau fédéral ; qu'il n'est pas établi que ce dernier lui ait donné des directives, des priorités ou des délais ou lui ait adressé des observations sur son management ; que certains griefs paraissent contradictoires, telle la délégation de ses tâches à des collaborateurs qu'il lui est reproché par ailleurs de mépriser, tel l'envoi à la Commission Européenne d'une plainte dont les dirigeants élus de la FNCA étaient les signataires, ou telle encore, la collaboration directe de ses collaborateurs avec le secrétaire général alors que d'autres collaborateurs se sont dits mal à l'aise en constatant qu'à certaines occasions, il passait outre l'ordre hiérarchique ; que la mauvaise qualité de ses relations avec les dirigeants des caisses régionales n'a pas été démontrée ; que dans ces conditions, il apparaît que le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse ;
1. ALORS QUE seule la persistance, sur une période suffisamment longue, d'un comportement managérial inadapté, peut permettre de caractériser une insuffisance professionnelle ; qu'en se bornant à affirmer que si plusieurs attestations de collaborateurs se plaignaient d'un comportement autoritaire du directeur général et du fait qu'il les ignorait, ne tenait pas compte de leurs suggestions ou de leur expérience ou les plaçait dans une situation inconfortable, un tel comportement n'était pas apparu subitement, qu'il pouvait aisément être détecté par l'employeur pendant la période d'essai d'un an et que dans la mesure où ce comportement n'avait pas semblé incompatible avec l'exercice des fonctions de directeur général pendant un an, lesdites attestations n'étaient pas de nature à caractériser une insuffisance professionnelle, sans rechercher si ce n'était pas la persistance sur une période assez longue d'un comportement autoritaire et d'un manque de respect qui avait permis aux supérieurs de Monsieur X... de s'apercevoir de son insuffisance professionnelle, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1232-1 du Code du travail ;
2. ALORS en outre QUE l'employeur soulignait que la décision de mettre fin au contrat de travail de Monsieur X... avait été provoquée par l'initiative prise par Monsieur X..., le 4 novembre 2005, soit à peine trois semaines avant le bureau de la FNCA devant approuver le budget 2006, de demander à deux avocats, conseils extérieurs choisis par lui, de refondre sous quinzaine l'architecture dudit budget, dont la préparation nécessitait pourtant chaque année des mois de préparation minutieuse, une telle initiative ayant provoqué une très vive préoccupation au sein de la Fédération (conclusions d'appel, p. 26) ; qu'en retenant que le comportement de Monsieur X... n'était pas apparu subitement, qu'il pouvait aisément être détecté par l'employeur pendant la période d'essai d'un an et que dans la mesure où ce comportement n'avait pas semblé incompatible avec l'exercice des fonctions de directeur général pendant un an, il n'était pas de nature à caractériser une insuffisance professionnelle, sans rechercher si ce n'était pas le fait survenu le 4 novembre 2005, qui, ajouté au comportement antérieur du salarié à l'égard de ses collaborateurs, avait conduit l'employeur à décider de le licencier, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1232-1 du Code du travail ;
3. ALORS QU'il était notamment reproché à Monsieur X..., directeur général, de s'être focalisé sur un seul dossier (celui de la Banque Postale et du livret A), au détriment des autres grands dossiers qui lui étaient confiés ; qu'en se bornant à affirmer, pour écarter ce grief, qu'en qualité de directeur général, Jean-Yves X... devait diriger les services de la FNCA sous le contrôle et l'autorité du bureau fédéral et qu'il n'est pas établi que ce dernier lui ait donné des directives, des priorités ou des délais ou lui ait adressé des observations sur son management, quand l'absence de directives ne dispensait pas Monsieur X... de gérer l'ensemble des dossiers relevant de ses fonctions, la cour d'appel a statué par un motif inopérant et privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1232-1 du Code du travail ;
4. ALORS QUE le juge a l'interdiction de dénaturer les documents de la cause ; qu'en l'espèce, la lettre de licenciement reprochait à Monsieur X... non pas d'avoir envoyé à la Commission Européenne une plainte dont les dirigeants élus de la FNCA étaient les signataires mais d'avoir réactivé cette plainte sans en informer les dirigeants signataires ; qu'en retenant à l'appui de sa décision qu'il était contradictoire de reprocher au salarié l'envoi à la Commission Européenne d'une plainte dont les dirigeants élus de la FNCA étaient les signataires, la cour d'appel a dénaturé la lettre de licenciement et violé le principe susvisé.
SECOND MOYEN DE CASSATION
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR condamné la FNCA à payer à Monsieur X... 20.000 à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice consécutif à la divulgation du licenciement, et 3.000 en application de l'article 700 du Code de procédure civile,
AUX MOTIFS QUE l'information du licenciement de Jean-Yves X... parue dans le journal spécialisé « La Tribune » le lendemain de l'envoi de la lettre de licenciement n'a été permise que grâce à une carence de l'employeur pour conserver la confidentialité de cette mesure pendant un délai décent ; que la divulgation de cette information le jour même où l'intéressé recevait sa lettre de licenciement lui a causé un préjudice certain en réparation duquel une indemnité de 20 000 lui sera allouée ;
1. ALORS QUE les juges du fond sont tenus de préciser l'origine des renseignements qui ont servi à motiver leur décision ; qu'en l'espèce, l'exposante faisait valoir que l'information parue dans le journal « La Tribune » le lendemain de l'envoi de la lettre de licenciement n'était aucunement de son fait (conclusions d'appel, p. 29) ; qu'en affirmant que l'information du licenciement de Jean-Yves X... parue dans le journal spécialisé « La Tribune » le lendemain de l'envoi de la lettre de licenciement n'avait été permise que grâce à une carence de l'employeur pour conserver la confidentialité de cette mesure pendant un délai décent, sans préciser d'où elle tirait cette affirmation, la cour d'appel a méconnu les exigences de l'article 455 du Code de procédure civile ;
2. ALORS en outre QU'en se bornant à affirmer que la divulgation de cette information le jour même où l'intéressé recevait sa lettre de licenciement lui avait causé un préjudice certain en réparation duquel une indemnité de 20 000 lui serait allouée, sans préciser en quoi ce préjudice pouvait consister, la cour d'appel a derechef violé l'article du Code de procédure civile.
Moyens produits au pourvoi n° G 09-71.504 par la SCP Coutard, Mayer et Munier-Apaire, avocat aux Conseils pour M. X....
PREMIER MOYEN DE CASSATION
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté Monsieur X... de sa demande en paiement de dommages et intérêts pour perte d'une chance de bénéficier d'une rémunération différée « retraite chapeau » ;
AUX MOTIFS QUE la retraite complémentaire servie aux cadres dirigeants de la FEDERATION NATIONALE DU CREDIT AGRICOLE lors de leur départ en retraite après 15 années de service résulte de l'engagement unilatéral de celle-ci et de son financement exclusif des cotisations ; qu'elle ne relève pas des caisses mentionnées dans le contrat de travail de Jean-Yves X... ; que celui-ci ayant une ancienneté de moins de deux ans ne saurait prétendre avoir perdu, du fait de son licenciement, la chance de bénéficier de cet avantage différé ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES DES PREMIERS JUGES QUE, en premier lieu, le Conseil n'a pas jugé le licenciement de Monsieur X... dénué, sur le fond, de cause réelle et sérieuse, mais a jugé que seule la rédaction de la lettre de licenciement rendait sur la forme, celui-ci, abusif
En second lieu, que Monsieur X... prétend avoir perdu le bénéfice d'une rémunération différée prévue contractuellement et qui a été un élément décisionnel dans son choix d'accepter le poste à la Fédération Nationale du Crédit Agricole, mais sans apporter le moindre élément à l'appui de ses prétentions.
Pour sa part et sur ce point que la Fédération Nationale du Crédit Agricole produit le contrat de travail de Monsieur X... ; qu'il n'est pas contesté que ce contrat est dûment signé par Monsieur X... ; qu'il est incontestable que la seule rémunération différée y figurant est le versement d'un treizième mois en décembre et qu'aucune mention n'y est portée quant au bénéfice d'un régime de retraite « chapeau ».
En troisième lieu, qu'il n'est pas contesté que pour bénéficier de la retraite complémentaire, le cadre de direction doit justifier d'une part d'être présent dans l'entreprise au jour de départ en retraite et d'autre part de quinze années d'ancienneté sous statut cadre de direction ; qu'il n'est pas non plus contesté que Monsieur X... bénéficiait de moins de deux ans d'ancienneté.
En quatrième lieu, que Monsieur X... n'apporte aucun élément de nature à justifier qu'aucun événement de quelque nature que ce soit n'aurait pu le priver de cette retraite complémentaire, qu'il aurait ainsi pu acquérir ces quinze années de service à la Fédération Nationale du Crédit Agricole.
Enfin, que Monsieur X... ne justifie pas d'avoir démissionné du Conseil d'Etat, ni perdu tout emploi du fait de son licenciement, pas plus qu'il ne justifie qu'il n'aurait pas demandé, avant le terme de ces quinze années, sa réintégration dans son corps d'origine, pas plus qu'il ne peut justifier par quel moyen il serait sûr d'atteindre l'âge de la retraite.
Dans ces conditions, que le présent Conseil est bien fondé à débouter de sa demande de dommages et intérêts pour perte de chance.
ALORS, D'UNE PART, QUE l'avantage de la « retraite chapeau » dont bénéficient statutairement tous les bénéficiaires de la convention collective des cadres dirigeants de la FNCA constitue un avantage conventionnel accordé au salarié dès la conclusion de son contrat de travail ; qu'en l'espèce, en affirmant que la retraite complémentaire servie aux cadres dirigeants de la FNCA résulte de l'engagement unilatéral de celle-ci, quand celle-ci figure également sur le contrat de détachement et les bulletins de paie de Monsieur X..., la cour d'appel a violé les articles L 1221-1 et L 2254-1 du code du travail et l'article 1134 du code civil.
ALORS, D'AUTRE PART, QUE dans ses conclusions délaissées, Monsieur X... faisait valoir que le régime complémentaire des cadres de direction de la FNCA lui était individuellement acquis en application du statut conventionnel qui lui avait été remis lors de la conclusion de son contrat de travail (p. 47), par un régime de rémunération différée (p. 43), octroyée et financée par une dotation proportionnelle versée définitivement pour tous les bénéficiaires de la convention collective des cadres dirigeants (p. 47 et 48), ce qui avait d'ailleurs conduit à un redressement fiscal de son employeur, précisément parce que la retraite chapeau constituait une rémunération différée acquise (p. 45 et 46), ce que confirmaient les conclusions rapport ALTEDIA du 19 avril 2005 (p. 48) qui démontrait que ce régime de retraite était doté en 2009 de près d'un milliard d'euros (p. 44) qu'il était un complément de rémunération, spécifique à la FNCA et aux caisses régionales de Crédit agricole CRCA (p. 44, p. 49 et 50) et le fait que, nonobstant la rupture de leur contrat de travail, les cadres dirigeants de CRCA qui intégraient des entreprises du groupe « côté CASA », non couvertes par cette convention collective, conservaient au titre de leurs droits acquis le bénéfice de ce régime (p 45 et48) qu'en omettant de répondre à ce moyen pertinent démontrant que la FNCA versait définitivement un complément de retraite correspondant au pourcentage de la rémunération de chaque cadre dirigeant, ce qui constituait une rémunération différée acquise à chacun de ces salariés, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.
ALORS, AUSSI, QUE la perte, du fait de l'employeur, des droits acquis dans le régime de retraite chapeau donne nécessairement lieu à une indemnisation du salarié correspondant à son temps de présence dans l'entreprise, peu important que son éviction soit intervenue avant la liquidation de ses droits à retraite ; que la cour d'appel, qui a rejeté la demande d'indemnisation de Monsieur X... au titre de ses droits acquis dans le régime de retraite chapeau, après avoir qualifié ce régime d' « avantage différé », ce dont il résultait que le salarié avait acquis une quote-part de droits à retraite chapeau, au cours de sa carrière au sein de la FNCA, dont la perte devait donner lieu à une indemnisation, n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, violant ensemble les articles 1134 du Code civil, L 911-1 et L 913-2 du Code de la sécurité sociale.
ALORS, ENCORE, QUE dans ses conclusions délaissées, Monsieur X... avait fait valoir que la retraite chapeau constitue une rémunération différée acquise au salarié et qui reste due après la rupture du contrat de travail, au sens de l'article 141 CE (ancien article 119 du Traité CE) et de l'article 1er de la Directive 75/117, ainsi que l'a jugé la Cour de justice des communautés européennes en retenant qu'une « pension d'entreprise », même versée après la cessation de la relation de travail, constitue une « rémunération » différée ; qu'en l'espèce, la retraite chapeau de la FNCA, qui n'est pas un régime de substitution, mais un complément du régime légal et conventionnel externe, constitue une rémunération différée acquise (p. 43 et 44) ; qu'en s'abstenant de répondre à ce moyen pertinent, la cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile ;
ALORS, ENFIN et SUBSIDIAIREMENT QUE le salarié qui ne peut, du fait de son licenciement prononcé sans cause réelle et sérieuse, bénéficier de la retraite chapeau applicable dans l'entreprise, subit nécessairement un préjudice qui doit être réparé ; qu'en rejetant la demande de Monsieur X... en paiement de dommages et intérêts pour perte d'une chance de bénéficier de la retraite chapeau aux motifs inopérants que « le salarié doit être présent dans l'entreprise lors du départ en retraite et qu'ayant une ancienneté de moins de deux ans (il) ne saurait prétendre avoir perdu, du fait de son licenciement, la chance de bénéficier de cet avantage différé », quand elle avait exactement retenu que « le licenciement de Monsieur X... était dépourvu de cause réelle et sérieuse », ce dont il résultait que cette perte de chance était suffisamment sérieuse pour donner lieu à une indemnisation, la Cour d'appel de Paris, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé les articles 1134 et 1147 du code civil outre l'article L 1235-3 du code du travail.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR rejeté la demande de Monsieur X... en paiement de dommages et intérêts pour respect d'une clause de non-concurrence illicite ;
AUX MOTIFS QUE l'article 14 de la convention collective des cadres de direction de la Caisse Régionale du Crédit Agricole Mutuel contient une clause de non-concurrence aux termes de laquelle le cadre de direction venant à quitter la caisse régionale s'engage, pour une durée de deux années, à n'exercer au service de sociétés particulières effectuant des opérations de banque, crédit, épargne, aucune activité professionnelle dans la circonscription de la caisse régionale et les départements limitrophes et ce, à peine de dommages-intérêts forfaitairement évalués après notification d'avoir à cesser l'activité en cause que le respect de cette disposition étant subordonné à la volonté de l'employeur de s'en prévaloir et à l'envoi préalable d'une mise en demeure, Jean-Yves X... ne peut soutenir qu'elle lui a été imposée sans contrepartie ;
ALORS, DUNE PART, QUE l'obligation de non-concurrence mise à la charge d'un salarié par une convention collective lui est opposable, en l'absence de mention dans le contrat de travail, dès lors qu'il a été informé de l'existence de la convention collective et mis en mesure d'en prendre connaissance ; qu'en excluant le caractère impératif de la clause conventionnelle de non-concurrence issue de l'article 14 de la convention collective des cadres de direction de la Caisse Régionale du Crédit Agricole Mutuel, auquel Monsieur X... s'était conformé, aux motifs que « le respect de cette disposition éta i t subordonné à la volonté de l'employeur de s'en prévaloir et à l'envoi préalable d'une mise en demeure », la Cour d'appel de Paris, qui a ajouté une condition d'application non prévue par la convention collective, a violé l'article susvisé.
ALORS, D'AUTRE PART, et subsidiairement, QU'en se bornant à affirmer que « le respect de cette disposition est subordonné à la volonté de l'employeur de s'en prévaloir et à l'envoi préalable d'une mise en demeure », sans cependant justifier sa décision, ni préciser la source de ces conditions réputées permettre l'application de l'obligation de non-concurrence litigieuse, la Cour d'appel de Paris a entaché sa décision d'une insuffisance de motifs, violant ainsi l'article 455 du Code de procédure civile.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR rejeté la demande de Monsieur X... en paiement d'un rappel de gratification au titre de l'année 2005 et de congés payés y afférents ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE Jean-Yves X... a reçu la gratification annuelle minimale correspondant à trois mois de salaire ; qu'ainsi que l'a justement relevé le Conseil de prud'hommes, aucun élément ne justifie qu'il pouvait prétendre à une prime supérieure ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE Monsieur X... revendique un complément de prime au motif qu'il aurait attribué à ses collaborateurs ayant atteint leurs objectifs une prime de 4,5 mois de salaire, alors qu'il n'aurait lui-même perçu que 3 mois ; qu'à part l'affirmer, Monsieur X... ne rapporte aucun élément permettant de justifier qu'il pouvait prétendre à une prime supérieure ; que pour sa part, la FEDERATION NATIONALE DU CREDIT AGRICOLE justifie qu'elle a respecté les termes du contrat de travail de Monsieur X... prévoyant une prime minimum de trois mois ; que dans ces conditions, le présent Conseil sera bien fondé à débouter Monsieur X... de sa demande sur ce point ;
ALORS QUE les juges du fond ne peuvent accueillir ou rejeter les demandes dont ils sont saisis sans examiner tous les éléments de preuve qui leur sont fournis par les parties au soutien de leurs prétentions ; qu'en se bornant à affirmer qu'a aucun élément ne justifie qu 'il pouvait prétendre à une prime supérieure », quand Monsieur X... avait versé aux débats les comptes rendus du Bureau Fédéral de la FNCA des mois de janvier 2005 à décembre 2005 ainsi que le relevé de décision du Bureau Fédéral du 5 janvier 2006 (pièce n°51), lesquels attestaient qu'il avait réalisé les cinq priorités mises à sa charge pour l'année 2005, de sorte qu'il pouvait prétendre à la gratification maximale de 4,5 mois, la Cour d'appel de Paris a violé les dispositions de l'article 455 du Code de procédure civile.