Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 3 mai 2011, 09-68.297, Inédit
Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 3 mai 2011, 09-68.297, Inédit
Cour de cassation - Chambre sociale
- N° de pourvoi : 09-68.297
- Non publié au bulletin
- Solution : Cassation
Audience publique du mardi 03 mai 2011
Décision attaquée : Conseil de prud'hommes de Toulouse, du 07 mai 2009- Président
- Mme Collomp (président)
Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Vu l'article L. 2511-1 du code du travail ;
Attendu que constitue une mesure discriminatoire l'attribution aux seuls salariés non grévistes d'une prime exceptionnelle ne correspondant pas à un surcroît de travail ;
Attendu, selon le jugement attaqué, que M. X... a participé du 21 au 23 juin 2007 à une grève ayant eu lieu au sein de la société Les courriers de la Garonne ; qu'ayant appris que l'employeur avait versé une prime exceptionnelle aux salariés non-grévistes, il a saisi la juridiction prud'homale motif pris de l'attribution discriminatoire d'une telle prime ;
Attendu que pour débouter le salarié de ses demandes, le jugement retient que la prime était destinée à compenser les conditions de travail pénibles des salariés pendant le mouvement social liées notamment à la nervosité des usagers du service de transport assuré par l'employeur ;
Qu'en statuant ainsi, sans caractériser un surcroît de travail des salariés n'ayant pas participé au mouvement de grève, le conseil des prud'hommes a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, le jugement rendu le 7 mai 2009, entre les parties, par le conseil de prud'hommes de Toulouse ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit jugement et, pour être fait droit, les renvoie devant le conseil de prud'hommes de Saint-Gaudens ;
Condamne la société Les Courriers de la Garonne aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Les Courriers de la Garonne à payer à M. X... une somme de 2 500 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite du jugement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du trois mai deux mille onze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt
Moyen produit par Me Le Prado, avocat aux Conseils pour M. X....
Le moyen reproche au jugement attaqué ;
D'AVOIR débouté le salarié de sa demande formulée au titre d'un rappel de prime et de dommages et intérêts pour mesure discriminatoire ;
AUX MOTIFS QU' « il apparaît que du 21 au 23 juin 2007, un mouvement social a eu lieu au sein de la SAS Les Courriers de la Garonne. La régularité de ce mouvement social qui avait bien fait l'objet d'un préavis n'est nullement contestée. Il est soutenu par le demandeur que l'employeur a consenti aux salariés non grévistes une prime exceptionnelle qui constituerait une mesure de discrimination prohibée. Il résulte des dispositions de l'article L. 2511-1 du Code du travail que l'exercice du droit de grève ne peut donner lieu à aucune mesure discriminatoire notamment en matière de rémunération et d'avantages sociaux. En l'espèce, il est question d'une prime exceptionnelle dont le caractère exceptionnel n'est d'ailleurs pas discuté et qui n'obéissait donc pas à un usage. Or s'il est constant qu'une prime spéciale ne peut être attribuée en récompense du refus de certains salariés de se joindre au mouvement social, l'employeur peut en revanche rétribuer le surcroît d'activité assumé par les salariés non grévistes. En l'espèce, il résulte des documents produits et notamment de la réponse faite par l'employeur aux représentants du personnel que la prime était destinée à compenser les conditions de travail pénibles des salariés pendant le mouvement social. L'employeur justifie d'ailleurs par deux attestations de ces conditions de travail plus difficiles liées notamment à la nervosité des usagers du service de transport assuré par l'employeur. Indépendamment de la question du temps de travail qui n'est pas en débat en l'espèce, la pénibilité accrue du travail démontrée par l'employeur pouvait justifier de sa part l'attribution d'une prime d'un montant d'ailleurs non équivalent pour tous les salariés, et ce, sans contrevenir aux dispositions de l'article L.2511-1 du Code du travail. Les demandes de prime et de dommages et intérêts sont donc mal fondées ».
ALORS QU'aux termes de l'article L. 2511-1 du Code du travail, l'exercice du droit de grève ne peut donner lieu de la part de l'employeur à des mesures discriminatoires en matière de rémunération et d'avantages sociaux ; que l'employeur ne peut pas établir une discrimination en matière de rémunération entre salariés fondée sur leur participation, ou leur non participation à la grève ; qu'en l'espèce, l'employeur a accordé après le mouvement social intervenu les 21, 22 et 23 juin 2007, dont la régularité n'était pas contestée, une prime exceptionnelle aux salariés non grévistes aux motifs que cette prime venait compenser leurs conditions de travail pénibles durant la grève car ils avaient été confrontés à la pression de leurs collègues grévistes, aux réclamations des clients et des donneurs d'ordre ; qu'il s'en évinçait que, sous couvert d'une prime exceptionnelle, l'employeur avait, en réalité, et de manière déguisée, accordé aux salariés non grévistes un avantage supplémentaire pour les récompenser de leur non participation à la grève, de sorte que la prime litigieuse revêtait nécessairement un caractère discriminatoire ; qu'en décidant le contraire, le Conseil de Prud'hommes a violé l'article L. 2511-1 du Code du travail.
ET ALORS A TITRE SUBSIDIAIRE QU'à supposer même que l'employeur puisse accorder une gratification particulière aux salariés non grévistes, c'est à la condition de justifier d'un surcroît de travail tiré de ce que la quantité des tâches demandée au personnel non gréviste pendant la période de grève, a été plus importante qu'à l'accoutumée; qu'il appartient aux juges du fond de caractériser le surcroît d'activité; que pour dire que la prime litigieuse, versée aux seuls salariés non grévistes, ne revêtait pas un caractère discriminatoire, le Conseil de Prud'hommes s'est borné à affirmer qu'il résultait des documents produits, et notamment de la réponse faite par l'employeur aux représentants du personnel que la prime était destinée à compenser les conditions de travail pénibles des salariés pendant le mouvement social, liées notamment à la nervosité des usagers ; qu'en statuant par des motifs impropres à caractériser un surcroît d'activité auquel aurait été confronté les salariés non grévistes, le Conseil de Prud'hommes a privé sa décision de toute base légale au regard de l'article L. 2511-1 du Code du travail.
Sur le moyen unique :
Vu l'article L. 2511-1 du code du travail ;
Attendu que constitue une mesure discriminatoire l'attribution aux seuls salariés non grévistes d'une prime exceptionnelle ne correspondant pas à un surcroît de travail ;
Attendu, selon le jugement attaqué, que M. X... a participé du 21 au 23 juin 2007 à une grève ayant eu lieu au sein de la société Les courriers de la Garonne ; qu'ayant appris que l'employeur avait versé une prime exceptionnelle aux salariés non-grévistes, il a saisi la juridiction prud'homale motif pris de l'attribution discriminatoire d'une telle prime ;
Attendu que pour débouter le salarié de ses demandes, le jugement retient que la prime était destinée à compenser les conditions de travail pénibles des salariés pendant le mouvement social liées notamment à la nervosité des usagers du service de transport assuré par l'employeur ;
Qu'en statuant ainsi, sans caractériser un surcroît de travail des salariés n'ayant pas participé au mouvement de grève, le conseil des prud'hommes a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, le jugement rendu le 7 mai 2009, entre les parties, par le conseil de prud'hommes de Toulouse ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit jugement et, pour être fait droit, les renvoie devant le conseil de prud'hommes de Saint-Gaudens ;
Condamne la société Les Courriers de la Garonne aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Les Courriers de la Garonne à payer à M. X... une somme de 2 500 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite du jugement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du trois mai deux mille onze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt
Moyen produit par Me Le Prado, avocat aux Conseils pour M. X....
Le moyen reproche au jugement attaqué ;
D'AVOIR débouté le salarié de sa demande formulée au titre d'un rappel de prime et de dommages et intérêts pour mesure discriminatoire ;
AUX MOTIFS QU' « il apparaît que du 21 au 23 juin 2007, un mouvement social a eu lieu au sein de la SAS Les Courriers de la Garonne. La régularité de ce mouvement social qui avait bien fait l'objet d'un préavis n'est nullement contestée. Il est soutenu par le demandeur que l'employeur a consenti aux salariés non grévistes une prime exceptionnelle qui constituerait une mesure de discrimination prohibée. Il résulte des dispositions de l'article L. 2511-1 du Code du travail que l'exercice du droit de grève ne peut donner lieu à aucune mesure discriminatoire notamment en matière de rémunération et d'avantages sociaux. En l'espèce, il est question d'une prime exceptionnelle dont le caractère exceptionnel n'est d'ailleurs pas discuté et qui n'obéissait donc pas à un usage. Or s'il est constant qu'une prime spéciale ne peut être attribuée en récompense du refus de certains salariés de se joindre au mouvement social, l'employeur peut en revanche rétribuer le surcroît d'activité assumé par les salariés non grévistes. En l'espèce, il résulte des documents produits et notamment de la réponse faite par l'employeur aux représentants du personnel que la prime était destinée à compenser les conditions de travail pénibles des salariés pendant le mouvement social. L'employeur justifie d'ailleurs par deux attestations de ces conditions de travail plus difficiles liées notamment à la nervosité des usagers du service de transport assuré par l'employeur. Indépendamment de la question du temps de travail qui n'est pas en débat en l'espèce, la pénibilité accrue du travail démontrée par l'employeur pouvait justifier de sa part l'attribution d'une prime d'un montant d'ailleurs non équivalent pour tous les salariés, et ce, sans contrevenir aux dispositions de l'article L.2511-1 du Code du travail. Les demandes de prime et de dommages et intérêts sont donc mal fondées ».
ALORS QU'aux termes de l'article L. 2511-1 du Code du travail, l'exercice du droit de grève ne peut donner lieu de la part de l'employeur à des mesures discriminatoires en matière de rémunération et d'avantages sociaux ; que l'employeur ne peut pas établir une discrimination en matière de rémunération entre salariés fondée sur leur participation, ou leur non participation à la grève ; qu'en l'espèce, l'employeur a accordé après le mouvement social intervenu les 21, 22 et 23 juin 2007, dont la régularité n'était pas contestée, une prime exceptionnelle aux salariés non grévistes aux motifs que cette prime venait compenser leurs conditions de travail pénibles durant la grève car ils avaient été confrontés à la pression de leurs collègues grévistes, aux réclamations des clients et des donneurs d'ordre ; qu'il s'en évinçait que, sous couvert d'une prime exceptionnelle, l'employeur avait, en réalité, et de manière déguisée, accordé aux salariés non grévistes un avantage supplémentaire pour les récompenser de leur non participation à la grève, de sorte que la prime litigieuse revêtait nécessairement un caractère discriminatoire ; qu'en décidant le contraire, le Conseil de Prud'hommes a violé l'article L. 2511-1 du Code du travail.
ET ALORS A TITRE SUBSIDIAIRE QU'à supposer même que l'employeur puisse accorder une gratification particulière aux salariés non grévistes, c'est à la condition de justifier d'un surcroît de travail tiré de ce que la quantité des tâches demandée au personnel non gréviste pendant la période de grève, a été plus importante qu'à l'accoutumée; qu'il appartient aux juges du fond de caractériser le surcroît d'activité; que pour dire que la prime litigieuse, versée aux seuls salariés non grévistes, ne revêtait pas un caractère discriminatoire, le Conseil de Prud'hommes s'est borné à affirmer qu'il résultait des documents produits, et notamment de la réponse faite par l'employeur aux représentants du personnel que la prime était destinée à compenser les conditions de travail pénibles des salariés pendant le mouvement social, liées notamment à la nervosité des usagers ; qu'en statuant par des motifs impropres à caractériser un surcroît d'activité auquel aurait été confronté les salariés non grévistes, le Conseil de Prud'hommes a privé sa décision de toute base légale au regard de l'article L. 2511-1 du Code du travail.