Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 23 mars 2011, 09-69.569, Inédit

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :



Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 2 juillet 2009), que M. X..., engagé le 20 avril 2002, en qualité de consultant ayant le statut de cadre, par la société Kedros consulting aux droits de laquelle se trouve la société Weavemanagement, société de services et de conseils en informatique, a été licencié le 23 juin 2004 ;

Attendu que la société Weavemanagement fait grief à l'arrêt de la condamner à payer à M. X... une somme à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse alors, selon le moyen :

1°/ que les juges du fond sont tenus d'examiner le motif de licenciement dans son intégralité et tel qu'il ressort de la lettre de licenciement qui fixe les limites du litige ; que la lettre de licenciement notifiée à M. X... insistait sur l'absence de toute progression du salarié concernant les points déjà signalés comme devant être améliorés et notamment relatifs à son incapacité à prendre en charge la dimension de conseil inhérente à son activité de consultant et à établir et assurer un relationnel de bon niveau avec les clients relevant de sa responsabilité ; qu'elle relevait aussi sa carence s'agissant de la nécessité d'une adaptation continuelle aux besoins du client ; qu'en ne s'expliquant pas précisément sur ces points, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L.1232-6 du code du travail ;

2°/ que la cour d'appel a constaté que M. X... avait des difficultés à prendre le leadership sur les actions placées sous sa responsabilité, qu'il devait se mettre en avant et concernant ses rapports écrits en 2004, qu'une amélioration était souhaitée par le responsable de mission ; qu'en retenant néanmoins que le licenciement de M. X... ne reposait pas sur une cause réelle et sérieuse, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et violé les articles L. 1232-1 et L. 1232-6 du code du travail ;

Mais attendu que la cour d'appel qui, après avoir examiné l'ensemble des griefs invoqués dans la lettre de licenciement et les éléments de preuve qui lui étaient soumis, a constaté qu'aucun élément objectif ne permettait de retenir une insuffisance professionnelle du salarié auquel l'employeur n'avait proposé aucune formation pour mettre en oeuvre ses "axes de progrès", a, dans l'exercice des pouvoirs qu'elle tient de l'article L. 1235-1 du code du travail, décidé que le licenciement était intervenu sans cause réelle et sérieuse ; que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Weavemanagement aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Weavemanagement à payer à M. X... la somme de 2 500 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-trois mars deux mille onze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par la SCP Piwnica et Molinié, avocat aux Conseils pour la société Weave management.

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir condamné la société Weavemanagement à payer à M. X... la somme de 30.000 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

AUX MOTIFS QUE la lettre de licenciement qui fixe les limites du litige était ainsi rédigée : « … Nous nous sommes vus dans l'obligation d'arrêter cette mesure en raison de vos insuffisances professionnelles et de votre incapacité à prendre en charge la dimension de conseil inhérente à votre activité de consultant. En effet, votre affectation initiale sur une mission pour notre client la Poste a dû être interrompue à la demande du responsable de mission en raison des difficultés à établir un relationnel de bon niveau avec les clients et de votre incapacité à assurer un leadership sur les actions relevant de votre responsabilité liée à de graves insuffisances dans votre communication orale. De plus, le bilan de votre action mettait en lumière un déficit important dans votre prise de notes écrites incompatible avec les exigences du métier de consultant pour lequel ceci représente une activité essentielle. Bien que ces points vous aient été communiqués lors de votre bilan annuel 2003, votre affectation sur de nouvelles missions n'a révélé aucune progression, de telle sorte que les responsables des missions sur lesquelles vous étiez affecté ont également demandé votre retrait de ces missions. Il est ainsi noté, par vos responsables de missions, que des briques de base du métier de conseil n'étaient pas maîtrisées, notamment sur le rédactionnel ou le pilotage d'un chantier, une rigidité en contradiction avec les missions de conseil assurées par Weave qui nécessitent non pas de coller des solutions toutes faites mais au contraire une adaptation continuelle aux besoins du client de façon à parvenir à les satisfaire de manière optimale. Les manques déjà constatés à la fin de l'année 2003 ont également été à nouveau relevés par ces chefs de mission, comme notamment la défaillance dans la communication écrite et l'incapacité à passer à une logique de résultat. Compte tenu des missions qui nous sont confiées par nos clients et des exigences qualitatives que ces missions impliquent au stade de leur réalisation, nous ne pouvons continuer une collaboration dans laquelle vous n'avez pas su déployer les compétences essentielles du conseil que nous étions en droit d'attendre d'un consultant de votre niveau, de votre expérience et de votre formation. … » ; qu'il n'est pas nécessaire pour légitimer un licenciement, que l'inadaptation à l'emploi ou l'incompétence du salarié se soient traduites par une faute ; qu'il importe cependant que les insuffisances alléguées par l'employeur se soient manifestées par des éléments extérieurs, par des anomalies de nature à entraver la bonne marche de l'entreprise et susceptibles de vérifications objectives ; qu'en l'espèce, force est de constater que si la société Weavemanagement verse aux débats les évaluations annuelles et les évaluations de performance qui étaient faites sur les missions qu'il a accomplies, ainsi que des attestations de salariés ayant collaboré sur les missions ou les ayant supervisées, documents dont il résulte que M. X... avait des qualités techniques indéniables mais qu'il était réservé et avait des difficultés à prendre le leadership sur les actions placées sous sa responsabilité et qu'il devait se mettre en avant, force est de constater : - qu'aucun des clients chez lesquels il s'est trouvé en mission ne s'est plaint de son comportement et n'a demandé qu'il ne soit plus affecté chez lui, - qu'au contraire, il a été affecté pendant près de deux ans sur des missions chez le même client, la Poste, sans qu'aucun élément objectif ne vienne établir que c'est à la demande de ce dernier qu'il n'y aurait plus été affecté, - que de même, aucune plainte de clients n'est produite pour les deux missions suivantes, - qu'en ce qui concerne son éventuelle insuffisance dans le relationnel, compte tenu de son caractère réservé et d'un manque de confiance en lui, aucune formation ne lui a été proposée alors que, dès sa première mission, ces points étaient décrits comme des axes d'amélioration ; que c'est à tort qu'au regard des éléments produits de part et d'autre que la juridiction a décidé que le licenciement reposait sur une cause réelle et sérieuse, étant de surcroît observé que : - tant en 2002 qu'en 2003, le salarié, qui avait donc atteint ses objectifs, s'était vu attribuer la prime maximale variable prévue par son contrat de travail, - que l'évaluation de la performance du 19 janvier 2004 met en évidence une bonne qualité des rapports écrits qui contiennent des précisions exhaustives, même si une amélioration est souhaitée par le responsable de mission le 23 avril 2004, ce dernier mettant par contre en évidence la clarté de l'expression orale, la capacité de M. X... à proposer des solutions et à avoir un regard critique et constructif sur les actions à mener ; qu'il y a donc lieu d'infirmer la décision attaquée, aucun élément objectif ne permettant de retenir en l'espèce une insuffisance professionnelle de M. X... auquel l'employeur n'a proposé aucune formation pour mettre en oeuvre ses axes de progrès ;

1/ ALORS QUE les juges du fond sont tenus d'examiner le motif de licenciement dans son intégralité et tel qu'il ressort de la lettre de licenciement qui fixe les limites du litige ; que la lettre de licenciement notifiée à M. X... insistait sur l'absence de toute progression du salarié concernant les points déjà signalés comme devant être améliorés et notamment relatifs à son incapacité à prendre en charge la dimension de conseil inhérente à son activité de consultant et à établir et assurer un relationnel de bon niveau avec les clients relevant de sa responsabilité ; qu'elle relevait aussi sa carence s'agissant de la nécessité d'une adaptation continuelle aux besoins du client ; qu'en ne s'expliquant pas précisément sur ces points, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L.1232-6 du code du travail ;

2/ ALORS QUE la cour d'appel a constaté que M. X... avait des difficultés à prendre le leadership sur les actions placées sous sa responsabilité, qu'il devait se mettre en avant et concernant ses rapports écrits en 2004, qu'une amélioration était souhaitée par le responsable de mission ; qu'en retenant néanmoins que le licenciement de M. X... ne reposait pas sur une cause réelle et sérieuse, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et violé les articles L.1232-1 et L.1232-6 du code du travail.

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