Cour de cassation, criminelle, Chambre criminelle, 9 février 2011, 10-82.446, Inédit
Cour de cassation - Chambre criminelle
- N° de pourvoi : 10-82.446
- Non publié au bulletin
- Solution : Rejet
- Président
- M. Louvel (président)
Texte intégral
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur les pourvois formés par :
- M. Jean-Pierre X...,
- M. Marc Y...,
contre l'arrêt de la cour d'appel d'AIX-EN-PROVENCE, 5e chambre, en date du 10 mars 2010, qui, pour escroqueries en bande organisée, infraction au code de la propriété intellectuelle, a condamné, le premier, à trois ans d'emprisonnement, 200 000 euros d'amende, le second, à trois ans d'emprisonnement dont un an avec sursis, 200 000 euros d'amende, et a prononcé sur les intérêts civils ;
Joignant les pourvois en raison de la connexité ;
I - Sur le pourvoi de M. Y... :
Attendu qu'aucun moyen n'est produit ;
II - Sur le pourvoi de M. X... :
Vu les mémoires produits, en demande et en défense ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 313-2, alinéa 2, article 313-1, alinéa 1, article 132-71 du code pénal et réprimés par l'article 313-2, alinéa 2, article 313-7, article 313-8 du code pénal, articles 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale, dénaturation ;
"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré M. X... coupable d'escroquerie réalisée en bande organisée, pour avoir à Perpignan et sur le territoire national ainsi que sur le territoire espagnol à compter de septembre 2001 jusqu'à la fin de l'année 2003 et depuis temps non couvert par la prescription, en sa qualité de dirigeant de droit de la société Santacruz, puis de la fin de l'année 2003 à février 2004, en qualité de dirigeant de fait de la société Tropycall, en s'interposant, dans les exportations théoriquement réalisées par ces sociétés espagnoles, à destination de revendeurs français, l'objet de son entreprise étant de s'intercaler artificiellement dans une relation commerciale intracommunautaire aux fins d'établir une fausse facturation intermédiaire présentant l'application d'un taux de TVA à 19,60 % sur un volume de ventes hors taxes, animé par le dessein formé à l'avance de ne pas reverser la TVA ainsi collectée, en procédant par ailleurs à des déclarations de TVA ne correspondant pas à la réalité, trompé l'Etat français, personne morale de droit public et de l'avoir déterminé, à son préjudice, à consentir un acte opérant décharge, en l'espèce, des déductions de TVA à l'ensemble de la clientèle des sociétés interposées, avec cette circonstance que les faits ont été commis en bande organisée, ici caractérisée, par la complexité des mécanismes mis en oeuvre au service au schéma de fraude, de recours systématique à des prête-noms, à des identités falsifiées, à des sociétés de domiciliation, à la création opportuniste de sociétés françaises éphémères et successives éludant toute comptabilité, à la création de sociétés d'exportation dans un pays (Espagne) distinct de celui de la provenance effective des marchandises (Monaco), l'organisation méticuleuse de la transparence de M. A... en dépit de sa qualité de dirigeant de fait des sociétés interposées ;
"aux motifs qu' il résulte de l'examen de la procédure que, contrairement à l'argumentation du prévenu, la prescription n'a pas été interrompue par le réquisitoire supplétif de 2007 mais par les réquisitoires introductifs des 22 juin et 1er décembre 2009, d'ailleurs nommément visés lors de l'interrogatoire de première comparution et visant l'ensemble des faits reprochés à M. X..., s'agissant d'escroqueries commises du 19 septembre 2001 jusqu'à fin 2003 ; que, de plus, s'agissant du délit d'escroquerie, le point de départ de la prescription se situe à la date de la dernière remise, soit fin 2003 ; qu'en conséquence, la prescription n'est nullement acquise ; que la relaxe de ce chef ne sera pas envisagée ;
"alors que tout arrêt doit comporter les motifs propres à justifier la décision ; que M. X... faisait valoir, dans ses conclusions d'appel, que les faits de la poursuite sont ceux énoncés dans le réquisitoire supplétif du 25 juin 2007 et qu'ainsi les faits antérieurs à la date de juin 2004 sont prescrits ; que pour rejeter le moyen soulevé par le prévenu, la cour a considéré que la prescription a été interrompue par les réquisitoires introductifs des 22 juin et 1er décembre 2009 ; que dans le réquisitoire de renvoi devant le tribunal correctionnel du 27 octobre 2008, il est uniquement fait mention de réquisitoires introductifs du 2 juin 2005 et du 1er décembre 2005 ; qu'en déduisant l'absence d'interruption de la prescription de deux réquisitoires introductifs qui ne figurent pas dans les pièces du dossier, la cour d'appel a non seulement dénaturé les pièces du dossier mais n'a pas justifié sa décision en violation des textes susvisés" ;
Attendu que, pour dire les faits non prescrits, l'arrêt attaqué prononce par les motifs repris au moyen ;
Attendu qu'en cet état de ces énonciations, et dès lors que l'erreur sur les dates des réquisitoires introductifs est purement matérielle et qu'ils ont été établis les 2 juin et 1er décembre 2005 et non en 2009, la cour d'appel a justifié sa décision ;
Qu'ainsi le moyen ne peut être admis ;
Sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles 313-2, alinéa 2, article 313-1, alinéa 1, article 132-71 du code pénal, et réprimés par l'article 313-2, alinéa 2, article 313-7, article 313-8 du code pénal, articles 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale, dénaturation ;
"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré M. X... coupable d'escroquerie réalisée en bande organisée, pour avoir à Perpignan et sur le territoire national ainsi que sur le territoire espagnol à compter de septembre 2001 jusqu'à la fin de l'année 2003 et depuis temps non couvert par la prescription, en sa qualité de dirigeant de droit de la société Santacruz, puis de la fin de l'année 2003 à février 2004, en qualité de dirigeant de fait de la société Tropycall, en s'interposant, dans les exportations théoriquement réalisées par ces sociétés espagnoles, à destination de revendeurs français, l'objet de son entreprise étant de s'intercaler artificiellement dans une relation commerciale intracommunautaire aux fins d'établir une fausse facturation intermédiaire présentant l'application d'un taux de TVA à 19,60 % sur un volume de ventes hors taxes, animé par le dessein formé à l'avance de ne pas reverser la TVA ainsi collectée, en procédant par ailleurs à des déclarations de TVA ne correspondant pas à la réalité, trompé l'Etat français, personne morale de droit public et de l'avoir déterminé, à son préjudice, à consentir un acte opérant décharge, en l'espèce, des déductions de TVA à l'ensemble de la clientèle des sociétés interposées, avec cette circonstance que les faits ont été commis en bande organisée, ici caractérisée, par la complexité des mécanismes mis en oeuvre au service au schéma de fraude, de recours systématique à des prête-noms, à des identités falsifiées, à des sociétés de domiciliation, à la création opportuniste de sociétés françaises éphémères et successives éludant toute comptabilité, à la création de sociétés d'exportation dans un pays (Espagne) distinct de celui de la provenance effective des marchandises (Monaco) l'organisation méticuleuse de la transparence de M. A... en dépit de sa qualité de dirigeant de fait des sociétés interposées ;
"aux motifs que dans ses écritures M. X... conteste l'intégralité des faits qui lui sont reprochés alors même que tant devant les services de police, que tout au long de l'instruction et encore devant les premiers juges, non seulement il les a reconnus mais a expliqué de façon détaillée et circonstanciée la mise en place du système frauduleux d'escroquerie à la TVA et ce, avec MM. A... et Y... ; qu'il a expliqué, comment, gérant de la société Santacruz en 2001, il avait fait la connaissance de M. A... : remarquant une palette de CD dans l'entrepôt de la société FE Santacruz, M. A... faisait part à M. X... de l'immense opportunité de gains sur ce genre de marchandises ; que bien que coutumier de la fraude à la TVA, M. X... réalisait qu'il pouvait augmenter sa marge commerciale en occultant le versement de la taxe pour copie privée ; que c'était le début d'une fructueuse collaboration entre M. X... et M. A..., auxquels allait s'adjoindre un troisième comparse, M. Y... ; que
M. X... commercialisait sur le territoire français les CD et DVD vierges préalablement acquis auprès de fournisseurs installés dans l'espace économique européen ; que les gains seront fructueux et permettront à M. X... de débiter à son profit, en numéraires des comptes de la SARL FE Santacruz, plus d'un million d'euros (1 994 5999,20 euros) entre le 11 septembre 2001 et le 31 octobre 2003 ; que les poursuites judiciaires déclenchées par un contrôle effectué auprès des clients de FE Santacruz par les sociétés Sorecop et Copie France suggéreront à M. X... de reconsidérer sa méthode ; que l'idée de créer des sociétés « taxis » destinées à servir d'écran et d'intermédiaires éphémères entre les fournisseurs étrangers et les clients français afin de récolter de la TVA était alors rapidement mise en pratique ; que MM. A... et Y... recrutaient les associés de paille et s'occupaient de la gestion des sociétés taxis tandis que M. X... servait d'intermédiaire : Tropycall, première société qui voyait le jour, bénéficiait du reliquat de stock que M. X... ne voulait plus continuer à commercialiser au travers de la société FE Santacruz, M. B... était nommé gérant de cette première structure ; que M. X... a également déclaré qu'il avait géré de fait cette société Tropycall jusqu'en février 2004, date de son départ au Paraguay, car le gérant de paille "n'y entendait rien" ; que M. Y... a toujours confirmé cette version et la participation de MM. X... et A... à la mise en place du système frauduleux d'escroquerie, et à la création des sociétés taxis ; qu'ainsi qu'il a été développé plus haut, il s'agit bien là d'escroquerie à la TVA au préjudice du Trésor public et non pas de fraude fiscale comme tente de l'invoquer le prévenu ; qu'en effet, le mécanisme de factures de complaisance formant un tout indivisible conduit à la constitution d'un crédit de TVA fictif par une minoration de la TVA nette due qui s'établit par la différence entre la TVA collectée et la TVA déductible ; que ces agissements tendant à minorer le montant de la TVA due sont constitutifs de manoeuvres frauduleuses ; que la remise de fonds est constituée puisque les manoeuvres avaient pour objet de générer une importante TVA déductible afin de minorer la TVA due par la clientèle du réseau ainsi fondé ; que les sociétés taxis dont la société Tropycall avaient pour unique objet l'émission d'une facturation s'interposant entre fournisseurs étrangers et clients français, afin d'offrir à ceux-ci des produits concurrentiels dont la TVA était déductible ; que cette déduction indue de TVA est considérée comme une remise par la jurisprudence, le délit étant consommé par l'acceptation de la déclaration de TVA, laquelle a conféré au document établi la valeur d'un titre de créance à l'égard du Trésor public ; qu'il sera rappelé que l'escroquerie est constituée à la charge de l'auteur des manoeuvres frauduleuses quel que soit le bénéficiaire de la remise ; que M. X... non seulement a toujours admis ce point, mais s'est longuement expliqué au cours de l'instruction sur le partage des fruits de cette nette escroquerie entre MM. A..., Y... et lui-même, version confirmée par ses comis en examen ; qu'il sera ainsi retranscrit un passage de l'interrogatoire de première comparution de M. Fumenier du 25 juin 2007 ;
Question : Que pouvez-vous nous dire concernant l'activité de la SARL FE Santacruz au regard des faits d'escroquerie à la TVA qui vous sont reprochés que ce soit ou non en relation avec M. A... ? Réponse : Je reconnais qu'au-delà des vraies factures que je passais en comptabilité (pas toutes d'ailleurs), j'avais avec la société FE Santacruz une activité consistant à établir au bénéfice de sociétés tierces, des fausses factures ou des factures majorées. Pour ce qui concerne l'activité de vente de CD et de DVD, Santacruz recevait la marchandise de sociétés allemandes ou espagnoles, en suspension de TVA, et la revendait TTC à des clients français. J'ai cité aux gendarmes les principaux fournisseurs qui se trouvaient en Espagne et marginalement en Allemagne : Milleniummedia, Speedler, Medianca. Question : Avez-vous fait des déclarations de TVA pour Santacruz et à quelle période ? Réponse : Oui, bien sûr, j'ai fait des déclarations CA3, CA4 mensuellement, pendant toute la période d'activité de la société entre septembre 2001 et décembre 2003, mais qui n'avaient rien à voir avec la réalité.
Question : A qui ont profité les sommes générées par cette fraude à la TVA sur l'activité de vente de CD et DVD ? Réponse : Elles ont été partagées entre Y..., A... et moi-même, mais pas à parts égales. Entre mai 2003 et le 15 août 2005, j'ai conservé la TVA pour moi puisque comme on dit « je faisais dans la TVA » antérieurement avec la société Santacruz. Y... et A... se partageaient la marge bénéficiaire hors taxes. Après le 15 août, nous prenions le bénéfice net, TVA incluse, et nous partagions en trois à parts égales, et ce jusqu'en novembre 2003 où Santacruz a établi ses dernières factures et cédé ses stocks à la SARL Tropycall ; que la circonstance de bande organisée est également constituée à l'égard de M. X... dans les mêmes formes que décrites plus haut pour M. Y... ; qu'il convient de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a retenu la culpabilité de M. X... du chef d'escroquerie en bande organisée ; que sur les peines, le tribunal a prononcé à l'encontre de M. Y... une peine d'emprisonnement proportionnée à la gravité des faits, à l'ampleur du préjudice occasionné au Trésor public, au profit généré sauf à l'assortir pour partie d'un sursis simple dans la limite de douze mois, compte tenu de la personnalité du prévenu et de sa volonté d'amendement justifiée par les pièces versées aux débats ; que la peine d'amende mérite d'être confirmée ; que les peines d'emprisonnement et d'amende prononcées à l'encontre de M. X... sont proportionnées à la gravité des faits, à l'ampleur du préjudice causé au Trésor public, au profit généré et à sa personnalité ; qu'elles méritent d'être confirmées ; que sur l'action civile, le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a déclaré les sociétés Sorecop et Copie France recevables en leur constitution de partie civile à l'encontre du ministère public, compte tenu du préjudice certain et direct subi du fait de l'infraction au code de la propriété intellectuelle retenue à l'encontre du prévenu, et en ce qu'il l'a déclarée irrecevable à l'encontre de M. X..., non renvoyé de ce chef devant le tribunal ; que les premiers juges ont parfaitement apprécié le montant des sommes dues au Trésor public comme résultant directement de l'infraction commise par les prévenus, et tel que chiffré dans la prévention ; qu'il doit être noté, contrairement à ce qui est allégué dans les écritures de M. X..., que celui-ci n'a été condamné à payer solidairement avec M. Y... à l'Etat français que la somme due au titre de la société Tropycall, et non au titre de la société X... FE Santacruz ; que le jugement sera confirmé dans toutes ses dispositions civiles ; que l'équité commande qu'il soit alloué aux sociétés Sorecop et Copie France et à l'Etat français la somme de 2 000 euros chacun au titre de l'article 475-1 du code de procédure pénale ;
"1) alors qu'est dirigeant de fait celui qui a accompli, en toute indépendance, des actes positifs de direction, de gestion ou d'administration générale de la société ; que pour qualifier M. X... de dirigeant de fait de la société Tropycall, la cour d'appel a relevé qu'il aurait déclaré qu'il avait géré de fait cette société jusqu'en février 2004, date de son départ au Paraguay, « car le gérant de paille n'y entendait rien » ; qu'en déduisant de ces seuls éléments que M. X... était gérant de fait de la société Tropycall, sans relever aucun acte précis de direction, de gestion ou d'administration générale de la société Tropycall qu'il aurait accompli, en toute indépendance, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des textes susvisés ;
"2) alors que tout arrêt doit répondre aux chefs péremptoires des conclusions dont les juges du fond sont régulièrement saisis par les parties ; que M. X... faisait valoir, dans ses conclusions d'appel, qu'il n'avait jamais occupé une quelconque fonction de dirigeant de fait au sein de la société Tropycall, que les pièces de la procédure n'apportent aucun élément probatoire de ce qu'il aurait pris une qualité de dirigeant de fait de la société Tropycall par des actes positifs de représentation auprès de tiers et de décisions quelconques comme le ferait un dirigeant de droit et qu'il n'a réalisé aucun acte positif de gestion ; qu'en déduisant des déclarations du prévenu selon lesquelles il aurait géré de fait la société Tropycall, ce qui caractérisait sa direction de fait de la société, sans rechercher, comme cela lui était demandé, si M. X... avait commis des actes positifs de gestion et si l'administration apportait la preuve qu'il avait exercé une gérance de fait de ladite société, la cour d'appel a privé sa décision de motifs en violation des textes susvisés ;
"3) alors que tout arrêt doit comporter les motifs propres à justifier la décision ; que M. X... faisait valoir, dans ses conclusions d'appel, qu'au vu des éléments du dossier la partie poursuivante ne faisant pas la preuve d'actes positifs de gestion de la société Tropycall, il ne pouvait être qualifié de « gérant de fait » pour la période courant de la fin de l'année 2003 au début février de l'année 2004 et partant qu'il ne saurait être poursuivi pour les faits de la prévention au titre des actes qu'aurait pu commettre la société Tropycall ; qu'il résulte des constatations de l'arrêt que M. Y... a toujours confirmé que M. X... avait géré de fait la société Tropycall ; qu'en déduisant le rôle de « gérant de fait » de M. X... des seules déclarations de M. Y..., la cour d'appel n'a pas justifié sa décision en violation des textes susvisés ;
"4) alors que ne commet pas le délit d'escroquerie celui qui ne soutient aucunement être titulaire d'un droit à déduction de taxe et ne sollicite pas le paiement c'est-à-dire la remise de la taxe ; que les faits de la poursuite d'où il résulterait que M. X... en sa qualité de dirigeant de droit de la société Fumenier Santacruz aurait artificiellement dans une relation commerciale intracommunautaire établi une fausse facturation présentant l'application d'un taux de TVA de 19,60 % animé par le dessein formé à l'avance de ne pas reverser la TVA ainsi collectée, trompé l'Etat français, à consentir un acte opérant décharge, en l'espèce des déductions de TVA à l'ensemble de la clientèle, avec cette circonstance que les faits auraient été commis en bande organisée, sont insusceptibles de la qualification retenue tenant au délit d'escroquerie à la TVA ; que la qualité reprochée de taxi, c'est-à-dire établir une fausse facturation est exclusive de toute qualification des faits entrant dans les prévisions des articles fondant la poursuite dès lors qu'il n'est pas établi et pas plus allégué que M. X... aurait exercé un droit à déduction soit par imputation de la taxe soit par demande de remboursement indue alors même que ce droit à déduction ne pouvait s'opérer que par le détaxeur, c'est-à-dire les clients de la société à responsabilité limitée X... Santacruz ; qu'il ressort de l'instruction qu'aucun des faits sur lesquels l'instruction a été menée ne peut être imputé à M. X... par le seul motif que la preuve n'est pas rapportée qu'il aurait sollicité par une inscription scripturale dans ses comptes ou par une demande de versement fiduciaire par le Trésor public, la remise de la part de l'Etat français de sommes résultant d'un remboursement de crédit de taxe ou d'imputation de la taxe récupérable sur la taxe due ; qu'il est non moins patent, tel qu'il ressort des faits de l'instruction, que ne peut être imputé au prévenu des manoeuvres destinées à tromper l'Etat en vue d'obtenir indûment de lui une remise, directe ou indirecte puisqu'aussi bien sur le défaut de non reversement de la taxe collectée dans les caisses du Trésor public qui aurait été susceptible de lui être reprochée ce que l'administration territoriale des impôts s'est abstenue à bon droit de faire ; qu'il est constant que le prévenu ès qualité dans les liens de la prévention du chef de sa qualité d'auteur principal du délit d'escroquerie à la TVA n'est pas le détaxeur c'est-à-dire celui qui se constitue un crédit de taxe et qui en demande le remboursement ou l'imputation, peu important le fait, à le supposer établi, que l'Etat français aurait été spolié de l'imputation ou de la demande de remboursement de la taxe d'amont par les sociétés bénéficiaires des factures dès lors qu'en tout état de cause, les taxis c'est-à-dire les sociétés X... Santacruz et Tropycall n'ont jamais, par des actes extérieurs, obtenu de l'Etat français le paiement direct ou indirect d'une créance de taxe et peu important au surplus le fait qu'auraient été émises des factures fausses, l'acte mensonger n'étant pas punissable au visa de l'article 313-1 du code pénal ; qu'il n'est pas établi non plus que les sociétés détaxeurs auraient consommé le délit par l'obtention de la remise requise ; qu'en conséquence, les faits pour lesquels M. X... est cité à comparaître ne sont nullement constitutifs du délit et ne peuvent recevoir la qualification retenue dans la mesure où il n'est pas démontré pas plus au demeurant soutenu ou allégué que le prévenu à titre de dirigeant de droit de la société Fumenier Santacruz ou à titre de dirigeant de fait prétendu de la société Tropycall ait commis ou tenté de commettre le délit consistant par la souscription de déclarations mentionnant des droits à déduction indue par des actes extérieurs auxdites déclarations elles-mêmes de nature à donner force et crédit aux allégations mensongères énoncées par ces déclarations en vue de tromper l'Etat ; que M. X... n'a pas persuadé l'administration des impôts de l'existence à son profit de créances détenues contre l'Etat et la remise de fonds, soit par remboursement direct au vu d'une demande de restitution de la taxe sur la valeur ajoutée, soit par remboursement indirect par voie d'imputation sur le montant de la taxe d'aval à raison de la réalisation d'affaires imposables ; qu'il n'est pas contesté par l'Etat de ce que la société FE X... et la société Tropycall aient établi des factures fausses, au bénéfice d'entrepreneurs clients mais n'a jamais exercé des droits à déduction ni par imputation sur les opérations taxables qu'elle a réalisées, ni par demande de remboursement de la taxe d'amont, ou pour le dire autrement n'a jamais prétendu détenir une créance contre l'Etat français et obtenir de lui directement ou indirectement une remise de fonds, le délit d'escroquerie n'est constitué en aucun de ses éléments ; qu'en jugeant qu'il s'agit pourtant bien là d'une escroquerie à la TVA au préjudice du Trésor public et non pas de fraude fiscale et que le mécanisme de factures de complaisance formant un tout indivisible conduit à la constitution d'un crédit de TVA fictif par une minoration de la TVA nette due qui s'établit par la différence entre la TVA collectée et la TVA déductible, de sorte que ces agissements tendant à minorer le montant de la TVA due sont constitutifs de manoeuvres, la cour d'appel a méconnu les textes visés ;
"5) alors que l'élément matériel du délit d'escroquerie est le fait, soit par l'usage d'un faux nom ou d'une fausse qualité, soit par l'abus d'une qualité vraie, soit par l'emploi de manoeuvres frauduleuses, de tromper une personne physique ou morale ; qu'en se contentant de relever, pour dire caractérisé ce délit, que M. X... a participé à la mise en place du système frauduleux d'escroquerie et à la création des sociétés taxis et qu'il s'est longuement expliqué sur le partage des fruits de cette escroquerie entre MM. A..., Y... et lui-même, la cour d'appel, qui n'a ce faisant nullement caractérisé l'élément matériel de l'infraction, a méconnu les textes visés ;
"6) alors qu'en se contentant de relever que M. Y... a toujours confirmé la participation de M. X... à la mise en place du système frauduleux d'escroquerie, la cour d'appel n'a pas davantage caractérisé l'élément moral de l'infraction d'escroquerie et a privé sa décision de toute base légale ;
"7) alors que constitue une bande organisée au sens de la loi, tout groupement formé ou d'une entente établie en vue de la préparation, caractérisée par plusieurs faits matériels, d'une ou plusieurs infractions ; qu'en se bornant à relever, pour retenir à l'encontre du requérant l'infraction de complicité d'escroquerie en bande organisée, que « la circonstance de bande organisée est également constituée à l'égard de M. X... dans les mêmes formes que décrites pour M. Y... », à savoir que ce dernier « a admis la circonstance de bande organisée compte tenu de l'entente préalable entre lui Silvestre et X..., sur l'architecture de la fraude », la cour d'appel a entaché sa décision d'une insuffisance de motifs et a violé l'article 132-71 du code pénal, ensemble le principe d'interprétation stricte de la loi pénale";
Attendu qu'il résulte de l'arrêt que M. X..., est poursuivi du chef, notamment, d'escroquerie en bande organisée, pour avoir, étant gérant respectivement de droit et de fait des sociétés Santacruz et Tropycall, en établissant des fausses factures relatives à des livraisons intracommunautaires, et en effectuant de fausses déclarations sur la taxe à la valeur ajoutée (TVA), trompé l'État pour le déterminer à consentir des déductions de TVA aux clients de ces sociétés "taxis" ;
Attendu que, pour dire M. X... coupable de ce délit, l'arrêt prononce par les motifs repris au moyen ;
Attendu qu'en l'état de ces énonciations, dépourvues d'insuffisance comme de contradiction, et dès lors que sont constitutives d'une escroquerie les manoeuvres consistant à mettre en place un circuit frauduleux de vente et de facturation fictive entre diverses sociétés de l'Union européenne afin d'échapper au reversement de la taxe collectée ou de faire naître indûment des droits à déduction de TVA, la cour d'appel, qui a caractérisé en tous ses éléments l'infraction d'escroqueries en bande organisée et établi la participation personnelle du prévenu à cette infraction, a justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE les pourvois ;
FIXE à 2 500 euros la somme que M. Y... devra verser à l'Etat au titre de l'article 618-1 du code de procédure pénale ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Louvel président, Mme Canivet-Beuzit conseiller rapporteur, M. Dulin conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Téplier ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;