Cour de cassation, civile, Chambre commerciale, 15 février 2011, 10-13.751, Publié au bulletin
Cour de cassation - Chambre commerciale
- N° de pourvoi : 10-13.751
- Publié au bulletin
- Solution : Rejet
- Président
- Mme Favre
Texte intégral
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le premier moyen :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 3 décembre 2009) et les productions que par jugement du 31 mars 2009, M. X..., (le débiteur) radié du répertoire des métiers le 6 juillet 2007 ainsi que du registre du commerce et des sociétés de Versailles le 3 octobre 2007 et cité à comparaître par acte d'huissier du 19 juin 2008 à la demande du président du tribunal, a été mis d'office en liquidation judiciaire, M. Y... étant nommé liquidateur ;
Attendu que le débiteur fait grief à l'arrêt d'avoir confirmé le jugement qui, ayant constaté son état de cessation des paiements, a ouvert sa liquidation judiciaire, alors, selon le moyen :
1°/ qu'en cas de cessation d'activité d'une personne immatriculée au répertoire des métiers, une procédure de liquidation judiciaire peut être ouverte sur l'assignation d'un créancier à la condition que cette assignation intervienne dans le délai d'un an à compter de l'arrêt d'activité ; que, pour s'assurer du respect de ce délai, c'est l'assignation du créancier aux fins d'ouverture de la procédure de liquidation judiciaire qui doit seule être prise en compte ; qu'en se bornant en l'espèce à constater, pour dire l'action de la caisse de mutualité sociale agricole d'Ile-de-France non prescrite, que le débiteur avait été assigné le 19 juin 2008 et que la radiation de l'entreprise était en date du 6 juillet 2007, sans vérifier si l'acte du 19 juin 2008 était l'assignation du créancier aux fins d'ouverture de la procédure de liquidation judiciaire quand ce dernier reconnaissait, dans ses conclusions, que l'acte du 19 juin 2008 était une citation à la demande du tribunal et que l'assignation en liquidation judiciaire n'avait été délivrée à son initiative que le 15 septembre 2008, la cour d'appel n'a pas mis la Cour de cassation en mesure d'exercer son contrôle sur le respect des conditions d'application de L. 640-5 du code de commerce ;
2°/ qu' en cas de cessation d'activité d'une personne immatriculée au répertoire des métiers, une procédure de liquidation judiciaire peut être ouverte sur l'assignation d'un créancier à la condition que cette assignation intervienne dans le délai d'un an à compter de l'arrêt d'activité ; que le délai d'un an est un délai préfix qui ne peut être interrompu par une citation à comparaître du tribunal aux fins d'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire avant que le débiteur soit assigné par le créancier en ouverture d'une procédure de liquidation judiciaire ; qu'en retenant en l'espèce que l'action de la caisse de mutualité sociale agricole d'Ile-de-France n'était pas prescrite quand le débiteur, après avoir cité à comparaître par acte du 19 juin 2008 pour voir ouvrir une procédure de redressement judiciaire, n'avait été assigné par le créancier aux fins d'ouverture d'une procédure de liquidation judiciaire que le 15 septembre 2008, soit plus d'un an après sa cessation d'activité, le 29 juin 2007, la cour d'appel a violé les articles L. 631-5 et L. 640-5 du code de commerce ;
3°/ qu'en cas de cessation d'activité d'une personne immatriculée au répertoire des métiers, une procédure de liquidation judiciaire peut être ouverte sur l'assignation d'un créancier dans le délai d'un an à compter de l'arrêt d'activité si la cessation des paiements est antérieure à celui-ci ; qu'en l'espèce, il est constant que le débiteur a cessé son activité en juin 2007, qu'il a été radié du répertoire des métiers en juillet 2007 et que la cessation des paiements a été fixée au 30 septembre 2007, soit postérieurement à la cessation d'activité ; qu'en déclarant néanmoins l'action de la caisse de mutualité sociale agricole d'Ile-de-France non prescrite et recevable, la cour d'appel a violé l'article L. 640-5 du code de commerce ;
4°/ qu'en se bornant à déclarer l'action de la caisse de mutualité sociale agricole d'Ile-de-France non prescrite sans répondre au moyen des conclusions du débiteur tiré de ce qu'une procédure collective ne peut être ouverte, sur l'assignation d'un créancier, que si l'arrêt de l'activité est postérieur à la cessation des paiements de l'artisan, cependant qu'en l'espèce la cessation d'activité était postérieure à la date de cessation des paiements retenue par le tribunal, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
Mais attendu qu'il résulte des articles L. 631-5 et L. 640-5 du code de commerce dans leur rédaction issue de la loi du 26 juillet 2005 de sauvegarde des entreprises que, lorsqu'il n'y a pas de procédure de conciliation en cours et que le débiteur, radié du registre du commerce et des sociétés ou du répertoire des métiers ou ayant cessé son activité, est dans l'impossibilité de faire face à un passif professionnel résiduel et exigible, le tribunal peut, à tout moment, se saisir d'office aux fins d'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire ou, si le redressement est manifestement impossible, de liquidation judiciaire ; qu'ayant relevé, par motifs propres et adoptés, que le débiteur avait été cité à comparaître le 19 juin 2008 à la demande du président du tribunal qui, s'étant saisi d'office, avait ordonné une enquête en raison du nombre d'inscriptions de privilèges du Trésor et des organismes de sécurité sociale et ayant retenu que "l'action" n'était pas prescrite et que le débiteur était en état de cessation des paiements, la cour d'appel, qui n'avait pas à répondre au grief évoqué à la quatrième branche devenu inopérant, a légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est pas fondé ;
Et attendu que le second moyen ne serait pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du quinze février deux mille onze.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt
Moyens produits par la SCP Le Bret-Desaché, avocat aux Conseils, pour M. X...
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
- PRIS DE CE QUE l'arrêt attaqué a confirmé le jugement du 31 mars 2009 rendu par le Tribunal de Commerce de Versailles, lequel avait constaté la cessation des paiements de Monsieur X..., ouvert une procédure de liquidation judiciaire à son égard, fixé définitivement la date de cessation des paiements au 30 septembre 2007 et désigné Maître Philippe Y... en qualité de liquidateur ;
- AUX MOTIFS QUE l'action n'est pas prescrite, Monsieur X... ayant été assigné le 19 juin 2008 et la radiation de l'entreprise étant en date du 6 juillet 2007 ;
- ALORS, D'UNE PART, QUE, en cas de cessation d'activité d'une personne immatriculée au répertoire des métiers, une procédure de liquidation judiciaire peut être ouverte sur l'assignation d'un créancier à la condition que cette assignation intervienne dans le délai d'un an à compter de l'arrêt d'activité ; que, pour s'assurer du respect de ce délai, c'est l'assignation du créancier aux fins d'ouverture de la procédure de liquidation judiciaire qui doit seule être prise en compte ; qu'en se bornant en l'espèce à constater, pour dire l'action de la CAISSE DE MUTUALITE SOCIALE AGRICOLE D'ILE DE FRANCE non prescrite, que Monsieur X... avait été assigné le 19 juin 2008 et que la radiation de l'entreprise était en date du 6 juillet 2007, sans vérifier si l'acte du 19 juin 2008 était l'assignation du créancier aux fins d'ouverture de la procédure de liquidation judiciaire quand ce dernier reconnaissait, dans ses conclusions, que l'acte du 19 juin 2008 était une citation à la demande du Tribunal et que l'assignation en liquidation judiciaire n'avait été délivrée à son initiative que le 15 septembre 2008, la Cour d'Appel n'a pas mis la Cour de Cassation en mesure d'exercer son contrôle sur le respect des conditions d'application de L. 640-5 du Code de Commerce ;
- ALORS, D'AUTRE PART, QUE, en cas de cessation d'activité d'une personne immatriculée au répertoire des métiers, une procédure de liquidation judiciaire peut être ouverte sur l'assignation d'un créancier à la condition que cette assignation intervienne dans le délai d'un an à compter de l'arrêt d'activité ; que le délai d'un an est un délai préfix qui ne peut être interrompu par une citation à comparaître du Tribunal aux fins d'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire avant que le débiteur soit assigné par le créancier en ouverture d'une procédure de liquidation judiciaire ; qu'en retenant en l'espèce que l'action de la CAISSE DE MUTUALITE SOCIALE AGRICOLE D'ILE DE FRANCE n'était pas prescrite quand Monsieur X..., après avoir cité à comparaître par acte du 19 juin 2008 pour voir ouvrir une procédure de redressement judiciaire, n'avait été assigné par le créancier aux fins d'ouverture d'une procédure de liquidation judiciaire que le 15 septembre 2008, soit plus d'un an après sa cessation d'activité, le 29 juin 2007, la Cour d'Appel a violé les articles L. 631-5 et L. 640-5 du Code de Commerce ;
- ALORS, ENCORE, QUE, en cas de cessation d'activité d'une personne immatriculée au répertoire des métiers, une procédure de liquidation judiciaire peut être ouverte sur l'assignation d'un créancier dans le délai d'un an à compter de l'arrêt d'activité si la cessation des paiements est antérieure à celui-ci ; qu'en l'espèce, il est constant que Monsieur X... a cessé son activité en juin 2007, qu'il a été radié du répertoire des métiers en juillet 2007 et que la cessation des paiements a été fixée au 30 septembre 2007, soit postérieurement à la cessation d'activité ; qu'en déclarant néanmoins l'action de la CAISSE DE MUTUALITE SOCIALE AGRICOLE D'ILE DE FRANCE non prescrite et recevable, la Cour d'Appel a violé l'article L. 640-5 du Code de Commerce ;
- ET ALORS, ENFIN, QU'en se bornant à déclarer l'action de la CAISSE DE MUTUALITE SOCIALE AGRICOLE D'ILE DE FRANCE non prescrite sans répondre au moyen des conclusions de Monsieur X... tiré de ce qu'une procédure collective ne peut être ouverte, sur l'assignation d'un créancier, que si l'arrêt de l'activité est postérieur à la cessation des paiements de l'artisan, cependant qu'en l'espèce la cessation d'activité était postérieure à la date de cessation des paiements retenue par le Tribunal, la Cour d'Appel a violé l'article 455 du Code de Procédure Civile.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
- PRIS DE CE QUE l'arrêt attaqué a confirmé le jugement du 31 mars 2009 rendu par le Tribunal de Commerce de Versailles, lequel avait constaté la cessation des paiements de Monsieur X..., ouvert une procédure de liquidation judiciaire à son égard, fixé définitivement la date de cessation des paiements au 30 septembre 2007 et désigné Maître Philippe Y... en qualité de liquidateur ;
- AUX MOTIFS QUE, dans un courrier du 27 mai 2009 adressé au Procureur de la République, section économique et financière, Maître Y... signalait que, malgré les injonctions du Procureur à l'audience, Monsieur X... refusait de restituer ses actifs mobiliers et son véhicule qu'il a détournés au profit de l'EURL qu'il a constituée ; que Maître Y... déposait plainte à l'encontre de Monsieur X... pour détournement d'actif ; que, dans ces conditions, il ne peut être question d'examiner le plan de redressement présenté par Monsieur X... lequel repose sur les bénéfices dégagés par l'EURL constituée avec les actifs détournés, ce qui reviendrait à entériner ces détournements ; qu'en conséquence, il y a lieu de confirmer le jugement qui a ouvert à l'égard de Monsieur X... une procédure de liquidation judiciaire ;
- ALORS, D'UNE PART, QU'en refusant d'examiner le plan de redressement présenté par Monsieur X... aux seuls motifs qu'il reposait sur les bénéfices dégagés par l'EURL constituée avec des actifs détournés, ce qui aurait conduit à entériner ces détournements, quand aucune décision de condamnation irrévocable n'est intervenue à l'encontre de Monsieur X... pour des faits de détournements d'actif sur la plainte déposée par Maître Y..., la Cour d'Appel a méconnu le principe de la présomption d'innocence et violé les articles 6-2 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et 9-1 du Code Civil ;
- ET ALORS, D'AUTRE PART, QU'en l'absence de décision rendue à l'encontre de Monsieur X... pour des faits de détournements d'actif sur la plainte déposée par Maître Y..., la matérialité de ces détournements ne peut être retenue comme certaine sur la seule foi d'un courrier du mandataire liquidateur signalant que, malgré les injonctions du Procureur de la République à l'audience, Monsieur X... aurait refusé de restituer ses actifs mobiliers et son véhicule qu'il aurait détournés au profit de l'EURL qu'il avait constituée ; qu'en tenant dès lors ces détournements pour certains pour refuser d'examiner le plan de redressement présenté par Monsieur X..., motifs pris que ce plan reposait sur les bénéfices dégagés par l'EURL constituée avec des actifs détournés, la Cour d'Appel n'a pas légalement justifié son arrêt au regard des articles L. 631-1 et L. 640-1 du Code de Commerce.