Cour de cassation, civile, Chambre civile 1, 26 janvier 2011, 09-71.840, Publié au bulletin

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :



Sur le moyen unique, pris en ses deux branches :

Attendu que Claude X... est décédé le 15 février 2004, en laissant pour lui succéder son épouse, Mme Tatiana Y..., avec laquelle il était marié sous le régime de la séparation de biens et était en instance de divorce, ainsi que sa fille d'un premier lit, Mme Isabelle X..., épouse Z..., et en l'état d'un testament olographe du 22 juillet 2003, découvert le 18 novembre 2004, aux termes duquel il désignait Mme Béatrice A... légataire universelle et "révoqu(ait) "de tous ses droits Mme Tatiana Y..." ; qu'en application d'un "protocole d'accord" du 9 avril 2004, Mme X..., épouse Z... a versé mensuellement à Mme Y..., jusqu'au 18 novembre 2004, une somme mensuelle de 1 500 euros prélevée sur les revenus locatifs des immeubles dépendant de la succession ; qu'un acte de partage de la succession entre Mme X..., épouse Z... et Mme A... a été établi le 24 janvier 2005 ; que par actes des 15 décembre 2005 et 24 février 2006, Mme Y... a fait assigner Mme X..., épouse Z... et Mme A... pour les voir notamment condamnées solidairement au paiement d'une pension mensuelle de 4 000 euros à compter du 18 novembre 2004 ;

Attendu que Mme Y... fait grief à l'arrêt attaqué (Paris, 13 novembre 2008) d'avoir déclaré son action irrecevable comme prescrite, alors, selon le moyen :

1°/ que le conjoint successible peut demander à la succession de l'époux prédécédé une pension dans un délai d'un an à partir du décès ou du moment où les héritiers cessent d'acquitter les prestations qu'ils fournissaient auparavant au conjoint, le délai étant prolongé jusqu'à l'achèvement du partage ; que l'action en rescision pour lésion dirigée contre un partage a nécessairement pour effet de remettre en cause ce partage jusqu'à la décision à intervenir sur cette action ; qu'en affirmant que la contestation du partage dans le cadre d'une action en rescision pour lésion n'avait pas pour effet de prolonger le délai d'un an, la cour d'appel a violé l'article 767 du code civil ;

2°/ qu'à défaut de rechercher si, à la date à laquelle elle avait présenté sa demande tendant à l'obtention d'une pension, le partage avait été achevé par un jugement définitif rendu sur l'action en rescision pour lésion dirigée contre ce partage, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 767 du code civil ;

Mais attendu que les dispositions de l'article 767 du code civil selon lesquelles, en cas d'indivision, le délai d'un an imparti au conjoint successible pour réclamer une pension à la succession de l'époux prédécédé se prolonge jusqu'à l'achèvement du partage ne s'appliquent que si le conjoint successible a des droits dans l'indivision ;

Attendu que la cour d'appel a relevé que Mme Y... avait été exhérédée de tous ses droits par Claude X... ; qu'il en résulte que tant le partage intervenu le 24 janvier 2005 entre Mme X..., épouse Z... et Mme A... que l'action en rescision dudit partage étaient sans incidence sur le délai dont Mme Y... disposait pour réclamer une pension à la succession et que sa demande de pension, formée plus d'un an après le décès de son époux ainsi que plus d'un an après la date à laquelle les héritiers avaient cessé d'acquitter les prestations qu'ils lui fournissaient était irrecevable ; que par ce motif de pur droit, substitué dans les conditions de l'article 1015 du code de procédure civile à ceux critiqués, l'arrêt se trouve légalement justifié ; que le moyen ne peut être accueilli ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne Mme Y... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de Mme X..., épouse Z... ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-six janvier deux mille onze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par la SCP Odent et Poulet, avocat aux conseils pour Mme Y..., veuve X...

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir déclaré irrecevable comme prescrite l'action engagée par Mme veuve X... à l'encontre de Mme Z... et Mlle A... aux fins de les voir condamnées solidairement au paiement d'une pension viagère mensuelle de 4.000 € à compter du 18 novembre 2004 et afin de se voir reconnaître le bénéfice d'un droit viager d'usage et d'habitation sur son immeuble d'habitation à Chantilly ;

AUX MOTIFS QUE, le délai d'un an imparti par l'article 767 du code civil au conjoint successible dans le besoin pour engager une action en paiement d'une pension ne peut être prorogé par le juge en fonction de circonstances particulières à l'espèce, telles la découverte tardive d'un testament exhérédant le conjoint survivant ; que M. X... est décédé le 15 février 2004, que les prestations fournies à Mme veuve X... en vertu du protocole du 9 avril 2004 ont cessé au mois de novembre 2004 et que le partage successoral s'est achevé le 24 janvier 2005 ; que l'action engagée par Mme veuve X..., suivant actes des 15 décembre 2005 et 24 février 2006, était prescrite dans la mesure où le délai d'un an était expiré le 24 janvier 2005 dans le meilleur des cas et que ni l'assignation en référé du 13 octobre 2004, ni celle du 18 janvier 2005 n'ont interrompu ce délai préfix, la première ne tendant pas au paiement d'une pension alimentaire mais à l'exécution d'un protocole d'accord et la seconde ayant été déclarée irrecevable par le juge de la mise en état du tribunal, tandis que l'arrêt de cette cour du 25 mai 2005 n'a pas fait droit à la demande de pension alimentaire formée en cause d'appel par Mme veuve X..., en sorte que l'interruption de prescription résultant de cette demande rejetée est non avenue par application de l'article 2247 du code civil ; que l'assignation en référé du 25 juin 2004 a été délivrée postérieurement à l'expiration du délai utile pour agir, de même que les conclusions d'incident devant le juge de la mise en état signifiées le 13 septembre 2005 ; que l'action en rescision de partage engagée par Mlle A... contre Mme X... épouse Z... n'a pas davantage pour effet de proroger ce délai, le partage étant achevé au sens de l'article 767 du code civil dès lors qu'il est signé, étant observé que Mme veuve X... n'est pas concernée par cette action ;

1°/ ALORS QUE le conjoint successible peut demander à la succession de l'époux prédécédé une pension dans un délai d'un an à partir du décès ou du moment où les héritiers cessent d'acquitter les prestations qu'ils fournissaient auparavant au conjoint, le délai étant prolongé jusqu'à l'achèvement du partage ; que l'action en rescision pour lésion dirigée contre un partage a nécessairement pour effet de remettre en cause ce partage jusqu'à la décision à intervenir sur cette action ; qu'en affirmant que la contestation du partage dans le cadre d'une action en rescision pour lésion n'avait pas pour effet de prolonger le délai d'un an, la cour d'appel a violé l'article 767 du code civil ;

2°l ALORS OUE, à défaut de rechercher si, à la date à laquelle Mme veuve X... a présenté sa demande tendant à l'obtention d'une pension, le partage avait été achevé par un jugement définitif rendu sur l'action en rescision pour lésion dirigée contre ce partage, la cour d'appel a privé son arrêt de base légale au regard de l'article 767 du code civil.

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