Cour de cassation, civile, Chambre civile 2, 18 novembre 2010, 09-13.265, Publié au bulletin

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :


Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société Lion salaisons Normandie (la société ) a assigné son assureur, la société Axa France IARD (l'assureur), pour obtenir sa condamnation à lui payer une certaine somme représentant l'indemnité due à la suite de l' incendie des locaux acquis en crédit bail avec promesse de vente auprès de la société Unicom, aux droits de laquelle vient la société Finamur ; qu'une cour d'appel a condamné l'assureur à payer une certaine somme à la société ;

Sur le premier moyen du pourvoi principal :

Attendu que la société fait grief à l'arrêt de la débouter de sa demande aux fins d'annulation du rapport d'expertise judiciaire et de récusation de l'expert alors, selon le moyen :

1°/ que la déontologie et l'obligation d'impartialité qui pèsent sur les experts leur imposent à la fois une obligation de courtoisie à l'égard des auxiliaires de justice et l'obligation de ne manifester aucun ressentiment à l'égard des parties et de leur conseil; que la manifestation de ressentiment ou l'émission de remarques désobligeantes en ce qu'elles font naître un doute objectif sur l'impartialité de l'expert justifie sa récusation ; que la société faisait valoir que l'expert avait tenu des propos désobligeants à l'égard de son conseil le traitant de "prestidigitateur redoutable" et en relevant dans l'une de ses notes aux parties qu'"après un suspense de trois mois, il a enfin fait sortir de son chapeau le lapin "marché" ; qu'en écartant la demande de récusation de l'expert en relevant que son attitude n'allait pas au-delà de l'ironie, sans rechercher si les propos ainsi tenus et l'existence même de cette attitude, n'étaient pas de nature à faire naître un doute sérieux sur l'impartialité de l'expert dans l'esprit de la société, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 234 et 341 du code de procédure civile, ensemble l'article 6 § 1er de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

2°/ que l'expert judiciaire est tenu d'une obligation d'impartialité sous réserve de récusation ; que l'article 341 du code de procédure civile, auquel renvoie l'article 234 du même code, qui prévoit des cas de récusation, n'épuise pas l'exigence d'impartialité requise de tout expert judiciaire; qu'en se bornant à relever que le fait de déjeuner avec les experts et conseils de l'assureur ne permettait pas de caractériser un sentiment d'amitié notoire pour écarter la demande de récusation de l'expert, sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si ce fait n'était pas de nature à faire naître un doute légitime sur l'impartialité de l'expert chez la société, la cour d'appel a violé les articles 234 et 341 du code de procédure civile ensemble l'article 6§1er de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

3°/ qu'en se bornant à apprécier les éléments de faits invoqués par la société à l'appui de sa demande de récusation isolément sans rechercher si de tels éléments, pris dans leur ensemble et globalement, ne pouvaient pas, du fait de leur conjonction et leur répétition, faire naître un doute légitime sur l'impartialité de l'expert chez la société, la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard de l'article 6§1er de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Mais attendu qu'une demande de récusation d'expert n'est pas recevable après le dépôt du rapport d'expertise ;

Que par ce motif de pur droit, substitué à ceux critiqués par le moyen, l'arrêt se trouve légalement justifié de ce chef ;

Attendu que le deuxième moyen du pourvoi incident de la société Axa n'est pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;

Mais sur le deuxième moyen du pourvoi principal :

Vu l'article 1134 du code civil ;

Attendu que pour fixer à une certaine somme le montant de l'indemnité due au titre des pertes indirectes, l'arrêt retient que la société demande 80 875,73 euros, sur la base d'un coût des travaux de 1 541 289 euros ; que l'assureur offre 46 440,57 euros, somme supérieure à l'estimation de l'expert, et qui sera retenue ;

Qu'en statuant ainsi alors que le contrat d'assurance énonçait que l'indemnité forfaitaire et complémentaire versée au titre des pertes indirectes est égale à 10 % du dommage lorsque celui-ci est égal ou inférieur à 76 224,50 euros et, lorsqu'il est supérieur à ce montant, à 10 % jusqu'à 76 224,50 euros et 5 % au-delà, et qu'elle avait évalué le dommage, correspondant au coût de reconstruction à la somme de 895 502,66 euros, somme supérieure à celle de 852 587 euros sur laquelle l'assureur avait calculé le montant de sa garantie, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

Et sur le troisième moyen du pourvoi principal :

Vu l'article 4 du code de procédure civile ;

Attendu que pour rejeter la demande de la société de condamnation de l'assureur à des dommages-intérêts pour "résistance" abusive, l'arrêt retient que l'assureur prospérant pour partie en ses prétentions, la demande de dommages-intérêts pour "procédure" abusive" devait être rejetée ;

Qu'en statuant ainsi, la cour d'appel, qui a méconnu les termes du litige, a violé le texte susvisé ;

Et sur le premier moyen du pourvoi incident, pris en sa deuxième branche :

Vu les articles 455 et 458 du code de procédure civile ;

Attendu que pour condamner l'assureur à payer une certaine somme au titre de l'indemnité d'assurance, l'arrêt retient que la société sollicite une indemnité au titre des honoraires d'architecte et que l'assureur s'y oppose en l'absence de reconstruction des bâtiments détruits ; que toutefois la police ne prévoyant pas une telle exclusion, ce poste doit être indemnisé ;

Qu'en statuant ainsi, sans répondre aux conclusions de l'assureur qui soutenait que l'avenant signé le 15 janvier 1998 ne prévoyait pas l'indemnisation de ce préjudice, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

Et sur le troisième moyen du pourvoi incident pris en sa première branche :

Vu l'article 1134 du code civil ;

Attendu que pour condamner l'assureur à payer à la société une certaine somme au titre de la garantie perte des loyers, l'arrêt retient que l'assureur soutient que la garantie ne profite qu'au bailleur, alors que la société était locataire, et ne devait qu'une indemnité résiduelle ; que cependant la société a de fait perdu une chance d'encaisser des loyers ;

Attendu qu'en statuant ainsi alors que le contrat stipulait que les assureurs garantissent le paiement des loyers au bailleur durant le temps effectif de la réparation des dommages, proportionnellement à la partie des biens détruite, et ce avec un maximum de deux années et que les conditions spéciales précisaient que cette garantie avait pour objet le versement des loyers au bailleur en cas d'impossibilité pour le preneur ou l'occupant d'utiliser temporairement tout ou partie des locaux après un sinistre, la cour d'appel a dénaturé les clauses du contrat et violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs du pourvoi incident :

CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il a débouté la société Lion salaisons Normandie de sa demande aux fins d'annulation du rapport de l'expert judiciaire et de la récusion de l'expert, l'arrêt rendu le 22 janvier 2009, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ; remet, en conséquence, sauf sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris ;

Condamne la société Lion salaisons Normandie et la société Axa France IARD aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, déboute la société Axa et la société Lion salaisons Normandie de leurs demandes ; condamne la société Lion salaisons Normandie à payer à la société Finamur la somme de 2 500 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-huit novembre deux mille dix.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits par la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat aux Conseils pour la société Lion salaisons Normandie (demanderesse au pourvoi principal).

PREMIER MOYEN DE CASSATION

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté la SA Lion Salaisons Normandie de sa demande aux fins d'annulation du rapport d'expertise judiciaire et de récusation de l'expert,

AUX MOTIFS QUE, « la S.A. LION SALAISONS NORMANDIE reproche vainement à l'expert d'avoir simplement repris l'état préparatoire de la S.A. AXA FRANCE IARD, affecté d'index arbitraires, alors que l'expert précise dans son rapport, que l'état de la société AXA correspond au Devis Quantitatif Estimatif du marché d'origine, en 1987, ce qui ne fait pas l'objet d'une critique reposant sur des données objectives, et que les index qu'il a appliqués, ne sont pas arbitraires mais sont ceux afférents à chacun des corps d'état concernés ; qu'elle invoque ensuite, à tort, une erreur "grossière" de l'expert, soit de 10 ans, dans l'application des index, puisqu'il n'est pas contesté que, sur l'intervention de son conseil cette erreur a été rectifiée ; qu'elle reproche encore à l'expert; tout aussi vainement, d'avoir dans sa note 4 du 26 avril 2007, exclut de l'indemnisation divers postes admis par la société AXA, soit les postes .châssis, plâtrerie, portes intérieures sauf une, poste de livraison EDF, mise à la terre et chauffage, revêtements des sols et murs des bureaux, et ce sans explications, alors que l'expert conclut que ces éléments sont en bon état (rapp.p.4) ; que le fait pour l'expert d'avoir déclaré, que le conseil de la S.A. LION SALAISONS NORMANDIE était un "prestidigitateur redoutable", pour avoir communiqué les extraits de marchés d'origine réclamés, avec un délai de 3 mois, ne va pas au-delà de l'ironie, et peut se justifier par le délai ainsi apporté pour lui communiquer ces pièces ; que le fait pour l'expert de donner un avis inférieur aux attentes d'une partie, sur une évaluation, telle que celle des honoraires d'architecte pour la reconstruction à l'identique, soit 6 % au lieu de 10 à 12 % demandés, ne peut lui être imputé à faute ; que la S.A. LION SALAISONS NORMANDIE estime fautif le fait pour l'expert d'avoir déclaré à plusieurs reprises dans ses notes, que ses opérations étaient closes, alors que force lui est de constater, qu'à chacune de ses demandes de poursuivre ses opérations, il s'est incliné ; qu'elle mentionne le fait que le 26 septembre 2007, le représentant de la S.A. LION SALAISONS NORMANDIE arrivé avec son conseil dans le bourg de Lion s/Mer (Normandie) au moment du déjeuner, et ayant choisi l'un des restaurants de ce bourg, a constaté avec surprise dès l'entrée que M. Philippe X... était en train de déjeuner dans ce même restaurant, avec les experts et le conseil de la société AXA, ce qui expliquerait son refus favorable à la société AXA d'effectuer des mesures d'humidité ; mais considérant que cette situation, non contestée, ne permet pas de caractériser un sentiment d'amitié notoire, ou un biais en faveur de l'assureur, dès lors que ce n'est que de façon fortuite que la rencontre s'est produite, aucun indice d'une concertation, ou du fait que les intéressés se seraient connus auparavant, n'étant proposé à la cour ; qu'en effet il résulte des éléments du dossier que :
- la rencontre s'est produite peu avant une réunion d'expertise programmée, dans le bourg de LION, où se trouve le siège social de la S.A. LION SALAISONS NORMANDIE, à quelques kilomètres du lieu du sinistre, à l'heure du déjeuner,
- si la S.A. LION SALAISONS NORMANDIE souligne qu'il existe en réalité trois autres restaurants à LION, soit le DRAKKAR, le COROSSOL et celui de L'HOTEL de VILLE, le caractère fortuit de la rencontre M. Philippe X... / représentants de la S.A. AXA FRANCE IARD n'est pas à exclure pour autant, dès lors que le choix de la S.A. LION SALAISONS NORMANDIE s'est porté sur le même restaurant, de sorte qu'il est certain que sa localisation le rendait plus pratique ; qu'il n'est pas proposé de prouver que M. Philippe X... connaissait les représentants de la SA AXA FRANCE IARD avant la naissance du présent litige ; que l'attitude de .l'expert judiciaire relève donc plutôt d'une courtoisie maladroite, ayant consisté à inviter une partie à sa table, à la suite d'une conversation engagée avec les représentants de la société AXA, que d'un indice d'une amitié notoire, ou d'un biais en faveur de cette partie ; que ces moyens doivent donc être écartés comme mal fondés ;
b - Les imprécisions Considérant que la S.A. LION SALAISONS NORMANDIE fait grief à l'expert d'avoir produit un tableau estimatif sans aucune explications ni détails, qui auraient permis à son expert,. M. Z... du cabinet SIEC, d'effectuer un contrôle, et notamment les prix unitaires et les quantités, les indices ; Mais considérant que le rapport de l'expert précise bien qu'il se fonde sur le marché d'origine, lequel lui a été fourni par la S.A. LION SALAISONS NORMANDIE elle-même, et suivant des délais qu'il lui a reproché, soit 3 mois, et précise bien les indices applicables par corps de métier, ce qui permet une analyse plus fine que le taux moyen BT 01, ce que, sinon l'expert, du moins son propre expert pouvait sans peine lui expliquer ;
c - Les erreurs Considérant que la S.A. LION SALAISONS NORMANDIE critique, ensuite, la méthode suivie par l'expert telle que la cour l'a explicitée plus haut, qu'elle avait donc parfaitement comprise, pour lui reprocher d'avoir omis de prendre en compte une réévaluation destinée à tenir compte de l'évolution des normes, alors que l'expert a précisé qu'il était partie du principe que la S.A. LIONS SALAISONS NORMANDIE ne voulait pas reconstruire ; qu'il décèle ensuite diverses erreurs dans l'application des indices par l'expert, pour un montant de 7.576 euros, erreurs qui ne sont pas de nature en raison des sommes en jeu, de permettre de déduire un biais de l'expert judiciaire en faveur de la S.A. AXA FRANCE IARD ; qu'il reproche encore le choix de la date des indices de base de la réévaluation retenus, soit Janvier 2000 "date de la proposition d'indemnisation", alors que l'incendie est survenu le 14 mai 2000, erreur patente ; que néanmoins son évidence montre qu'il s'agit d'une simple erreur matérielle, et non d'une intention de favoriser l'une des parties, alors au surplus que le tableau estimatif où cette base figure avait été soumis aux parties avant le dépôt du rapport ; que le grief tenant au choix de la date de mars 1988, "point moyen du chantier (de construction)" comme base de départ du calcul, alors que les prix de base devaient être fixés dès l'ouverture du chantier, n'est pas mieux fondé, ce choix ne traduisant qu'un souci d'équilibre et non un biais, dans le cas d'un marché ferme qui devait prendre en compte l'évolution des prix sur la durée du chantier ; qu'aucun des éléments objectifs invoqués par la SA LIONS SALAISONS NORMANDIE ne permettant de caractériser une violation du principe de la contradiction, ou d'une autre de ses obligations par l'expert, ni de justifier un risque de doute sur son impartialité de la part de l'une des parties, il convient de débouter la S.A. LIONS SALAISONS NORMANDIE de sa demande d'annulation du rapport d'expertise, et de récusation de l'expert»,

ALORS, D'UNE PART, QUE la déontologie et l'obligation d'impartialité qui pèsent sur les experts leur imposent à la fois une obligation de courtoisie à l'égard des auxiliaires de justice et l'obligation de ne manifester aucun ressentiment à l'égard des parties et de leur conseil ; que la manifestation de ressentiment ou l'émission de remarques désobligeantes en ce qu'elles font naître un doute objectif sur l'impartialité de l'expert justifie sa récusation ; que la société Lion Salaisons Normandie faisait valoir que l'expert avait tenu des propos désobligeant à l'égard de son conseil le traitant de « prestidigitateur redoutable » et en relevant dans l'une de ses notes aux parties qu'«après un suspense de trois mois, il a enfin fait sortir de son chapeau le lapin " marché " »; qu'en écartant la demande de récusation de l'expert en relevant que son attitude n'allait pas au-delà de l'ironie, sans rechercher si les propos ainsi tenus et l'existence même de cette attitude, n'étaient pas de nature à faire naître un sérieux doute sur l'impartialité de l'expert dans l'esprit de l'exposante, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 234 et 341 du Code de procédure civile, ensemble l'article 6§1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales,

ALORS, D'AUTRE PART, QUE l'expert judiciaire est tenu d'une obligation d'impartialité sous peine de récusation ; que l'article 341 du nouveau Code de procédure civile, auquel renvoie l'article 234 du même code, qui prévoit des cas de récusation, n'épuise pas l'exigence d'impartialité requise de tout expert judiciaire ; qu'en se bornant à relever que le fait de déjeuner avec les experts et conseils de l'assureur ne permettait pas de caractériser un sentiment d'amitié notoire pour écarter la demande de récusation de l'expert, sans rechercher, ainsi qu'elle y était pourtant invitée, si ce fait n'était pas de nature à faire naître un doute légitime sur l'impartialité de l'expert chez la société Lion Salaisons Normandie, la Cour d'appel a violé les articles 234 et 341 du Code de procédure civile ensemble l'article 6§1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales,

ALORS, ENFIN, QU'en se bornant à apprécier les éléments de faits invoqués par la société Lion Salaisons Normandie à l'appui de sa demande de récusation isolément sans rechercher si de tels éléments, pris dans leur ensemble et globalement, ne pouvaient pas, du fait de leur conjonction et leur répétition, faire naître un doute légitime sur l'impartialité de l'expert chez la société Lion Salaisons Normandie, la Cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard de l'article 6§1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné la SA AXA France IARD à verser à la société Lion Salaisons Normandie la somme de 1.063.993,60 euros au titre de l'indemnité d'assurance,

AUX MOTIFS QUE, « la S.A. LIONS SALAISONS NORMANDIE demande 80.875,73 euros, sur la base d'un coût des travaux de 1.541.289 euros ; que la S.A. AXA FRANCE IARD offre 46.440,57 euros, somme supérieure à l'estimation de l'expert, et qui sera retenue »,

ALORS QUE selon le contrat d'assurance, comme l'ont constaté tant les parties que les premiers juges, l'indemnité forfaitaire et complémentaire versée au titre des pertes indirectes est égale à 10% du dommage lorsque celui-ci est égal ou inférieur à 76.224,50 euros et, lorsqu'il est supérieur à ce montant, à 10% jusqu'à 76.224,50 euros et 5% au-delà ; que la Cour d'appel a évalué le dommage, c'est-à-dire le coût de reconstruction à la somme de 895.502,66 quand la société AXA l'évaluait à la somme de 852.587 euros ; qu'en se bornant à accorder à la société Lion Salaisons Normandie au titre de la garantie pertes indirectes la somme offerte par AXA et calculée à partir d'un coût de reconstruction inférieur à celui qu'elle a retenu, la Cour d'appel a violé l'article 1134 du Code civil.

TROISIEMEN MOYEN DE CASSATION

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR rejeté les autres demandes des parties en ce compris la demande de la société Lion Salaisons Normandie tendant à voir condamner la compagnie AXA Assurances à lui verser la somme de 10.000 euros pour sa résistance abusive,

AUX MOTIFS QUE, «- Sur les demandes de dommages-intérêts pour procédure abusive : que la S.A. LIONS SALAISONS NORMANDIE demande 10.000 euros de dommages-intérêts à la S.A. AXA FRANCE IARD, et la S.A. AXA FRANCE IARD la même somme à celle-là, pour procédure abusive ; que l'appel est un droit dont l'exercice n'est susceptible de dégénérer en abus, que s'il est dicté par une intention malicieuse, la mauvaise foi ou résulte d'une erreur grossière équipollente au dol, ou procède à tout le moins d'une légèreté blâmable ; (…)qu'en ce qui concerne la demande de la S.A. LIONS SALAISONS NORMANDIE, la société AXA prospérant aussi pour partie en ses prétentions, cette demande doit aussi être rejetée»,

ALORS QUE, la société Lion Salaisons Normandie sollicitait la condamnation de la société AXA à lui verser la somme de 10.000 euros à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive ; qu'en la déboutant de cette demande au motif que la société AXA prospérant pour partie en ses prétentions, elle devait être déboutée de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive, la Cour d'appel a méconnu les termes du litige en violation des articles 4 et 5 du Code de procédure civile.


Moyens produits par la SCP Célice, Blancpain et Soltner, avocat aux Conseils pour la société Axa France IARD venant aux droits des sociétés Axa Courtage et de l'UAP (demanderesses au pourvoi incident).

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné la société AXA FRANCE IARD à payer à la société LION SALAISONS NORMANDIE la somme de 1.063.993,60 € au titre de l'indemnité d'assurance ;

AUX MOTIFS QUE :
2. Les garanties complémentaires
- Les honoraires d'architecte : Considérant que la SA LION SALAISONS NORMANDIE sollicite un taux de 12 % de la valeur des travaux pour ce poste ; que la SA AXA FRANCE IARD conclut au débouté, au motif que la SA LION SALAISONS NORMANDIE n'a pas reconstruit ; que toutefois la police ne prévoyant pas une telle exclusion, ce poste doit être indemnisé ;
que l'expert ayant relevé que la reconstruction à l'identique ne posant pas de difficultés, du fait que les plans existent encore, le taux de 6 % qu'il a retenu sera jugé juste, et la somme de 50.455 euros allouée ;

1°/ ALORS QUE le contrat d'assurance dans sa version résultant de l'avenant du 15 janvier 1998, avenant dont les sociétés AXA et LION SALAISONS NORMANDIE reconnaissaient l'une et l'autre qu'il était applicable au présent litige, ne prévoyait plus, au chapitre « garanties complémentaires », la prise en charge des frais d'architecte, comme le faisait valoir la société AXA à titre principal (cf. contrat d'assurance UAP, avenant du 15 janvier 1998 « CONVENTIONS SPECIALES » annexé au contrat, « DEUXIEME PARTIE : GARANTIES COMPLEMENTAIRES», p. 5) ; qu'en condamnant néanmoins cette dernière à payer à la société LION SALAISONS NORMANDIE la somme de 50.455 euros au titre de la prise en charge des honoraires d'architecte, la Cour d'appel a méconnu les stipulations contractuelles de la police d'assurance et violé l'article 1134 du Code civil.

2°/ ALORS QU' en se déterminant ainsi, sans s'expliquer sur le moyen des conclusions d'AXA qui soutenait que la police ne couvrait pas les honoraires d'architecte, la Cour a violé l'article 455 du Code de procédure civile ;

3°/ ALORS, SUBSIDIAIREMENT, QU' à supposer qu'elle se soit fondée sur le contrat d'assurance dans sa version antérieure à la conclusion de l'avenant du 15 janvier 1998, lequel stipulait que « les assureurs garantissent à la suite d'un dommage couvert au titre des garanties ci-dessus : (…) VII. Les honoraires de l'architecte reconstructeur (…) dont l'intervention serait nécessaire » (cf. contrat d'assurance UAP, « DEUXIEME PARTIE : GARANTIES COMPLEMENTAIRES », point VII, p. 9), la Cour d'appel, en faisant application d'un contrat qui ne régissait plus les relations des parties, a violé l'article 1134 du Code civil.

4°/ ET ALORS, ENCORE PLUS SUBSIDIAIREMENT, QU' à supposer que la Cour d'appel se soit fondée sur le contrat d'assurance dans sa version antérieure à la signature de l'avenant du 15 janvier 1998, ce dernier stipulait que « les assureurs garantissent à la suite d'un dommage couvert au titre des garanties ci-dessus : (…) VII. Les honoraires de l'architecte reconstructeur (…) dont l'intervention serait nécessaire» (cf. contrat d'assurance UAP, « DEUXIEME PARTIE : GARANTIES COMPLEMENTAIRES », point VII, p. 9) ; que seuls étaient ainsi couverts au titre des garanties complémentaires originairement stipulées les frais d'honoraires d'architecte dont l'intervention aurait été nécessaire à la reconstruction du bien endommagé ; qu'en condamnant la société AXA à prendre en charge les frais d'architecte, au motif que la police ne prévoyait pas « d'exclusion » de la garantie concernant les honoraires d'architecte en l'absence de reconstruction du bien endommagé, la Cour d'appel a en tout état de cause dénaturé les termes pourtant clairs et précis de la police d'assurance en sa version antérieure à l'avenant du 15 janvier 1998 et violé en conséquence l'article 1134 du Code civil.

SECOND MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné la société AXA FRANCE IARD à payer à la société LION SALAISONS NORMANDIE la somme de 1.063.993,60 € au titre de l'indemnité d'assurance ;

AUX MOTIFS QUE :
2. Les garanties complémentaires (…)
- La garantie démolition déblais : Considérant que la SA LION SALAISONS NORMANDIE demande la somme de 140.141,60 euros ; qu'il y a lieu de relever que la somme réclamée au cours de l'expertise était de 145.000 francs, somme offerte par la SA AXA FRANCE IARD, et acceptée par l'expert ; que devant la Cour, la SA AXA FRANCE IARD accepte le montant d'une facture de 19.818,37 euros sous réserve de justification du payement, non fondée ; que c'est donc cette somme qui sera allouée, aucune obligation de reconstruction n'étant stipulée dans la police ;

1°/ ALORS QUE la police d'assurance stipulait que «les assureurs garantissent à la suite d'un dommage couvert au titre des garanties ci-dessus : (…) III. Les frais de déblais, de démolition, de déplacement et replacement rendus nécessaires du fait du sinistre et ce, à concurrence des frais réels » (cf. contrat d'assurance UAP, avenant du 15 janvier 1998 « CONDITIONS SPECIALES » annexé au contrat, « DEUXIEME PARTIE : GARANTIES COMPLEMENTAIRES », point III, p. 5) ; que la police subordonnait ainsi la prise en charge des frais de déblais à la preuve des frais réellement engagés par le bénéficiaire de la police ; qu'en l'espèce, la société AXA faisait valoir que la seule facture afférente à de tels frais versée aux débats était établie au nom de la société UNICOMI sans que la société LION SALAISONS NORMANDIE démontre en avoir personnellement assumé le paiement ; qu'en condamnant néanmoins la société AXA à payer la somme de 19.818,37 € à la société LION SALAISONS NORMANDIE au titre des frais de déblais et de démolition, sans vérifier si cette dernière avait effectivement et personnellement pris en charge les frais de déblais et de démolition, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134 du Code civil.

2°/ ALORS EN TOUT ETAT DE CAUSE QUE le jugement doit être motivé ; qu'en se bornant à énoncer que « devant la Cour, la SA AXA FRANCE IARD accepte le montant d'une facture de 19.818,37 € sous réserve de justification du payement, non fondée » sans s'expliquer sur les raisons qui rendaient cette réserve non fondée, la Cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné la société AXA FRANCE IARD à payer à la société LION SALAISONS NORMANDIE la somme de 1.063.993,60 € au titre de l'indemnité d'assurance ;

AUX MOTIFS QUE :
2. Les garanties complémentaires (…)
- La garantie perte de loyers : Considérant que la SA LION SALAISONS NORMANDIE sollicite deux années de loyers, soit 131.411,04 euros, au titre de loyers qu'elle n'a pas pu encaisser ; Que la SA AXA FRANCE IARD conclut au débouté au motif que la garantie ne profite qu'au bailleur, alors que la SA LION SALAISONS NORMANDIE était locataire, et ne devait qu'une indemnité résiduelle ; mais considérant que la SA LION SALAISONS NORMANDIE a de fait perdu une chance d'encaisser des loyers ; que l'expert a évalué ce poste 339.701 francs (51.787 euros), somme que la société AXA et la SA LION SALAISONS NORMANDIE avaient alors acceptée ;
Que c'est donc cette somme qui sera retenue ;

1°/ ALORS QUE la police d'assurance stipulait que «les assureurs garantissent à la suite d'un dommage couvert au titre des garanties ci-dessus : I. Le paiement des loyers au bailleur durant le temps effectif de la réparation des dommages, proportionnellement à la partie des biens détruite, et ce avec un maximum de deux années » (cf. contrat d'assurance UAP, avenant du 15 janvier 1998 « CONDITIONS SPECIALES » annexé au contrat, « DEUXIEME PARTIE : GARANTIES COMPLEMENTAIRES », point I, p. 5) ; que la police précisait en outre que la garantie « perte de loyers» « a pour objet le versement des loyers au Bailleur en cas d'impossibilité pour le Preneur ou l'occupant d'utiliser temporairement tout ou partie des locaux après un sinistre. Elle s'exerce donc au profit exclusif du Bailleur qui devra apporter les justificatifs de son préjudice, le locataire pouvant être dispensé de ses obligations dans la limite de cette garantie. La garantie s'applique en prenant pour base les loyers concernant tant, l'occupation des locaux que le bail à construction, éventuellement indexé, et fixé au CONTRAT DE CREDIT BAIL OU DE BAIL » (cf. contrat d'assurance UAP, avenant du 15 janvier 1998 «CONDITIONS PARTICULIERES » annexé au contrat, «DISPOSITIONS SPECIALES D'ASSURANCE », section « B. PERTE DES LOYERS », p. 15) ; que la prise en charge de la perte des loyers était ainsi exclusivement réservée au bailleur souscripteur de l'assurance ; qu'en condamnant néanmoins la société AXA à payer la somme de 51.787 € à la société LION SALAISONS NORMANDIE en indemnisation de sa perte de chance d'encaisser des loyers, la Cour d'appel a méconnu les stipulations contractuelles de la police d'assurance et violé l'article 1134 du Code civil.

2°/ ALORS QUE la police d'assurance AXA stipulait que « les assureurs garantissent à la suite d'un dommage couvert au titre des garanties ci-dessus : I. Le paiement des loyers au bailleur durant le temps effectif de la réparation des dommages, proportionnellement à la partie des biens détruite, et ce avec un maximum de deux années » (cf. contrat d'assurance UAP, avenant du 15 janvier 1998 « CONDITIONS SPECIALES » annexé au contrat, « DEUXIEME PARTIE : GARANTIES COMPLEMENTAIRES », point I, p. 5) ; que seuls étaient ainsi couverts les loyers perdus pendant la réparation effective des dommages causés par le sinistre ; que la Cour d'appel a expressément constaté « qu'il est constant et non discuté qu'il n'y a pas eu reconstruction à ce jour » ; qu'en condamnant néanmoins la société AXA à indemniser la société LION SALAISONS NORMANDIE au titre de sa prétendue perte de chance d'encaisser des loyers, la Cour d'appel a méconnu les stipulations contractuelles de la police d'assurance et violé l'article 1134 du Code civil.

3°/ ALORS EN TOUT ETAT DE CAUSE QU' en se bornant à énoncer que la société LION SALAISONS NORMANDIE avait de fait perdu une chance d'encaisser des loyers pour condamner la société AXA à lui payer la somme de 51.787 €, sans s'expliquer sur les raisons justifiant qu'AXA soit tenue au paiement d'une indemnité pour « perte de chance » d'encaisser des loyers, indemnité n'entrant pas dans les prévisions du contrat, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale, au regard des articles 1134 et 1147 du Code civil ;

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