Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 26 octobre 2010, 09-41.002, Inédit

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué que M. X... a été engagé par la société E2C aux droits de laquelle vient la société Fiduciaire nationale d'expertise comptable, en qualité de cadre comptable par contrat de travail du 1er juin 2001 ; que par avenant du 5 février 2003, avec effet au 1er janvier 2003, il a été promu directeur d'agence et a été soumis à un forfait en jours de travail à l'année ; qu'ayant démissionné par lettre du 2 décembre 2006, il a saisi la juridiction prud'homale pour voir dire que cette démission s'analysait en une prise d'acte produisant les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse et obtenir paiement de diverses sommes ;

Sur les premier, deuxième, troisième moyen pris en ses trois premières branches et quatrième moyens du pourvoi principal du salarié :

Attendu que ces moyens ne sont pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;

Mais sur le troisième moyen pris en sa quatrième branche du pourvoi principal du salarié :

Vu les articles L. 3121-45 et L. 3121-48 du code du travail, 8. 1. 2. 5 de la convention collective des cabinets d'experts-comptables et de commissaires aux comptes étendue par arrêté du 20 février 2001 ;

Attendu que, pour débouter le salarié de sa demande en paiement d'heures supplémentaires pour la période postérieure au 5 février 2003 et de sa demande tendant à faire produire à la rupture du contrat les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, l'arrêt retient que le contrat de travail liant les parties contient une convention de forfait en jours ; que la convention collective des experts-comptables satisfait à toutes les conditions posées par l'article L. 3121-45 du code du travail dès lors que son article 8. 1. 2. 5 prévoit d'une part que l'employeur prend les dispositions nécessaires pour permettre le respect des articles L. 220-1, L. 221-2 et L. 221-4 du code du travail, et d'autre part que les modalités de suivi de l'organisation du travail des salariés concernés, de l'amplitude de leurs journées d'activité et de la charge de travail qui en résulte, sont examinées par le cadre et l'employeur qui définissent ensemble les moyens permettant de maîtriser et d'adapter la charge de travail et sa répartition dans le temps ;

Attendu, cependant, que, selon l'article L. 3121-40 du code du travail, la conclusion de conventions individuelles de forfait pour les cadres autonomes ne relevant pas des dispositions des articles L. 3111-2 et L. 3121-39 doit être prévue par une convention ou un accord collectif étendu ou par une convention ou un accord d'entreprise ou d'établissement qui détermine les catégories de cadres susceptibles de bénéficier de ces conventions ainsi que les modalités et les caractéristiques principales de celles-ci ; que les articles L. 3121-45 et L. 3121-48 du même code, relatifs aux conventions de forfait en jours, disposent notamment que la convention ou l'accord détermine les conditions de contrôle de son application et prévoit des modalités de suivi de l'organisation du travail des salariés concernés, de l'amplitude de leurs journées d'activité et de la charge de travail qui en résulte, ainsi que les modalités concrètes d'application des dispositions des articles L. 3131-1 relatives au repos quotidien et des articles L. 3132-1, L. 3132-2 et L. 3164-2 relatives au repos hebdomadaires ; qu'il en résulte que lesdites modalités ne peuvent être prévues que par convention ou accord collectif ;

Qu'en statuant comme elle a fait, alors qu'il se déduisait de ses constatations que les modalités exigées par les articles L. 3121-45 et L. 3121-48 du code du travail n'avaient pas été prévues par la convention collective et avaient été laissées à l'initiative des parties ou de employeur, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

Et sur le cinquième moyen du pourvoi principal du salarié :

Vu l'article 1315 du code civil, ensemble le principe fondamental de libre exercice d'une activité professionnelle, les articles 1134 et 1147 du code civil ;

Attendu que le respect par un salarié d'une clause de non-concurrence illicite lui cause nécessairement un préjudice dont il appartient au juge d'apprécier l'étendue et qu'il incombe à l'employeur qui s'oppose à la demande en paiement de dommages-intérêts de ce chef de prouver que le salarié n'a pas respecté cette clause ;

Attendu que, pour limiter à la somme de 1 000 euros la demande de dommages-intérêts du salarié relative à la clause de non-concurrence, après avoir constaté la nullité de celle-ci en raison de l'absence de contrepartie financière, l'arrêt retient d'une part que la stipulation au contrat de travail d'une clause de non-concurrence nulle crée nécessairement un préjudice au salarié en ce qu'elle constitue une gêne à la recherche d'un nouvel emploi tant durant l'exécution du contrat du travail car elle réduit ses possibilités de démissionner qu'après sa rupture, restreignant la prospection d'un nouvel emploi et d'autre part que le 27 décembre 2006, en accusant réception de la démission de M. X..., la société Fiduciaire nationale d'expertise comptable a levé la clause de non-concurrence ; que contrairement à ce que prétend le salarié, en l'absence de contrepartie, celle clause était stipulée dans le seul intérêt de l'employeur qui pouvait y renoncer sans son accord ; que compte tenu de la limitation à la liberté de l'emploi qui ne s'est exercée que durant l'exécution du contrat de travail, le préjudice résultant de la nullité de la clause soit être évalué à la somme de 1 000 euros ;

Qu'en statuant ainsi, par des motifs inopérants, sans rechercher comme il lui était demandé, si le salarié avait respecté la clause illicite, la cour d ‘ appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le pourvoi incident :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a débouté M. X... de sa demande en paiement d'heures supplémentaires pour la période postérieure au 5 février 2003 et de ses demandes subséquentes relatives à la prise d'acte de la rupture du contrat de travail et au droit à la formation et en ce qu'il a condamné la société Fiduciaire nationale d'expertise comptable à payer la somme de 1 000 euros à titre de dommages-intérêts pour la clause de non-concurrence, l'arrêt rendu le 10 décembre 2008, entre les parties, par la cour d'appel de Montpellier ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Toulouse ;

Laisse à chaque partie la charge de ses propres dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Fiduciaire Nationale d'expertise comptable à payer à M. X... la somme de 2 500 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-six octobre deux mille dix.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits au pourvoi principal par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils pour M. X...


PREMIER MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à la décision attaquée d'AVOIR dit bien fondé l'avertissement du 20 novembre 2006 et d'AVOIR refusé de faire produire à la prise d'acte par Monsieur X... de la rupture de son contrat de travail les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, et débouté le salarié de sa demande au titre du droit individuel à la formation ;

AUX MOTIFS QUE bien que Monsieur X... ne sollicite pas l'annulation de l'avertissement donné par son employeur le 20 novembre 2006, il invoque dans sa lettre de démission essentiellement cette sanction dont il conteste le bien-fondé pour justifier la rupture du contrat de travail ; qu'il convient donc de l'examiner ; que l'avertissement du 20 novembre 2006 reproche à Monsieur X... une absence pour congés payés du 25 au 30 septembre 2006 sans demande de congés, le défaut de saisie des temps depuis le 1er octobre 2006, ainsi qu'un défaut de suivi des encaissements et de la situation des en-cours ; que dans sa lettre du 2 décembre 2006, Monsieur X... ne nie pas la matérialité des faits qui lui sont reprochés exposant que depuis 2001 il pose ses congés et en informe la direction sans confirmation écrite, il saisit les temps de manière irrégulière sans objection de l'employeur et il rencontre des difficultés pour obtenir le paiement des honoraires dus par les clients ; que si le reproche du suivi des encaissements n'apparaît pas fondé, les difficultés rencontrées ne provenant pas nécessairement d'un manquement de Monsieur X..., par contre les deux autres s'avèrent établis et la tolérance admise pendant plusieurs années envers le comportement du salarié n'interdisait la société Fiducial Expertise de prononcer contre lui un avertissement, sanction la plus modérée ; qu'ainsi l'avertissement du 20 novembre 2006 s'avère fondé ;

ALORS QU'un employeur ne peut pas imputer à faute à un salarié l'irrespect qu'il a longtemps toléré des procédures internes à l'entreprise ; qu'en l'espèce, la Cour d'Appel a elle-même constaté que le salarié faisait valoir qu'il ne pouvait lui être reproché, par avertissement du 20 novembre 2006, ni une absence pour congés payés du 25 au 30 septembre 2006 sans demande préalable, ni le défaut de saisie des temps de travail depuis le 1er octobre 2006, dès lors que « depuis 2001 époque de son embauche, il pose ses congés et en informe la direction sans confirmation écrite, il saisit les temps de manière irrégulière sans objection de l'employeur » ; qu'en jugeant fondé l'avertissement infligé au salarié en affirmant péremptoirement que « la tolérance admise pendant plusieurs années envers le comportement du salarié n'interdisait la société Fiducial Expertise de prononcer contre lui un avertissement, sanction la plus modérée », sans à tout le moins constater que l'employeur avait préalablement indiqué au salarié qu'il entendait mettre fin aux pratiques en vigueur depuis son embauche, la Cour d'Appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1222-1 et L. 1331-1 et suivants du Code du travail.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à la décision attaquée d'AVOIR rejeté les demandes de rappel de salaire et de primes sur objectifs de Monsieur X... et d'AVOIR refusé de faire produire à sa prise d'acte de la rupture de son contrat de travail les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, et débouté le salarié de sa demande au titre du droit individuel à la formation ;

AUX MOTIFS QUE Monsieur X... se plaint de ne pas avoir bénéficié en 2006 et 2005 de l'augmentation annuelle des salaires exposant que le gel de sa rémunération constituait une pression pour qu'il signe l'avenant à son contrat de travail modifiant la clause de non-concurrence ; qu'aucune disposition conventionnelle ou contractuelle ne prévoit une augmentation annuelle des salaires et leur existence les années précédentes ne crée aucun droit à leur renouvellement ; qu'il se prévaut du budget de l'agence qu'il dirigeait qui porte mention d'une augmentation de sa rémunération de 1, 9 % ; que la société Fiducial Expertise prétend qu'il ne s'agit qu'une proposition de budget élaborée par lui et qui n'a pas obtenu l'accord de la direction laquelle compte tenu d'une prime de 6 000 euros versée en mars 2006 a décidé d'attendre les résultats de l'exercice pour décider si une augmentation devait intervenir ; qu'ainsi rien n'établit le droit de Monsieur X... aux augmentations de salaire qu'il réclame ; que Monsieur X... réclame la somme de 7 000 euros pour prime sur objectifs ; qu'il étaye peu sa demande n'indiquant ni les dispositions ouvrant droit à cette prime ni les modalités de son calcul ; que si la société Fiducial Expertise reconnaît qu'une telle prime était habituellement versée, elle indique qu'elle supposait que le directeur d'agence atteigne les objectifs fixés et que tel n'a pas été le cas en 2006 le chiffre d'affaires s'étant élevé à la somme de 759. 621 euros contre celle de 852. 078 euros prévue au budget ; que Monsieur X... ne fournit aucune explication appuyant ses demandes de commissions juridiques A2C de 439, 04 euros et de commissions surprime de 1602, 04 euros ; que le bien-fondé de sa prétention de ce chef ne peut être retenu ;

1) ALORS QUE l'employeur ne peut pas priver un salarié d'une augmentation de salaire accordée annuellement à l'ensemble des salariés ; que précisément en l'espèce, le salarié faisait valoir que depuis son embauche, il avait toujours bénéficié d'une augmentation annuelle comme l'ensemble des salariés de l'entreprise jusqu'en janvier 2005, date à partir de laquelle l'employeur l'a privé de l'augmentation générale des salaires accordée aux autres salariés (conclusions d'appel du salarié page 11 et 12) ; qu'en rejetant sa demande de rappel de salaire en affirmant péremptoirement « qu'aucune disposition conventionnelle ou contractuelle ne prévoit une augmentation annuelle des salaires et leur existence les années précédentes ne crée aucun droit à leur renouvellement », sans rechercher si, compte tenu des augmentations dont le reste du personnel a continué à bénéficier après 2005, le salarié ne pouvait pas se prévaloir d'une obligation pour l'employeur de le faire bénéficier, comme l'ensemble des salariés, d'une augmentation annuelle de salaire, la Cour d'Appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134 du Code civil ;

2) ALORS par ailleurs QU'en affirmant que le salarié ne pouvait prétendre au paiement d'un rappel de prime sur objectif au seul prétexte que « si la société Fiducial Expertise reconnaît qu'une telle prime était habituellement versée, elle indique qu'elle supposait que le directeur d'agence atteigne les objectifs fixés et que tel n'a pas été le cas en 2006 le chiffre d'affaires s'étant élevé à la somme de 759. 621 euros contre celle de euros prévue au budget », sans rechercher si, tel que les premiers juges l'avait retenu et tel que le faisait valoir le salarié, la prime n'avait pas été versée à Monsieur X... les années précédentes bien qu'il n'ait pas atteint ses objectifs, ce qui était de nature à établir que l'atteinte des objectifs n'était pas une condition de son paiement, la Cour d'Appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134 du Code civil ;

3) ALORS en tout état de cause QUE les juges du fond sont tenus de répondre aux conclusions des parties ; qu'en l'espèce, le salarié faisait valoir qu'il avait fait l'objet d'une discrimination salariale, rien ne justifiant objectivement qu'il ne bénéficie pas d'augmentations et de primes sur objectifs comme les autres salariés, ses résultats n'étant pas moins bons, et même souvent meilleurs (conclusions d'appel page 34 et 35) ; qu'en omettant de répondre à ce chef péremptoire de conclusions, la Cour d'Appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à la décision attaquée d'AVOIR rejeté les demandes de Monsieur X... au titre des heures supplémentaires et de paiement d'indemnités pour privation du repos compensateur et travail dissimulé et d'AVOIR refusé de faire produire à sa prise d'acte de la rupture de son contrat de travail les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, et débouté le salarié de sa demande au titre du droit individuel à la formation ;

AUX MOTIFS QUE sur la période du 23 mai 2002 au 4 février 2003 : en matière des heures de travail effectuées, il résulte de l'article L. 3171-4 du Code du travail que leur preuve n'incombe pas spécialement à l'une des parties et que l'employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié ; que cependant, il appartient à ce dernier de fournir préalablement au juge des éléments de nature à étayer sa demande ; que le décompte produit par Monsieur X... n'étaye pas suffisamment sa demande car il comporte un nombre important d'heures de travail mentionnant comme client lui-même, ce qui à l'évidence correspond à une activité consacrée à d'autres tâches que l'établissement de la comptabilité et qui en absence d'autres éléments ne peut être retenue comme temps de travail au-delà de la durée contractuelle ;

1) ALORS QUE les juges du fond ne peuvent pas dénaturer les écrits soumis à leur appréciation ; qu'en l'espèce, pour étayer sa demande au titre des heures supplémentaires, le salarié ne versait pas aux débats un simple décompte, mais des extraits d'un document interne à l'entreprise intitulé « journal par assistant » et retraçant l'intégralité de ses activités pour l'entreprise, au fur et à mesure de leur exécution, durant la période litigieuse ; qu'en affirmant néanmoins que le salarié aurait produit un décompte qui n'était pas de nature à étayer sa demande, la Cour d'Appel a ignoré la réalité du document versé aux débats et a violé l'article 1134 du Code civil ;

2) ALORS en outre QUE si par application de l'article L. 212-1-1 devenu L. 3171-4 du Code du travail, il appartient en premier lieu au salarié qui formule une demande d'heures supplémentaires de fournir des éléments de nature à étayer sa demande, constitue un tel élément un document retraçant le temps qu'il a passé à la disposition de son employeur ; qu'en affirmant en l'espèce que « le décompte produit par Monsieur X... n'étaye pas suffisamment sa demande car il comporte un nombre important d'heures de travail mentionnant comme client lui-même, ce qui à l'évidence correspond à une activité consacrée à d'autres tâches que l'établissement de la comptabilité », sans dire en quoi les attributions du salarié n'impliquaient pas qu'il consacre son temps de travail à d'autres tâches que l'établissement de la comptabilité, et qui pouvaient particulièrement concerner la gestion de l'agence à laquelle il était affecté et dont il est devenu officiellement directeur dès janvier 2003 tel que l'a constaté l'arrêt attaqué (page 2), la Cour d'Appel a privé sa décision de base légale au regard du texte précité ;

3) ALORS au surplus QUE si par application de l'article L. 212-1-1 devenu L. 3171-4 du Code du travail, il appartient en premier lieu au salarié qui formule une demande d'heures supplémentaires de fournir des éléments de nature à étayer sa demande, constitue un tel élément un document retraçant le temps qu'il a passé à la disposition de son employeur ; qu'en affirmant en l'espèce que « le décompte produit par Monsieur X... n'étaye pas suffisamment sa demande car il comporte un nombre important d'heures de travail mentionnant comme client lui-même, ce qui à l'évidence correspond à une activité consacrée à d'autres tâches que l'établissement de la comptabilité », sans dire en quoi indépendamment même du temps consacré par le salarié à d'autres tâches que l'établissement de la comptabilité, le « journal par assistant » concernant Monsieur X... qui était versé aux débats ne montrait pas un nombre d'heures de travail tel que sa demande d'heures supplémentaires devait être regardée comme suffisamment étayée, la Cour d'Appel a derechef privé sa décision de toute base légale ;

ET AUX MOTIFS QUE sur la période à compter du 5 février 2003 : Monsieur X... conteste l'application à son égard d'un temps annuel de travail de forfait en jours ; qu'il se plaint que la société Fiducial Expertise n'a jamais veillé au respect de la limite de quarante-huit heures de travail hebdomadaire, au respect de la limite de onze heures de repos consécutif journalier, au respect de la limite de trente-cinq heures de repos hebdomadaire, à la limite de six jours consécutifs de travail et au respect de l'interdiction de travail le dimanche ; que Monsieur X... cadre autonome entrait dans la catégorie de cadres pouvant bénéficier d'un forfait jours annuel et la convention collective des experts comptables satisfait à toutes les conditions posées par l'article L. 3121-45 du Code du travail pour sa validité ; que cette convention prévoit en son article 8. 1. 2. 5 notamment que la charge de travail confiée ne peut obliger le cadre à excéder une limite de durée quotidienne de travail effectif fixée à dix heures et une limite hebdomadaire de travail effectif fixée à quarante-huit heures ; qu'elle ajoute que l'employeur prend les dispositions nécessaires pour permettre le respect des articles L. 220-1, L. 221-2 et L. 221-4 du Code du travail (L. 3131-1, L. 3131-1 et L. 3132-2 selon la nouvelle codification) et elle précise que le cadre disposant d'une grande liberté dans la conduite ou l'organisation des missions correspondant à sa fonction et dans la détermination du moment de son travail, le cadre et l'employeur examinent ensemble, afin d'y remédier, les situations dans lesquelles ces dispositions n'ont pu être respectées ; que l'obligation de respecter les limites maximales de travail est une obligation réciproque et en cas de dépassement le cadre et son supérieur doivent déterminer les contreparties liées à la surcharge ; que l'autonomie accordée à Monsieur X... était très importante car il dirigeait l'agence de Villefranche-de-Rouergue et n'était placé que sous l'autorité du directeur régional dont l'éloignement ne permettait pas un contrôle effectif du temps de travail II disposait de la plus grande latitude à organiser ses temps et rythme de travail ; que jamais durant la durée de la relation contractuelle. Monsieur X... ne s'est plaint de difficultés résultant de forfait jours annuel et de la difficulté à remplir sa tâche dans le respect de ses conditions ; que pour toute la période considérée, figuraient au projet de budget préparé chaque année par Monsieur X... pour l'agence qu'il dirigeait, les besoins en temps pour accomplir le travail prévu et les ressources humaines disponibles ; que pour chaque année il existe un excédent de temps parfois non négligeable par exemple de 1283 heures pour l'exercice 2004 / 2005 et de 1993 heures pour celui 2005 / 2006 ; qu'aucun élément n'est venu perturber ces prévisions et notamment pas un accroissement de l'activité, le chiffre d'affaires envisagé n'ayant pas été atteint ; qu'ainsi contrairement à ce que prétend Monsieur X... aucune surcharge de travail n'existait par rapport au temps de travail qu'il avait défini ; qu'aucune donnée ne montre la nécessité pour lui de travailler plus de quarante-huit heures par semaine, plus de six jours consécutifs ou le dimanche, de prendre un repos de moins de onze heures entre deux jours de travail ou de trente-cinq heures pour le repos hebdomadaire ; que la convention de forfait jours annuel s'avère valable et Monsieur X... doit être débouté de sa demande concernant un rappel de salaire pour la période postérieure au 5 février 2003 ; qu'ainsi Monsieur X... doit être débouté de sa demande en paiement des heures supplémentaires et de celles subséquentes en indemnités pour privation du repos compensateur et travail dissimulé ;

4) ALORS QUE l'article L. 212-15-3 III du Code du travail devenu L. 3121-45 exige que la convention ou l'accord collectif de travail qui prévoit la conclusion de conventions de forfait en jours précise également « les conditions de contrôle de son application » et « des modalités de suivi de l'organisation du travail des salariés concernés, de l'amplitude de leurs journées d'activité et de la charge de travail qui en résulte » ; qu'en affirmant en l'espèce que la convention collective des cabinets d'experts-comptables et de commissaires aux comptes du 9 décembre 1974 satisfaisait à ces exigences quand cette convention laissait à l'employeur le soin de « prend re les dispositions nécessaires pour permettre le respect des articles L. 220-1, L. 221-2 et L. 221-4 du Code du travail (un repos minimum de 11 heures entre deux journées de travail, limitation à 6 jours par semaine et respect de l'obligation d'un repos hebdomadaire d'une durée minimale de 35 heures consécutives) » et abandonnait au cadre et à l'employeur le soin de « défini r ensemble les moyens permettant, par un effort permanent d'organisation, de maîtriser et d'adapter la nouvelle charge de travail et sa répartition dans le temps » et d'« examine r ensemble, afin d'y remédier, les situations dans lesquelles ces dispositions de son article 8. 1. 2. 5 relatif aux conventions de forfait en jour n'ont pu être respectées », la Cour d'Appel a violé l'article L. 3121-45 susvisé ;

5) ALORS en tout état de cause QU'en retenant que l'employeur n'avait pas manqué à ses obligations résultant de l'article L. 3121-45 du Code du travail et 8. 1. 2. 5 de la convention collective des cabinets d'experts-comptables et de commissaires aux comptes du 9 décembre 1974, sans rechercher s'il avait effectivement « pris les dispositions nécessaires pour permettre le respect des articles L. 220-1, L. 221-2 et L. 221-4 du Code du travail (un repos minimum de 11 heures entre deux journées de travail, limitation à 6 jours par semaine et respect de l'obligation d'un repos hebdomadaire d'une durée minimale de heures consécutives) » tel qu'il y était tenu, la Cour d'Appel a privé sa décision de base légale au regard des textes susvisés.

QUATRIEME MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à la décision attaquée d'AVOIR rejeté la demande de Monsieur X... au titre des congés payés et d'AVOIR refusé de faire produire à sa prise d'acte de la rupture de son contrat de travail les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, et débouté le salarié de sa demande au titre du droit individuel à la formation ;

AUX MOTIFS QUE Monsieur X... réclame le paiement de la somme de 11681, 32 euros d'indemnité de congés payés représentant 15 jours pour l'année civile 2002, 9 jours pour l'année civile 2003, 9 jours pour l'année civile 2004, 13 jours pour l'année civile 2005 et 7 jours pour l'armée civile 2006 ; qu'il raisonne par année civile et non pas par période d'acquisition des congés payés (1er juin au 30 mai de l'année suivante) ni par période de prise des congés (1er mai au 30 avril de l'année suivante) ; qu'il ne fournit aucune indication sur les jours de congés acquis et pris selon ces périodes étant relevé que dans sa demande de congés du 12 juillet 2004 qu'il ne conteste pas avoir obtenu, il évalue à zéro les jours de congés restant pour l'année 2002 et à 8 ceux pour l'année 2003 contrairement à son actuelle prétention ; que sa demande est insuffisamment explicite pour qu'il y soit fait droit ;

ALORS QU'il appartient à l'employeur de justifier que le salarié a été mis en mesure de prendre chaque année les congés payés auxquels il a droit ; qu'en faisant peser en l'espèce la charge de cette preuve sur le salarié, la Cour d'Appel a violé l'article 1315 du Code civil.

CINQUIEME MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à la décision attaquée d'AVOIR limité à 1. 000 euros les dommages et intérêts dus à Monsieur X... à raison de l'existence d'une clause de non-concurrence nulle dans son contrat de travail ;

AUX MOTIFS QUE la clause de non-concurrence, en ce qu'elle porte atteinte au principe fondamental de libre exercice d'une activité professionnelle, n'est licite que si elle est indispensable à la protection des intérêts légitimes de l'entreprise, limitée dans le temps et dans l'espace, qu'elle tient compte des spécificités de l'emploi du salarié et comporte l'obligation pour l'employeur de verser au salarié une contrepartie financière ; que le contrat de travail initial stipule une clause de non-concurrence d'une durée de trois ans sur un périmètre de 100 kilomètres autour du lieu de travail du collaborateur ; que cette clause qui ne prévoit pas de contrepartie financière, s'avère nulle ; que la stipulation au contrat de travail d'une clause de non-concurrence nulle crée nécessairement un préjudice au salarié en ce qu'elle constitue une gêne à la recherche d'un nouvel emploi tant durant là période du contrat de travail car elle réduit ses possibilités de démissionner qu'après sa rupture, restreignant la prospection d'un noirci emploi ; que le 27 décembre 2006, en accusant réception de la démission de Monsieur X..., la société Fiducial Expertise a levé la clause de nonconcurrence ; que contrairement à ce que prétend le salarié, en absence de contrepartie, cette clause était stipulée dans le seul intérêt de l'employeur qui pouvait donc y renoncer sans son accord ; que compte tenu de la limitation à la liberté de l'emploi qui ne s'est exercée que durant l'exécution du contrat de travail, le préjudice résultant de la nullité de la clause de non-concurrence doit être évalué à la somme de 1 000 euros ;

1) ALORS QUE le préjudice consécutif à l'introduction dans un contrat de travail d'une clause de non-concurrence illicite est seulement fonction du respect de cette clause par le salarié ; que le fait que l'employeur ait entendu renoncer unilatéralement au bénéfice de la clause illicite lors de la rupture du contrat de travail est sans incidence sur l'existence et l'étendue du préjudice ; qu'en l'espèce, pour déterminer le préjudice consécutif à l'introduction dans le contrat de travail de Monsieur X... d'une clause de nonconcurrence illicite, la Cour d'Appel a pris en compte le fait que l'employeur avait voulu renoncer à son bénéfice lors de la prise d'acte par le salarié de la rupture de son contrat de travail ; qu'en statuant de la sorte quand seul devait être pris en compte le respect par le salarié de la clause illicite, la Cour d'Appel a violé les articles 1134 et 1147 du Code civil ;

2) ALORS au surplus QUE la nullité d'une clause contractuelle la fait disparaître rétroactivement et rend dès lors sans objet et sans effet la renonciation d'une partie à cette clause ; qu'en jugeant en l'espèce que l'employeur avait pu renoncer à la clause de non concurrence dont il a constaté la nullité pour en déduire que l'atteinte portée à la liberté de l'emploi du salarié était limitée, la Cour d'appel a violé l'article 1134 du Code civil.


Moyen produit au pourvoi incident par la SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez, avocat aux Conseils pour la société Fiducial nationale d'expertise comptable

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir condamné la Société FIDUCIAL EXPERTISE à payer à Monsieur X... 1 000 € de dommages-intérêts pour clause de non-concurrence illicite,

AUX MOTIFS QUE le contrat de travail initial stipule une clause de non-concurrence d'une durée de trois ans sur un périmètre de 100 kilomètres autour du lieu de travail du collaborateur ; que cette clause, qui ne prévoit pas de contrepartie financière s'avère nulle ; que la stipulation dans le contrat de travail d'une clause de non-concurrence nulle crée nécessairement un préjudice au salarié en ce qu'il constitue une gêne à la recherche d'un nouvel emploi tant durant la période du contrat de travail, car elle réduit ses possibilités de démissionner qu'après sa rupture, restreignant la prospection d'un nouvel emploi ; que le 27 septembre 2006, en accusant réception de la démission de Monsieur X..., la Société FIDUCIAL EXPERTISE a levé la clause de non-concurrence, et que, contrairement à ce que prétend le salarié, en l'absence de contrepartie, cette clause était stipulée dans le seul intérêt de l'employeur qui pouvait donc y renoncer sans son accord ; que, compte tenu de la limitation à la liberté de l'emploi qui ne s'est exercée que durant l'exécution du contrat de travail, le préjudice résultant de la nullité de la clause de non-concurrence doit être évalué à la somme de 1 000 € ;

ALORS QUE la Cour d'appel, relève que la Société FIDUCIAL EXPERTISE avait levé la clause de non-concurrence le 27 décembre 2006 en accusant réception de la démission de Monsieur X..., et que la limitation à la liberté de l'emploi qu'elle estime avoir été subie par le salarié ne s'était exercée que durant l'exécution de son contrat de travail, ce dont il résultait que Monsieur X... n'avait pas été amené à respecter la clause de non-concurrence illicite, et qu'il n'avait subi aucun préjudice ; qu'en statuant de la sorte, elle a violé l'article 1134 du Code civil.

Retourner en haut de la page