Cour de cassation, civile, Chambre civile 3, 26 mai 2010, 09-15.317, Publié au bulletin

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :



Sur le moyen unique :

Vu l'article 1178 du code civil, ensemble l'article 1315 du même code ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Caen, 21 avril 2009), que par acte notarié du 29 mars 2005, les époux X... ont consenti à M. Y... une promesse unilatérale de vente d'un immeuble, valable jusqu'au 16 juin 2005, sous la condition suspensive de l'obtention, au plus tard le 18 mai 2005, d'un prêt d'un montant de 400 000 euros, et moyennant le versement d'une indemnité d'immobilisation ; que la vente n'ayant pas été réalisée, M. Z... a assigné les époux X... en restitution de l'indemnité d'immobilisation ;

Attendu que pour le débouter de sa demande, l'arrêt, qui constate que M. Y... a présenté une première demande de prêt le 7 avril 2005 puis une seconde le 8 juillet 2005, après avoir obtenu une prorogation de la promesse jusqu'au 15 juillet 2005, et que le prêt ne lui a été accordé que le 29 juillet 2005, retient qu'il ne démontre pas que la non-obtention du prêt nécessaire à l'acquisition dans le délai convenu, voire au plus tard le 15 juillet 2005, ne lui est pas imputable ;

Qu'en statuant ainsi, alors qu'il appartient au promettant de rapporter la preuve que le bénéficiaire d'une promesse de vente sous condition suspensive d'obtention d'un prêt, qui démontre avoir présenté au moins une offre de prêt conforme aux caractéristiques stipulées à la promesse, a empêché l'accomplissement de la condition, la cour d'appel, qui a inversé la charge de la preuve, a violé les textes susvisés ;



PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 21 avril 2009, entre les parties, par la cour d'appel de Caen ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Caen, autrement composée ;

Condamne les époux X... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande des époux X... et les condamne, ensemble, à payer à M. Y... la somme de 2 500 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-six mai deux mille dix.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par la SCP Le Griel, avocat aux Conseils pour M. Y...

Le pourvoi reproche à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir condamné le bénéficiaire de la promesse à payer aux promettants le montant de l'indemnité d'immobilisation, outre les intérêts au taux légal à compter du 10 novembre 2005,

aux motifs qu'il résulte de l'examen des pièces produites que, le 7 avril 2005, M. Y... a déposé auprès de la Caisse d'Epargne une demande de prêt d'un montant de 400 000 € au taux de 3,5% l'an, remboursable en deux cent dix mensualités, qu'il a, le 16 mai 2005, quoique se prévalant du défaut de réalisation de la condition suspensive, sollicité auprès de Maître A..., notaire des époux X..., la prorogation de la date limite d'obtention du prêt « en raison d'une demande de renseignements complémentaires portant entre autres sur la nature et le montant des travaux à réaliser », qu'après échange de courriers et sans répondre à cette demande, Maître A... a, le 23 juin 2005, informé M. Y... de l'accord des époux X... pour « proroger la promesse de vente jusqu'au 15 juillet 2005, dernier délai », qu'il n'est pas justifié d'un accord de prêt qui serait intervenu avant cette date, mais seulement d'un fax adressé le 8 juillet 2005 par la Caisse d'épargne à Maître A... pour l'informer du dépôt le même jour d'une demande d'un prêt de 400 000 € au taux de 2,95 % l'an remboursable sur quinze ans, que cet établissement a, le 29 juillet 2005, délivré une attestation d'accord de prêt sous conditions, portant sur une somme de 400 000 € au taux de 3,25 % l'an, remboursable sur quinze ans, puis, le 19 août 2005, adressé à Maître A... la copie d'une offre de prêt correspondante, que le prêt n'a donc pas été obtenu dans le délai d'acquisition prorogé, que les appelants font valoir que la demande de prêt du 7 avril 2005 n'a pu prospérer faute de diligences du postulant, qu'ils en veulent pour preuve, notamment, outre les termes sus-rapportés du courrier du 16 mai 2005, un courrier du 30 mai suivant dans lequel M. Y... indique à Maître A... : « Aujourd'hui j'ai mis à la disposition du banquier tous les éléments nécessaires et je devrais obtenir une réponse dans le mois et donc pouvoir signer l'acte définitif aux alentours du 15 juillet » ainsi que le dépôt d'une seconde demande de prêt, qu'ils observent au surplus qu'il s'avère que M. Y... a souhaité négocier le financement tant du prix d'acquisition que des travaux de réhabilitation, alors que le bénéficiaire d'une vente sous condition suspensive se doit de solliciter un prêt conforme aux stipulations de la promesse, qu'en procédant ainsi, M. Y... a retardé l'obtention d'une offre définitive de prêt et manqué à ses obligations contractuelles, qu'il appartient à celui qui s'est obligé sous condition de démontrer qu'il a accompli des diligences normales ou encore de justifier des raisons pour lesquelles il n'a pu surmonter les obstacles mis à la réalisation de cette condition, qu'en l'occurrence, M. Y... n'établit pas quelles pièces accompagnaient sa demande initiale de prêt ni quels renseignements complémentaires auraient été exigés par la Caisse d'épargne, qu'il n'explique pas même pourquoi ces renseignements auraient porté « sur l'assiette globale de l'opération », selon ses termes, alors que le prêt qu'il sollicitait était dit « sans travaux » ni pourquoi il a renouvelé sa demande de prêt, qu'il ne démontre donc pas que la non obtention du prêt nécessaire à l'acquisition dans le délai convenu, voire au plus tard le 15 juillet 2005, ne lui est pas imputable à faute, que, par suite, la condition suspensive doit être réputée accomplie et son incapacité à acquérir, sinon au 16 juin 2005 du moins au 15 juillet suivant, justifie que l'indemnité d'immobilisation soit reconnue acquise aux époux X...,

alors qu'il appartient seulement au bénéficiaire d'une promesse de vente sous condition suspensive d'obtention d'un prêt de justifier qu'il a sollicité un prêt conforme aux caractéristiques stipulées dans la promesse dans le délai imparti par celle-ci et qu'en exigeant en l'occurrence du bénéficiaire, au-delà d'une telle obligation, qu'il fasse la preuve de ce que la non obtention du prêt dans le délai de réalisation de la promesse ne lui était pas imputable à faute, la Cour d'appel a violé les articles 1134, 1178 et 1315 du Code civil.

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