Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 26 janvier 2010, 08-41.052, Inédit
Cour de cassation - Chambre sociale
- N° de pourvoi : 08-41.052
- Non publié au bulletin
- Solution : Cassation
- Président
- M. Chauviré (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Texte intégral
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Vu les articles L. 1234-1, L. 1234-5 et L. 1234-9 du code du travail ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... qui était employé depuis le 15 septembre 1993 en qualité d'éducateur spécialisé au sein de l'institut médico-éducatif "La Mauresque" par l'Association des oeuvres de plein air des jeunesses laïques et républicaines, a été licencié pour faute grave le 5 juillet 2003 ;
Attendu que pour décider que le licenciement reposait sur une faute grave l'arrêt retient, d'une part, que le salarié a manqué à son obligation de loyauté envers l'employeur en ne lui remettant pas, dans un délai raisonnable, le document justifiant de la durée de son absence qu'il lui avait demandé après sa mise en liberté et, d'autre part, que l'incarcération du salarié a causé un trouble objectif au sein de l'entreprise ;
Qu'en statuant ainsi, alors que le trouble dans l'organisation et le fonctionnement de l'entreprise résultant de l'incarcération en détention provisoire d'un salarié, présumé innocent, ne peut justifier un licenciement disciplinaire et alors que ne constitue pas une faute grave la seule absence de justification par le salarié de la durée de son incarcération dès lors que l'employeur avait été informé du placement en détention provisoire et de la fin de cette mesure, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 25 avril 2007, entre les parties, par la cour d'appel de Montpellier ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Nîmes ;
Condamne l'Association des oeuvres de plein air des jeunesses laïques et républicaines aux dépens ;
Vu les articles 700 du code de procédure civile et 37, alinéa 2, de la loi n° 91-467 du 10 juillet 1991, condamne l'Association des oeuvres de plein air des jeunesses laïques et républicaines à payer à la SCP Monod et Colin la somme de 2 500 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-six janvier deux mille dix.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt
Moyen produit par la SCP Monod et Colin, avocat aux Conseils, pour M. X...
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir considéré que le licenciement de M. X... était justifié par une faute grave et de l'avoir débouté de ses demandes en paiement des dommages et intérêts et d'indemnités ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE l'absence du salarié a caractérisé un trouble dans l'organisation et le fonctionnement de l'entreprise par l'absence de production dans un délai raisonnable d'un justificatif précisant la durée de son absence contrairement à la convention collective applicable, justificatif que le salarié n'a fourni que le 3 juillet 2003, date de l'entretien préalable au licenciement, alors qu'il datait du 10 juin 2003, faisant ainsi preuve d'un manquement manifeste à son obligation de loyauté envers son employeur ; qu'en outre, la révélation de l'incarcération du salarié, dont le salarié ne rapporte pas la preuve d'être imputable à son employeur a causé un trouble objectif caractérisé au sein de l'association, s'agissant d'un éducateur à qui il appartenait de donner l'exemple aux jeunes handicapés envers qui il avait des obligations renforcées d'éducation et en raison de l'atteinte à la crédibilité et à l'image de cet établissement spécialisé envers les familles et les organismes de tutelle ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE M. X... n'a pas respecté une obligation de loyauté intrinsèque au contrat ; que la vie privée de M. X... a été parfaitement respectée ; que M. X... s'est absenté trois mois de l'entreprise sans apporter la notification du motif de son absence réclamée par l'employeur ; que M. X... n'a pas respecté une éthique au sein de l'établissement occasionnant auprès des jeunes handicapés par la révélation de son incarcération ; que le licenciement de M. X... est parfaitement justifié du fait qu'il n'a pas justifié en temps utiles des motifs de la détention et pour avoir porté atteinte au bon fonctionnement de l'entreprise ;
ALORS, d'une part, QUE le placement du salarié en détention provisoire, pour des faits indépendants de sa vie professionnelle, est un fait relevant de la vie personnelle du salarié ; qu'un trouble objectif dans le fonctionnement de l'entreprise ne permet pas, en lui-même, de prononcer une sanction disciplinaire à l'encontre de celui par lequel il est survenu ; qu'en retenant que la faute grave était constituée par le trouble objectif caractérisé dans l'entreprise par la révélation de l'incarcération d'un salarié, la cour d'appel a violé l'article L.122-14-3 du code du travail ;
ALORS, d'autre part, QUE la seule absence de justification de la durée de la suspension du contrat de travail, dont l'employeur avait pris acte, ne constitue pas une faute grave ; qu'en se bornant, pour dire le licenciement fondé sur une faute grave, à constater l'absence de production dans un délai raisonnable d'un justificatif précisant la durée de la détention provisoire du salarié ayant entraîné la suspension du contrat de travail, suspension dont l'employeur avait pris acte, la cour d'appel a violé l'article L.122-14-3 du code du travail.