Cour de cassation, civile, Chambre civile 2, 17 décembre 2009, 09-10.614, Inédit
Cour de cassation - Chambre civile 2
- N° de pourvoi : 09-10.614
- Non publié au bulletin
- Solution : Cassation sans renvoi
- Président
- M. Mazars (conseiller doyen faisant fonction de président)
Texte intégral
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Vu l'article L. 1424-42 du code général des collectivités territoriales ;
Attendu, selon le jugement attaqué rendu en dernier ressort, que le 6 mars 2006, M. X..., assuré auprès de la Mutuelle assurance des travailleurs mutualistes (MATMUT), a perdu le contrôle de son véhicule et percuté les glissières de sécurité, alors qu'il circulait sur l'autoroute A10 ; que l'accident a nécessité l'intervention du Service départemental d'incendie et de secours de l'Indre et Loire (SDIS) ; que la MATMUT ayant refusé de rembourser à la société Compagnie financière et industrielle des autoroutes (Cofiroute), qui exploite le tronçon d'autoroute sur lequel s'est produit l'accident, les frais d'intervention du SDIS, cette dernière l'a assignée en paiement devant un tribunal d'instance ;
Attendu que pour condamner la MATMUT à rembourser à la société Cofiroute les frais d'intervention du SDIS, le jugement énonce que la société concessionnaire, lorsqu'elle supporte un dommage du fait d'un accident de la circulation dispose d'un droit à réparation du seul fait de l'implication du véhicule terrestre à moteur dans l'accident à l'origine de son dommage, ce qui ne constitue qu'une illustration du principe selon lequel celui qui cause par son fait un dommage à autrui est tenu de le réparer ;
Qu'en statuant ainsi, alors que l'article L. 1424-42, alinéa 6, du code général des collectivités territoriales, qui apporte au principe de gratuité des interventions du SDIS se rattachant à ses missions de service public une exception appelant une interprétation stricte, dispose que les frais de ces interventions sur le réseau routier et autoroutier concédé doivent être pris en charge par les sociétés concessionnaires d'ouvrages routiers ou autoroutiers, dans les conditions déterminées à l'alinéa 7 du même article, et exclut ainsi que ces sociétés puissent obtenir de la personne tenue à réparation, ou de son assureur, le remboursement de ces frais, le tribunal d'instance a violé le texte susvisé ;
Et vu l'article 627 du code de procédure civile ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, le jugement rendu le 24 octobre 2008, entre les parties, par le tribunal d'instance de Tours ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi ;
Déboute la société Compagnie financière et industrielle des autoroutes de sa demande en paiement de la somme de 450 euros ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Compagnie financière et industrielle des autoroutes ; la condamne à payer à la société MATMUT assurances la somme de 2 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite du jugement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-sept décembre deux mille neuf.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt
Moyen produit par la SCP Boré et Salve de Bruneton, avocat aux Conseils pour la société MATMUT assurances
Il est fait grief au jugement attaqué d'AVOIR condamné la MUTUELLE ASSURANCE DES TRAVAILLEURS MUTUALISTES (MATMUT) à régler à la COMPAGNIE FINANCIERE ET INDUSTRIELLE DES AUTOROUTES (COFIROUTE) la somme de 450 euros correspondant aux frais d'intervention du SERVICE DEPARTEMENTAL D'INCENDIE ET DE SECOURS (SDIS) DE L'INDRE-ET-LOIRE ;
AUX MOTIFS QUE l'article L.1424-42 du Code général des collectivités territoriales dispose en son premier alinéa que : « le service départemental d'incendie et de secours n'est tenu de procéder qu'aux seules interventions qui se rattachent directement à ses missions de service public définies à l'article L.1424-2 » ; que le second alinéa de cet article énonce : « s'il a procédé à des interventions ne se rattachant pas directement à l'exercice de ses missions, il peut demander aux personnes bénéficiaires une participation aux frais
» ; que l'alinéa 6 de ce même article est rédigé comme suit : « les interventions effectuées par les services d'incendie et de secours sur le réseau routier et autoroutier concédé font l'objet d'une prise en charge par les sociétés concessionnaires d'ouvrages routiers ou autoroutiers » ; qu'ainsi il se déduit de ces dispositions, certes de façon dérogatoire mais cependant clairement, que l'intervention des SDIS sur le réseau autoroutier concédé, comme ce fut le cas en l'espèce le 6 mars 2006, n'est pas gratuite mais fait l'objet d'une prise en charge par les sociétés concessionnaires dudit réseau ; que comme le prévoit l'avant dernier alinéa de l'article L.1424-42, les conditions de prise en charge des frais d'intervention des SDIS sont réglées par une convention que ces services et les sociétés concessionnaires adoptent ; qu'en l'occurrence une convention relative aux modalités d'intervention du SDIS 37 sur le réseau autoroutier concédé à la Compagnie Financière et Industrielle des Autoroutes a été adoptée par ce service et cette société le 1er janvier 2007 ; que cette convention chiffre à 450 euros le coût d'intervention unitaire du SDIS 37 en cas, comme en l'espèce, de « secours pour accident de la circulation » ; que si certes l'article L.1424-42 du Code général des collectivités territoriales ne prévoit pas de recours contre le conducteur du véhicule impliqué dans l'accident, ce qui ne saurait surprendre, cette question relevant des règles régissant les rapports entre les sociétés concessionnaires de droit privé et les usagers des équipements et services mis à disposition par ces sociétés, il n'en demeure pas moins que la société concessionnaire, lorsqu'elle supporte un dommage du fait d'un accident de la circulation dispose d'un droit à réparation du seul fait de l'implication du véhicule terrestre à moteur dans l'accident à l'origine de son dommage, ce qui ne constitue qu'une illustration du principe selon lequel celui qui cause par son fait un dommage à autrui est tenu à le réparer ; que la Société MATMUT ASSURANCES ne peut sérieusement contester ce principe, l'ayant elle-même mis en oeuvre en réglant partie des frais occasionnés par l'accident causé par son assuré, Monsieur Nicolas X... ; que si, comme le soutient la Société MATMUT ASSURANCES, la convention liant la Compagnie Financière et Industrielle des Autoroutes et le SDIS ne lui est pas opposable, celle-ci fixe un montant forfaitaire des interventions de ce dernier, montant dont la Société MATMUT ASSURANCES ne démontre ni même ne soutient qu'il excéderait le coût réel de l'intervention du 6 mars 2006 ; que les dépenses couvertes par les frais de péage dont s'acquittent les usagers du réseau autoroutier concédé s'entendent de celles liées à la construction, à l'exploitation, à l'aménagement ou encore à l'extension de l'infrastructure mais ne comprennent pas le coût d'intervention de services extérieurs lorsque cette intervention a été rendue nécessaire par le fait des usagers et revêt donc un caractère exceptionnel ; que le principe et le montant des frais dont la Compagnie demanderesse doit s'acquitter en raison de l'intervention du SDIS sont réglés respectivement par la loi et par la convention du 1er janvier 2007 ; qu'il convient donc de condamner la Société MATMUT ASSURANCES à payer à la Compagnie Financière et Industrielle des Autoroutes la somme de 450 euros majorée des intérêts au taux légal à compter du 22 avril 2008 ;
ALORS QUE les frais d'intervention des services départementaux d'incendie et de secours sur le réseau routier et autoroutier concédé ne peuvent être pris en charge, par une dérogation d'interprétation stricte au principe de gratuité de leurs interventions se rattachant à leurs missions de service public, que par les sociétés concessionnaires d'ouvrages routiers ou autoroutiers dans les conditions déterminées par une convention conclue entre elles et ces services, de sorte que ces sociétés ne peuvent obtenir de la personne tenue à réparation ou de son assureur le remboursement de ces frais ; qu'en considérant que, puisque Monsieur X... aurait été responsable de l'accident ayant entraîné l'intervention du SDIS DE L'INDRE-ET-LOIRE dont la COFIROUTE avait supporté le coût, cette dernière aurait eu le droit d'obtenir de la MATMUT, assureur de Monsieur X..., le remboursement de tels frais d'intervention en réparation de son préjudice, quand ces frais ne pouvaient être supportés que par la société concessionnaire, sans pouvoir être mis à la charge de Monsieur X... ou de la MATMUT, le Tribunal d'instance a violé les articles 1382 et 1383 du Code civil, ainsi que les articles 1424-2 et 1424-42 du Code général des collectivités territoriales.