Cour de cassation, civile, Chambre civile 3, 2 décembre 2009, 08-20.073, Publié au bulletin

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :



Attendu, selon l'arrêt attaqué (Basse-Terre, 11 février 2008), rendu sur renvoi après cassation (3è Civ., 11 octobre 2005, pourvoi n° 04-15.952), que la société à responsabilité limitée SFAM (la société SFAM), copropriétaire, a assigné M. X..., syndic de copropriété, pour voir annuler l'ensemble des décisions de l'assemblée générale des copropriétaires du 27 février 1999 et désigner un administrateur provisoire ;

Sur le premier moyen :

Vu l'article 28, alinéa 2, du décret du 17 mars 1967, dans sa rédaction applicable en la cause ;

Attendu qu'en dehors de l'hypothèse prévue par l'article L. 443-15-1 du code de la construction et de l'habitation, la durée des fonctions du syndic ne peut excéder trois années ; que toutefois, pendant le délai prévu à l'article 1792 du code civil, elle ne peut dépasser une année lorsque le syndic, son conjoint, leurs commettants ou employeurs, leurs préposés, leurs parents ou alliés jusqu'au troisième degré inclus ont, directement ou indirectement, à quelque titre que ce soit, même par personne interposée, participé à la construction de l'immeuble ;

Attendu que pour rejeter la demande d'annulation, l'arrêt retient que M. X... a cédé ses parts de la société PP Caraïbes et a démissionné de ses fonctions de gérant le 3 novembre 1994 ; qu'il n'avait donc plus aucun intérêt dans cette société lorsqu'il a été nommé syndic, et que l'irrégularité alléguée quant à la durée des fonctions du syndic ne saurait entraîner l'annulation de l'assemblée ;

Qu'en statuant ainsi, alors que la limitation à un an de la durée des fonctions du syndic qui a participé à la construction de l'immeuble en qualité d'associé ou de dirigeant de la société promoteur s'impose, même après qu'il a perdu cette qualité, jusqu'à l'expiration de la garantie décennale, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les deuxième et troisième moyens :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 11 février 2008, entre les parties, par la cour d'appel de Basse-Terre ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Basse-Terre, autrement composée ;

Condamne, ensemble, le syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier Le Louisiane à Saint-Martin et M. X... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne le syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier Le Louisiane à Saint-Martin et M. X... à payer, ensemble, à la société SFAM la somme de 2 500 euros ; rejette la demande du syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier Le Louisiane à Saint-Martin et de M. X... ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du deux décembre deux mille neuf.MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits par la SCP Boré et Salve de Bruneton, avocat aux Conseils pour la société SFAM.

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l'arrêt d'AVOIR débouté la SARL SFAM de ses demandes tendant à voir annuler l'ensemble des résolutions contenues au procès-verbal d'assemblée générale du 27 février 1999 et condamner solidairement le syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier LE LOUISIANE et Monsieur X..., en qualité de syndic du syndicat des copropriétaires et à titre personnel, à l'indemniser de sa quote-part des frais indûment engagés par lui au nom de la copropriété à hauteur de 4.000 euros et des préjudices moral et matériel subis par elle ;

AUX MOTIFS QUE « que la SFAM invoque également les dispositions de l'article 28 du décret du 17 mars 1965 suivant lesquelles la durée des fonctions de syndic ne peuvent excéder une année pendant le délai prévu à l'article 1792 (ancien) du Code civil, lorsque le syndic a participé même indirectement à la construction de l'immeuble ; que cependant c'est faussement qu'elle affirme que Monsieur X... est syndic de copropriété depuis 1996 bien qu'étant également co-gérant de la société PP CARAÏBES, société promoteur de l'ensemble immobilier litigieux dont la construction et la commercialisation auraient été achevées en 1993 ; qu'à supposer ce dernier point exact encore qu'il ne soit pas établi, il ressort des pièces produites que Monsieur X... a cédé ses parts de la société PP CARAÏBES et a démissionné de ses fonctions de gérant le 3 novembre 1994 ; qu'il n'y avait donc plus aucun intérêt dans cette société lorsqu'il a été nommé syndic, et que cette irrégularité allégué quant à la durée des fonctions du syndic ne saurait entraîner l'annulation de l'assemblée litigieuse » ;

1°) ALORS QUE la limitation à un an de la durée des fonctions du syndic qui a participé à la construction de l'immeuble en qualité d'associé ou de dirigeant de la société promoteur de l'immeuble s'impose même après qu'il ait perdu cette qualité ; qu'en écartant néanmoins une telle limitation aux motifs que le syndic avait cédé ses parts de la société promoteur et n'en avait plus la qualité de gérant, la Cour d'appel a violé l'alinéa 2 de l'article 28 du décret du 17 mars 1967, dans sa version applicable aux faits de l'espèce ;

2°) ALORS QU'en toute hypothèse, en retenant qu'il n'était pas établi que la construction de l'immeuble litigieux ait été achevée en 1993, quand ce point spécialement allégué par la SFAM n'était nullement contesté par Monsieur X... et le syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier LE LOUISIANE, la Cour d'appel a violé l'article 4 du Code de procédure civile ;

3°) ALORS QU'en toute hypothèse, le juge doit trancher les questions de fait dont dépend l'issue du litige dont il est saisi ; qu'en se bornant à viser, comme une hypothèse, l'achèvement de l'immeuble litigieux en 1993 quand, la SFAM soutenant que la durée des fonctions de Monsieur X... était limitée à un an à compter de sa nomination dès lors qu'il avait participé à la construction de l'immeuble et avait été désigné pendant le délai prévu à l'article 1792 du Code civil, il lui incombait de trancher cette question, la Cour d'appel a violé l'article 12 du Code de procédure civile.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l'arrêt d'AVOIR débouté la SARL SFAM de ses demandes tendant à voir annuler l'ensemble des résolutions contenues au procès-verbal d'assemblée générale du 27 février 1999 et condamner solidairement le syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier LE LOUISIANE et Monsieur X..., en qualité de syndic du syndicat des copropriétaires et à titre personnel, à l'indemniser de sa quote-part des frais indûment engagés par lui au nom de la copropriété à hauteur de 4.000 euros et des préjudices moral et matériel subis par elle ;

AUX MOTIFS QUE « la SFAM prétend encore que la convocation adressée par syndic est nulle en raison de l'absence de notification des documents prévus à l'article 11 du décret du 17 mars 1967 ; que cependant contrairement à ce qu'elle prétend il résulte des pièces produites que le budget prévisionnel avait été annexé à la convocation, même si cette dernière n'indiquait pas qu'il y était annexé ; qu'en l'absence de tout contrat écrit ou de projet de contrat écrit concernant le syndic qui exerçait ses fonctions à titre bénévole, il ne peut être fait grief à celui-ci d'avoir adressé une convocation n'annexant ni le contrat ni projet de contrat ; que de ce chef la convocation ne peut être considérée comme nulle » ; « que la SFAM soutient en outre que la tenue de l'assemblée générale serait irrégulière, aux motifs que l'établissement de la feuille de séance est intervenue avant la désignation du président et du bureau … ; que cependant le fait que la feuille de présence ait été dressée avant la désignation du Président et des membres du bureau, conformément d'ailleurs à l'article 35 du règlement de copropriété, ne saurait entraîner l'annulation de l'assemblée générale, dès lors que l'établissement de cette feuille de présence ne constitue nullement une décision » ;

1°) ALORS QUE lors de l'élection ou du renouvellement du syndic, qu'il soit ou non bénévole, les conditions essentielles du mandat de syndic doivent être notifiées aux copropriétaires au plus tard en même temps que l'ordre du jour ; qu'en retenant qu'en l'absence de tout contrat écrit ou de projet de contrat écrit concernant le syndic qui exerçait ses fonctions à titre bénévole, il ne pouvait être fait grief à celui-ci d'avoir adressé une convocation n'annexant ni le contrat ni projet de contrat, quand il appartenait au syndic même bénévole de notifier les conditions essentielles de son mandat aux copropriétaires amenés à se prononcer sur le renouvellement de son mandat, peu important qu'il soit ou non établi par écrit, la Cour d'appel a violé ensemble les articles 11 et 29 du décret du 17 mars 1967, dans leur version applicable aux faits de l'espèce ;

2°) ALORS QUE l'établissement de la feuille de présence est une formalité substantielle, dont le non respect entraîne l'annulation de l'assemblée générale, à laquelle il doit être nécessairement procédée après l'élection du président de ladite assemblée ; qu'en retenant que le fait que la feuille de présence ait été dressée avant la désignation du Président et des membres du bureau, conformément d'ailleurs à l'article 35 du règlement de copropriété, ne saurait entraîner l'annulation de l'assemblée générale, dès lors que l'établissement de cette feuille de présence ne constitue nullement une décision, la Cour d'appel a violé l'article 14 du décret du 17 mars 1967.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l'arrêt d'AVOIR débouté la SARL SFAM de ses demandes tendant à voir déclarer nul de plein droit le mandat du syndic et condamner solidairement le syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier LE LOUISIANE et Monsieur X..., en qualité de syndic du syndicat des copropriétaires et à titre personnel, à l'indemniser de sa quote-part des frais indûment engagés par lui au nom de la copropriété à hauteur de 4.000 euros et des préjudices moral et matériel subis par elle ;

AUX MOTIFS QUE « la société SFAM se prévaut d'abord de l'article 18 de la loi du 10 juillet 1965 suivant lequel le syndic doit soumettre au vote de l'assemblée générale, lors de sa première désignation et au moins tous les trois ans, la décision d'ouvrir ou non un compte bancaire ou postal séparé au nom du syndicat, faute de quoi le mandat du syndic est nul de plein droit ; qu'elle soutient que Monsieur X... n'a pas déféré à cette obligation ; que cependant il résulte du procès-verbal d'assemblée générale du 28 mai 1996 ayant désigné Monsieur X... aux fonctions de syndic bénévole que l'assemblée a décidé alors l'ouverture d'un compte bancaire par copropriété ; que ce compte a effectivement été ouvert ; que l'assemblée attaquée s'est tenue moins de 3 ans plus tard, le 27 février 1999, et qu'en tout état de cause, le compte était alors déjà ouvert ; que ce moyen est donc entaché d'une erreur de fait » ;

ALORS QUE, à peine de nullité de plein droit de son mandat, le syndic doit, lors de sa première désignation et au moins tous les trois ans, soumettre au vote de l'assemblée générale la décision d'ouvrir ou non un compte bancaire ou postal séparé au nom du syndicat, même lorsque le syndicat est déjà titulaire d'un compte bancaire séparé ; qu'en se contentant de relever que lors de l'assemblée générale du 27 février 1999 moins de trois ans s'étaient écoulés depuis l'ouverture d'un compte bancaire le 28 mai 1996 quand de tels motifs ne suffisaient pas à établir que le syndic avait soumis à l'assemblée générale la question de l'ouverture d'un compte dans le délai de trois ans à compter du 28 mai 1996, et ne pouvaient, partant, justifier le rejet de la demande d'annulation du mandat du syndic, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'alinéa 5 de l'article 18 de la loi du 10 juillet 1965, dans sa version applicable à la cause.
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