Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 16 septembre 2009, 07-41.069, Inédit
Cour de cassation - Chambre sociale
- N° de pourvoi : 07-41.069
- Non publié au bulletin
- Solution : Cassation partielle
- Président
- M. Ludet (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Texte intégral
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X... a été engagée le 8 décembre 1999 par M. Y... en qualité de secrétaire par contrat initiative emploi d'une durée de 24 mois à compter du 15 décembre 1999 et jusqu'au 14 décembre 2001 ; qu'à la suite de deux avertissements, le contrat de travail a été rompu pour faute grave le 24 mai 2000, que contestant cette mesure et s'estimant non remplie de ses droits en matière de rémunération, elle a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes ;
Sur le premier moyen du pourvoi incident de l'employeur :
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt d'avoir dit le licenciement abusif et de l'avoir condamné à payer des sommes à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et au titre de l'indemnité de précarité alors, selon le moyen ;
1°) que la mauvaise exécution répétée de tâche simple d'exécution, ne demandant aucune compétence spécifique ni appréciation, constitue en soi une faute, même en l'absence de mauvaise volonté délibérée ; qu'en retenant en l'espèce que "les griefs relatifs aux erreurs de calcul, aux erreurs de rédaction des factures clients, au mauvais calcul sur les récapitulatifs des factures clients, aux mauvais enregistrements de la comptabilité, aux modes différents de règlement sur les devis sont des griefs traduisant une insuffisance professionnelle de la part de Mme X..., laquelle, en l'absence de démonstration d'une volonté délibérée de sa part de mal exécuter ses missions, n'est pas de nature à justifier un licenciement disciplinaire", quand la répétition d'erreurs dans l'exécution des tâches relevées était de nature à caractériser la faute grave de la salariée, la cour d'appel a violé les articles L. 122-14-3 et L. 122-40 devenus L. 1232-1 et L. 1331-1du code du travail ;
2°) que si celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver, réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation ; qu'en l'espèce, l'employeur établissait la faute de la salariée qui avait manqué à son obligation contractuelle de le prévenir immédiatement en cas d'absence ; qu'il appartenait dès lors à la salariée d'établir des circonstances de nature à justifier que son manquement ne lui était pas imputable ; qu'en affirmant en l'espèce que le grief tiré de l'absence de la salariée le 20 avril 2000 n'était pas sérieux au prétexte que rien n'aurait permis d'établir que la salariée aurait été en mesure de prévenir son employeur immédiatement comme le prévoyait le contrat de travail, faisant ainsi peser sur l'employeur la charge et le risque d'une preuve qui ne lui incombait pas, la cour d'appel a violé l'article 1315 du code civil et L. 122-8 et L. 122-9 devenus L. 1234-5 et L. 1234-9 du code du travail ;
3°) que l'attestation contient la relation de faits auxquels son auteur a assisté ou qu'il a personnellement constatés ; qu'en se fondant en l'espèce sur une attestation de l'ex-concubin de Mme X... pour retenir que l'employeur lui aurait annoncé lors de l'entretien préalable qu'elle était libre de tout engagement, ce qui aurait été de nature à justifier ses absences des 22, 23 et 24 mai, quand il était constant qu'il n'avait pas assisté à cet entretien, la cour d'appel a violé l'article 202 du code de procédure civile ;
Mais attendu qu'ayant constaté que l'employeur s'était placé sur le terrain de la faute grave pour justifier la rupture anticipée du contrat de travail et ayant retenu d'une part, que le grief d'insuffisance professionnelle reproché, en l'absence de démonstration d'une volonté délibérée de la part de la salariée, n'était pas de nature à justifier une telle faute et, d'autre part que les absences injustifiées reprochées n'étaient pas établies, la cour d'appel a, sans inverser la charge de la preuve, légalement justifié sa décision ;
Sur le troisième moyen du pourvoi incident :
Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur ce moyen qui ne serait pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
Mais sur le deuxième moyen du pourvoi incident de l'employeur :
Vu l'article L. 1243 8 du code du travail ;
Attendu qu'ayant décidé que la rupture anticipée du contrat initiative emploi conclu était abusive, l'arrêt condamne l'employeur à payer à la salariée une somme au titre de l'indemnité de précarité ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'il résulte des dispositions de l'article L. 1243 8 du code du travail que l'indemnité de fin de contrat ne s'applique pas aux contrats initiative-emploi, qui sont des contrats conclus au titre de l'article L. 1242 3 du même code, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
Et sur le moyen unique du pourvoi principal de la salariée :
Vu les articles L. 1243 1 et L. 5134 65 du code du travail ;
Attendu qu'ayant constaté que Mme X... avait été engagée par contrat initiative emploi à durée déterminée de vingt quatre mois du 15 décembre 1999 au 14 décembre 2001, la cour d'appel, après avoir dit la rupture du contrat de travail abusive, a condamné l'employeur à verser à la salariée une somme de 3 000 euros à titre de dommages intérêts pour rupture abusive en application de l'article L. 122 4 5 du code du travail et celle de 1 510,71 euros à titre d'indemnité de précarité ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'en cas de rupture abusive du contrat à durée déterminée la salariée a droit à des dommages-intérêts d'un montant au moins égal aux rémunérations qu'elle aurait perçues jusqu'au terme du contrat, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE et ANNULE, mais seulement en ses dispositions allouant à la salariée une somme de 3 000 euros en réparation du préjudice subi du fait de la rupture anticipée abusive du contrat initiative emploi conclu et celle de 1 510,71 euros à titre d'indemnité de précarité, l'arrêt rendu le 22 décembre 2006, entre les parties, par la cour d'appel de Douai ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Amiens ;
Laisse à chaque partie la charge respective de ses propres dépens ;
Vu les articles 700 du code de procédure civile et 37 de la loi du 10 juillet 1991, rejette les demandes de Mme X... et de M. Y... ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par M. Ludet, conseiller le plus ancien en ayant délibéré, conformément aux articles 452 et 456 du code de procédure civile, en son audience publique du seize septembre deux mille neuf.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt
Moyen produit au pourvoi principal par la SCP Bouzidi et Bouhanna, avocat aux conseils pour Mme X... ;
MOYEN DE CASSATION
LE POURVOI REPROCHE A L'ARRÊT ATTAQUÉ après avoir dit que le licenciement était abusif D'AVOIR limité le montant de la condamnation de l'employeur à la somme de 3 000 à titre de dommages et intérêts pour rupture abusive et de 1 510,71 à titre d'indemnité de précarité et débouté l'exposante du surplus de ses demandes;
AUX MOTIFS QUE compte tenu des circonstances de la rupture, du montant de la rémunération versée au salarié, de son âge, de sa capacité à trouver un nouvel emploi, eu égard à sa formation et à son expérience professionnelle, de son ancienneté dans l'entreprise et de l'effectif, la Cour fixe à 3 000 le préjudice subi en application des dispositions de l'article L. 122-14-5 du Code du travail, outre 1 10,71 à titre d'indemnité de précarité ;
ALORS D'UNE PART QU' en vertu des articles L 122-3-8 et L 322-4-8 du Code du travail, la méconnaissance par l'employeur des règles applicables à la rupture du contrat initiative emploi conclu à durée déterminée, ouvre droit pour le salarié à des dommages et intérêts d'un montant au moins égal aux rémunérations qu'il aurait perçues jusqu'au terme du contrat, sans préjudice de l'indemnité prévue à l'article L 122-3-4 du Code du travail ; qu'ayant expressément constaté qu'était abusif et ne reposait pas sur une faute grave le licenciement de l'exposante embauchée dans le cadre d'un contrat initiative emploi d'une durée déterminée de 24 mois, la Cour d'appel qui, par application de l'article L 122-14-5 du Code du travail, condamne l'employeur à la seule somme de 3 000 à titre de dommages et intérêts pour rupture abusive a violé ce texte par fausse application ;
ALORS D'AUTRE PART QU' en vertu des articles L 122-3-8 et L 322-4-8 du Code du travail, la méconnaissance par l'employeur des règles applicables à la rupture du contrat initiative emploi conclu à durée déterminée, ouvre droit pour le salarié à des dommages et intérêts d'un montant au moins égal aux rémunérations qu'il aurait perçues jusqu'au terme du contrat, sans préjudice de l'indemnité prévue à l'article L 122-3-4 du Code du travail ; qu'après avoir expressément retenu que le licenciement de l'exposante, employée selon contrat initiative emploi d'une durée déterminée de 24 mois, ne reposait pas sur une faute grave et était abusif, la Cour d'appel qui limite la condamnation de l'employeur à la somme de 3 000 correspondant au préjudice subi en application des dispositions de l'article L 122-14-5 du Code du travail, n'a pas tiré les conséquences légales qui s'évinçaient de ses propres constatations selon lesquelles l'exposante avait droit à des dommages et intérêts d'un montant au moins égal aux rémunérations qu'elle aurait perçues jusqu'au terme de son contrat et a violé les articles L. 122-3-8 du Code du travail et L 322-4-8 8 dudit Code ;
Moyens produits au pourvoi incident par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux conseils pour M. Y... ;
POURVOI INCIDENT
PREMIER MOYEN DE CASSATION
Il est fait grief à la décision attaquée d'AVOIR dit le licenciement abusif et condamné Monsieur Y... à payer 3.000 euros de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, 1.510,71 euros au titre de l'indemnité de précarité et 1.000 euros par application de l'article 700 du Code de Procédure Civile ;
AUX MOTIFS QUE la faute grave résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputables au salarié qui constitue une violation des obligations découlant du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise même pendant la durée limitée du préavis sans risque de compromettre les intérêts légitimes de l'employeur ; que c'est à l'employeur qui invoque la faute grave et s'est situé sur le terrain disciplinaire et à lui seul de rapporter la preuve des faits allégués et de justifier qu'ils rendaient impossible la poursuite du contrat de travail, même pendant la durée du préavis ; que les griefs relatifs aux erreurs de calcul, aux erreurs de rédaction des factures clients, au mauvais calcul sur les récapitulatifs des factures clients, aux mauvais enregistrements de la comptabilité, aux mauvais différents de règlement sur les devis sont des griefs traduisant une insuffisance professionnelle de la part de Myriam X..., laquelle, en l'absence de démonstration d'une volonté délibérée de sa part de mal exécuter ses missions n'est pas de nature à justifier un licenciement disciplinaire ; que sur les absences injustifiées, en ce qui concerne l'absence du 20 avril 2000, si Jean Max Y... en a été effectivement informé qu'à 18 heures, il ressort des pièces versées au dossier que la salariée n'était absente que depuis l'après-midi, de sorte que le grief n'est pas sérieux, rien ne permettant d'établir qu'elle était en mesure de prévenir son employeur immédiatement comme le prévoit son contrat de travail ; qu'en ce qui concerne les absences des 22, 23 et 24 mai 2000, Myriam X... n'est pas sérieusement démentie quand elle soutient ainsi qu'en atteste son ex-concubin qu'elles sont intervenues à la suite de l'entretien préalable au cours duquel Jean Max Y... a annoncé à Myriam X... qu'elle était libre de tout engagement, étant observé que Jean Max Y... ne justifie d'aucune mise en demeure adressée à la salariée pour reprendre son poste ;
1) ALORS QUE la mauvaise exécution répétée de tâche simple d'exécution, ne demandant aucune compétence spécifique ni appréciation, constitue en soi une faute, même en l'absence de mauvaise volonté délibérée ; qu'en retenant en l'espèce que « les griefs relatifs aux erreurs de calcul, aux erreurs de rédaction des factures clients, au mauvais calcul sur les récapitulatifs des factures clients, aux mauvais enregistrements de la comptabilité, aux mauvais différents de règlement sur les devis sont des griefs traduisant une insuffisance professionnelle de la part de Myriam X..., laquelle, en l'absence de démonstration d'une volonté délibérée de sa part de mal exécuter ses missions n'est pas de nature à justifier un licenciement disciplinaire », quand la répétition d'erreurs dans l'exécution des tâches relevées était de nature à caractériser la faute grave de la salariée, la Cour d'appel a violé les articles L. 122-14-3 et L. 122-40 devenus L.1232-1 et L1331-1du Code du travail ;
2) ALORS QUE si celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver, réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation ; qu'en l'espèce, l'employeur établissait la faute de la salariée qui avait manqué à son obligation contractuelle de le prévenir immédiatement en cas d'absence ; qu'il appartenait dès lors à la salariée d'établir des circonstances de nature à justifier que son manquement ne lui était pas imputable ; qu'en affirmant en l'espèce que le grief tiré de l'absence de la salariée le 20 avril 2000 n'était pas sérieux au prétexte que rien n'aurait permis d'établir que la salariée aurait été en mesure de prévenir son employeur immédiatement comme le prévoyait le contrat de travail, faisant ainsi peser sur l'employeur la charge et le risque d'une preuve qui ne lui incombait pas, la Cour d'appel a violé l'article 1315 du Code civil et L.122-8 et L.122-9 devenus L.1234-5 et L.1234-9 du Code du travail ;
3) ALORS QUE l'attestation contient la relation de faits auxquels son auteur a assisté ou qu'il a personnellement constatés ; qu'en se fondant en l'espèce sur une attestation de l'ex-concubin de Madame X... pour retenir que l'employeur lui aurait annoncé lors de l'entretien préalable qu'elle était libre de tout engagement, ce qui aurait été de nature à justifier ses absences des 22, 23 et 24 mai, quand il était constant qu'il n'avait pas assisté à cet entretien, la Cour d'Appel a violé l'article 202 du Code de Procédure Civile.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné Monsieur Y... à payer à Madame X... 1.510,71 euros au titre de l'indemnité de précarité et 1.000 euros par application de l'article 700 du Code de Procédure Civile ;
AUX MOTIFS QUE compte tenu des circonstances de la rupture, du montant de la rémunération versée au salarié, de son age, de sa capacité à trouver un nouvel emploi eu égard à sa formation et à son expérience professionnelle, de son ancienneté dans l'entreprise et de l'effectif de celle-ci, la Cour fixe à 3.000 euros le préjudice subi en application des dispositions de l'article L.122-14-5 du Code du travail outre 1.510,71 euros à titre d'indemnité de précarité ;
1) ALORS QUE les juges du fond ne peuvent pas fonder leur décision sur des motifs contradictoires ; qu'en condamnant l'employeur à payer une indemnité de précarité après avoir retenu qu'il y avait lieu d'appliquer l'article L.122-14-5 devenu L.1235-5 du Code du travail, retenant ainsi qu'il s'agissait d'une relation de travail à durée indéterminée, la Cour d'Appel a violé l'article 455 du Code de Procédure Civile ;
2) ALORS en tout état de cause QUE l'indemnité de fin de contrat ne s'applique pas aux contrats initiative-emploi ; qu'en condamnant en l'espèce l'employeur à payer 1.510,71 euros au titre de l'indemnité de précarité, la Cour d'appel a violé l'article L.122-3-4 devenu L.1243-10 du Code du travail.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné Monsieur Y... à payer à Madame X... 331,72 euros au titre des heures supplémentaires et 1.000 euros par application de l'article 700 du Code de Procédure Civile ;
AUX MOTIFS QUE c'est par des motifs pertinents qu'il convient d'adopter que les premiers juges ont alloué 331,72 euros à titre d'heures supplémentaires outre 33,17 euros de congés payés y afférents ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE Madame X... fournit le détail des heures supplémentaires effectuées alors que l'employeur se borne à indiquer qu'il a toujours réglé à ses salariés leurs heures supplémentaires et à préciser qu'aucun appel téléphonique n'est notifié après l'horaire de travail de Mademoiselle X... sans fournir au Conseil des horaires effectivement effectuées par cette dernière ;
ALORS QUE s'il résulte de l'article L. 212-1-1 du Code du travail que la preuve des heures de travail effectuées n'incombe spécialement à aucune des parties et que l'employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié, il appartient cependant à ce dernier de fournir préalablement au juge les éléments de nature à étayer sa demande ; qu'en jugeant en l'espèce qu'il y avait lieu de faire droit à la demande de la salariée au prétexte que l'employeur ne fournissait pas les horaires effectivement effectués par la salariée après avoir seulement affirmé, par motifs adoptés, que la salariée « fournit le détail des heures supplémentaires effectuées », sans relever l'existence d'éléments de nature à étayer sa demande, la Cour d'appel a violé l'article L.212-1-1 devenu L3171-4 du Code du travail.