Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 24 juin 2009, 07-43.994, Inédit

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :



Sur le moyen unique :

Attendu selon l'arrêt attaqué (Rouen, 19 juin 2007), que M. X..., engagé le 30 septembre 1998 en qualité de responsable commercial par la société Confreight, a exercé les fonctions de responsable de l'agence du Havre à compter du mois de janvier 1999 ; que placé en arrêt maladie le 14 janvier 2002, il a été licencié le 15 juin 2002 en raison de son inaptitude totale à tout poste dans l'entreprise ; qu'il a saisi la juridiction prud'homale aux fins d'obtenir la condamnation de l'employeur au paiement de diverses sommes à titre de rappel de salaire, d'indemnité compensatrice de préavis et de dommages-intérêts pour licenciement abusif lié aux conditions de harcèlement moral et pour préjudice moral lié à l'altération de son état de santé ;

Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de l'avoir condamné au paiement de diverses sommes à titre d'indemnité pour licenciement nul, d'indemnité de préavis et de dommages-intérêts alors, selon le moyen, que l'existence d'un harcèlement moral suppose l'existence d'agissements répétés ayant pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte aux droits du salarié et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel ; que les juges du fond doivent donc constater, avant d'admettre l'existence d'un harcèlement moral, la réalité d'actes répétés et injustifiés caractérisant une violence morale et psychologique de nature à nuire au salarié ; qu'en se bornant à relever, pour dire qu'il aurait été évincé et dénigré, et ainsi victime d'un harcèlement moral, que M. X... avait reçu des ordres et des critiques d'une salariée qui se serait comportée comme sa supérieure et lui aurait lancé des quolibets d'une part, avait été destinataire de courriers « insistants » de son employeur les 27 et 28 septembre 2001 d'autre part, la cour d'appel, qui n'a pas caractérisé une faute imputable à l'employeur constitutive d'un harcèlement moral, a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 122-49 du code du travail ;

Mais attendu que la cour d'appel qui a retenu, d'une part, que M. X... avait fait l'objet de brimades et de dénigrements par sa collaboratrice qui l'avait privé de ses responsabilités, d'autre part, que ces agissements avaient gravement altéré sa santé, son inaptitude étant la conséquence directe de ceux-ci, a exactement décidé que le licenciement de ce salarié, victime de harcèlement, pour une inaptitude dont l'employeur ne pouvait se prévaloir, était nul ; que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Confreight France aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Confreight France à payer à M. X... la somme de 2 500 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-quatre juin deux mille neuf.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils pour la société Confreight France.

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné la société CONFREIGHT à payer à Monsieur X... 22.872 euros d'indemnité pour licenciement nul, 11.436 euros à titre d'indemnité de préavis, 30.000 euros de dommages et intérêts, 2.500 euros au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

AUX MOTIFS QUE Monsieur X... soutient que sa situation de harcèlement moral a été principalement causée par Madame Y... ; que cette dernière avait été engagée le 23 novembre 2000, en qualité de responsable d'exploitation, et était la collaboratrice de Monsieur X... ; que cependant il résulte des nombreux mails adressés par Madame Y... à Monsieur X... que celle-ci se comportait comme son supérieur, lui donnant des instructions nombreuses et précises (« Florent, merci de faire le nécessaire svp, je m'occupe du contrôle des dossiers » pièce 51, et pièces 53, 54, 55, 56) et lui faisant des observations sur son travail (pièce 48) et même des reproches (pièces 45 à 50) ou interdisant aux salariés de l'agence de prendre des décisions ayant des conséquences financières en son absence sans son accord (pièce 34), Madame Y... a en outre à plusieurs reprises utilisé l'ordinateur de Monsieur X... pour envoyer des mails en signant notamment « Anne Z... à la place de Florent » ; qu'au surplus il résulte des mails échangés avec Madame A..., directrice FRANCE que Madame Y... critiquait ouvertement le travail et la personne de Monsieur X... qualifié par elle de « superman commercial » ; que Monsieur X... a ainsi été évincé de ses responsabilités par Madame Y... et dénigré par elle ; que quant à Madame A..., elle a envoyé de nombreux mails insistant au salarié les 27 et 28 septembre 2001 ; que les agissements dont Monsieur X... a été victime ont gravement altéré sa santé ainsi qu'en attestent les certificats médicaux produits faisant référence aux graves difficultés rencontrées dans le travail et mauvais traitements au sein de l'entreprise (certificat du docteur B..., médecin du travail et du docteur C..., psychologue, du Docteur D..., psychiatre, et du Docteur E...) ; que l'état dépressif du salarié ayant conduit à son inaptitude, celle-ci est la conséquence directe du harcèlement moral qu'il a subi ce qui exclut la possibilité pour la société de se prévaloir de cette inaptitude ; que le licenciement est donc nul et il sera accordé à Monsieur X... une indemnité équivalente à six mois de salaire, soit la somme de 22.872 euros ; que quant au préjudice résultant du harcèlement moral, il sera réparé par la somme de 30.000 euros ;

ALORS QUE l'existence d'un harcèlement moral suppose l'existence d'agissements répétés ayant pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte aux droits du salarié et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel ; que les juges du fond doivent donc constater, avant d'admettre l'existence d'un harcèlement moral, la réalité d'actes répétés et injustifiés caractérisant une violence morale et psychologique de nature à nuire au salarié ; qu'en se bornant à relever, pour dire qu'il aurait été évincé et dénigré, et ainsi victime d'un harcèlement moral, que Monsieur X... avait reçu des ordres et des critiques d'une salariée qui se serait comportée comme sa supérieure et lui aurait lancé des quolibets d'une part, avait été destinataire de courriers « insistants » de son employeur les 27 et 28 septembre 2001 d'autre part, la Cour d'appel, qui n'a pas caractérisé une faute imputable à l'employeur constitutive d'un harcèlement moral, a privé sa décision de base légale au regard de l'article L.122-49 du Code du travail ;

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