Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 16 juin 2009, 08-40.020, Inédit

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :



Sur le moyen unique, pris en sa deuxième branche :

Vu les articles L. 1232-1 du code du travail et 1134 du code civil ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme Y... X...a été engagée en qualité d'opérateur adjointe de responsable d'exploitation le 14 janvier 1999 par la société Groupe inter service (GIS) ; que son contrat de travail, contenant une clause de mobilité, laquelle stipulait " le soussigné s'engage à répondre dans les plus brefs délais à toute autre affectation suivant les nécessités de l'entreprise et en tout lieu où la société exerce ou exercera ses activités, ce sans indemnité. Le changement d'affectation peut avoir une incidence tant sur les attributions que sur le lieu et les horaires de travail ", a été transféré à la société Cejip Psi le 1er février 2003 ; qu'elle a été victime d'un accident du travail le 22 mai 2003 sur le site d'Orly, qu'elle a été déclarée apte à son poste à l'issue de la seconde visite de reprise du 21 novembre 2003 et a été licenciée le 19 février 2004 pour avoir refusé de rejoindre le poste proposé sur le site de l'opéra Garnier ; que contestant son licenciement, elle a saisi la juridiction prud'homale ;

Attendu que pour décider que le licenciement de la salariée était fondé sur une faute grave et pour rejeter ses demandes de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, l'arrêt retient que le transfert de son contrat de travail de la société GIS a entraîné le transfert de toutes les clauses du contrat dont la clause " relative à la mobilité ", qu'eu égard à cette clause le changement de poste d'Orly à celui de Garnier entrait dans les prévisions du contrat de travail, l'écart de distance des deux postes étant acceptables, et la définition des postes comparables et qu'elle s'imposait à elle ;

Qu'en statuant ainsi, alors qu'en l'absence de définition précise de sa zone géographique d'application la clause de mobilité est nulle, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 7 novembre 2007, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;

Condamne la société Cejip Psi aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Cejip Psi à payer à Mme Y... X...la somme de 2 500 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du seize juin deux mille neuf.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par la SCP Gaschignard, avocat aux Conseils pour Mme Y... X....

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté Madame Y..., de ses demandes tendant à voir condamner son employeur, la SARL CEJIP PSI, à lui payer des indemnités de préavis et de licenciement et des dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, ainsi qu'à lui payer un rappel de salaires ;

AUX MOTIFS QUE la SARL CEJIP PSI demande l'infirmation du jugement du conseil de prud'hommes au double motif que le nouveau poste proposé est conforme aux indications du médecin du travail et que la clause de mobilité figurait dans le contrat de travail ; que la SARL CEJIP PSI fonde sa position sur le fait que la salariée s'est obstinée à refuser le nouveau poste pour des raisons médicales et qu'elle précise que ce poste était proposé à titre temporaire, dans son courrier du 15 octobre 2003, en attendant un nouvel avis du médecin du travail, lors du contrôle à venir vers le 15 novembre mais que de toutes façons des obstacles juridiques interdisaient un poste identique ; qu'il apparaît d'un premier certificat du médecin du travail établi le 1er octobre 2003 que Madame Y...pouvait reprendre son travail à la condition de ne pas effectuer de manutention ; que la réserve sur cette interdiction de porter des charges n'a été levée que par un certificat du médecin du travail établi le 21 novembre 2003 ; que Madame Y..., en justifiant en tout ou partie, par d'autres certificats médicaux, de ses absences, a refusé constamment le nouveau poste au motif qu'elle pouvait réintégrer désormais son poste initial ; que le transfert de son contrat de travail de la société GIS en date du 14 janvier 1999 à la société GIS SARL, le 1er février 2003, avait entraîné le transfert de toutes les clauses du contrat dont la clause « relative à la mobilité » ; qu'eu égard à cette clause, le changement de poste d'Orly à celui de Garnier entrait dans les prévisions du contrat de travail, l'écart de distance entre les deux postes étant acceptable et la définition des postes comparable ; que c'est à juste titre que l'employeur demande l'infirmation du jugement en raison de la faute grave de Madame Y...qui a refusé de regagner le nouveau poste fixé par l'employeur ;

1° ALORS QUE Madame Y..., qui avait du reste fait l'objet d'un avertissement le 14 janvier 2004, n'a pas été licenciée en février 2004 pour avoir, en octobre ou novembre 2003, refusé une affectation temporaire qui aurait été conforme aux préconisations du médecin du travail, mais pour avoir, après que le médecin du travail avait précisé que la salariée était apte à son poste actuel sans restriction, refusé une affectation définitive à Paris, et ce « compte tenu du non respect des clauses contractuelles par votre refus d'application du paragraphe concernant la mobilité géographique » ; qu'en retenant que la faute grave de la salariée était notamment caractérisée par le refus qu'elle aurait opposé à son employeur d'accepter un reclassement temporaire, la cour d'appel a méconnu les termes du litige, tels que fixés par la lettre de licenciement, et par suite violé l'article L. 124-14-2 du Code du travail ;

2° ALORS QUE la clause de mobilité qui ne définit aucune zone géographique précise d'application doit être réputée non écrite ; que la salariée soutenait que la clause du contrat de travail du 14 janvier 1999, autorisant l'employeur à procéder à une mutation « en tout lieu où la Société exercera ses activités » ne pouvait pas lui être opposée ; qu'en affirmant péremptoirement que cette clause de mobilité s'imposait à la salariée sans rechercher, comme elle y était invitée, si ladite clause n'était pas nulle en raison de l'absence de définition précise de sa zone géographique d'application, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 122-14-3 du code du travail et 1134 du code civil ;

3° ALORS, au surplus, QUE le jugement de première instance, dont la confirmation était demandée, avait constaté que la mutation imposée à la salariée aurait eu pour conséquence de la rétrograder d'un poste d'adjoint responsable d'exploitation à un poste de machiniste ; qu'en affirmant sans plus s'en expliquer que Madame Y...aurait été fautive de refuser un emploi « comparable » sans rechercher si le nouveau poste d'affectation correspondait aux qualifications et aux attributions contractuelles de la salariée, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134 du Code civil ;

4° ALORS, subsidiairement, QUE la lettre de licenciement fixe les termes du litige ; que la lettre de licenciement énonçait en l'espèce que l'employeur entendait prononcer un licenciement « pour cause réelle et sérieuse », et fixait à la salariée un préavis de deux mois, sans retenir la faute grave ; qu'en disant le licenciement justifié par une faute grave et en infirmant notamment le chef du jugement qui avait condamné l'employeur à payer l'indemnité légale de licenciement, la cour d'appel a violé les articles L. 124-14- 2et L. 122-25-2 du Code du travail ;

5° ALORS, plus subsidiairement encore, QUE, le refus par un salarié de la modification de ses conditions de travail, s'il peut constituer une cause réelle et sérieuse de licenciement, ne constitue pas à lui seul une faute grave, qu'en statuant comme cidessus, par des motifs qui ne caractérisent pas la faute grave commise par la salariée, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 122-6, L. 122-8 et L. 122-9 du Code du travail ;
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